Le dossier du mois

Une thématique dans chaque #DossierDuMois, avec la rédaction d’Infogreen et l’expertise de nos partenaires

Publié le 30 septembre 2016
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septembre 2016

Dessine-moi une maison !

À quoi ressemblera l’habitat de demain ? Axé sur le partage de l’espace, des équipements, des services mais aussi des idées, très peu gourmand en énergie y compris en énergie grise, optimisé d’un point de vue économique. En un mot, durable et, en tous cas, multiforme. C’est ce que vous découvrirez dans ce dossier.

Bonne lecture !

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Infogreen a le plaisir de vous présenter le 4e opus de son Dossier du mois. Nous avons choisi d’y mettre en lumière une thématique qui, comme les précédentes, est étroitement liée avec le développement durable : l’habitat.

Comme de nombreux domaines, l’habitat est en train de connaître une mutation profonde. En cause, plusieurs facteurs : l’espace se fait rare donc cher, les sources d’énergie fossiles et les ressources commencent à s’épuiser, les déchetteries sont pleines à craquer, le lien social se distend et l’isolement pèse. Autant de problématiques qui poussent à réfléchir sur de nouveaux modes de vie : on repense l’agencement des maisons, on se réapproprie l’espace public, on renoue avec ses voisins, on échange les idées, on mutualise les outils, on s’intéresse à de nouveaux matériaux et à de nouvelles techniques de construction.

Parler d’habitat aujourd’hui (et a fortiori demain), c’est aller au-delà du bâtiment pour réfléchir à l’échelle du quartier, voire de la ville, et adopter une approche durable en ce sens qu’elle englobe les 3 piliers écologique, social et économique. C’est ce que souligne le ministre du Logement, Marc Hansen, qui nous a livré sa vision de l’habitat de demain : « À l’avenir, l’accent devra être mis davantage sur les synergies entre le monde du travail, les commerces et les infrastructures publiques comme les écoles. La façon dont nous nous déplacerons jouera un rôle primordial : la mobilité douce et le transport en public seront aussi importants que la préservation et la création d’espaces verts et de lieux de rencontre, ceci en vue de dynamiser les relations entre les habitants. Le défi majeur sera de réussir à créer ces synergies et ces interactions sociales si importantes. Dans la ville de demain, la solidarité entre les habitants et la mixité sociale seront des éléments clé pour garantir la cohésion sociale ».

Parmi les initiatives du ministère, le Greng Hausnummer, une distinction mise en place pour encourager la construction de bâtiments durables, appliquée par CLK lors de la conception de sa future maison témoin.

Les promoteurs publics montrent l’exemple. Ainsi, Guy Entringer, directeur de la SNHBM, nous dévoile son dernier projet : un véritable village de 800 logements sur 27 hectares à Olm, qui offrira une école, une maison relais, une crèche, des commerces, des lieux de restauration, de nombreux espaces publics, ainsi qu’un concept de mobilité favorisant les transports en commun.

Une multitude d’autres projets d’un nouveau genre voient le jour au Luxembourg comme ailleurs mais, en réalité, il s’agit plus de retourner aux sources que d’innover. En tous cas, au moins pour ce qui est des aspects social et économique.

Les coopératives d’habitat, connues aussi sous le nom d’habitat partagé, ont le vent en poupe dans les pays scandinaves, en Suisse et en Allemagne où elles existent depuis un siècle déjà. Au Luxembourg, le 1er projet de ce type est en train de voir le jour sous l’impulsion du collectif Adhoc, représenté par Éric Weirich, qui travaille sur la construction d’un immeuble d’une trentaine de logements qui fera la part belle à des espaces communs multifonctionnels conçus pour se réunir ou être utilisés à tour de rôle par les différentes familles, le tout sera assorti d’une offre de services accessibles aussi bien aux membres qu’aux non-membres.

Dans le même état d’esprit collaboratif, au Kirchberg, le Fonds éponyme a décidé d’installer des laboratoires d’idées successivement dans chacun des quartiers afin de permettre aux habitants et aux usagers de se les réapproprier et de créer des lieux de vie qui leur ressemble.

Vivre ensemble (tout en faisant des économies), c’est aussi l’objectif du projet d’habitat intergénérationnel porté par l’association Cohabit’âge, chapeautée par Moussa Seck. Une formule win-win qui permet aux personnes âgées d’être solidaires des problèmes de logement que peuvent connaître les jeunes, tout en se sentant moins seules et plus en sécurité et de bénéficier d’un complément de revenus. Du côté des jeunes, l’avantage est de se loger moins cher, de trouver ou de retrouver une ambiance familiale rassurante quand ils viennent de loin et d’être solidaires des difficultés liées au vieillissement de la population. Pour les deux parties, la transmission de connaissances et de savoir-faire sont des éléments essentiels.

C’est également la solidarité qui prime dans les activités de l’Agence immobilière sociale, institution étatique dirigée par Gilles Hempel. Son principe ? Remettre le pied à l’étrier à des familles en situation précaire en leur offrant un logement à moindre coût. Et pour motiver des propriétaires à mettre leur bien à disposition, un package « casco » leur est offert : garantie de paiement des loyers et restitution du bien en bon état et à tout moment. Encore une fois, tout le monde y trouve son compte.

Autre acteur, transfrontalier cette fois, à retrouver dans ce dossier : l’association EcoTransFaire qui a pour vocation, entre autres, de réhabiliter des maisons de cités ouvrières dans les 4 pays de la Grande Région. Comme l’indique son président, Bernard Lahure, ces maisons ont des qualités à exploiter dans le contexte actuel, la 1re étant d’avoir amorti leur énergie grise.

La rénovation du bâti existant est d’ailleurs au cœur des préoccupations de certains politiciens européens, à l’instar de Claude Turmes qui nous a livré une interview exclusive. 40 % de l’énergie consommée en Europe est liée aux bâtiments. On s’attaque aujourd’hui aux constructions nouvelles, mais la rénovation est un pan essentiel d’une politique climatique en ce sens que 70 % du bâti de 2050 existe déjà et qu’à cette échéance, tout le parc immobilier devra être near zero energy. « Pour remplir nos objectifs, il faudrait atteindre un taux de rénovation de 3 % des bâtiments par an en Europe. Or, nous ne sommes même pas à un 1 % », constate l’eurodéputé. Une piste pour accélérer le mouvement en la matière serait, pour lui, le projet EnergySprong à découvrir dans cette interview.

Qui dit rénovation, dit performance énergétique. Le logement de demain ne consommera pas d’énergie, il pourra même en produire, poussant les ingénieurs-conseils à dépasser toujours plus leurs limites. « C’est une bonne chose », selon Denis Lecanu du bureau Betic, « mais cela peut parfois entraîner des dérives. Prévoir une isolation de plusieurs dizaines de centimètres est-il vraiment pertinent si l’on considère la quantité d’énergie nécessaire lors du cycle de vie du matériau ? Les habitations devront donc plus que jamais prendre en compte leur production d’énergie grise ».

D’énergie grise, il en est question dans la maison en paille qui, contrairement aux autres techniques, constitue un puits de carbone. « On estime qu’il faut 10 ans pour que la consommation de carbone des habitants d’une telle maison pour se chauffer ne dépasse la quantité stockée dans les murs. Sans compter que les murs sont sans ciment ni terre cuite, gros consommateurs d’énergie », apprenons-nous dans l’article qui y est consacré.

Et puisqu’une maison à consommation d’énergie quasi-nulle est une maison qui comble son peu de consommation par la production d’électrique via, la plupart du temps, des panneaux solaires, nous ne pouvions pas ne pas aborder le sujet. La problématique principale de cette technologie étant le stockage de l’énergie produite. Problème résolu grâce à la batterie domestique Powerwall de Tesla qui se recharge pendant la journée grâce à l’électricité générée par les panneaux solaires et la restitue après le coucher du soleil pour alimenter la maison.

Mélanie Trélat

Le logement de demain sera modulable et adaptable
Le logement de demain sera modulable et adaptable

Marc Hansen, ministre du Logement, nous donne sa vision de l’évolution des villes et des modes d’habitation. Interview.

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Comment imaginez-vous la ville de demain ?

Les villes grandissent de plus en plus. Le défi est de garantir le développement socio-économique et d’offrir en même temps un cadre de vie agréable aux habitants. La ville de demain sera une ville plus durable, plus compacte et plus solidaire. Elle devra s’adapter aux besoins sociaux et énergétiques et être capable de se transformer dans le temps.

A l’avenir, l’accent devra être mis davantage sur les synergies entre le monde du travail, les commerces et les infrastructures publiques comme les écoles. La façon dont nous nous déplacerons jouera un rôle primordial : la mobilité douce et le transport en public seront aussi importants que la préservation et la création d‘espaces verts et de lieux de rencontre, ceci en vue de dynamiser les relations entre les habitants. Le défi majeur sera de réussir à créer ces synergies et ces interactions sociales si importantes.

