Le dossier du mois

Une thématique dans chaque #DossierDuMois, avec la rédaction d’Infogreen et l’expertise de nos partenaires

Publié le 15 mai 2023
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mai 2023

L’âme de fonds

« La réussite ne se mesure pas à l’argent que vous gagnez mais à votre capacité à changer la vie des gens. » Michelle Obama

L'âme de fonds
La transparence du vert
La transparence du vert

« L’âme de fonds »… Une plongée au cœur de la finance durable où petites organisations et importants organismes financiers jouent une partition commune pour l’avenir de la planète.

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Il y a quelques années encore, de célèbres poudres à lessiver se vantaient de laver plus blanc que blanc. Aujourd’hui, la couleur dominante est le vert que l’on retrouve dans chaque secteur de notre société. Même celui de la finance s’y est engagé à corps perdu depuis 2020. Encore faut-il que chacun s’y retrouve sans y perdre son âme.

En effet, la finance durable est devenue un sujet incontournable dans le monde des affaires. Les investisseurs cherchent de plus en plus à placer leur argent dans des entreprises et des projets ayant un impact positif sur l’environnement et la société. Le Luxembourg, connu pour être un centre financier international, n’y a pas échappé et a pris des mesures pour encourager la finance durable dans le pays.

Évidemment, la frontière avec le greenwashing est mince. Incorporer du vert dans les fonds d’investissement peut, soit s’apparenter à un geste pour la planète, soit à une opération séduction pour offrir une belle façade aux clients.

Afin de jouer la carte de la transparence, le gouvernement luxembourgeois est donc entré dans la danse en créant une taxonomie facilitant aux investisseurs l’identification des meilleurs fonds durables. De fait, cette taxonomie est un système de classification des activités économiques en fonction de leur impact environnemental. Elle permet aux clients d’évaluer si un investissement est réellement durable ou s’il s’agit simplement de greenwashing.

La taxonomie luxembourgeoise est basée sur les critères de l’Union européenne. Elle identifie six objectifs environnementaux. D’abord la lutte contre le changement climatique, et l’adaptation au changement climatique. Ensuite, l’utilisation durable et la protection de l’eau et des ressources marines ; la transition vers une économie circulaire, la prévention et le contrôle de la pollution. Enfin, la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Le Grand-Duché est un des leaders dans la finance durable, tout comme le sont la France et les Pays-Bas. Le pays a créé un cadre réglementaire favorable à cette finance verte et a lancé des initiatives pour encourager les investissements durables. Ils sont importants pour l’avenir de notre planète et peuvent aider à réduire les émissions de gaz à effet de serre, à protéger la biodiversité et à promouvoir une économie circulaire.

Comme le soulignait Michèle Obama, « La réussite ne se mesure pas à l’argent que vous gagnez mais à votre capacité à changer la vie des gens. » Que l’on soit une petite organisation ou un groupe financier d’envergure, chacun a son rôle à jouer pour le développement de demain.

Bonne lecture !

Sébastien Yernaux

« La durabilité n'est pas dans l'ADN du secteur financier »
« La durabilité n’est pas dans l’ADN du secteur financier »

La Luxembourg Sustainable Finance Initiative, partenariat public-privé du ministère des Finances, du ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, de Luxembourg for Finance et du Conseil supérieur pour un développement durable, agit depuis 2020 comme coordinateur national sur les sujets relatifs à la finance durable.

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Interview de sa general manager, Nicoletta Centofanti.

Dans quel contexte a été créée la Luxembourg Sustainable Finance Initiative et quel est son rôle ?

En 2018, le gouvernement publiait une feuille de route sur la finance durable, avec comme première recommandation de fonder une entité de coordination de tous les acteurs de la finance durable. LSFI a donc vu le jour en 2020 avec pour missions principales d’identifier des synergies entre les différents acteurs concernés par la finance durable et de rédiger une stratégie pour le Luxembourg. Cette stratégie, nous l’avons publiée en 2021 avec des objectifs à court (1 an), moyen (2-3 ans) et long termes (5 ans). Elle peut être consultée sur notre site web.

Nos missions incluent également la sensibilisation des différentes parties prenantes : population, grand public, institutions financières et l’accompagnement du secteur financier dans cette transition durable.

Quels sont selon vous les principaux obstacles actuels de la finance durable ?

Pour ma part, je suis une experte en durabilité, ingénieure de l’environnement. Mais quand on parle de finance durable, on demande à un secteur jusqu’hier focalisé sur le sujet « finance », de devenir expert en durabilité. La durabilité qui est, comme on le sait, un sujet très complexe, avec beaucoup d’enjeux. Même en ne considérant « que » les dimensions ESG (environnement, social et de gouvernance), chacune comporte beaucoup de sous-catégories avec des complexités et un besoin de connaissances spécifiques.

C’est donc un sujet qui n’est pas dans leur ADN. La connaissance, la sensibilisation et la compréhension des enjeux derrière les termes « finance durable » sont sans doute les obstacles les plus difficiles à surmonter. Beaucoup de travail a été réalisé par les institutions financières, et surtout par la Commission européenne, qui est en train de réglementer le secteur. Mais à ce stade, cette réglementation représente, elle aussi, un grand obstacle, car il faut la mettre en place, la rendre juste, la comprendre et ensuite collecter les données nécessaires pour répondre aux obligations.

On parle beaucoup du défi des données, de leur collecte et de leur qualité. Je pense que ce défi n’est pas tellement lié au manque de données, mais surtout à la façon de collecter ces données, avec le procédé le plus juste et d’être capables de les comprendre et de les utiliser de manière adéquate, afin de mener à des actions concrètes et pertinentes.

Le greenwashing est également un terme qui revient souvent. Mais à vrai dire, à l’heure actuelle, tout le monde est encore dans l’attente d’une définition correcte. De mon point de vue, on fait du greenwashing quand on utilise des informations dont on dispose pour les transmettre de façon trompeuse. Or, le greenwashing volontaire n’est, à mon sens, pas vraiment présent, car les institutions financières ont à cœur de donner les informations correctes.

Le risque est plutôt indirect, lorsqu’une entreprise financière transmet des informations incomplètes, parce qu’elle ne comprend pas tout à fait ce que l’on attend d’elle. C’est pourquoi les piliers éducation, sensibilisation et prise de conscience sont très importants pour la LSFI et ses diverses parties prenantes. En étant bien informé, on peut mieux communiquer.

Quelles synergies-clés, mises en place à l’aide de la LSFI, permettent au secteur d’avancer vers une finance plus durable ?

En tant que plateforme de coordination, nous échangeons périodiquement avec toutes nos parties prenantes. Actuellement, nous avançons sur deux thématiques réparties dans des groupes de travail. Ces groupes rassemblent des acteurs financiers, éducatifs, publics, des ONG, etc. qui, grâce à leurs propres expertises, accompagnent notre équipe sur les différents thèmes et sur les missions qui y sont liées.

Le premier se nomme «  Sustainable Finance Education & Training » et se focalise donc sur la formation, tandis que le second – « Climate Measurement & Reporting » - coordonne les acteurs actifs dans les outils de mesure et le reporting. Deux autres groupes de travail commenceront bientôt à discuter des thématiques « Innovation & Retail Products for Sustainable Finance » et « ESG Data ». Ce dernier groupe a un très grand défi qui l’attend, puisqu’il va essayer d’identifier quels indicateurs peuvent nous aider à mesurer les développements de la finance durable sur l’économie réelle. À l’heure actuelle, nous ne pouvons mesurer que l’impact durable des fonds d’investissement, sur base des critères ESG inclus dans leurs stratégies. L’étude que nous avons réalisée avec PwC Luxembourg indique d’ailleurs que près de la moitié des fonds luxembourgeois appliquent une stratégie ESG.

Pour citer un autre exemple de synergie, nous avons conclu un partenariat avec l’Université du Luxembourg, incluant la création d’une série de webinaires trimestriels sur la finance durable. Ceux-ci nous permettent de créer un pont entre le monde académique et financier dans le but d’appliquer les meilleures pratiques du monde académique dans le secteur financier.

Enfin, notre assemblée annuelle donne l’occasion à toutes nos parties prenantes de faire part de leurs récentes activités, de leurs obstacles et opportunités, et génère des actions communes ou la mise en place d’actions leur permettant de faire face aux difficultés qu’elles rencontrent.

Propos recueillis par Marie-Astrid Heyde
Photo : LSFI

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« Les soupçons de greenwashing continuent à planer sur le secteur financier »
« Les soupçons de greenwashing continuent à planer sur le secteur financier »

Qu’entend-on par finance durable ? Comment définir la durabilité d’un produit financier et éviter le « greenwashing » ? On pose le cadre avec Lynn Robbroeckx, secrétaire générale et responsable CSR (Corporate Social Responsibility) de Luxembourg for Finance, l’agence nationale pour le développement de la place financière.

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Madame Robbroeckx, quels sont les objectifs de la finance durable, par rapport à la finance « classique » ?

« La finance joue un rôle essentiel qui est de mobiliser les moyens financiers disponibles vers des activités économiques productives. Elle permet donc à l’activité économique de se développer, à l’innovation d’émerger et contribue à la création de nombreux emplois. La finance durable suit le même raisonnement, mais avec une finalité particulière. Les montants investis dans des produits financiers durables visent des objectifs environnementaux (transition énergétique, défis climatiques), sociaux (santé, droits humains, services aux personnes défavorisées) ou de bonne gouvernance, ce qui est généralement résumé par le sigle ESG. L’Accord de Paris sur le climat, en décembre 2015, a lancé un appel important au secteur financier international pour qu’il soutienne des investissements massifs destinés, en grande partie, à assurer la transition énergétique vers un modèle ‘zéro carbone’. Différentes études calculent que les investissements nécessaires se compteront en milliers de milliards par an si l’on veut limiter le réchauffement climatique à 2 degrés d’ici maximum 2050. »

Des structures et/ou outils ont-ils été mis en place, au Luxembourg, pour accompagner la transition du secteur financier vers plus de durabilité ? Et des actions concrètes ?

« Il y a 30 ans, le Luxembourg a déjà joué un rôle important dans le développement de la microfinance par la création d’instruments d’investissement spécifiques. Aujourd’hui, près d’un tiers des fonds de microfinance sont basés au Luxembourg, ce qui représente plus de 50% des actifs sous gestion mondiaux en microfinance. Mais le succès le plus visible est celui du Luxembourg Green Exchange, lancé par la Bourse de Luxembourg en 2016. Cette ‘bourse verte’ est une plateforme dédiée aux obligations vertes, sociales et durables définies et contrôlées à travers une série de critères stricts. Le LGX inclut aujourd’hui plus de 1.600 obligations pour un total de 880 milliards d’euros et reste leader mondial. Dix ans plus tôt, en juillet 2006, différents partenaires privés et publics avaient déjà mis en place l’agence de labellisation LuxFlag qui accorde différents labels durables, reconnus internationalement, à des produits d’investissement et d’assurance. Au début 2023, l’agence affichait 341 produits labellisés pour un total d’actifs sous gestion de 183 milliards d’euros. En 2017, les pouvoirs publics luxembourgeois ont signé un accord avec la Banque européenne d’Investissement pour créer une Plateforme du financement climatique Luxembourg-BEI et, en janvier 2020, l’État luxembourgeois a lancé la Luxembourg Sustainable Finance Initiative (LSFI), qui a notamment reçu pour mission de développer et implémenter la stratégie nationale en matière de finance durable. »

Comment les aspects de durabilité s’intègrent-ils dans les programmes de formation des professionnels du secteur, des investisseurs ?

« C’est clairement un des enjeux actuels et pour les années futures. Pour assurer le succès de la finance durable en tant que secteur stratégique, il faut transformer les équipes et l’expertise afin de disposer de gens capables de développer des produits attractifs et inspirant confiance aux investisseurs, ainsi que de personnes maîtrisant parfaitement les nouvelles réglementations que l’Union européenne met en place progressivement pour renforcer la crédibilité de la finance durable. De nombreuses formations sont développées dans le pays pour pallier le manque de spécialistes. C’est d’autant plus important de former des gens issus de notre centre financier que cette pénurie d’experts se fait ressentir dans la plupart des centres financiers européens. L’Université du Luxembourg a par exemple développé une option ‘finance durable’ dans son Master en Finance et Économie et la Bourse de Luxembourg a créé la LGX Academy pour assurer la mise à niveau des professionnels du secteur. »

En mars, vous avez publié un rapport sur la pénétration des ESG dans les différents secteurs de la banque et de la finance à travers le monde. Les activités ESG n’occupent toujours qu’une petite fraction du total, mais une plus grande part en Europe qu’aux USA et en APAC (Asie-Pacifique). Qu’en est-il à l’échelle luxembourgeoise ?

« S’il est évident que les produits d’investissement ESG connaissent des progressions importantes ces dernières années, surtout en Europe, leur part reste insuffisante par rapport aux besoins de transformation de la société. Ceci dit, dans une étude menée par la LSFI, en collaboration avec PwC Luxembourg, et publiée en décembre 2022, on observe qu’au Luxembourg les actifs sous gestion des fonds ESG représentent plus de la moitié des fonds Ucits enregistrés dans le pays. Fin juin 2022, ils représentaient 2.200 milliards d’euros d’actifs, soit 54,6% du total. »

Peut-on dire que le Luxembourg est un pays moteur à l’échelle européenne ?

« Au niveau de l’activité des fonds d’investissement, qui reste au cœur de l’activité de notre centre financier, c’est évident. Selon une autre étude réalisée par l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement, en collaboration avec Morningstar, au cours du premier semestre 2022, on observe qu’un tiers des actifs sous gestion dans les fonds durables européens est basé au Luxembourg. Nous sommes donc un leader européen mais aussi international étant donné que 83% des actifs nets des fonds durables au niveau mondial sont logés en Europe. Ensuite, comme je l’ai déjà signalé, le Luxembourg Green Exchange est également un précurseur en matière d’obligations vertes et durables. Il reste un exemple et un moteur pour la finance durable au Luxembourg. »

Quelles sont les prochaines étapes dans ce processus de transition nationale ?

« Un des grands problèmes à résoudre est celui du manque de données fiables qui permettraient de définir précisément le niveau de durabilité d’un produit d’investissement. Actuellement, les acteurs financiers sont contraints d’indiquer un degré de durabilité (entre vert clair et vert foncé) mais ils manquent cruellement d’informations sur le niveau de durabilité des entreprises dans lesquelles ils proposent d’investir. La mise en place progressive des réglementations européennes (taxonomie, SFDR et CSRD) devrait résoudre ce problème en exigeant de ces entreprises – aujourd’hui seules les plus grandes sont concernées – qu’elles fournissent annuellement un rapport sur leurs indicateurs environnementaux, sociaux et de gouvernance. Tant que ces données ne seront pas disponibles, les soupçons de greenwashing continueront à planer sur le secteur financier, le poussant finalement à se montrer extrêmement prudent dans la définition des produits durables. »

Propos recueillis par Marie-Astrid Heyde
Photo : Luxembourg for Finance

La finance durable « made in Luxembourg » peut-elle avoir un réel impact ?
La finance durable « made in Luxembourg » peut-elle avoir un réel impact ?

Sabine Dörry, chercheur senior associé au Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), résume quelques difficultés que rencontre la transition vers une finance plus durable dans le paysage financier luxembourgeois.

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La finance durable se voit attribuer un rôle clé dans la décarbonisation de nos sociétés et de nos économies. En effet, la puissante industrie financière luxembourgeoise se développe dans ce rôle : en témoignent les efforts de LuxSE (Luxembourg Stock Exchange, ndlr) pour élargir le marché obligataire durable, un nouveau cadre pour guider les notations ESG des entreprises et un véritable enthousiasme parmi les professionnels de la finance pour s’engager dans les défis de la durabilité.

Bien que la finance durable soit un terme mal défini, elle s’aligne sur la décarbonisation et les objectifs sociaux connexes définis dans l’Accord de Paris, les objectifs de développement durable des Nations Unies et le Green Deal européen. La transition de nos sociétés et de nos économies est une tâche colossale qui s’inscrit dans plusieurs héritages et champs de bataille actuels, qui pourraient entraver des changements de grande envergure. J’aborde brièvement certains d’entre eux.

Une place financière au lourd héritage

Commençons par le long, bien qu’ambivalent, héritage du Luxembourg en tant que place financière. Le Luxembourg agit depuis longtemps comme un « standard » financier indispensable au service de la finance mondiale, concevant, entre autres, des structures financières complexes qui s’ajoutent au travail réel pour détourner les revenus sous forme de capital / argent vers quelques bénéficiaires privilégiés. L’argent n’est généralement pas redirigé vers les endroits où les revenus générés sont nécessaires pour investir dans des infrastructures durables, des technologies et des compétences nécessaires à une transition rapide et, surtout, juste (OPC Lux, 2022).

Le Luxembourg a longtemps prospéré sur ce modèle d’entreprise générateur d’honoraires ; un héritage dont il est difficile de se désengager en période d’impératifs durables.

Sortir d’une vision économique remontant aux années 1970

Transformer les sociétés n’est pas simple, mais ressemble plutôt à une négociation désordonnée entre des groupes de parties prenantes ayant des intérêts différents, par ex. où investir et comment signaler les avantages de durabilité d’un investissement. Un deuxième héritage est donc la domination actuelle de la pensée économique traditionnelle.

Comme l’économie, la finance en tant que discipline académique a été formalisée dans les années 1970. Cette formalisation lui a permis d’acquérir une autorité scientifique en cultivant la crédibilité et la politique à travers des modèles théoriques. Les mesures économiques clés telles que le PIB ne parviennent toujours pas à valoriser la nature et la biodiversité : les forêts ralentissent le changement climatique en stockant le carbone, en purifiant l’air, en empêchant l’érosion des sols et bien plus encore. Les calculs économiques suggèrent que les arbres font ces choses pour nous gratuitement ; mais que les arbres morts contribuent positivement au PIB en créant une valeur mesurable pour nous dans les magasins de meubles.

Une vague d’obligations vertes et de fonds « made in Luxembourg » finance des projets qui prétendent être bénéfiques pour l’environnement et entraver le changement climatique, mais leur bénéfice réel est largement supposé, sans être scientifiquement mesuré.

Le propre intérêt aux dépens d’un réel changement

Cela m’amène à mon troisième point connexe : les indicateurs de base tels que l’ESG, l’investissement à impact, etc. sont censés mesurer l’impact de l’activité financière conçue pour apporter un réel changement. Les relations fondées sur le marché sont interprétées comme « démocratiques » car elles permettent à différentes parties de prendre des décisions conscientes quant à leurs « besoins ».

L’échange d’informations et de perspectives basé sur le marché coordonne principalement ceux qui poursuivent leurs propres intérêts. Dans ce contexte, la ligne de conduite à adopter est assimilée au plan d’action (économiquement) rationnel : par conséquent, l’objectivité scientifique et les intérêts des parties prenantes s’entremêlent dans la conception des indicateurs clés.

La taxonomie de l’Union européenne - elle-même un champ de bataille politique comme l’a démontré un récent procès contre ses principes violés - ne fournit actuellement aucune orientation claire sur la voie de l’industrie vers la durabilité ni un terrain d’entente pour les valeurs/principes sous-jacents aux mesures.

Prendre la bonne direction

Tout cela affecte la transition du Luxembourg vers une finance durable. Cependant, cela ne dispense pas les professionnels de leur responsabilité. Chaque activité financière et chaque investissement transitant par le Luxembourg a des manifestations sociales et environnementales concrètes dans un lieu concret. Le Luxembourg doit mobiliser son poids politique et sa puissance financière durable « made in Luxembourg » de manière plus globale pour créer un impact réel, avec plus de volonté de façonner activement plutôt que d’équilibrer les intérêts. Que valorise vraiment le Luxembourg en tant que « leader de la finance durable » autoproclamé, que représente-t-il ?

Carte blanche traduite de l’anglais par Marie-Astrid Heyde
Portrait Sabine Dörry : Spuerkeess - Flavie Hengen

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« L'ESG, une nouvelle dimension de l'investissement »
« L’ESG, une nouvelle dimension de l’investissement »

Les fonds d’investissements alternatifs, entre risques et opportunités. Les points de vue de Julie Pelcé et Aurélien Hollard, avocats spécialisés dans les sujets ESG (Environnemental, Social et de Gouvernance) au sein de CMS Luxembourg, l’antenne luxembourgeoise du réseau mondial CMS.

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Quelles nouvelles opportunités – orientées durabilité - se présentent sur le marché des fonds d’investissements ?

Aurélien Hollard (partner, head of the Investment Fund practice) : « Nous constatons un intérêt croissant du côté des investisseurs pour les fonds d’investissement alternatifs (AIF), c’est-à-dire, comme leur nom l’indique, des fonds qui investissent dans des domaines alternatifs, tels que les énergies renouvelables, les infrastructures, l’immobilier ou encore les sociétés non cotées, comme les start-up. Cet intérêt s’accompagne d’une démocratisation de ces produits financiers - ce qu’on appelle le retailisation. Les investisseurs de détail ont plus tendance à considérer des critères d’éthique et de durabilité, et pas uniquement des critères financiers. Nous avons donc vraiment le sentiment que l’ESG peut être un sujet très sensible et clé dans le développement de cette démocratisation des fonds d’investissements alternatifs. »

Julie Pelcé (managing associate au sein du département Capital Markets et Investment Funds et spécialiste ESG) : « Cet intérêt des investisseurs est suivi par l’intérêt des gestionnaires d’actifs, aussi bien pour s’adapter à la réglementation que pour intégrer les risques de durabilité dans leurs produits et avoir des impacts positifs sur les critères non financiers.

Une étude récente réalisée par Morningstar et l’ALFI indique que fin 2022, le nombre d’actifs dans des fonds dits ‘durables’ - ce qu’on appelle article 8, article 9 sous la réglementation européenne SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation, NDLR) – était légèrement en-deçà des 50 %, avec une constante évolution trimestrielle.

Au-delà des fonds, de plus en plus d’émissions de dettes sont structurées essentiellement pour financer des projets environnementaux et sociaux : green bonds, sustainability bonds, etc. Au Luxembourg, toutes ces activités sont très soutenues, notamment grâce au Luxembourg Green Exchange. »

Des opportunités qui s’accompagnent toutefois de risques. Comment empêcher le « greenwashing » des fonds alternatifs ?