Dans la ville de demain la solidarité entre les habitants et la mixité sociale seront des éléments clé pour garantir la cohésion sociale. Dans ce contexte, citons les jardins partagés qui sont un exemple de réussite dans la création d’un espace commun, durable et solidaire.

Quelle a été l’évolution du logement ces dernières décennies ?

Ces dernières décennies, le logement s’est surtout adapté aux contraintes et défis énergétiques. Grâce aux nouvelles technologies, le logement est devenu plus durable et il est un élément important dans la lutte contre la pauvreté énergétique.
Il reste toutefois encore des efforts à faire pour réussir à adapter les typologies de logements à l’évolution des types de ménage et les modes de vie contemporains.

Quelle place le logement occupera-t-il dans la ville du futur et à quoi ressemblera-t-il ?

Le logement doit reconquérir les centres villes et contribuer ainsi à la mixité sociale et au développement socio-économique. La cohésion sociale est un des grands défis de notre société. Le logement du futur devra donc tenir compte des changements sociaux et énergétiques, il devra être modulable et adaptable aux différents modes de vie et aux différents types de ménage. Le logement du futur sera durable et intégré de manière optimale dans un système de services complémentaires et d’économie circulaire.

Qu’est-ce que l’évolution des modes d’habitation implique en termes d’innovation ?

L’évolution des modes d’habitation nécessite un esprit innovateur en matière d’utilisation d’espace. Le logement doit s’adapter d’avantage aux différentes typologies de ménage. Les logements doivent offrir une grande flexibilité pour qu’ils puissent être adaptés et configurés aux besoins des ménages. Les unités de logements doivent être plus variées et s’adresser aussi bien aux familles monoparentales qu’aux personnes âgées ou aux personnes vivant en collocation.
L’évolution des modes de construction permet la production d’énergie par des bâtiments à énergie positive et un meilleur recyclage en fin de vie.

Quel rôle joue votre ministère dans cette évolution ? Comment l’accompagne-t-il ?

Le rôle du ministère du Logement est de donner de nouvelles impulsions aux particuliers et aux professionnels. Avec le projet Klimabank an nohaltegt Wunnen par exemple, le ministère du Logement a joué un rôle prédominant pour la promotion de la construction durable, l’assainissement énergétique durable et la mise en valeur des énergies renouvelables dans le domaine du logement.

Propos recueillis par Mélanie Trélat

En 2050, tous les bâtiments seront nearly zero energy
En 2050, tous les bâtiments seront nearly zero energy

C’est entériné : à partir de 2021, toutes les nouvelles constructions seront à consommation quasi nulle en Europe. La prochaine étape concerne la rénovation des bâtiments existants. Qu’elle soit flambant neuve ou vieille de plusieurs décennies, la maison de demain ne consommera pas d’énergie ! Rencontre avec l’initiateur de l’actuelle directive européenne sur l’efficacité énergétique des bâtiments, l’eurodéputé Claude Turmes.

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« 45 % de l’énergie consommée est liée aux bâtiments. Il n’y a donc aucun espoir de faire avancer les choses sur le plan du changement climatique si on ne bouge pas dans le bon sens au niveau des bâtiments », annonce Claude Turmes, l’eurodéputé luxembourgeois à l’origine de la directive sur l’efficacité énergétique et un acteur majeur de la directive sur la performance énergétique des bâtiments selon laquelle tous les bâtiments construits en Europe à partir de 2021 doivent être nearly zero energy.
Sur ce point, dont il se dit très fier, il reste également humble : « la politique est bonne quand elle écoute ce qui se dit dans la société. La responsabilité politique, c’est reconnaître les problèmes comme le changement climatique et tracer une orientation vers laquelle on veut aller. Je n’ai fait que transformer l’essai lancé par le Dr. Wolfgang Feist du Passivhaus Institut en 1996, lorsqu’il a inauguré la 1re maison passive d’Europe à Darmstadt. Pour l’anecdote, lors de la fête des 20 ans du Passivhaus Institut à laquelle j’étais invité, 1.100 personnes étaient présentes, parmi lesquelles 300 Chinois. On peut donc dire que le Dr. Feist et son équipe du Passivhaus Institut ont fait plus pour le changement climatique que n’importe quel politique européen en exportant le concept des maisons zéro énergie et énergie + non seulement en Asie, mais aussi en Amérique et au Maghreb ». Rappelons à ce propos que, dans le cadre de la COP22 à Marrakech, une antenne marocaine du Passivhaus Institut sera inaugurée.

Vingt ans après la construction de la 1re maison passive qui sera le standard dès 2017 au Luxembourg, l’objectif de l’Union européenne est que l’ensemble du bâti atteigne le standard nearly zero energy d’ici 2050, bâtiments neufs et existants compris. Au vu de la durée de vie moyenne d’un immeuble, on estime que les 2/3 des bâtiments de 2050 sont déjà construits aujourd’hui. Ce qui signifie que se doter d’un parc de bâtiments neufs passifs offre certes un certain potentiel, mais que cela ne peut suffire à endiguer la surconsommation énergétique.

« Pour remplir nos objectifs, il faudrait atteindre un taux de rénovation de 3 % des bâtiments par an en Europe. Or, nous ne sommes entre 1,2 et 1,4 % », constate encore Claude Turmes. C’est pourquoi il se bat pour des budgets soient débloqués sur deux points cruciaux à son sens : la communication et la logistique. La solution, selon lui, n’est pas tant de légiférer ou de subventionner que de convaincre les gens de rénover davantage. Cela passe par le fait de leur faire entendre le message que rénover est synonyme de confort, mais aussi et surtout par le fait de trouver des solutions innovantes pour rendre les travaux rénovation moins contraignants. Et pour cela, il faut, explique-t-il « s’investir davantage dans un dialogue avec les chercheurs, les industriels et les artisans pour mieux comprendre où des gains peuvent être réalisés sur le plan logistique. L’innovation est également nécessaire pour rendre la rénovation durable grâce à des matériaux de qualité qui peuvent être recyclés. Qu’il s’agisse de nouveaux bâtiments ou de rénovation, l’immeuble du futur sera déconstruit à la fin de sa vie, et non plus démoli. Le lien avec l’économie circulaire est ici évident ».

Pour démontrer l’intérêt des synergies entre l’industrie, les constructeurs, la recherche mais aussi le secteur public, Claude Turmes s’appuie sur l’exemple du projet EnergySprong lancé il y a 6 ans aux Pays-Bas, projet qui vise la réhabilitation de plus de 11.000 logements sociaux. « Le pays a débloqué plusieurs millions d’euros pour développer un concept de préfabrication basée sur du design 3D. Ce concept permet de transformer en quelques jours seulement une passoire énergétique en une maison nearly zero energy sans déloger les habitants et ce, en posant directement une nouvelle toiture avec panneaux solaires intégrés sur l’ancienne toiture au moyen d’une grue, en venant plaquer des panneaux isolants dans lesquels les nouvelles menuiseries sont déjà installées sur les façades existantes et en changeant la cuisine ou la salle de bain », précise l’eurodéputé. L’idée est donc de mettre en place une sorte de bouclier tout autour de la maison. Le coût est estimé à 70.000 euros par maison pour les 1.000 premières maisons et il devrait baisser proportionnellement à l’augmentation du nombre de maisons ainsi rénovées.

Photo : Claude Turmes - source : Jwh at Wikipedia Luxembourg

Mélanie Trélat

Cités ouvrières, comment faire du neuf avec du vieux ?
Cités ouvrières, comment faire du neuf avec du vieux ?

Stigmate déchu de l’époque sidérurgique et pourtant partie intégrante du patrimoine historique et architectural de la Grande Région, la cité ouvrière présente un potentiel non négligeable dans le cadre d’éco-rénovations. De quoi susciter l’intérêt du GEIE EcoTransFaire qui planche sur la question.

Interview de son gérant, Bernard Lahure.

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Où réside le potentiel des maisons de cité ouvrière ?

Ces maisons répondaient dès leur construction, avant les années 1960, à un besoin de densification de l’habitat, qui est toujours d’actualité. Elles sont conçues selon un modèle reproductible d’unités qu’on accole les unes aux autres et, en ce sens, elles correspondent bien aux contraintes urbanistiques actuelles.

Autre avantage : elles possèdent souvent un jardin au fond duquel se trouve une ouverture, ce qui d’une part favorise les échanges familiaux et inter-familiaux, et d’autre part permet de cultiver localement des fruits et légumes.

Enfin, ces bâtiments sont constitués le plus souvent des déchets de l’usine, de briques de laitier notamment, ou du calcaire trouvé dans les jardins. Ils ont donc consommé peu de CO2 lors de leur construction et ont déjà amorti leur énergie grise.

Quels sont, en revanche, leurs inconvénients ?

Elles ne correspondent plus aux besoins en termes d’espaces et d’agencement - ces maisons sont souvent petites, moins de 100 m2, et le besoin en nombre de m2 par personne est aujourd’hui plus élevé qu’il ne l’était il y a quelques décennies -, mais également en termes de luminosité : la tendance actuelle est aux grandes surfaces vitrées qui apportent à la fois lumière et chaleur, alors que les maisons de cité sont souvent pourvues de petites fenêtres.

De plus, cet habitat était à l’origine chauffé par l’industrie locale, soit à travers un réseau de chaleur lorsque que l’usine était vraiment très proche, soit par la fourniture du coke nécessaire au chauffage. On ne regardait donc pas à la dépense énergétique car il y avait de quoi se chauffer tant qu’on en voulait. Il y a donc un défaut de réponse de ces maisons quant à la consommation énergétique.

Pourquoi alors ne pas raser ces maisons pour en construire de nouvelles ?

Le nombre de maisons ouvrières a été évalué à 7 millions en Europe du Nord et, même si beaucoup ont pris le parti de détruire pour reconstruire - notamment aux Pays-Bas et en Belgique-, on ne peut pas toutes les raser car le nombre de carrières qui reprennent les déchets de construction est limité. La déconstruction est donc amenée à s’essouffler. C’est pourquoi il est essentiel de préserver et de réhabiliter ce type de bâtiments.

À quels obstacles êtes-vous confrontés dans le cadre de ces projets d’éco-rénovation ?

Nous devons faire face à la difficulté de convaincre les habitants de faire des travaux dans leur habitation, et de le faire ensemble, car la rénovation, pour être sensée, doit être opérée sur une bande de maisons. Il est d’autant plus difficile de les convaincre que, plus la maison remise à neuf est petite, plus les frais engagés seront difficilement amortissables avec les économies d’énergie qui pourront être réalisées dans un second temps. Il faut savoir que la population concernée est composée d’une forte mixité en termes d’intérêt pour l’action de rénover, d’âge et de revenu. Ces population, personnes âgées vivent depuis longtemps dans ces maisons sans avoir eu la possibilité de les rénover ni l’envie, ou des primo-accédants qui ne se lancent pas dans d’importants travaux car ils épargnent en attendant de pouvoir acheter plus grand.

La seule solution est alors de modéliser un système technique constructif permettant de faire baisser les coûts de rénovation, couplé à une approche sociale.

Quelquefois engager une rénovation peut également s’avérer complexe du fait que les matériaux qui composent la maison étaient issus de l’industrie locale (laitier de hauts-fourneaux, briques fabriquées sur place…), avec une forte hétérogénéité et des contraintes environnementales accrue lors des opérations de rénovation.

Comment financer ces travaux puisqu’ils ne sont pas amortis par les économies d’énergie ?

En réintroduisant dans le système économique l’énergie grise consommée, la densification de l’habitat, le non-stockage en décharge… Mais tout cela est compliqué car nous devons nous adresser à plusieurs acteurs différents qui ne travaillent pas de manière transversale. La question est de savoir qui met combien dans la corbeille pour financer cette rénovation.

Quelles sont les retombées économiques de tels projets ?

À l’inverse de la démarche mercantile de certaines grosses firmes qui sont à l’origine de l’ubérisation de la rénovation, notre approche est d’être au service des citoyens, ce qui implique de travailler avec des acteurs de terrain de manière à pouvoir faire évoluer les procédés et à créer un climat de confiance, de mobiliser les entreprises locales, d’utiliser des matériaux locaux et même de se financer en partie localement.

Où et quand seront menés les 1er projets ?

Deux chantiers démonstratifs seront réalisés à Differdange au Luxembourg et à Saulnes en France, deux communes qui ont une certaine proximité géographique donc une culture commune mais des différences constructives qui vont nous permettre de faire des propositions différentes. Dans le cadre de ce projet, nous travaillerons dans un second temps avec les communes de Chiny en Belgique et de Birkenfeld en Allemagne. Le planning dépend de l’attribution ou non de fonds européens. Le dossier a été déposé, il est en cours d’analyse, l’acceptation nous sera confirmée ou infirmée courant octobre et s’il est retenu, les travaux pourront débuter début 2018.

Nous préparons également un autre projet sur Dudelange et Virton.

Le GEIE que vous dirigez se définit comme un « pôle de coopération transfrontalier en éco-rénovation et éco-construction ». Travailler de manière transfrontalière, n’est-ce pas se donner des contraintes supplémentaires là où il y en déjà assez ?

C’est la contrainte qui fait avancer l’Homme et, d’ailleurs, nous voyons cet aspect transfrontalier comme une richesse avant de le voir comme une contrainte. Les entreprises échangent ici sur tous les territoires et chaque pays à ses thématiques de prédilection : la Belgique est plus avancée que ses voisins dans le domaine des éco-matériaux, le Luxembourg sur les groupements d’entreprises, la France sur les questions d’insertion sociale et de travail ainsi que les techniques de massification de la rénovation, l’Allemagne est quant à elle très efficiente en économie locale et impact environnemental.

Travailler de manière transfrontalière, c’est combiner tous ces avantages. Je viens du monde scientifique et, en sciences, on observe que c’est toujours sur les bords, à la frontière, que se créent les réactions. Nous sommes transfrontaliers, c’est une de nos caractéristiques et nous ne pouvons pas vivre autrement.

Crédit photo : Differdange - Wikimedia commons - martinroell

Mélanie Trélat

L'habitat de demain selon Betic
L’habitat de demain selon Betic

L’énergie reste au cœur des réflexions menées sur l’habitat de demain. Mais c’est l’énergie sous plusieurs facettes qu’il faut considérer : la consommation des habitations se réduit de plus en plus mais l’augmentation de la production d’autres énergies vient contrebalancer ces résultats. Le choix des matériaux, les chemins de transport, le recyclage des constructions… Voilà des énergies cachées, appelées énergies grises, qui doivent être maîtrisées et pour lesquelles il est nécessaire et important de considérer le cycle de vie complet.

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Dans notre métier d’ingénieur-conseil de la construction, la législation sur la performance énergétique nous pousse à dépasser toujours plus nos limites en imaginant des solutions qui répondent aux critères en vigueur… C’est une bonne chose mais cela peut parfois entraîner des dérives. Prévoir une isolation de plusieurs dizaines de centimètres est-il vraiment pertinent si l’on considère la quantité d’énergie nécessaire lors du cycle de vie du matériau ? Les habitations devront donc plus que jamais prendre en compte leur production d’énergie grise. Cela ne doit cependant pas nous empêcher de poursuivre nos efforts pour trouver la façon la plus économique et la plus écologique pour réduire les consommations de chaque bâtiment. Pensons entre autres aux nombreux bâtiments à assainir énergétiquement et pour lesquels les moyens d’isolation actuels se heurtent à des contraintes techniques et architecturales.

L’habitat partagé au service de l’environnement

Notre mode de vie a beaucoup évolué. Lorsque l’on observe les habitations au Grand-Duché de Luxembourg et que l’on considère le prix du foncier, on constate que les maisons individuelles sont construites sur des terrains de plus en plus petits… Bien entendu, je suis le premier à accorder beaucoup d’importance à la notion de propriété individuelle, mais nous pourrions facilement imaginer des habitations individuelles avec des parties communes et du matériel partagé : garage, jardin, dépendances pour stocker du matériel de bricolage, de jardinage et autres équipements à faible usage. Un jardin partagé de 30 ares ne serait-il pas plus agréable qu’une zone réduite de 2 ares, favorisant de fait la vie communautaire et la communication ? Nous réduirions ainsi la production d’énergie grise de nos habitations : un seul cabanon de bricolage, une seule tondeuse, deux fois moins de clôtures… Ces dernières années, on voit ce mode de vie se développer, notamment dans les pays nordiques : Suède, Danemark, Norvège, Finlande…

Dans la même logique, il fut une époque où plusieurs générations vivaient sous le même toit. Même si je ne me l’imagine pas personnellement aujourd’hui, n’est-ce pas une piste intéressante à considérer ?

La mobilité jouera aussi un rôle important sur le fonctionnement global de la société du futur. Seule une réflexion commune sur les lieux de travail, les lieux d’habitation, de loisir et de services, les déplacements et les moyens de communication entre ces lieux permettra de construire l’habitat adapté. Analyser un seul de ces axes ne serait qu’ignorer les besoins et les réalités concrètes.