J.P. : « Aussi bien les autorités de surveillance - comme la CSSF - que les régulateurs nationaux, se penchent sur la question du greenwashing, car leur rôle est d’assurer un exercice de marché sain et donc aussi la confiance des investisseurs dans le marché de financement durable. Les législateurs européens sont également très actifs sur ces sujets. Ces derniers mois, on voit presque chaque semaine des nouvelles propositions de directives pour prévenir le greenwashing au niveau des produits, donc pour les consommateurs, ou même des consultations des autorités de régulation européenne sur ce qu’est le greenwashing, parce qu’aujourd’hui nous n’avons pas vraiment de définition commune, ni de réglementation qui pourrait le sanctionner.

Il y a également des discussions autour d’une potentielle réglementation des noms de fonds - qui peuvent parfois faussement intéresser un investisseur, par exemple en utilisant le mot ‘green’ ou ‘ESG’ alors que le fonds ne reflète pas vraiment cela. L’Union européenne a aussi la volonté d’étendre l’Ecolabel des produits de consommation aux fonds d’investissement. On constate donc un réel intérêt de ne pas tromper l’investisseur, comme tout autre consommateur.

Avec toutes ces discussions sur le greenwashing, le marché s’inquiète de ne pas pouvoir répondre au niveau de durabilité attendu, notamment pour remplir ces conditions de noms de fonds, ou d’Ecolabel. Une période de transition sera sans doute nécessaire pour contrôler ce risque de greenwashing tout en s’assurant que les réglementations mises en place sont aussi adaptées au marché. »

En tant qu’avocats, comment accompagnez-vous vos clients pour les éloigner de ce risque de greenwashing ?

J.P. : « Notre rôle est d’abord de les informer sur la réglementation. Pour beaucoup, elle est très opaque, et l’appliquer sans la comprendre peut indirectement mener à du greenwashing. Nous organisons des formations pour nos clients afin d’être sûrs qu’ils comprennent les enjeux et les risques et nous leur conseillons une transparence totale.

A.H. : « Nous leur expliquons les risques fondamentaux et les aidons à mettre en place une stratégie adaptée pour limiter les risques de greenwashing. Il est essentiel qu’ils s’assurent que tout ce qu’ils font est maîtrisé dans leur communication. Je pense que le greenwashing est une problématique d’information trompeuse, qui peut être volontaire comme involontaire. Évidemment, à notre niveau nous ne pouvons rien faire véritablement pour ceux qui le font volontairement. Nous pouvons les aider à mettre leur documentation en ordre avec la réglementation, mais nous ne pourrons pas avoir de réel impact. Ce sera plutôt le rôle de l’approche répressive, punitive qui arrivera dans un second temps, lorsqu’ils auront à faire face à leurs responsabilités.

Là où nous pouvons les aider réellement, c’est sur les aspects d’informations trompeuses involontaires. On les met face au questionnement : si vous proposez cela, êtes-vous vraiment capables de prouver ce à quoi vous vous engagez ? Disposez-vous des process et des données vous permettant de justifier que vous faites bien ce que vous dites ? C’est là notre plus-value : on part d’un exercice de modification de documentation et on aboutit finalement à un vrai changement de paradigme. Ils doivent être conscients que l’ESG n’est pas un exercice de compliance, mais une nouvelle dimension de l’investissement. »

Propos recueillis par Marie-Astrid Heyde
Photo : Marie Champlon

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Accompagner la transition grâce à un financement à impact
Accompagner la transition grâce à un financement à impact

BGL BNP Paribas souhaite accompagner les entreprises luxembourgeoises dans le développement de leur démarche RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises). Son nouveau financement à impact, dont le taux peut être bonifié en cas de bonnes performances extra-financières, a été développé dans cette optique.

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Face aux défis environnementaux et sociaux, les entreprises ont un rôle important à jouer. Dès aujourd’hui, de nombreuses mesures peuvent être prises par celles-ci afin de lutter contre les inégalités ou accélérer la transition énergétique. Cette démarche est d’autant plus urgente que la réglementation se durcit depuis plusieurs années, contraignant les organisations à communiquer de façon transparente autour des critères environnementaux, sociaux ou de bonne gouvernance (ESG), que ce soit vis-à-vis de leurs clients, investisseurs ou régulateurs. Demain, les règles se feront plus exigeantes encore.

En matière de responsabilité sociétale, il n’est toutefois pas toujours simple d’identifier les axes permettant d’agir à l’échelle de son entreprise. C’est donc pour accompagner et encourager les sociétés luxembourgeoises dans cette voie que BGL BNP Paribas a mis au point une offre de financement à impact inédite au Luxembourg. Les entreprises peuvent désormais accéder à un crédit dont le taux pourra être bonifié en fonction de la réalisation d’objectifs ESG bien définis.

« Ce produit répond à un double besoin des entreprises : celui de financer leur propre transition énergétique et celui d’adopter un fonctionnement plus respectueux de l’environnement ou bénéfique à la société dans son ensemble, explique Anne-Sophie Dufresne, Directrice Banque des Entreprises au sein de BGL BNP Paribas. Il s’agit de les aider à mettre en place les bonnes pratiques pour leur permettre de répondre aux attentes de leurs parties prenantes. Nous souhaitons que cela profite notamment aux PME, qui composent une bonne partie du tissu économique luxembourgeois, et qui sont parfois moins bien outillées que les grandes structures pour faire face à ces nouvelles exigences ».

Quelle est votre maturité RSE ?

Ce financement à impact proposé par BGL BNP Paribas se décline en deux produits, l’un à destination de sociétés qui s’engagent dans une démarche RSE, l’autre pour celles qui ont déjà mis en place une série de mesures en la matière : réduction des émissions de gaz à effet de serre, gestion durable des déplacements professionnels, achats responsables, amélioration d’indicateurs liés à la diversité et l’inclusion, etc.

Dans le premier cas de figure, vous pouvez obtenir un crédit de 100.000 à 100 millions d’euros, avec un taux d’intérêt qui variera annuellement en fonction de l’évolution de votre notation extra-financière. Ainsi, si vos performances ESG s’améliorent, votre taux diminuera et inversement. Dans le cadre de cette offre, BGL BNP Paribas travaille en collaboration avec EcoVadis (lire notre encadré), qui établit une notation de départ pour l’entreprise et atteste de la réalisation (ou non) des objectifs ESG retenus.

Dans le cas où l’entreprise est plus mature en matière de RSE, elle pourra choisir elle-même, dans une liste établie par BGL BNP Paribas, entre 2 et 5 objectifs ESG cohérents avec son activité. En collaboration avec la banque, elle déterminera ensuite une trajectoire d’évolution ambitieuse par rapport à ces objectifs. 90 jours avant la date anniversaire de la souscription de son prêt, l’entreprise devra fournir une attestation, certifiée par un tiers indépendant, qui confirme les évolutions enregistrées par rapport aux critères ESG retenus.

Renforcer sa compétitivité

Si BGL BNP Paribas développe ces nouveaux produits de financement aujourd’hui, c’est notamment pour permettre aux PME de conserver toute leur compétitivité au cours des années à venir. « Avec les différentes réglementations du plan d’action de la Commission européenne pour financer la croissance durable et notamment l’objectif de la neutralité carbone en 2050, il est crucial pour les entreprises luxembourgeoises de se mettre en ordre de marche afin de réussir leur transition énergétique », estime Catherine Wurth, Responsable RSE au sein de BGL BNP Paribas. « Nous avons eu beaucoup de discussions avec de grands acteurs sur leur stratégie RSE, qui sont généralement confrontés à la même problématique : leurs fournisseurs sont souvent dans l’incapacité de faire valoir une démarche RSE à leur niveau. Cependant, le critère de durabilité devenant indispensable dans le choix de leurs prestataires, ces grandes entreprises ne pourront plus faire appel à des fournisseurs qui ne poursuivent pas d’objectifs de développement durable.

Adopter une démarche RSE cohérente constitue un réel enjeu de compétitivité pour chaque entreprise. Je pense également qu’il s’agit d’un excellent moyen de fédérer les équipes autour d’un projet commun, qui donne du sens et génère de l’impact positif ».

En mettant au point cette offre visant à accompagner l’ensemble des acteurs de l’économie vers plus de durabilité, BGL BNP Paribas poursuit aussi son propre cheminement en la matière.

« Toutes et tous nos chargé(e)s d’affaires suivent des formations pour maîtriser la finance durable, qui s’avère parfois très technique. Le Groupe BNP Paribas a pris des engagements en matière de décarbonation de son activité, notamment via l’adhésion à la Net-Zero Banking Alliance lancée en avril 2021 par l’ONU Environnement. Ces nouveaux financements à impact constituent une autre manière d’accélérer l’effort collectif vers une transition durable », conclut Catherine Wurth

L’expertise unique d’EcoVadis

Fondée en 2007, EcoVadis est une agence de notation extra-financière européenne spécialisée dans l’évaluation des PME. Elle sert 110.000 entreprises dans le monde et environ 200 au Luxembourg, dont 70% sont des PME. « Pour évaluer la maturité RSE des entreprises, nous leur demandons de remplir un questionnaire adapté à leur taille ainsi qu’à leur secteur, et de nous faire parvenir une série de documents qui attestent de leur engagement en faveur d’un développement responsable, explique Julien Carboni, Strategic Account Executive au sein d’EcoVadis. Une équipe de 500 analystes vérifie ensuite ces documents pour s’assurer que la structure met tout en œuvre pour atteindre les objectifs fixés ». Une note est alors attribuée à l’entreprise, qui peut la comparer à celle de ses pairs et chercher à s’améliorer. « Nous accompagnons ainsi les sociétés dans leur mise en conformité vis-à-vis des nouvelles réglementations, de plus en plus exigeantes en matière de durabilité », ajoute Julien Carboni.

Pour en savoir plus : bgl.lu/fr/financement-a-impact ou sustainable-business@bgl.lu

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Catherine Wurth, Responsable RSE, BGL BNP Paribas et Anne-Sophie Dufresne, Directrice Banque des Entreprises, BGL BNP Paribas

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Une banque humaine et responsable
Une banque humaine et responsable

Banque Raiffeisen est implantée au Luxembourg depuis 1925. Elle a su s’adapter aux évolutions du marché tout en conservant son ancrage. Aujourd’hui, elle se concentre sur le développement de la finance durable et responsable pour proposer des services de conseils de qualité, accessibles au plus grand nombre.

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La durabilité est ancrée dans les gènes de Banque Raiffeisen. En tant que premier groupe financier coopératif luxembourgeois, il a pour mission de répondre aux besoins de ses clients, tout en tenant compte de leurs préférences ESG. En plus de son activité de crédits, de ses services pour une clientèle de détail, Banque Raiffeisen propose des services de Banque Privée, notamment des formules de conseil et de gestion discrétionnaire.

« Nous sommes proches de notre clientèle », souligne Georg Joucken, responsable du département Banque Privée. « Plus de 90% de nos employés sont des résidents luxembourgeois et il en est de même pour nos clients. Les liens sont encore plus forts, car en tant que coopérative, nos clients peuvent devenir membres. Nous dépassons, aujourd’hui, les 45.000 ! Ils s’identifient à Banque Raiffeisen et peuvent bénéficier de certains avantages tarifaires. Nous avons une trentaine d’agences au Luxembourg, ce qui permet une certaine proximité. »

Et qu’est-ce qui différencie Banque Raiffeisen des autres ? « Il y a déjà les placements. Comme nous n’avons pas de produits gérés en interne, nous disposons d’une grande liberté dans notre sélection de produits. Dans ce contexte, nous avons mis en place un processus de sélection strict et totalement transparent pour chaque type de produit. Au niveau de notre processus de sélection des fonds actions « best of », nous utilisons comme point de départ une base de données de Morningstar. Uniquement les fonds avec un avis favorable des analystes de Morningstar sont retenus dans la première étape du processus. Ensuite, interviennent nos critères qui sont plus quantitatifs, c’est-à-dire que les fonds doivent avoir une performance supérieure à celle de l’indice de référence sur 3 et 5 ans. Le deuxième critère est le niveau de risque. Là aussi, nous sélectionnons des produits qui ont une volatilité inférieure ou égale à l’indice de référence sur une période de 3 et 5 ans. En résumé, seuls les fonds qui ont une surperformance par rapport à l’indice de référence tout en prenant moins de risques, obtiennent nos faveurs. Enfin, nous regardons le volume et la catégorie, ainsi que la régularité de performance. Ce dernier critère nous permet également de gérer la quantité finale des fonds que nous retenons. »

Une sélection rigoureuse donc, mais dans le but de répondre aux besoins des clients. « Nous aimons bien le terme « Phygital » qui est la combinaison entre le physique et le digital. L’objectif est de ne pas digitaliser à tout prix, de rester humain et de trouver le meilleur compromis des deux mondes. Tout ce qui est opérationnel et administratif se dirige vers une digitalisation accrue alors que l’aspect humain est toujours privilégié pour les conseils à nos clients.  »

Une banque centrée sur le développement durable

Selon certains échos, Banque Raiffeisen propose à ses clients l’offre la plus complète en matière de solutions de placements qui s’inscrivent dans une approche ESG (Environment & Social & Governance).

« En effet, la Banque dispose d’une large gamme dans ce domaine, en matière de services, nous disposons d’une stratégie de gestion discrétionnaire certifiée ESG par LuxFlag. Ensuite, nous avons des formules de conseil, des plans d’investissement et des produits d’assurance qui permettent également d’investir dans des fonds qui sont considérés comme durables. Comme le souligne notre ligne de conduite, l’investissement durable s’adresse à des personnes qui souhaitent investir dans des produits financiers tout en construisant un avenir plus responsable, écologique et social. »
Dans le cadre de la stratégie 2020-2025, Banque Raiffeisen a mis en place quatre initiatives qui traitent uniquement du volet ESG : un groupe de travail qui se penche sur le développement d’une culture ESG au sein de la banque, un autre qui est actif sur la réduction de l’empreinte carbone au niveau des bâtiments notamment, un troisième qui travaille sur l’offre durable en matière de crédit et un dernier, spécialisé dans l’offre de placement en matière de durabilité. Le but pour le volet placements consiste à offrir une alternative ESG pour chaque type de service et de produit proposé.

En mars 2021, le règlement relatif à la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (« SFDR ») a été adopté par l’Union européenne. Le règlement impose aux acteurs du secteur financier des obligations de publication pour les fonds et la gestion discrétionnaire qui s’inscrivent dans une approche ESG.

« D‘une manière générale nous constatons que la réglementation évolue et se renforce en permanence. On voit bien que le régulateur a reconnu l’urgence d’agir. Jusqu’à il y a peu, nous étions plus dans du déclaratif de nos actions. Aujourd’hui, il faut le prouver ! C’est notamment à travers d’autres réglementations (taxonomie, MIFID, …) que le cadre légal se précise et que les acteurs comprennent de mieux en mieux ce que le régulateur attend. Raiffeisen a décidé de travailler avec des labels en matière de durabilité. Ceci permet d’avoir une validation externe et indépendante concernant le respect d’un certain niveau d’exigences en la matière. La durabilité est un défi très intéressant et nous sommes déterminés à maintenir notre engagement, car nous croyons que c’est la meilleure façon de répondre aux besoins actuels et futurs de nos clients. »

Sébastien Yernaux
Photos : Marie Champlon

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La gestion ESG habile de la BIL
La gestion ESG habile de la BIL

Les termes « environnement », « social » et « gouvernance » sont au centre de changements dans le fonctionnement des sociétés en général, et des institutions bancaires en particulier. La BIL est donc concernée et a progressivement intégré ces notions dans l’ensemble de son fonctionnement, dont le développement des produits et services responsables.

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Le développement durable fait partie intégrante de la stratégie de la BIL et l’ensemble de ses processus sont revus à l’aune de cette vision. La Banque a signé les « Principles for Responsible Banking » de l’UNEP FI (United Nations Environment Programme Finance Initiative). De plus, en adhérant aux principes UN Global Compact, elle s’engage à contribuer aux objectifs de développement durable de l’Agenda 2030 des Nations Unies. Ces objectifs répondent aux défis sociaux et environnementaux mondiaux. Ils coordonnent un plan commun destiné à promouvoir la paix et la prospérité tout en protégeant la planète.

« Ce changement de paradigme fait notamment suite à l’Accord de Paris qui a mis en avant les effets du changement climatique » souligne Alessandra Simonelli, Head of Sustainable development. « Il y a également une vraie pression réglementaire sur les banques en termes de transparence concernant les impacts de leur produits et services. La pression du régulateur n’est pas sur le fait d’être vert ou non, mais d’être transparent. »

Et d’ajouter : « Il y a une véritable prise de conscience dans la gestion de la banque, quel que soit le service concerné. Comme n’importe quelle entreprise du pays, nous allons travailler sur l’impact carbone de notre bâtiment, et aussi sur notre impact social. De par notre activité, nous avons également un rôle d’intermédiaire financier. Nous accompagnons nos clients dans leur propre transition environnementale en finançant certains projets. »

La BIL s’engage donc pour la construction d’une économie durable. En 2021, elle a défini sa stratégie de durabilité, et travaille sur les quatre piliers suivants :

  • une gouvernance responsable ;
  • des produits responsables et durables ;
  • la volonté d’être un employeur responsable ;
  • la volonté d’avoir un impact positif sur son environnement et les communautés locales.

Plus de transparence pour des produits responsables

Concernant le développement de produits financiers responsables, la BIL a notamment travaillé sur la mise en place d’un Green Bond Framework. Ce document de référence publié en mai 2022 encadre ses futures émissions d’obligations « vertes ». Cela marque son engagement clair en faveur de la croissance du marché de la finance durable. « Au départ, le but était d’élargir la base de nos investisseurs, de nos pourvoyeurs de liquidités », explique Olivier Habay, Head of Long Term Funding. « Cela peut être des banques, des fonds, des entités spécialisées dans l’octroi de fonds sustainable, ou encore des assets managers et des assureurs. L’ensemble de l’industrie a des objectifs en termes d’investissements durables et, ces acteurs doivent investir dans produits qui répondent à certains critères de durabilité. Il faut donc des émetteurs capables d’amener des obligations vertes qui répondent à ces critères et qui garantissent que leurs fonds seront utilisés à des fins durables. »

Pour la petite histoire, il faut savoir que la BIL est la première banque à mettre en place un Green Bond Framework garantissant le financement exclusif de projets immobiliers efficaces sur le plan énergétique au Luxembourg. « L’État dispose également d’un outil similaire mais avec un périmètre différent du nôtre », poursuit Olivier Habay. « La complexité rencontrée dans son élaboration est inhérente à la problématique de la durabilité dans le secteur financier, c’est-à-dire que nous sommes sur une réglementation en perpétuelle évolution. »

La Banque parvient ainsi à avoir un impact positif local et elle contribue concrètement à la transition vers une économie faible en émissions carbone. Les responsables se réjouissent de pouvoir œuvrer aux côtés des investisseurs et des clients pour financer des projets de bâtiments efficaces sur le plan énergétique au Luxembourg.

Cette volonté de proposer des produits responsables à ses clients se retrouve également dans ses fonds d’investissement « maison ». Quatre fonds de sa gamme BIL Invest ont obtenu le label LuxFLAG ESG. « C’est certain que cela rassure les clients et les investisseurs », précise Alessandra Simonelli. « Juger un produit sur son impact environnemental et social, c’est compliqué. La nouvelle réglementation demande que, pour tous les nouveaux produits d’investissement et à partir du 30 juin, on soit transparent sur les principales incidences négatives des produits. Cela concerne l’impact du produit sur les émissions de carbone, sur l’eau ou encore, sur la biodiversité, soit une vingtaine d’indicateurs au total sur lesquels il faut être transparent. Cela reste très complexe à déchiffrer pour le client. D’où l’importance d’un label octroyé par des experts externes. C’est un avantage certain qui rassure et qui simplifie le choix final. »

La transparence est également essentielle pour les obligations « vertes » émises par la Banque. Les données sont scrutées par les investisseurs, et pour en garantir l’exactitude, un organisme tiers est mandaté pour auditer l’allocation des fonds collectés et s’assurer que tous les critères d’éligibilité sont bien respectés. C’est un gage de qualité supplémentaire donné aux investisseurs. Et c’est à la base de la relation de confiance qui existe entre la banque et ses clients.

Sébastien Yernaux
Photo : Marie Champlon

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La finance durable au révélateur de son impact véritable
La finance durable au révélateur de son impact véritable

Au-delà des simplifications et des raccourcis, Thierry Feltgen porte l’ambition de rectifier quelques croyances en matière d’investissement durable. Face à la complexité du sujet, BLI procède de façon structurée et transparente, pour trouver réponse à la question : quel est mon véritable impact ? La question devrait infuser l’éthique de toute gestion d’actifs responsable.

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D’après une estimation des Nations Unies, 5 à 7.000 milliards de dollars d’investissements seront nécessaires chaque année jusqu’en 2030 pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD). Quelles sont les solutions pour parvenir à ces ambitions ?

Thierry Feltgen, Head of SRI (Socially Responsible Investment) Strategy & Stewardship chez Banque de Luxembourg Investments (BLI), l’asset manager de la Banque de Luxembourg, opte pour la lucidité : « Ce n’est pas aussi simple que l’on voudrait l’avoir. Il serait tellement beau d’affirmer : lorsque j’achète une entreprise d’éoliennes sur le marché secondaire, j’ai atteint les ODD. Souvent, le sujet est tellement simplifié qu’il en devient faux.

Les activités d’une multitude d’entreprises permettent de changer le tissu économique, la qualité de la croissance. Ces changements se passent dans le monde réel. A côté de celui-ci, il y a le monde financier, tel un monde virtuel. Dès qu’une entreprise a émis ses actions, elles peuvent s’échanger de détenteur en détenteur, indépendamment de sa volonté – et de ses activités. Il faut se rendre à l’évidence : que je sois investi dans une entreprise ou que je l’évite ne changera rien dans un premier temps. »

Thierry Feltgen emprunte la définition du GIIN (Global Impact Investing Network) pour affirmer un état de fait : « Les investissements à impact sont réalisés dans l’intention de générer un impact social et environnemental positif et mesurable en même temps qu’un rendement financier. »

Il confère à la réglementation son effet fédérateur et incitateur : « Elle ne nous interdit pas d’investir dans le charbon, mais nous engage à être transparents vis-à-vis de notre clientèle. C’est un peu le name and shame. Beaucoup d’investisseurs ont des valeurs, ils se détournent du charbon, du nucléaire, du tabac, de l’alcool etc.si bien que de plus en plus d’acteurs financiers sont amenés à respecter ces critères éthiques. Cela a un effet significatif sur le cours de ces entreprises à moyen/long terme. Une entreprise au comportement douteux aura des difficultés à réémettre du capital, tandis que des entreprises vertueuses auront un accès plus facile aux financements. C’est pour moi l’enjeu du green deal européen : réorienter les flux vers les activités vertueuses.

La SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) et la taxonomie européenne des activités environnementalement durables sont de très bonnes initiatives, même s’il y a une quantité énorme de données à appréhender, de concepts à mettre en place pour être conformes, car les autorités de tutelle telle la CSSF veillent. Ainsi, les conseillers clientèle de la Banque de Luxembourg sont invités à des séances de formation continue pour bien intégrer toutes les notions de l’investissement durable et garder à jour leur maîtrise du sujet, selon l’exigence de la réglementation, afin que le client puisse en tirer une valeur ajoutée. »

Signalons que la majorité des fonds gérés par BLI et distribués par la Banque de Luxembourg sont classés article 8+ ou 9 selon la classification SFDR (c’est-à-dire les plus hauts niveaux d’ambition selon le cadre défini par l’Union européenne ; ndlr).

« La majeure partie de nos fonds investit donc en actifs durables quand le reste de notre portefeuille est composé d’actions faisant la promotion des facteurs de durabilité, » poursuit Thierry Feltgen. « J’estime qu’à la fin de cette décennie, tout le cadre en matière de finance durable sera en place et en équilibre – car plein d’éléments restent à construire. L’industrie financière se voit confrontée au défi de devoir se rendre conforme à un cadre réglementaire de plus en plus ambitieux. Mais outre la conformité réglementaire, il s’agit maintenant d’y ajouter de la substance qualitative, afin de soutenir le Green Deal. »

Le leitmotiv de BLI est de pouvoir quantifier cette substance : la notation ESG (critères Environnementaux, Sociaux et de bonne Gouvernance) a ainsi été intégrée dans son modèle de valorisation des entreprises. « Chez nous, les décisions d’achat/vente sont faites par rapport à la fair value (valeur intrinsèque de l’entreprise : estimation de la valeur financière d’un bien la plus objective possible, au-delà de sa valeur de marché actuelle) des entreprises. Ainsi, un émetteur faisant face à des risques de durabilité majeurs ou qui les gère mal verra sa fair value baisser. A contrario, une entreprise qui rencontre peu de risques en matière de durabilité et/ou qui les gère très bien verra sa fair value majorée. Ainsi, nous avons intégré des considérations extra-financières dans le moteur-même de nos décisions d’achat/vente .

Par ailleurs, nous appliquons parcimonieusement des politiques d’exclusion (charbon, hydrocarbures non conventionnels, armes controversées…). En effet, mis à part les activités incontestables, nous n’aimons pas trop les exclusions. La raison : si je suis investi, je peux influer sur l’entreprise en tant que co-propriétaire, l’encourager à signer l’UN Global Compact (Pacte Mondial des Nations Unies) ou les SBTI (Science-Based Targets Iniative, ndlr) ... Si par contre je l’exclus de mes investissements, je n’ai pas la légitimité d’intervenir au niveau de ses décisions stratégiques. Cette activité d’engagement prend plusieurs formes : l’engagement individuel, l’engagement collaboratif, et l’influence par le vote aux assemblées générales. »

Le gérant SRI voit dans l’engagement collaboratif un instrument de choix pour stimuler cette exigence d’influence. Aujourd’hui, des plateformes tel que l’ISS (Institutional Shareholder Services) permettent de soumettre sans grand effort les votes possibles aux assemblées générales des entreprises dans lesquelles on est investi et de les ajuster éventuellement en quelques clics. Ainsi, l’accès au vote est devenu simple : il s’agit d’une avancée démocratique, d’autant plus qu’il existe des plateformes avec lesquelles il est possible de s’allier, comme par exemple celle de l’UNPRI, ce qui permet d’entrer en dialogue avec les entreprises.

Il active alors un autre levier, le risque : « Imaginons une entreprise produisant des boissons à Cape Town en Afrique du Sud, en proie à de graves problèmes d’approvisionnement en eau, puisque les nappes phréatiques sont en train de baisser considérablement. Dans le futur, cette activité rencontrera des difficultés pour perdurer.

Ces effets sont lents à se matérialiser. Par contre, en tant que financiers, nous devons appréhender les entreprises et leurs risques, surtout lorsqu’ils sont extrêmes, afin de prendre les bonnes décisions d’investissement pour les portefeuilles sous notre responsabilité.

Avec notre équipe, nous avons le projet de construire un modèle permettant d’identifier les risques physiques et climatiques qui auront un effet matériel sur nos portefeuilles, et d’utiliser cette information pour entrer en dialogue avec les entreprises dans lesquelles nous sommes investis. »

En guise de conclusion, une projection à courte échéance : « Quand il y aura un consensus général pour préférer les entreprises intègres, qui vont dans le sens de la transition, elles auront alors un accès plus aisé aux financements, que ce soit en capital ou en crédit. Là, le changement va s’opérer ».

Cette interview a été réalisée sur la base d’un article de Thierry Feltgen intitulé « L’investissement durable et responsable déconstruit et reconstruit » publié sur le blog de BLI le 3 avril 2023. Il est à lire ICI.

Par Sébastien Michel
Photos : Marie Champlon

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CSSF : le régulateur à l'heure de la finance durable
CSSF : le régulateur à l’heure de la finance durable

Sans son organe vital de régulation, la finance durable luxembourgeoise demeurerait sans doute à l’état des vaines promesses. Entretien éminemment transparent avec Laura Gehlkopf, coordinateur ESG (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance) de la CSSF (Commission de Surveillance du Secteur Financier).

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Quels sont les meilleurs leviers pour orienter les flux de capitaux vers des activités vertueuses ? Comment impliquer davantage les investisseurs vers le financement durable ?

Depuis quelques années, les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (dits ESG) ont été placés au premier plan de l’agenda réglementaire dans tous les secteurs.

Dans le fonctionnement des marchés financiers, il s’agit d’adopter des mesures pour permettre à ce que le système financier contribue aussi à la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat et du Programme des Nations Unies de développement durable à l’horizon 2030. La transition vers une économie durable nécessite en effet des investissements massifs qui ne pourront pas être supportés uniquement par de l’argent public : son financement par des investisseurs professionnels et privés est indispensable.

Le public a donc également son rôle à jouer, et si, l’intérêt est manifeste, comme le montre un sondage, mandaté entre autres par la CSSF en 2022 , il est tout aussi manifeste que la finance durable est un sujet que le grand public a du mal à cerner (sondage grand public sur la finance durable : intérêt pour le sujet, mais besoin d’être mieux informé – CSSF).

Pour à la fois orienter les flux de capitaux vers des activités vertueuses et durables et sensibiliser les investisseurs, le cadre réglementaire s’articule autour de 4 piliers que l’on peut sommairement résumer ainsi :

  • un système de classification des activités, afin de définir celles qui sont durables (c’est ce qu’on appelle taxonomie) ;
  • des obligations de publication d’informations par les entreprises financières et non financières, pour renforcer la transparence des informations fournies aux investisseurs ;
  • l’intégration des aspects liés à la durabilité dans les outils traditionnels de gestion des risques et de gouvernance des entités ;
  • la création d’un cadre pour permettre aux investisseurs d’identifier et d’exprimer leurs préférences pour des investissements qui respectent certains critères en matière de durabilité.

Tous ces éléments fondateurs, dont nous travaillons à la mise en œuvre depuis 2021, visent à améliorer la fiabilité et la comparabilité des informations sur la durabilité, mitigeant ainsi les risques d’écoblanchiment pour assurer la confiance non seulement des investisseurs mais aussi de toutes les parties prenant dans une finance qui intègre les facteurs de durabilité.

Depuis 2018 et le plan d’action de l’UE pour la finance durable, quel est, selon vous, le chemin parcouru et celui restant à parcourir ?

La finance verte fait partie du Green Deal de l’Union européenne (ou Pacte Vert européen) publié le 11 décembre 2019, qui est une stratégie très ambitieuse et qui a pour but d’atteindre les objectifs que le monde s’est donnés dans le cadre de l’accord de Paris, entré en vigueur en novembre 2016. S’en est suivi un calendrier réglementaire assez serré.

Depuis 2021 nous avons vu se mettre en place les éléments constitutifs du cadre réglementaire applicable à la finance durable que j’ai rappelé plus haut, à un rythme plutôt soutenu. Jamais auparavant des lignes politiques n’avaient été transformées en règles applicables aussi rapidement, notamment parce que les dates cibles de 2030, 2035 et 2050 sont très rapprochées.

Mais tous les travaux initiés depuis 2021, comme ceux qui restent à entreprendre, démontrent que l’intégration de la durabilité et des risques liés à la durabilité en tant que facteurs clés des stratégies financières est un objectif à long terme, et qu’un changement profond est en train de s’opérer.

Aussi si une partie conséquente du travail législatif a déjà été formalisée au niveau européen, une grande partie de la mise en œuvre se poursuivra en 2023, et le secteur financier devra poursuivre ses efforts pour atteindre les objectifs que l’Europe s’est fixés. Même si de nombreux aspects restent encore à clarifier ou à ajuster, notamment en vue d’une approche européenne harmonisée, on ne peut pas nier que l’Union européenne prend ses responsabilités face à l’importance des enjeux complexes auxquels nous devons faire face.

Quelles sont les mesures mises en œuvre pour certifier et fiabiliser la véritable durabilité de produits financiers ? Comment informer au mieux les investisseurs de la pertinence de leurs produits financiers durables ?

Comme je l’ai déjà rappelé, l’ensemble du cadre réglementaire vise notamment à améliorer la fiabilité et la comparabilité des informations sur la durabilité qui sont fournies aux investisseurs.

On peut souligner dans ce contexte que depuis août 2022, les préférences en matière de durabilité des investisseurs doivent être prises en compte par les professionnels offrant des services de conseil en investissement et de gestion discrétionnaire.

Ces préférences doivent être prises en compte selon le processus déjà établi par les règles dites MiFID (pour Markets in Financial Instruments Directive), qui consiste à poser des questions sur la situation financière, les objectifs d’investissement, la tolérance au risque et l’expertise financière. Les institutions financières doivent connaître leurs clients et les produits qu’ils distribuent, et cette connaissance doit désormais s’étendre aux aspects ESG.

Afin que les investisseurs puissent avoir une bonne compréhension des concepts liés à la finance durable, l’éducation financière est un aspect à ne pas négliger. La finance durable est une matière relativement complexe et il est nécessaire pour les investisseurs d’en comprendre les notions clés. Cela est indispensable pour assurer un degré élevé de confiance dans le cadre réglementaire qui est en train de se mettre en place.

La CSSF joue également son rôle dans ce domaine en faisant de la finance durable un des sujets centraux de son programme d’éducation financière.

Les résultats de l’enquête mentionnée plus haut ont en effet démontré que la finance durable est un sujet difficile d’accès pour le grand public. Une campagne d’information et surtout un site dédié ont donc été conçus et lancés en début d’année 2023, avec la volonté de contribuer à une meilleure compréhension du sujet, de sensibiliser les citoyens et de les inciter à questionner l’offre de produits existants.

Pensez-vous que l’ingénierie financière soit à même de mesurer les véritables performances énergétiques et climatiques des entreprises cotées ?