Appréhender sa consommation d’énergie autrement

Réduire notre consommation pour préserver l’environnement n’est plus suffisant aujourd’hui. Nous devons nous positionner en tant que prosumer (producteur et consommateur) et penser les habitations de façon à les rendre pleinement autonomes. Panneaux solaires, photovoltaïques, pompes à chaleur, systèmes d’isolation qui permettent de les rendre de moins en moins « énergivores »… J’imagine très bien d’ici quelques temps que beaucoup d’habitations produiront plus d’énergie que leurs besoins et qu’elles pourront fournir leur surplus de production à une maison voisine. La mise en place de réseaux de communication et de transfert de données performants et intelligents (smart grids) sera alors indispensable.

Miser sur la recherche et l’innovation

Nous avons tous conscience que la problématique liée au stockage de l’énergie est également un enjeu essentiel. Beaucoup se veulent pessimistes sur ce sujet, mais si nous nous projetons en 2050, nous devrions totalement l’intégrer à nos réflexions. Quand on observe les évolutions techniques de ces dernières décennies, rien ne laissait présager les nombreuses avancées techniques dans ce domaine : éoliennes offshore, hydroliennes en phases de test, études menées sur l’énergie de fusion… Soyons optimistes et misons sur le fait que l’habitation de demain stockera l’énergie qu’elle produit. En matière de recherche et d’innovation, je suis positif et je ne peux m’empêcher de penser que c’est en visant les étoiles qu’on atteint la lune.

La technique au service de l’environnement

Un axe primordial est la technique. Elle fait partie intégrante de nos vies et de la philosophie Betic : créer une technologie simple et performante qui permette de rendre une maison intelligente, des plus autonomes, en restant simple d’utilisation. Je ne crois pas que l’intelligence d’une maison doit se substituer à celle des habitants, sans quoi on rentre dans un cercle vicieux, mais chez Betic, nous proposons des solutions qui permettent de s’affranchir des dysfonctionnements techniques pouvant surgir d’une mauvaise utilisation.

Un exemple tout simple : une programmation erronée d’un thermostat « trop intelligent » conduit à une surconsommation qui aurait pu être évitée. Nos locaux sont pensés pour éviter tous ces types de dysfonctionnements. Notre construction basse énergie est équipée de systèmes domotiques comme les stores qui se règlent automatiquement suivant l’orientation du soleil et permettent d’éviter un réchauffement des bureaux. Une bonne isolation et une ventilation naturelle nous permettent de ne pas être assujettis à un système d’air conditionné. L’habitation de demain devra donc faire la part belle aux systèmes intelligents mais surtout simples d’utilisation.

À mes yeux, l’habitat de demain sera donc intelligent mais simple d’utilisation. Sa production d’énergie lui permettra de le rendre autonome et de fournir de l’électricité à d’autres infrastructures. Il comprendra davantage d’espaces partagés, tout en garantissant l’intimité des habitants.

Gilles Christnach, administrateur délégué, Betic Ingénieurs-Conseils

CLK, une maison-témoin entièrement « green »
CLK, une maison-témoin entièrement « green »

Dans quelques mois, CLK ouvrira au public les portes d’une nouvelle maison-témoin, conçue des boiseries aux pavés avec une vision entièrement « green ». Exemple de ce que pourra être l’habitat de demain avec Bruno Da Mota, conducteur de travaux.

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Avril 2017. C’est la date à laquelle il sera possible aux futurs propriétaires intéressés de visiter la nouvelle maison-témoin de CLK située à Grevels.

Et qu’a-t-elle de spécial, cette maison ? « Tout d’abord, il s’agit d’une maison haut de gamme, mais surtout, lors de sa conception, nous avons été particulièrement attentifs à l’aspect écologique. Il s’agit, bien entendu, d’une maison triple A, un standard que nous avons adopté bien avant d’y être contraints par la législation. Mais, en plus des équipements incontournables dans ce type de bâtiments - pompe à chaleur air/eau, ventilation mécanique contrôlée avec récupération de chaleur -, nous y avons intégré de nombreuses technologies qui font qu’elle pourrait théoriquement être autosuffisante en énergie voire active (ndlr : productrice d’énergie), à savoir des panneaux solaires photovoltaïques, des panneaux solaires pour la production d’eau chaude sanitaire et une citerne de récupération de l’eau de pluie », explique Bruno Da Mota.

Autre spécificité de cette maison : elle sera dotée d’un « Greng Hausnummer », une distinction mise en place par le ministère du Logement luxembourgeois pour encourager la construction de tels bâtiments. Cette démarche va très loin et s’applique aussi bien à l’isolation qu’aux techniques spéciales et aux matériaux. Son obtention est soumise à des contraintes très strictes reprises dans une check-list. Par exemple : les châssis, portes et autres éléments en bois doivent être en bois local ou certifié FSC, l’escalier principal doit être en bois massif, des peintures spécifiques à base de silicate ou de caséine doivent être utilisées pour le crépi ; le jardin, les toilettes et le lave-linge doivent être alimentés par de l’eau de pluie (ce qui oblige à poser une cuve de récupération ainsi qu’un système de purification) ; 80 % de la surface extérieure consolidée doit permettre la récupération d’eau ; l’électricité consommée doit être intégralement verte ; un système d’interruption du courant doit être installé dans les chambres à coucher afin qu’aucun appareil ne reste en veille ; etc. « Pour répondre à cette exigence et même la dépasser, nous avons choisi d’équiper les interrupteurs et capteurs répartis dans l’ensemble de la maison d’un système de domotique sans fil qui fonctionne sans courant, uniquement au moyen de l’énergie générée par les mouvements qui se produisent à l’intérieur de l’interrupteur », précise le conducteur de travaux.

« Si de nombreux points de la check-list font partie de notre cahier des charges habituel, pour d’autres, nous devons adopter une approche et une façon de travailler différentes. Le fait que certains critères échappent à notre contrôle peut compliquer les choses. Par exemple, un des points de la check-list concerne la proximité des transports publics, ce sur quoi nous n’avons aucune emprise en tant que constructeurs », ajoute-t-il.

Les données relatives à la température et à la luminosité seront relevées par des capteurs, tout comme la consommation générale de la maison et la consommation spécifique de certains appareils, ce qui permettra à CLK d’établir des statistiques et de déterminer où se trouve le potentiel d’économie. Une expérience similaire avait déjà été menée il y a quelques années, en collaboration avec l’Université de Liège, dans une maison passive construite pour la directrice technique de l’entreprise. Pendant plus d’un an, la manière dont une maison passive « vit » en situation réelle a été étudiée, pour déterminer l’apport d’énergie nécessaire en fonction des moments de la journée et comment mieux concevoir ce type de maison en fonction de l’utilisation quotidienne qui en est faite.

À travers sa nouvelle maison-témoin, l’entreprise CLK démontre qu’elle est en mesure de mener une démarche qui est de bout en bout éco-friendly, une approche qui peut bien évidemment aussi être appliquée aux projets de ses clients.

Dans les cartons également, la construction de nouveaux bureaux dont la majorité des matériaux employés seront certifiés Cradle to Cradle, donc entièrement composés de matériaux recyclés et entièrement recyclables. Le début des travaux est imminent et il s’agit, là encore, d’une expérience qui profitera ensuite aux clients de CLK. « Appliquer cette certification aux projets de nos clients est la prochaine étape. Si nous voulons réduire les émissions de CO2 de 40 % d’ici 2030 et si le Luxembourg présente le Cradle to Cradle comme une contrainte d’ici une dizaine d’années, nous serons déjà dans le train », conclut Bruno Da Mota.

Mélanie Trélat

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La paille, un matériau de construction sain et durable
La paille, un matériau de construction sain et durable

À l’heure où les pouvoirs publics imposent le standard de la maison passive, pourquoi ne pas aller plus loin encore ? Par exemple, en construisant une maison en paille.

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En effet, quelle cohérence y a-t-il à construire une maison passive en béton, très énergivore, isolée en polystyrène ou polyuréthane issus du pétrole ? Il est possible d’atteindre le même standard avec des matériaux naturels qui ont capté du carbone durant leur croissance.

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Au Luxembourg, la société Holzwunnen est en train de concevoir une maison-témoin en ossature bois et isolation paille en collaboration avec l’entreprise belge Paille-Tech pour la partie ossature.

L’idée de cette maison est de démontrer que l’on peut réaliser une telle construction avec un haut niveau de qualité, tant dans les matériaux que dans l’exécution. Ce bâtiment, situé à Kaundorf, sera construit avec une structure en bois, une isolation en paille, des finitions intérieures en argile, bois et Fermacel, un parement extérieur en crépi sur fibre de bois, des châssis en bois-alu et une isolation sous dalle en verre cellulaire. Le constructeur prévoit de limiter l’énergie grise de cette maison à son strict minimum en y mettant en œuvre autant que faire se peut des matériaux écologiques.