Cette question est essentiellement liée à la qualité et la pertinence des informations fournies et des modèles utilisés, donc il y a une responsabilité prépondérante des émetteurs. Les autres parties prenantes peuvent également jouer un rôle pour exiger une information de qualité et veiller au risque d’écoblanchiment.

La réglementation a également toute sa place dans cette problématique notamment en fixant le cadre des informations à fournir. Ainsi, la directive sur les informations non financières (2014/95/UE) du 2 octobre 2014 (transposée à Luxembourg par la loi du 23 juillet 2016 concernant la publication d’informations non financières relatives à la diversité par certaines grandes entreprises et certains groupes) est la première à exiger des informations non financières incluant les sujets en relation avec l’environnement. Ces dernières années face aux attentes grandissantes en matière d’informations non financières des différentes parties prenantes et aux exigences des autres réglementations (notamment le règlement (UE) 2019/2088 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers), les informations mises à disposition par les émetteurs ont été parfois jugées insuffisantes, peu harmonisées ou comparables.

La directive UE 2022/2464 du 14 décembre 2022 sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises, en cours de transposition au Luxembourg, a pour but de remédier à ces faiblesses en :

  • étendant sensiblement le nombre d’entités soumises à la publication de ces informations ;
  • élargissant et précisant les informations requises qui devront répondre à des normes adoptées par la Commission européenne (les normes ESRS développées par l’EFRAG) ;
  • soumettant ces informations à l’émission d’un rapport d’assurance (assurance limitée qui devrait évoluer vers une assurance raisonnable) ;
  • soumettant les informations publiées par les émetteurs au contrôle des autorités nationales compétentes.

Les premiers rapports émis par les émetteurs les plus importants seront disponibles en 2025 sur les données 2024. Une application échelonnée est prévue pour les autres entités concernées. La réglementation prévoit que ces rapports soient fournis sous un format électronique permettant un traitement informatique (cf réglementation esef), cela devrait permettre l’automatisation de leur exploitation par les analystes.

Comment lutter efficacement contre l’écoblanchiment ? Quel sont les missions de la CSSF dans cette lutte ?

Comme je vous le disais, l’intégration de l’ensemble des considérations ESG dans le système existant et la responsabilisation de l’ensemble des parties prenantes sont les objectifs qui sous-tendent le cadre réglementaire applicable en matière de finance durable.

Cette approche est aussi pertinente en matière de lutte contre l’écoblanchiment, qui est une problématique transverse qui ne peut pas être appréhendée par un seul biais.

Il y a en ce moment un gros travail engagé au niveau européen et auquel la CSSF contribue activement, pour arriver à définir l’écoblanchiment et mieux comprendre le phénomène, son ampleur et les risques potentiels qui y sont liés.

Ce qui se dégage pour l’instant de ces travaux, c’est qu’il faut examiner le phénomène d’un point de vue multidimensionnel, car les causes de l’écoblanchiment sont multiples et peuvent impliquer ou affecter un large éventail d’acteurs, pas seulement les consommateurs, et ce, à tous les niveaux de la chaine.

Une fois posé un tel constat, la prise en compte des risques ESG et autres facteurs de durabilité dans les stratégies, les dispositifs de gouvernance et les processus internes des entités surveillées apparait comme essentielle, non plus seulement pour assurer la résilience du secteur financier face aux changements climatiques et aux risques de transition, mais également pour mitiger les risques d’écoblanchiment.

Ainsi la CSSF attend de la part des acteurs qu’ils intègrent les facteurs ESG aux différents niveaux de leurs organisations. Les transformations profondes auxquelles doivent faire face les entités surveillées rendent nécessaire l’instauration des structures de gouvernance adaptées aux enjeux actuels.

De la même façon, nous avons entrepris l’intégration des aspects ESG dans l’approche de supervision et les outils de surveillance de la CSSF, avec comme objectif l’accompagnement de la transition du secteur financier et de ses acteurs.

Dans cette optique, la CSSF a identifié et récemment communiqué un certain nombre de priorités de supervision dans le domaine de la finance durable.

Ces priorités s’articulent naturellement autour des éléments fondateurs du cadre réglementaire dont elles visent à accompagner une mise en œuvre cohérente, tout en tenant compte de sa complexité.

Quel est le poids de l’Europe dans le développement d’une transparence au niveau mondial ? Quel rôle le Luxembourg a-t-il à jouer ?

La position importante qu’occupe le Luxembourg dans le monde financier lui confère un rôle clé pour accompagner la transition du secteur financier. La redistribution du capital vers des investissements durables représente une opportunité pour le Luxembourg de contribuer de manière distincte au financement privé du Green Deal de l’Union européenne et à la durabilité de manière générale.

Cette ambition est aussi mise en avant dans la Luxembourg Sustainable Finance Roadmap, qui souligne également la dimension internationale du secteur luxembourgeois.

Cette dimension internationale trouve toute son importance en matière de finance durable, puisque comme vous le soulignez, la finance durable, de part sa portée globale, appelle une approche harmonisée, car seule une réponse collective pourra permettre de lutter efficacement contre l’urgence climatique et de prendre en compte de manière efficace les enjeux de durabilité.

De ce point de vue, la collaboration, au niveau européen d’abord, mais aussi au niveau international est fondamentale, et la CSSF assure une représentation active du secteur luxembourgeois auprès des forums internationaux et européens en charge du développement et de l’harmonisation des exigences liées à la finance durable, notamment via sa participation aux groupes de travail de la Commission européenne et des autorités européennes de surveillance, ainsi qu’aux groupes de travail internationaux tels que le NGFS, le Comité de Bâle et l’OICV.

La CSSF coopère aussi avec les autres autorités compétentes afin de partager les expériences et pratiques de surveillance en matière de lutte contre l’écoblanchiment. Mieux comprendre le phénomène de l’écoblanchiment pour pouvoir le circonscrire et en assurer une surveillance harmonisée au sein de l’Union européenne est une étape clé vers la création d’un environnement de confiance pour toutes les parties prenantes.

Propos recueillis par Sébastien MICHEL
Photo : CSSF

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La transparence avant tout
La transparence avant tout

La durabilité est présente dans tous les secteurs financiers. L’objectif d’arriver à la neutralité climatique en 2050 n’y est pas étranger.

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Le Groupe Foyer est actif dans plusieurs pays européens et exerce deux métiers. Il y a d’une part l’assurance commercialisée au Luxembourg à travers un vaste réseau d’agences, mais aussi l’assurance en Belgique, l’assurance-vie à l’étranger, ou encore l’assurance santé à l’international. D’autre part, Foyer est également acteur en gestion de fortune via sa filiale CapitalatWork Foyer Group. Des domaines qui doivent tous intégrer la durabilité.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’investissement socialement responsable (ISR) n’est pas nouveau. Si au départ il était principalement exclusif (éviter d’investir dans des secteurs ou activités qui ont un impact négatif), il est passé à une notion plus inclusive, qui cherche à privilégier des investissements ayant un impact positif sur l’environnement et la société.
La notion d’ISR a donc connu et connait encore, notamment sous l’impulsion réglementaire, de nombreux développements.

Michael Geeroms, gestionnaire de fonds chez CapitalatWork Foyer Group, explique : « Pour les investissements de certains de nos compartiments soumis à l’article 8 du règlement SFDR (voir plus loin), nous avons intégré des facteurs ESG (Ndlr : Environnement, Social et Gouvernance), suivant une méthodologie que nous appelons « CapitalatWork responsible investment methodology.  »

En effet, pour sélectionner les actifs dans lesquels ils souhaitent investir, les experts de CapitalatWork Foyer Group intègrent, en plus des critères classiques d’analyse financière, des principes d’exclusion, ainsi qu’une stratégie de « Best in Class » basée sur un scoring ESG, tout en restant fidèles à leur philosophie, où ils se concentrent uniquement sur les émetteurs ayant les business models les plus solides et compréhensibles, un endettement faible, une forte génération de trésorerie et une valorisation attractive.

Selon Michael Geeroms, l’arrivée de la Taxonomie environnementale et du règlement SFDR, qui essaie d’établir une liste d’activités économiques ayant un impact favorable sur l’environnement, permettra de standardiser toutes les méthodologies d’analyse et d’investissements. Cela devrait finalement créer plus de clarté et rendre l’ISR plus compréhensible pour les investisseurs. « C’est un travail complexe, mais qui apporte une certaine transparence à toutes nos initiatives. Les institutions financières suivent les instructions très strictes du règlement SFDR imposé par l’Union Européenne. »

La classification Article 8 revient régulièrement dans la conversation. Cette terminologie provient du règlement SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation), et désigne des fonds qui promeuvent des caractéristiques ESG selon les exigences de l’Union Européenne. C’est le cas pour les deux compartiments ESG Equities at Work et ESG Bonds at Work, sous-jacents du produit d’assurance-vie invest4change commercialisé par Foyer au Luxembourg et pour lesquels la durabilité fait partie intégrante de la stratégie et des processus d’investissement.

Au Luxembourg, un label renforce encore la probité des fonds durables, sur une base ESG : le label LuxFlag ESG Funds. « CapitalatWork Foyer Group offre deux fonds labellisés », poursuit Sandrine Chabrerie, Responsable RSE pour le Groupe Foyer. « Et notre produit d’assurance-vie invest4change a également reçu ce label, qui atteste de la pertinence de la stratégie d’investissement ESG poursuivie. Notre filiale WEALINS offre également un produit d’assurance-vie labellisé par LuxFlag sur le marché belge. Avoir une agence neutre externe qui confirme nos efforts dans la matière, c’est un gage de sérieux et de transparence aux yeux de nos clients et l’on voit un certain enthousiasme devant les produits durables que nous proposons. La nouvelle génération est particulièrement séduite par ces produits, même si la tendance reste tout de même de posséder des fonds variés. »

Au sein du Groupe Foyer, nous sommes convaincus que le phénomène durable n’est pas un effet de mode. « Les portefeuilles sont gérés sur le long terme », souligne Michael Geeroms. « La réglementation demande une telle transparence qu’il est impossible de duper les investisseurs. Notre objectif est de respecter scrupuleusement les règles en la matière, et une des premières choses à faire, c’est informer nos clients, afin qu’il y ait une véritable prise de conscience. Chacun garde en tête que l’Union Européenne impose comme premier objectif d’arriver à la neutralité climatique en 2050. La législation continue à évoluer rapidement en fonction de cet objectif, et il faut la suivre de près pour rester conformes. »

Un objectif que l’on retrouve dans les futurs projets. « La réglementation sur la durabilité a un impact positif sur notre offre de produits et services, les investissements et notre rôle d’entreprise citoyenne », précise Sandrine Chabrerie, « car nous travaillons à traduire cette réglementation en opportunités. La durabilité est de plus en plus omniprésente dans toutes nos actions et se diffuse dans toute l’organisation. Une des forces du Groupe Foyer, c’est d’en avoir fait un de ses piliers de sa stratégie d’entreprise. »

Sébastien Yernaux
Photos : Marie Champlon

The role of finance in well-being oriented and sustainable societies
The role of finance in well-being oriented and sustainable societies

Financial activities have been initially invented to satisfy a need : matching the supply of savings with the demand for investments. Finance’s mission became generating profits for the sake of profits, thus contributing to current development unsustainability.