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Le travail de Paille-Tech comporte une partie de bureau d’études, puis une phase de préfabrication en atelier. Holzwunnen, ayant déjà l’expertise dans les maisons à ossature bois, garantit un montage très rapide sur site : la construction d’une maison se discute souvent des mois avec le client et son architecte, se construit en 3-4 semaines en atelier et est montée en moins de 5 jours.
Les avantages de la construction en paille sont multiples et peuvent être résumés ainsi :

Isolation
Les murs en ossature bois remplis de ballots de paille de 46 cm de large permettent d’atteindre les coefficients d’isolation des maisons passives (U=0,12W/m2K).

Inertie thermique et hygrométrie
Les enduits d’argile peuvent être directement appliqués sur la paille, ce qui évite de multiplier les couches de panneaux divers. De 3 à 4 cm en moyenne, ils apportent une inertie importante au bâtiment. En outre, la terre crue, qui est un fabuleux régulateur hygrométrique, est garante d’un confort incomparable : pas de buée sur les fenêtres ou les miroirs, pas de gorge irritée par un air trop sec.

Santé
Une jolie maison sans produits chimiques, sans colles et sans peintures, c’est désormais possible et c’est bien meilleur pour la santé de ses occupants.

Résistance au feu et longévité
Contrairement à certains a priori, la paille en ballot résiste très bien aux incendies, qu’elle n’alimente pas. Elle garde son pouvoir isolant même confrontée à de très hautes températures, d’autant plus lorsqu’elle est enduite d’argile. Les pompiers français et allemands ont fait des expériences édifiantes, valables pour toute l’Europe. La longévité des ballots de paille dans la construction est attestée par leur état impeccable dans des réalisations vieilles de plus d’un siècle. Et les rongeurs ne s’y plaisent pas : trop compact et sans valeur nutritive.

Crédit photo Lefrancq
Crédit photo Lefrancq - 1

Produits locaux abondants, non transformés et recyclables
À l’heure de l’économie circulaire, que peut-on rêver de mieux pour construire des bâtiments ? Aucune pollution à l’entrée, aucune à la sortie, tout peut retourner à la terre en cas de besoin.

CO2
Le bois et la paille ont stocké du carbone durant leur croissance. Contrairement aux autres techniques, l’isolation en paille constitue un puits de carbone. On estime qu’il faut 10 ans pour que la consommation de carbone des habitants d’une telle maison pour se chauffer ne dépasse la quantité stockée dans les murs. Sans compter que les murs sont sans ciment ni terre cuite, gros consommateurs d’énergie.
De nombreux bâtiments publics ont été édifiés un peu partout en Europe et ce, jusqu’à 8 étages ! La paille est donc définitivement un matériau d’avenir dans la perspective d’un habitat sain et durable pour les générations futures !

Infogreen avec Julien Lefrancq / Paille-Tech

Les maisons peuvent désormais stocker de l'énergie !
Les maisons peuvent désormais stocker de l’énergie !

Qui dit habitat de demain, dit habitat peu gourmand en énergie, voire producteur d’énergie. Tesla répond aujourd’hui à la problématique du stockage de l’électricité produite via des panneaux solaires avec son Powerwall, distribué au Luxembourg par Winwatt.

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À quelques semaines de la mise en œuvre au Luxembourg de la législation imposant que tous les bâtiments d’habitation soient construits selon le standard Near Zero Energy, on ne peut pas parler d’habitat sans parler de performance énergétique. La maison de demain est une maison qui ne consomme pas d’énergie, voire qui en produit, et qui le fait, dans la mesure du possible, à base de sources renouvelables. Or, les panneaux solaires et éoliennes de toit ont leurs limites. Une d’entre elles étant que l’électricité ainsi produite est difficilement stockable.

C’est sans compter sur Tesla et sur son Powerwall, présenté en avril 2015 à Los Angeles et distribué au Luxembourg par notre partenaire WinWatt.

Qu’est-ce que le Powerwall ? C’est une batterie domestique (lithium-ion…) connectée à des panneaux solaires. Elle se recharge pendant la journée grâce à l’électricité générée par les panneaux solaires et la restitue après le coucher du soleil pour alimenter la maison. Le tout de manière totalement automatisée.

Les avantages sont évidents. En comblant le fossé entre le pic solaire et le pic de la demande électrique, le système permet d’optimiser l’utilisation des panneaux solaires - donc le recours aux énergies renouvelables -, voire de rendre la maison totalement autonome. Il permet également de stocker l’électricité pendant les heures creuses et de la consommer pendant les heures pleines, ce qui est économiquement intéressant. De plus, le système bascule automatiquement vers l’alimentation sur batterie en cas de panne de courant, assurant ainsi la sécurité de l’approvisionnement énergétique.

Le Powerwall a une capacité de stockage de 6,4 kWh, ce qui est suffisant pour couvrir la consommation en énergie de la plupart des maisons en soirée. À noter que plusieurs batteries peuvent être installées ensemble pour des maisons ayant des besoins énergétiques plus élevés. À noter également que le Powerwall est facile à installer et ne nécessite aucun entretien. Qui plus est, les prix se démocratisent.

Mélanie Trélat

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Bientôt un nouveau quartier à Olm 
Bientôt un nouveau quartier à Olm 

En tant que promoteur public, la SNHBM a vocation à montrer l’exemple à travers ses projets. C’est le cas avec un quartier d’un nouveau genre qui sortira de terre d’ici 2 ans à l’Ouest de la capitale. Interview du directeur de la SNHBM, Guy Entringer.

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Guy Entringer, directeur de la SNHBM
Guy Entringer, directeur de la SNHBM - 1

Comme son nom l’indique, la Société nationale des habitations à bon marché s’adresse à des acheteurs dont la priorité est de se loger à un prix abordable. Ceci toutefois n’exclut pas un espace suffisant -les logements de la SNHBM sont en général plus grands que la moyenne-, des matériaux de qualité - elle n’a, par exemple, jamais mis en œuvre de fenêtres en PVC -, et des constructions respectueuses de l’environnement. Dans ce domaine, le promoteur public est toujours à la pointe du progrès et a même quelques années d’avance sur la législation, puisqu’il construit en classe énergétique AAA depuis 2015 déjà. « Nous ne recherchons pas le moindre prix à tout prix », précise le directeur, « mais plutôt un certain équilibre entre prix, qualité et écologie ».

Pas encore de bâtiments à énergie positive dans les cartons mais, en revanche, un ambitieux projet qui s’inscrit dans les objectifs de développement de la SNHBM, à savoir passer de la construction de 80 logements par an en 2015 à 250 logements par an à partir de cette année.

Le projet dont il est question se situera sur le territoire de la commune de Kehlen, plus précisément dans la localité d’Olm, et s’étendra sur 27 hectares. 800 logements y seront créés dont la moitié seront des maisons unifamiliales et l’autre moitié des appartements. Un véritable village, donc, qui, en plus des logements, offrira une école, une maison relais, une crèche, des commerces et des lieux de restauration.

L’accent sera mis sur la mobilité douce avec des zones de parking centralisées à différents endroits du quartier et une excellente connexion avec la ville via les transports en commun. « Nous souhaitons que les arrêts de bus soient plus faciles à atteindre que les parkings afin de dissuader les futurs habitants de prendre leur voiture et de les encourager à utiliser plutôt les transports publics », explique le directeur de la SNHBM. Le carsharing de véhicules électriques est à l’étude.

Une autre idée novatrice qui sera exploitée dans le cadre de ce projet : celle de partager différents objets ou outils. « Une étude a démontré que chacun possède chez lui une quarantaine d’articles dont il ne se sert que de manière très occasionnelle, par exemple : un Kärcher ou un barbecue. L’idée d’un investisseur serait de créer une structure qui mettrait à disposition ce type d’équipements moyennant un prix de location modique », précise Guy Entringer.

Les terrains seront assez réduits (environ 2 ares) mais les habitants et les usagers du quartier seront invités à se rencontrer et à échanger dans les lieux publics. Ainsi, plusieurs placettes seront créées pour se retrouver à l’extérieur lors des beaux jours, ainsi qu’une « maison pour tous », dont le fonctionnement reste encore à définir.

Au niveau constructif, une attention toute particulière sera portée sur le fait de réduire les gravats au maximum en ne creusant ni caves ni parkings souterrains et en faisant en sorte que les bâtiments épousent les courbes du terrain. Concernant les matériaux qui seront utilisés, aucune décision n’a encore été prise et le directeur de la SNHBM reste prudent : « On entend beaucoup parler d’économie circulaire et de cycle de vie des matériaux. Le principe est bon, sans aucun doute, mais, dans la pratique, on manque encore de recul. Nous ne voulons pas prendre de risques car les gens n’achètent qu’une fois dans leur vie et leur logement n’est pas un laboratoire. On ne doit pas être absolument novateur ni l’être forcément sur tous les points. Ce qui est sûr, c’est que 100 unités sortiront de terre dès la première année et c’est déjà un grand défi ».

Le PAP sera introduit dans les jours qui viennent et les travaux devraient démarrer dans 2 ans. « Le projet n’en est qu’à ses débuts et nous sommes ouverts à toute autre idée novatrice », conclut Guy Entringer.

Photo : siège de la SNHBM

Mélanie Trélat

Agence immobilière sociale, remettre le pied à l'étrier
Agence immobilière sociale, remettre le pied à l’étrier

L’Agence immobilière sociale transforme des maisons ou appartements inoccupés en logements sociaux pour proposer, sans délais d’attente interminables, des toits à des familles défavorisées et leur permettre de rebondir dans la vie. Interview de Gilles Hempel, directeur.

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Gilles Hempel, directeur de l'AIS
Gilles Hempel, directeur de l’AIS - 1

Le modèle proposé par l’AIS est simple. Il se base sur deux piliers : d’un côté une famille qui a des difficultés à se loger, de l’autre une personne qui possède un bien immobilier dont elle n’a pas l’usage dans l’immédiat. L’AIS fait le pont entre les deux parties. Plus concrètement, l’AIS prend en bail auprès d’un propriétaire privé un logement dont elle garantit le paiement régulier du loyer, le bon état et la récupération en cas de besoin. En contrepartie de quoi, le propriétaire consent à louer son bien à un prix inférieur à celui du marché, un prix qui soit accessible à une clientèle défavorisée.

Les quelque 340 logements qui composent le parc immobilier de l’AIS sont ainsi mis à disposition des bénéficiaires pour une durée de 3 ans (qui peut être assouplie en cas de besoin), qui paient en échange une indemnité d’occupation plafonnée à un tiers de leurs revenus.

Qui sont ces propriétaires qui acceptent de perdre de l’argent par rapport au marché privé ? Et pourquoi ? « Ce ne sont pas des propriétaires classiques, des investisseurs immobiliers dont le but est le rendement », indique Gilles Hempel, « Il s’agit, par exemple, de personnes âgées qui ont quitté leur maison pour vivre en maison de retraite, de personnes qui ont hérité d’une maison, souhaitent la transmettre à leurs enfants dans quelques années, veulent qu’elle reste habitée en attendant et qu’elle se libère dès qu’ils en auront besoin. Il peut également s’agir de propriétaires qui ont fait de mauvaises expériences sur le 1er marché ou d’autres qui n’ont simplement pas envie de s’aventurer sur ce marché car mettre son appartement en location par la voie traditionnelle s’apparente à avoir une activité commerciale et toute activité commerciale est liée à du travail et à des risques que chacun n’est pas forcément prêt à endosser ». L’avantage de l’AIS est d’offrir à ces propriétaires un package « casco » : ils ne doivent s’occuper de rien et peuvent récupérer leur bien dès qu’ils le demandent, sans que celui-ci ait subi la moindre dégradation.

De plus, à partir de 2017, les propriétaires qui collaborent avec l’AIS bénéficieront d’avantages fiscaux, à savoir une exonération de 50 % des impôts sur les recettes locatives. Ce qui peut déjà compenser une partie du manque à gagner par rapport au marché privé.

Quant aux logements, ils doivent répondre à deux critères de sélection : un accès facile aux réseaux de transports en commun (afin de ne pas isoler des personnes qui, souvent, n’ont pas de voiture) et un standard énergétique raisonnable (afin de ne pas noyer des foyers déjà modestes sous les charges). Au besoin, des travaux de rénovation énergétique peuvent être préconisés. Ils sont à charge du propriétaire mais peuvent être pré-financés par l’AIS à travers un système de déduction des frais de rénovation du loyer.

Côté locataires, « ce sont des gens exclus du 1er marché immobilier qui sont en situation précaire, qui vivent avec un revenu de remplacement comme le RMG ou qui ont un travail à plein temps, mais en interim ou en CDD. Aujourd’hui, sans CDI, vous n’avez aucune chance d’avoir accès à un appartement. Nous comptons, parmi nos locataires, de nombreux foyers monoparentaux, souvent des femmes qui se retrouvent seules avec leurs enfants après une séparation et qui n’ont pas travaillé depuis plusieurs années parce qu’elles se sont consacrées à leur éducation. Elles ne trouvent pas de patron qui les engage tout de suite, donc pas de propriétaire qui accepte de les loger », explique le directeur.

Pour lutter contre cette discrimination sur le marché immobilier et permettre aux personnes en difficulté de rebondir, l’AIS les aide, non seulement en leur fournissant un logement, mais aussi en élaborant un projet social avec eux et en les accompagnant dans leur recherche d’un emploi stable. « Nous analysons les raisons pour lesquelles ces gens sont exclus et nous leur proposons des pistes pour se réintégrer dans la société : ils ont parfois besoin de suivre une formation, d’être suivi psychologiquement ou de passer leur permis de conduire, par exemple. Nous les obligeons également à constituer une épargne avec l’argent économisé grâce au faible loyer qu’ils paient afin d’être en mesure de payer une caution ou d’avoir un apport pour un prêt immobilier une fois leur CDI en poche. 10 % des gens qui nous quittent le font pour une acquisition », souligne Gilles Hempel. La sortie du bénéficiaire est donc préparée dès le jour où il signe son contrat de location et elle est encadrée par un travailleur social de l’AIS et un travailleur social externe spécialisé dans leur problématique (Femmes en détresse, Caritas, LISCO, etc.). Le logement est finalement un tremplin.

« On estime qu’au Luxembourg entre 10 et 20.000 logements sont inoccupés. Nous disposons donc d’une ressource énorme de surfaces habitables à activer pour proposer, presque du jour au lendemain, des logements à des familles défavorisées et leur permettre de s’inclure dans la société », conclut Gilles Hempel.
À noter que l’AIS est un service de la Fondation pour l’accès au logement, financé à 100 % par des fonds publics : Le ministère du Logement prend en charge les frais liés aux risques locatifs, le ministère de la Famille, les communes et les offices sociaux prennent en charge les frais de fonctionnement.

Mélanie Trélat

Cohabitation intergénérationnelle, d'une pierre plusieurs coups !
Cohabitation intergénérationnelle, d’une pierre plusieurs coups !

Des jeunes qui peinent à se loger compte tenu de loyers trop élevés, des nouveaux arrivants qui cherchent à s’intégrer dans leur pays d’accueil, des personnes âgées dont la solitude devient pesante dans une maison désormais trop grande pour elles… Ces problématiques semblent éloignées l’une de l’autre. Elles peuvent pourtant trouver une solution commune : la cohabitation intergénérationnelle.

Interview de Moussa Seck, porte-parole de l’association Cohabit’âge.

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En quoi consiste le modèle que votre association propose ?
Nous proposons en fait deux modèles. Le premier est un logement chez l’habitant (une personne âgée en l’occurrence) ouvert à tous les jeunes qui ont des difficultés à se loger au Luxembourg, qu’ils soient étudiants ou qu’ils démarrent dans la vie active. Le second consiste à offrir des solutions de logement intergénérationnel à des ressortissants de pays tiers pour faciliter leur intégration en leur permettant de mieux appréhender la culture, la langue, les us et coutumes de leur pays d’accueil. Dans ce cas, notre association se positionne comme usufruit des biens pour la constitution d’un patrimoine solidaire dans le cadre de démembrements de propriétés.

Quelles sont les motivations des personnes âgées et jeunes qui participent à ce type de projets ?
Pour les personnes âgées qui proposent un hébergement : être solidaires des problèmes de logement que peuvent connaître les jeunes, se sentir moins seules et plus en sécurité, bénéficier d’un complément de revenus…

Pour les jeunes qui en bénéficient : se loger à moindre coût, recréer une ambiance familiale rassurante quand ils viennent de loin ou créer un lien qu’ils n’ont peut-être jamais connu avec leurs grands-parents, être solidaires des difficultés liées au vieillissement de la population.

Pour les deux parties, la transmission de connaissances et de savoir-faire sont des éléments essentiels. Les jeunes profitent de l’expérience des personnes âgées. En échange, ils peuvent par exemple les aider à se familiariser avec les outils numériques et les réseaux sociaux.

Dans la pratique, comment cette cohabitation fonctionne-t-elle ?
Il existe trois formules de cohabitation : la formule solidaire qui prévoit que l’hébergement est fourni en échange d’une présence et d’une aide concrète à travers diverses tâches comme passer la tondeuse ou préparer les repas par exemple, la formule conviviale qui comprend une participation aux charges et la formule amicale qui inclut un loyer modéré, à savoir un loyer de 300 euros maximum.

Quels sont les avantages de l’habitat intergénérationnel pour la société d’une manière générale ?
Apporter des logements à prix abordables, tout en créant du lien social entre personnes d’âges et d’origines géographiques différents, en favorisant l’intégration des jeunes dans la vie active et des étrangers dans leur pays d’accueil et en évitant une certaine ségrégation par catégories : les seniors dans des maisons de retraite, les nouveaux arrivants dans des foyers pour immigrés, les jeunes dans cités universitaires, etc.