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Will finance and banking manage to re-orient their activities to promote well-being in socially and environmentally sustainable societies ?

The excessive emphasis on money - typical of modern societies - creates a perverse incentive to grow and accumulate private fortunes without considering their purpose. The 2008 financial crisis is a lingering memory of the social disasters that can arise from this approach. A relatively small speculative bubble made possible by poor regulations, opaque financial instruments, and attempts to sustain consumption in one of the world’s most affluent societies had far-reaching consequences, impacting the lives of billions of people worldwide.

In the early 2000s, the loss of economic competitiveness and the increased income inequality threatened Americans’ purchasing power. However, rather than reducing consumption, the financial and banking system backed Americans’ lifestyle offering easy credit in exchange for large gains. This system generated great fortunes until a relatively minor default revealed its fragility triggering the well-known credit crunch and its dramatic consequences on real economy.

The preeminence of money and its accumulation undermine the environment too. Figures 1 and 2 demonstrate the association between economic growth, CO2 emissions - the main driver of climate change - and material footprint, a measure of resource consumption. Both figures indicate that economic growth is historically coupled to negative environmental externalities. That is efficiency gains and green technologies are not sufficient to mitigate the detrimental effects of economic growth on the environment. CO2 emissions temporarily decreased only during recessions (in figure 1, CO2 emissions decline markedly when GDP per capita growth is negative). Is living in a perpetual crisis the only way to protect the environment ? The answer is clearly negative, but for this to happen the societal goal should shift from the production of goods and services to the provision of well-being. The success of a society should be measured by its ability to transform resources into quality of life.

Can the banking and finance industry rediscover its original mission and contribute to well-being in socially and environmentally sustainable societies ? A world oriented towards well-being will still require financial and banking services, but their goal should shift from the production of money for the sake of money to the production of money for the sake of well-being. As money primarily equates well-being for those at the lower end of the income distribution, the output of banking and finance should be aimed at initiatives to durably improve well-being, such as financing public goods and services — including high quality and free education, healthcare, public transport —, reducing income inequality, lowering the retirement age, or supporting universal basic income.

In conclusion, the banking and finance industry must realign its purpose with the original mission of facilitating resource allocation and contribute to societal well-being. This requires shifting from a profit-driven approach to one that prioritizes well-being, particularly for those with lower incomes. It’s time for a paradigm shift from the pursuit of wealth to the provision of well-being as a measure of progress.

Francesco Sarracino

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Alles ESG – oder was ?
Alles ESG – oder was ?

Von März bis April haben die ABBL-Stiftung für Finanzbildung, die CSSF, ALFI und das Verbraucherschutzministerium eine viel beachtete nationale "Sensibilisierungskampagne" zu nachhaltigen Finanzen durchgeführt.

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Die Kampagne wirkt wie der Höhepunkt einer mehrjährigen Phase, während derer hiesige Finanzmarktakteure die neuen Regulierungsvorgaben der EU zur Sustainable Finance umzusetzen hatten (Stichworte sind Taxonomie, SFDR und ESG). Seht her : Wir haben geliefert ! Versprochen wird, dass es jetzt Finanzprodukte gibt, durch deren Kauf auch Otto Normalinvestor mehr Klimaschutz und eine Warenproduktion unter Einhaltung der Menschenrechte bewirken kann.

Aber ist das so ? Was wird behauptet, und was wurde tatsächlich geliefert ? Um diese Fragen zu beantworten, ist es sinnvoll, sich die Produktpalette aus dem Jahr 2020 anzuschauen, also aus der Zeit, als die neuen Regularien noch nicht gültig waren. Was hat sich am Produktangebot im Vergleich zu damals geändert ? Man würde meinen : ganz elementar viel. Leider ist die Antwort : nichts Wesentliches. Vielfach wurden bei Finanzmarktprodukten, die jetzt als nachhaltig beworben werden, keine Portfolios umgeschichtet, es erfolgte kein Divest aus fossilen Energien, und es wurden auch keine Firmen ausgeschlossen, denen die Einhaltung der Menschenrechte egal ist. Schlimmer noch : Die Marketingmaschinerie hängt diesen unveränderten Produkten jetzt nur ein neues Mäntlein um.

Um diese Behauptung zu beweisen, ist es nötig, der Frage auf den Grund zu gehen, was da in den letzten Jahren passiert ist. Dabei ist es wichtig, gleich zu Beginn einen entscheidenden Unterschied zwischen einem „Investieren in Nachhaltigkeit“ sozialer und ökologischer Banken einerseits sowie nachhaltigem Investieren konventioneller Finanzinstitutionen andererseits festzuhalten. Während Erstere ausschließlich in soziale und ökologische Unternehmen investieren, dies gewissermaßen ihr Wesenskern und Gründungszweck ist, haben Letztere als Folge von Regulierungen die berühmten „ESG-Kriterien“ zu berücksichtigen, wenn sie ihre Produkte als „nachhaltig“ kennzeichnen wollen. Für sie bedeutet das, Geld in Unternehmen oder Finanzprodukte zu investieren, die neben traditionellen Finanzindikatoren (Risiko und Renditeaussichten usw.) auch ökologische und soziale Kriterien sowie Aspekte der guten Unternehmensführung erfüllen. Die Betonung liegt auf „auch“, das heißt, es wird zugleich in fossile Energien oder Aktivitäten investiert, bei denen Menschenrechtsverletzungen Teil der Produktionsmethoden sind.

Und ein zweiter Unterschied ist wichtig zur Trennung der Spreu vom Weizen : Dadurch, dass neue Regularien und die Konsumentennachfrage es erzwingen, Produkte mit Blick auf ihre Nachhaltigkeit einzuordnen, unterziehen konventionelle Emittenten sie einem umfangreichen „ESG-Screening“. So werden plötzlich aus vielen herkömmlichen Finanzprodukten scheinbar nachhaltige Angebote, obwohl sie es nicht sind.

Eine Koalition aus sechs zivilgesellschaftlichen Organisationen (ASTM, Cercle de coopération des ONGD, etika, Greenpeace, Justice et Paix, SOS Faim) stehen der Kampagne daher sehr kritisch gegenüber : Anstatt die Bevölkerung über die Fallstricke vermeintlich nachhaltiger Finanzprodukte aufzuklären, bewirbt sie diese unkritisch. Sie bietet vermeintlich nachhaltige Geldanlagen nicht nur als Beitrag zur Bekämpfung der Klimakrise an, sondern auch zum Schutz der Menschenrechte. Damit weckt sie falsche Erwartungen und führt Bürger:innen in die Irre.

Als Gesellschaft, die sich mitten in der Klimakrise befindet und mit Menschenrechtsverletzungen im Rahmen wirtschaftlicher Aktivitäten konfrontiert ist, müssen wir ein nachhaltiges und faires Wirtschaftsmodell einführen. Damit Organisationen und Industrien diese systemische Aufgabe erfolgreich angehen können, benötigen sie viel Kapital. Die Umleitung von Geld, um auf diese Weise zu Innovation, der Schaffung von Arbeitsplätzen und dem Übergang zu einer nachhaltigen Wirtschaft beizutragen, ist daher eine absolute Priorität.

Doch können ESG-, grüne oder nachhaltige Finanzprodukte die Geldströme wirklich so umlenken, dass sie sich positiv auf die Umwelt und die Gesellschaft auswirken ? Ohne ausreichende verbindliche Anforderungen an die Auswirkungen sogenannter nachhaltiger Investitionen auf die Realwirtschaft besteht ein hohes Risiko des Green- bzw. Socialwashing, d. h. es wird fälschlicherweise behauptet, dass die Investitionen positive Auswirkungen auf das Klima und die Gesellschaft haben.

Beim Handel von Aktienfonds an der Börse, also auf dem Sekundärmarkt, wechseln jedoch nur bereits bestehende Wertpapiere ihren Besitzer. Auf die Realwirtschaft hat das kaum Auswirkungen. Das konventionelle Finanzsystem ermöglicht ferner kaum Transparenz in dem Sinne, dass Anleger:innen oder Sparer:innen wissen, ob mit ihrer Geldanlage tatsächlich nur Projekte finanziert werden, die im Einklang mit ihren moralischen, philosophischen oder religiösen Überzeugungen stehen. So enthalten auch ESG-Fonds Aktien von Firmen aus Branchen, die sie eigentlich nicht finanzieren wollen, wie z.B. der Rüstungs- oder Atomindustrie.

Beim Alternativen Sparkonto, Frucht einer Kooperation zwischen Spuerkeess und etika, wird das Kapital dagegen ausschließlich in Kredite an Projekte der realen Wirtschaft umgewandelt, die strengen sozialen und ökologischen Kriterien entsprechen. Seit dem Beginn dieser Zusammenarbeit vor 26 Jahren wurden rund 205 Projekte, die ökologische und soziale Kriterien erfüllen (z. B. Solarenergie, Sozialwohnungen, Elektrobusse, Bio-Restaurants usw.), in Höhe von über 105 Millionen Euro. Damit wurde nicht nur die nachhaltige Kultur des Landes geprägt, das Finanzprodukt war mit den strengen Nachhaltigkeitskriterien bei der Kreditvergabe auch Vorreiter in der Finanzbranche. Wir können mit Stolz sagen, dass wir unserer Zeit weit voraus waren !

Von Ekkehart Schmidt / etika
Foto : Bau eines neuen Wasserkraftwerks an der Mühle von Moestroff

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Une finance plus équitable est indispensable au développement durable
Une finance plus équitable est indispensable au développement durable

Le développement durable ne peut tenir debout sans développement équitable, sans englober toutes les géographies et toutes les strates sociales. C’est ainsi que le réseau InFiNe.lu alimente un pan légitime de l’économie : la finance inclusive. Anne Bastin, sa directrice nous en livre sa définition, ses appréciations et ses orientations.

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Qu’est-ce que la finance inclusive (inclusion financière) ? Comment la définir ?

Il est important de rappeler qu’aujourd’hui 2,5 milliards de personnes dans le monde n’ont pas d’accès aux services financiers, à savoir l’épargne, le crédit, l’assurance, les moyens de paiements et les transferts d’argent.

La finance inclusive comme l’indique le mot inclusif est de permettre à toutes les populations d’avoir accès à des services financiers de façon simple. Parmi les populations il s’agit non seulement des entrepreneurs et des individus mais désormais l’accent est également mis sur les jeunes et les femmes, qui par le passé, avaient moins accès aux services financiers.

Les services financiers les plus demandés sont l’épargne, le crédit, l’assurance mais aussi les paiements, les transferts d’argent (notamment pour les migrants qui envoient de l’argent à leur famille restée souvent dans leur pays d’origine).

La finance inclusive touche les pays du Sud mais également du Nord et parmi nos membres, Microlux octroie des crédits aux individus porteurs de projets au Luxembourg et qui n’ont pas accès aux banques classiques.

La proximité et la confiance sont fondamentaux dans la finance inclusive, ce que les clients bénéficiaires ne retrouvent pas dans les banques classiques.

Microfinance, micro-crédit, finance inclusive, quelles sont les missions prioritaires du réseau inFiNe.lu ? Dans quelle mesure impactent-elles concrètement le quotidien ?

Le réseau InFiNe.lu existe depuis 2014 et comprend 36 membres qui proviennent des secteurs publics, privés et de la société civile. L’association InFiNe a pour objet de contribuer au renforcement et à la promotion d’un centre d’excellence au Luxembourg dans le domaine de la finance inclusive, en capitalisant sur le rôle de premier plan du pays dans le secteur financier et de la coopération au développement.

InFiNe contribue au développement de savoir et de savoir-faire, par la coordination des échanges et la collaboration entre les membres. (Pour atteindre sa mission, InFiNe organise des événements afin de consolider les synergies avec les membres, organise des ateliers de renforcement des capacités et rend visible l’écosystème national de la finance inclusive à l’extérieur du Luxembourg.)

Ceci permet aux acteurs luxembourgeois d’être reconnus sur le terrain et de faire connaitre leur expertise au Luxembourg comme à l’international ; que ce soient des ONG : ADA, CARE, Handicap International mais aussi les big four comme Ernst & Young, Deloitte, la BEI, LhOFT (fintechs), LuxDev et les fonds d’investissements. Cela amène également la collaboration sur des thématiques telles que la Green Finance, l’Impact Finance ou la stratégie d’inclusion financière pour les femmes.

À noter que la sécurité alimentaire et la nutrition sont au centre de la thématique pour le prochain prix européen de la microfinance qui sera remis en novembre 2023 lors d’une cérémonie coorganisée par InFiNe et e-MFP (European Microfinance Platform).

La finance inclusive crée de l’impact : l’inclusion financière a été identifiée comme un catalyseur pour 7 des 17 objectifs de développement durable en tant qu’ensemble d’objectifs interdépendants, conçus pour atteindre la paix et la prospérité des personnes et de la planète.

Le réseau luxembourgeois de la finance inclusive a la particularité de rassembler un large éventail d’expertises caractérisées par la diversité de ses membres issus du secteur public ou privé.

Quelques chiffres : l’industrie de la microfinance a évolué depuis les années 80. L’estimation est de 180 milliards USD et elle aurait permis d’atteindre plus de 200 millions de clients (source : CGAP-World Bank, Consultative Group to Assist the Poor).

Depuis une quarantaine d’années, les institutions de microfinance ont beaucoup changé avec désormais un focus sur la durabilité (sustainability), tout en diversifiant les types de services financiers avec l’introduction de la finance digitale (mobile money).

En quoi, peut-on associer la finance durable à la finance inclusive ? En quoi se complètent-elles, s’opposent-elles ?

Pour moi la finance inclusive et la finance durable vont de pair et chacune a pour objectif d’avoir un impact positif sur les populations ciblée. Si la finance inclusive a clairement pour objectif la réduction de la pauvreté et l’atteinte des objectifs de développement durable en tenant compte de tous ; la finance durable recouvre trois concepts : la finance solidaire, la finance socialement responsable et la finance verte.

  • L’investissement responsable : il permet d’intégrer les critères ESG dans les processus d’investissement et de gestion. L’investissement responsable incite les entreprises et sociétés de gestion à prendre en compte des critères extra-financiers, comme les aspects liés à l’environnement, au social et la gouvernance. (Labellisation des fonds par LuxFLAG au Luxembourg)
  • La finance verte : elle réunit l’ensemble des opérations financières en faveur de la transition énergétique et écologique et de la lutte contre le changement climatique. Ses outils principaux sont les obligations vertes. Ces emprunts servent à financer des projets contribuant à la transition écologique : gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie.
  • La finance solidaire : elle regroupe les placements dont l’engagement est orienté sur des critères sociaux : notamment des activités d’insertion liées à l’emploi, au social et au logement, à la solidarité internationale et à l’environnement.

Plusieurs membres d’InFiNe ne font que de la « finance finance », des fonds d’impact et ne travaillent pas directement dans la finance inclusive mais dans la finance durable (Innpact, Finance in Motion, Bamboo Capital Partners).

Donc je vois plutôt ces deux modèles comme faisant partie d’un écosystème avec le même objectif d’utiliser la finance inclusive et la finance sociale comme un outil de lutte contre la pauvreté et de développement durable.

Propos recueillis par Sébastien Michel
Photos : inFiNe

En route vers plus de responsabilité pour l'ensemble du secteur financier
En route vers plus de responsabilité pour l’ensemble du secteur financier

ADA est spécialisée dans la finance inclusive dans les pays en développement. Elle porte une attention croissante à l’évolution des pratiques et standards en matière de finance durable afin d’intégrer au mieux cette dimension à ses actions.

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ADA (Appui au développement autonome) est une ONG luxembourgeoise qui a comme objectif de soutenir le secteur de la finance inclusive. Elle vise les populations qui n’ont pas accès à la finance traditionnelle. C’est ce que l’on a appelé pendant des années, la microfinance. « Nous intervenons dans les pays en développement où les populations n’ont pas accès aux systèmes bancaires traditionnels », souligne Mathilde Bauwin, responsable gestion des connaissances ADA, leader changements climatiques. « Nous appuyons les institutions financières de ces pays, en particulier les institutions de microfinance, pour qu’elles offrent des services adaptés à ces populations. »

Par nature, parce qu’elle s’adresse à des populations exclues, la finance inclusive vise depuis toujours à avoir un impact positif sur le plan social. « Toutefois, depuis quelques années, on intègre de plus en plus les questions environnementales dans nos projets. On accompagne les acteurs financiers dans les pays en développement dans l’analyse de leurs propres performances sociales et environnementales. Ainsi, ils peuvent se fixer des critères à suivre. On les appuie également pour développer des services financiers qui vont répondre à des besoins sur le plan social et environnemental. Pour prendre un exemple concret, nous aidons à développer des crédits adaptés à l’acquisition d’équipements fonctionnant aux énergies renouvelables (lampes solaires, chauffe-eau solaires, etc.) ou aux activités économiques liées à la chaîne de valeur du bois produit de manière durable. Ces crédits peuvent être destinés aux menuisiers qui vont utiliser du bois local, ou directement aux producteurs de bois qui gèrent des plantations forestières. »

Une réglementation plus transparente

C’est en 2012 que les standards de bonnes pratiques, en termes de gestion de la performance sociale de la finance inclusive, ont été établis. « Dans le secteur financier classique, il n’y a pas de standards déclinés en bonnes pratiques de façon aussi concrète que pour la finance inclusive », poursuit Mathilde Bauwin. « Il y a, en revanche, l’investissement responsable depuis quelques années qui intègre notamment les critères ESG (Environnement Social Gouvernance). Le problème est que, jusqu’il y a peu, chacun pouvait les définir comme il le souhaitait. Il n’y avait donc pas d’homogénéité. Cela a facilité les accusations de greenwashing ou impactwashing. »

Pour répondre à cette problématique, une nouvelle réglementation a vu le jour : la taxonomie établie par l’Union Européenne. « Elle permet d’identifier les activités qui sont durables sur le plan environnemental. Les autres volets (notamment sociaux) seront intégrés dans les années à venir. Cela permet en principe d’avoir des définitions communes sur le caractère durable ou non, même s’il y aura certainement des améliorations à apporter à ces définitions à l’avenir. »

C’est un premier pas qui va dans le bon sens selon ADA, même si ce n’est qu’un début et que des difficultés se posent au niveau de l’application de cette réglementation. « Il y a par exemple de nombreuses nouvelles exigences en termes de reporting pour les acteurs du secteur financier, pour démontrer les résultats des investissements. On commence par identifier la part d’investissements dans des secteurs durables d’après la taxonomie et ensuite, il va falloir mesurer leur impact. C’est une nouvelle démarche qui pèse beaucoup sur les acteurs financiers. Il faut se donner le temps de collecter les informations, de les calculer… Néanmoins, cela reflète la tendance à l’amélioration des pratiques et aux possibilités de diminuer le greenwashing. »

Au niveau du Luxembourg, on retrouve la Luxembourg Sustainable Finance Initiative. « La LSFI a lancé une initiative pour la création d’un groupe de travail, dont ADA fait partie, pour choisir un outil pertinent afin d’évaluer l’impact climatique des investissements financiers. Actuellement, il existe plusieurs méthodes sur le marché et le but est que les acteurs du secteur eux-mêmes sélectionnent la meilleure à appliquer selon leur domaine. Une diversité d’acteurs sont représentés afin que chacun puisse apporter son expertise. »

Tous les moyens sont donc sur la table pour que chacun avance dans la même direction.

Sébastien Yernaux
Photo : ©ADA

Le développement durable, c'est l'avenir !
Le développement durable, c’est l’avenir !

Si microlux est avant tout orientée sur le social, elle intègre de plus en plus la notion environnementale dans ses services de conseils. Une étape importante même si l’absence de résultats visibles directement rebute encore certains bénéficiaires.

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microlux est une entreprise sociale à but non lucratif ayant pour mission l’inclusion sociale et économique des personnes qui n’ont pas accès au crédit bancaire traditionnel. Son activité principale consiste à accompagner et financer, sous forme de microcrédits, les porteurs de projet qui souhaitent créer ou développer une entreprise. L’objectif est d’améliorer leurs conditions de vie et leur épanouissement professionnel.

Depuis sa création, microlux a soutenu plus de 200 entrepreneurs permettant la création de plus de 280 emplois. Les microentrepreneurs soutenus par microlux sont actifs dans divers secteurs comme la restauration, les services de bien-être et soins esthétiques, le transport de personnes et de petits colis, l’alimentation, le nettoyage, etc.

Première institution de microfinance au Luxembourg, microlux a été créée en 2016 à l’initiative de ses 4 membres fondateurs, BGL BNP Paribas, ADA (Appui au Développement Autonome), l’ADIE (Association pour le droit à l’initiative économique) et le FEI (Fonds Européen d’Investissement). Le groupe d’assurances Foyer S.A. est entré dans le capital de microlux en 2018.

Selon les responsables de microlux, « un développement ne peut pas être durable en laissant de côté tout un pan de la population. En ce sens, la mission d’inclusion financière et sociale des exclus bancaires de microlux s’inscrit pleinement dans cette mouvance. L’activité de microlux répond donc aux objectifs de développement durables 1 (pas de pauvreté), 8 (travail décent et croissance économique), et dans une moindre mesure 10 (inégalités réduites). »

Si microlux joue avant tout la carte du social, le point de vue environnemental est également pris en compte dans les conseils. « Nous n’agissons pas directement dessus mais commençons des réflexions pour intégrer cette dimension dans nos services d’accompagnement aux entrepreneurs, à travers une sensibilisation qui les encourage à intégrer à leur tour cette dimension dans leur pratique commerciale », souligne Quyen Ngo-Li, Communication Manager chez microlux. « Nous sommes vraiment à la genèse de cette idée-là. Évidemment, nous ne jouons pas dans la même cour en termes de tailles de sociétés, mais leur expertise est importante dans les conseils fournis à nos clients. »

Le but de microlux est vraiment d’intégrer cette notion environnementale dans les projets des bénéficiaires. « Certains n’ont pas encore compris l’importance de cette vision dans le développement, voire dans le lancement de leur business. Il faut dire qu’ils sont assez occupés et si les résultats ne sont pas visibles directement, cela peut les freiner. D’où nos différentes initiatives, autant quand ils sont reçus en nos bureaux que lorsqu’ils participent à des ateliers. »

Sébastien Yernaux, en collaboration avec microlux
Légende : Jérémy Del Rosario (Credit manager), Sam Paulus (Senior manager) et Quyen Ngo-Li, (Communication manager).
Crédit photo : Tania Alamilla.

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