Est-ce que ce modèle fonctionne bien au Luxembourg ?
Ce dispositif y est encore à l’état embryonnaire, mais il est déjà bien implémenté dans des pays comme le Canada, le Royaume-Uni, l’Espagne ou la France. En France, par exemple, le réseau d’associations de logement intergénérationnel Cosi, dont nous faisons partie, crée chaque année 2.000 à 2.500 nouveaux binômes ! 2016 est notre 1re année de fonctionnement au Luxembourg et nous avons déjà constitué 11 binômes. En 2017, nous visons la création d’une vingtaine de binômes et d’une cinquantaine en 2018.

Vous parlez de binômes. Ce dispositif n’est donc ouvert qu’aux personnes seules ?
Non. Il est tout à fait envisageable que des personnes âgées qui vivent en couple accueillent un jeune chez elles. Nous envisageons également d’ouvrir ce dispositif aux femmes qui vivent seules avec leur(s) enfant(s).

Comment ces binômes sont-ils répartis dans le pays ?
Notre ambition est de créer une plateforme de développement de l’habitat intergénérationnel. Nous avons démarré dans les communes du Sud et nous souhaitons maintenant diffuser ce modèle dans toutes les villes du Luxembourg. Nous travaillons notamment en étroite collaboration avec l’Office social de la ville d’Ettelbruck qui souhaite déployer ce type d’habitat dans le Nord du pays.

Le public est-il sensible à ce concept selon vous ?
Nous constatons que les personnes âgées ne sont pas toujours au courant du dispositif. Nous travaillons donc avec l’appui de prescripteurs institutionnels et familiaux. Nous nous rendons dans les entreprises qui ont une « fibre » RSE afin de présenter le projet aux salariés qui pourront ensuite en parler à leurs parents. Nous avons un feedback positif de la part des entreprises qui nous font part de la réceptivité de leurs employés.

Nous effectuons la même démarche auprès des médecins libéraux et des hôpitaux comme, par exemple, les hôpitaux Robert Schuman. Beaucoup de personnes âgées sont en effet dans ces structures alors qu’elles n’ont rien à y faire : elles souffrent plus de solitude et d’isolement que de problèmes de santé. Ce type d’habitat permet aux personnes âgées de retrouver l’envie de vivre et, finalement, de rester en vie plus longtemps.

Qu’en est-il de l’hébergement de ressortissants de pays tiers ?
Nous avons 50 dossiers de jeunes réfugiés en attente.

Le problème auquel nous devons faire face est que les personnes qui perçoivent le RMG risquent de perdre leur revenu si elles cohabitent avec quelqu’un qui a des revenus plus élevés. Notre idée est donc de développer des unités de vie individuelles, avec des entrées et des compteurs d’électricité indépendants, ainsi que des espaces de rencontre communs (salle polyvalente, salle informatique, etc.).

Notre objectif est d‘acquérir quelques biens dans les 3 prochaines années : 2 en 2017, 4 en 2018 et 4 en 2019 avec l’aide de l’État qui peut soutenir jusqu’à 75 % du prix d’acquisition et les subsides de l’Œuvre nationale de secours Grande-Duchesse Charlotte dans le cadre du projet mateneen qui vise à étoffer l’offre d’hébergements dans le contexte de la crise migratoire que nous traversons.

Mélanie Trélat

Habitat partagé : et si on vivait VRAIMENT ensemble ?
Habitat partagé : et si on vivait VRAIMENT ensemble ?

Finie la maison unifamiliale entourée d’un grand jardin, l’heure est aujourd’hui à de nouveaux modèles de logement, coopératifs et évolutifs, parmi lesquels, l’habitat partagé.

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Habitat partagé, groupé, participatif, coopérative d’habitat… qu’est-ce que c’est et comment ça fonctionne ? Il s’agit d’un mode d’habitat où les habitants ne sont ni tout à fait propriétaires, ni tout à fait locataires, mais coopérateurs. Chaque projet fonctionne selon un modèle qui lui est propre, car il est à l’image de ses fondateurs. Ces derniers sont impliqués dans chaque décision de la conception du lieu de vie à sa gestion quotidienne. Ils mutualisent les tâches et les services (garder les enfants, s’occuper des espaces verts ou de la gestion administrative, etc.) et s’engagent à participer à la vie de l’immeuble, en échange d’un prix du logement plus abordable. Un tel projet demande donc un investissement financier moindre qu’un investissement classique, mais aussi un investissement en temps. Dans la pratique, chacun y dispose d’une surface privée, qui est en général plus petite que la moyenne, mais profite en contrepartie d’installations communes diverses et variées : laverie, salle de jeu, de sport, disco pour les ados, bibliothèque, jardin d’hiver, atelier de bricolage, garderie et même chambre d’amis.

Parallèlement à la mise en commun d’espaces et de services, un des aspects phare de l’habitat partagé est la modularité des espaces qui permet de pourvoir à l’arrivée de nouveaux enfants qui nécessite d’agrandir l’espace, au départ des plus grands, à des séparations ou des décès qui font que certaines pièces deviennent superflues.

Au-delà de l’avantage social évident de ce type de projets, ils ont aussi une portée environnementale à travers l’utilisation de matériaux de construction de qualité, de préférence locaux et la production d’énergie décentralisée et à base de sources renouvelables.

Le modèle vient du Nord de l’Europe où il est apparu dès la fin du XIXe siècle. Déjà bien adopté en Allemagne, en Autriche et en Scandinavie où le taux de logements en coopératives avoisinerait les 20 %, c’est surtout la Suisse qui en est la tête de proue. À Zurich, la capitale économique du pays réputée pour les prix élevés de ses loyers, 1 logement sur 5 est en coopérative, un héritage d’une loi datant de 1907 qui obligeait la ville, alors industrielle et pauvre, à mettre des terrains à la disposition des patrons pour qu’ils y construisent des résidences privées et autogérées pour loger leurs ouvriers. Un des derniers projets en date est le quartier « Mehr als wohnen » qui s’étend sur 4 hectares et regroupe près de 1.200 habitants répartis dans 13 immeubles et 370 logements. Chez nos voisins français, on dénombre quelque 300 projets.

Et au Luxembourg ? L’habitat coopératif, en plus d’employer un mode de construction écologique et de favoriser le lien social, présente l’avantage d’être une réponse possible à la problématique de la raréfaction des terrains (l’habitat groupé est, par définition, dense) donc à celle de la flambée des prix des logements, particulièrement présente au Luxembourg avec un prix moyen de vente de 4.559 euros/ m2 pour un appartement. Comment ? à travers un financement de la construction de l’immeuble qui est opéré par une société coopérative dont les membres paient chaque mois un loyer couvrant les frais de fonctionnement du bâtiment. En cas de départ, ils récupèrent leur capital initial. Pas de spéculation possible, donc.

Le collectif Ad-hoc, qui existe depuis 2 ans et regroupe une centaine de personnes a été constitué pour monter un projet pilote de ce type… à découvrir dans l’article suivant.

Mélanie Trélat

Collectif Adhoc : des espaces, des ressources et des services en commun
Collectif Adhoc : des espaces, des ressources et des services en commun

Déjà bien implanté dans certains pays du Nord de l’Europe, l’habitat partagé n’a pas encore fait d’émules dans nos contrées. C’est sans compter une poignée de pionniers, réunis au sein du collectif Adhoc habitat participatif qui travaille depuis deux ans sur le lancement d’un projet pilote au Luxembourg.

Interview d’un des membres, Éric Weirich.

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Comment votre projet d’habitat partagé est-il né ?

L’initiative est partie, début 2014, d’un petit groupe de quelques personnes. Dans le cadre de recherches sur la question « Comment habiter dans le futur ? », ce groupe a étudié les coopératives d’habitation, qui existent en Allemagne et en Suisse depuis une centaine d’années déjà. À la suite de ces recherches, une conférence a été organisée à l’Oekozenter mi-2014. Elle a permis de sonder le marché. Résultat : avec une centaine de participants, nous pouvons dire qu’il y a un réel intérêt pour le sujet de la part de la population ! Cette conférence, nous la considérons comme le point de départ de notre projet. Voici donc un peu plus de 2 ans qu’un noyau dur d’une quinzaine de personnes s’est formé qui travaille sur la création d’un bâtiment en habitat partagé au Luxembourg.

Quel est le principe de l’habitat partagé ?

C’est d’optimiser les surfaces habitables en mettant en commun des pièces qui ne sont pas souvent utilisées et de miser sur l’autogestion en utilisant les ressources et compétences internes disponibles.

Ce type d’habitat n’existe pas encore au Luxembourg ?

Non, mais ce sera bientôt le cas avec notre futur bâtiment qui comprendra une trentaine unités d’habitations et des espaces communs multifonctionnels, assortis d’une offre de services de type carsharing ou espace médias, accessibles aussi bien aux membres qu’aux non-membres.

Qui seront les futurs habitants ?

Nous misons sur l’esprit communautaire de notre groupe. Celui-ci est hétérogène : il est formé d’étudiants, de familles nombreuses, de retraités, etc. Il est multiculturel et intergénérationnel, à l’image de la société luxembourgeoise !

Comment l’organisation quotidienne se passera-t-elle ?

Nous avons l’intention de gérer un maximum de tâches de manière interne. Cela se fera probablement via un système de mise à disposition de temps : chacun devra accorder un certain nombre d’heures à la communauté et les tâches seront aussi variées que siéger au conseil d’administration, tondre la pelouse ou assurer la garde des enfants des autres locataires.

Nous souhaitons également inciter les futurs co-habitants à aller les uns vers les autres. Les échanges sont un élément primordial dans la réussite du projet. Si nous vivons dans cette coopérative d’habitation comme dans un immeuble lambda, nous serons passés à côté de quelque chose !

Où votre immeuble sera-t-il situé ?

Nous sommes en négociation pour la mise à disposition, en bail emphytéotique, d’un terrain appartenant à l’État sur le plateau de Kirchberg. L’emphytéose nous permettrait d’épargner près de la moitié des frais de construction, économies qui se répercuteront sur le montant des loyers qui, de ce fait, baisseront.

Une autre facette de ce projet, au-delà de l’aspect social, est le volet économique : nous souhaitons créer du logement à un prix abordable qui se situera en dehors du marché spéculatif

Et au niveau constructif, avez-vous adopté une approche green et comment se traduit-elle ?

Oui, il y a tout un volet écologique dans ce projet.

Cette construction devra tenir 100 ans. Nous misons donc sur des matériaux durables, de haute qualité et qui proviendront, dans la mesure du possible, du Luxembourg et de la Grande Région.

Ensuite, nous avons réalisé plusieurs études qui nous ont permis d’élaborer un modèle selon lequel nous serons autosuffisants d’un point de vue énergétique grâce à la production décentralisée d’énergie renouvelable, y compris pour l’alimentation des voitures en carsharing, qui seront toutes électriques.

Enfin, nous avons orienté nos recherches de terrain en nous basant sur plusieurs critères, parmi lesquels figuraient une position centrale et une bonne connexion avec les transports publics, de manière à encourager les futurs résidents à abandonner leur voiture autant que faire se peut.

Votre ambition est-elle de dupliquer ce modèle par la suite ?

Pour l’instant, nous nous concentrons sur la réalisation de ce 1er projet qui mobilise toutes nos ressources, mais l’idée est, bien sûr, d’introduire ce modèle durablement au Luxembourg et, dans cette optique, nous allons mettre notre expérience à disposition des futurs porteurs de projets.

Pour en savoir plus : http://ad-hoc.lu/

Mélanie Trélat

Quartier Stuff, créer SON lieu de vie idéal
Quartier Stuff, créer SON lieu de vie idéal

Peut-être avez-vous déjà aperçu le container rouge qui trône au milieu d’un ancien terrain vague du Grünewald désormais transformé en un jardin partagé ? Il s’agit du QG d’un laboratoire d’idées destiné à reconfigurer le quartier pour qu’il soit à l’image de ses usagers.

Interview de Giny Laroche, gestionnaire de quartier au Fonds pour l’urbanisation et l’aménagement du plateau de Kirchberg.

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Quelle est l’idée de départ de ce Quartier Stuff ?

L’idée est de dynamiser la vie sociale, rendre le quartier à ses usagers, faire qu’ils se l’approprient et qu’ils deviennent des acteurs responsables de son développement.

Il est prévu de développer l’offre de logements dans les années à venir dans le quartier du Grünewald, et plus largement sur tout le plateau de Kirchberg. L’objectif est de créer la meilleure qualité de vie possible en fonction des besoins propres aux usagers de chaque quartier.

Où êtes-vous êtes allés puiser l’inspiration pour développer ce modèle ?

Le concept de laboratoire d’innovation sociale existait déjà mais sous d’autres formes que celle qu’il prend ici. Nous utilisons pour notre travail des méthodes comme l’Open Innovation ou le Design Thinking, ce à quoi nous mêlons le fonctionnement d’un comité de quartier et un système de budget participatif.

La vocation d’un tel laboratoire est de trouver des solutions en réunissant des expertises diverses et variées. Nos experts sont les citoyens : chacun a un savoir-faire à apporter, des idées et un angle de vue différent à proposer. C’est pourquoi notre Quartier Stuff est ouvert à tous à partir de 6 ans.

Comment se compose le groupe que vous avez formé ?

Pour la plupart, les participants sont des gens qui habitent le quartier, mais nous avons aussi des gens qui y travaillent, des gens qui habitent dans d’autres quartiers du Kirchberg et des gens qui n’habitent pas du tout au Kirchberg mais qui sont attirés par le concept. Notre groupe comprend une trentaine de personnes, d’une dizaine de nationalités différentes, avec des professions et des expériences de vie très variées, qui apportent une grande diversité sociale et culturelle. Chacun s’investit 3 à 4 heures, 1 à 2 fois par semaine, prend sur son temps personnel, travaille dur, suivant une méthodologie qui lui permet d’apprendre beaucoup. Nous formons les participants aux techniques de manière à ce qu’ils puissent « reprendre » l’outil et en faire un laboratoire géré de manière autonome. Ce projet leur donne de la légitimité : ils ne sont pas demandeurs d’un service ou spectateurs mais acteurs de l’évolution de leur quartier. Les décisions sont toujours prises en groupe.

Comment ce travail participatif se déroule-t-il dans la pratique ?

Un comité de quartier a été créé en janvier 2016 qui a pour mission principale, mais pas exclusive, d’opérer le Quartier Stuff.

En mai, nous avons lancé un grand sondage par le biais d’une quarantaine de panneaux dispersés dans l’espace public et dans les bâtiments. Sur ces panneaux, les passants étaient invités à inscrire leurs idées pour une meilleure qualité de vie. Nous avons ainsi récolté pas moins de 1.300 suggestions en 10 jours ! Parmi celles-ci, seules une trentaine n’étaient pas pertinentes. Ces suggestions ont été réparties, selon une méthode propre au Quartier Stuff, en 6 catégories qui sont la mobilité, la jeunesse, la biodiversité, l’espace public, les services et la vie sociale. Chacune d’entre elles a ensuite été analysée sous l’angle de sa facilité d’implémentation et de son impact, des interviews, recherches et observations de terrains ont été menées, le but étant de mieux comprendre les besoins des utilisateurs du quartier dans chaque thématique.

Les prochaines étapes seront de dégager de ces travaux des solutions innovantes, de développer et de tester des prototypes. Un vote sera organisé en début d’année prochaine pour élire les projets qui seront financés par l’enveloppe budgétaire prévue à cet effet par le Fonds Kirchberg.

Quel est l’avenir de ce projet une fois que les travaux de construction programmés sur le terrain que vous occupez auront débuté ?

Ce projet durera deux ans, soit deux cycles. Il est symbolisé par un objet physique : le container rouge qui tient lieu d’espace créatif. Ce container sera ensuite déplacé dans un autre quartier dont les usagers pourront, à leur tour, créer leur laboratoire.

Une Grünewalder Stuff sera installée et ce sera aux participants de l’actuel laboratoire d’innovation sociale ainsi qu’aux habitants du quartier de décider ce qu’ils en feront : continuera-t-il à être un laboratoire d’idées ? Sera-t-il transformé en un simple lieu de rencontre et de convivialité ? Ou disparaîtra-t-il complètement ? Le prochain laboratoire, celui du Kiem, sera peut-être très similaire à celui-ci ou sera radicalement différent, tout dépend de ce que les habitants en feront.

Nous procéderons de cette manière pour tous les futurs quartiers du plateau de Kirchberg.

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Quel est le rôle du jardin collectif qui jouxte votre « QG » ?

Nous sommes installés sur une friche, un terrain vague. Véronique Bous, architecte au Fonds Kirchberg, a eu l’excellente idée d’y installer un potager éphémère en 2014, de manière à proposer aux usagers d’investir le terrain en attendant les constructions. C’était un véritable succès. Un deuxième jardin potager suivait peu après, en 2015. Entre-temps, il y a non seulement des jardins potagers, mais aussi un bac à sable, deux terrains de pétanque, des barbecues et du mobilier urbain. En plus de constituer un lieu de rencontre, cet espace nous permet de gagner en expérience et de déterminer plus précisément où se trouvent les besoins pour le futur aménagement du site.

Mélanie Trélat

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