Le dossier du mois

Une thématique dans chaque #DossierDuMois, avec la rédaction d’Infogreen et l’expertise de nos partenaires

Publié le 13 février 2020
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février 2020

« Nature humaine »

« La biodiversité nous concerne au premier chef, car la biodiversité c’est nous, nous et tout ce qui vit sur terre »
Hubert Reeves

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Nature humaine
Nature humaine

« La biodiversité nous concerne au premier chef, car la biodiversité c’est nous, nous et tout ce qui vit sur terre » Hubert Reeves

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« Ce qui m’inquiète, c’est l’avenir de l’humanité. La multiplication des tempêtes, la fonte des glaces, la dégradation des sols, la disparition des forêts, le réchauffement climatique global et l’érosion de la biodiversité me font penser que nous sommes dans une situation alarmante », explique Hubert Reeves, le célèbre astrophysicien, vulgarisateur scientifique et écologiste québécois.

La biodiversité, c’est la vie sous toutes ses formes : espèces animales et végétales, habitats, écosystèmes, avec leurs caractères génétiques. C’est notre capital naturel, vital. Indispensable à la survie de notre mode de vie, en quelque sorte.

Malgré la surface réduite de son territoire, le Luxembourg possède encore une biodiversité considérable et des paysages variés grâce à une diversité géologique et microclimatique importante. Mais cette biodiversité est en déclin depuis plus de quarante ans. L’Observatoire de l’environnement naturel estime que 75 % des habitats et espèces sont dans un état de conservation défavorable au Luxembourg. Ce déclin est directement lié au développement des agglomérations et des zones commerciales ou industrielles - fragmentation du paysage liée à la forte croissance démographique et économique - ainsi qu’à l’intensification de l’agriculture.

L’activité humaine a tout changé. Mais là où l’humain a mis le souk, il peut aussi remettre bon ordre, avec pour premier allié la nature elle-même, qui regorge de solutions pour reprendre ses droits. Au pied du mur, les consciences, de plus en plus, se réveillent. L’État a pris le taureau par les cornes, en initiant des projets, en les cofinançant dans un cadre européen ou pas, en soutenant l’action de gens de terrain qui s’engagent, à l’image de natur&ëmwelt, de centaines de scientifiques, de bénévoles, d’associations locales, de communes, d’entreprises parfois… Le chemin est encore long. Il n’y a rien qui ne puisse être entrepris. Pour l’eau, quand les petits ruisseaux font les grandes rivières. Pour la forêt, quand on fait flèche de tout bois. Pour des terres utilisées durablement, biologiquement, quand se nourrir va de la fourche locale à la bonne et saine fourchette. Pour la faune, la flore, les insectes pollinisateurs. Pour le cercle de la vie, dans lequel s’inscrit l’être humain.

« C’est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain ne l’écoute pas », disait déjà un certain Victor Hugo, au XIXe siècle ! Il est temps d’entendre, de convaincre, de sensibiliser, d’éduquer, de faire mieux… Temps de replanter, de faire revivre, de sauver ce qu’il reste du patrimoine pour le transmettre. Temps de gommer l’ombre de l’Homme sur la nature, pour restaurer une nature humaine.

Alain Ducat

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Près de 40 ans d'engagement sur le terrain
Près de 40 ans d’engagement sur le terrain

Organisation environnementale d’origine associative mais d’utilité publique, natur&ëmwelt lutte principalement pour la sauvegarde de la nature et de la biodiversité locale. Elle se compose d’une fondation et d’une asbl aux rôles distincts, mais liés et complémentaires. Et elle dispose d’une solide expérience, assortie de compétences scientifiques reconnues.

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D’un côté, il y a natur&ëmwelt Fondation Hëllef fir d’Natur, un organisme d’utilité publique, créé en 1982. En 2022, on arrivera aux 40 années d’engagement ! Ses principaux domaines d’activité sont l’acquisition et la gestion de réserves naturelles, et la mise en œuvre de plans d’action pour la sauvegarde de la biodiversité dans le cadre du plan national pour la protection de la nature.

De l’autre, il y a natur&ëmwelt asbl, et ses plus de 11 000 membres, qui réalise des campagnes de sensibilisation et d’éducation liées à l’environnement. Mais également des actions pratiques, scientifiques et politiques au niveau local, national et européen sur les problématiques environnementales.

Des spécialistes et des projets

Depuis toutes ces années, natur&ëmwelt s’engage donc, sur le terrain. « Pour la protection de nos paysages naturels, de nos biotopes rares et de nos espèces menacées, tant dans la faune que dans la flore », souligne le directeur Gilles Weber qui applaudit d’abord l’équipe. « natur&ëmwelt ne serait pas la plus grande organisation environnementale luxembourgeoise sans ses spécialistes, géographes, biologistes, ingénieurs, qui élaborent les plans de gestion les mieux adaptés pour chaque réserve naturelle. Chaque campagne de sensibilisation et d’éducation, chaque intervention politique, chaque événement, et chaque action concrète sur le terrain vise à protéger, restaurer ou valoriser notre environnement naturel de façon durable. Avec une collecte rigoureuse de données scientifiques rassemblées lors de monitoring sur le terrain, la fondation est aujourd’hui une référence indéniable de professionnalisme et de compétence sur la question de la biodiversité au Luxembourg. C’est grâce à tous ces gens que cela bouge et grâce à vous que nous avançons ensemble vers un avenir plus vert, durable et soutenable », prolonge-t-il à l’adresse du grand public et des mécènes, dont le soutien est bienvenu, à côté des partenaires privés ou publics qui soutiennent le mouvement.

Les réserves naturelles de natur&ëmwelt Fondation Hëllef fir d’Natur couvrent une superficie totale de quelque 1 475 ha aux quatre coins du pays. Et ce patrimoine vert ne cesse de s’agrandir, à chaque fois que c’est possible – notamment financièrement -, avec pour objectif de renforcer le réseau national et européen de zones protégées. En 2019, la Fondation a acquis 73 ha pour 1 250 000 euros. De quoi ajouter le projet « Bats and Birds » aux prérogatives pour 2020. « Ici ou ailleurs, les chauves-souris ne connaissent pas de frontières et leur régression est l’affaire de tous. Trois espèces sont reconnues en danger critique d’extinction : la barbastelle, le petit rhinolophe et le grand rhinolophe. Localiser et garantir la protection des sites des colonies mais également des habitats de chasse permettra le maintien, voire l’amélioration des effectifs de ces espèces ».

Accueil et sensibilisation

Les missions sont multiples et pluridisciplinaires, touchant tous les domaines, l’eau, les terres, la faune, la flore, et visent aussi une forme de pédagogie et de « faire savoir » complétant le savoir-faire. Plusieurs points d’accueil sont accessibles au public. La Maison de la Nature à Kockelscheuer est le siège principal, mais c’est aussi un centre de documentation, d’information, de sensibilisation et d’éducation au développement durable et à la protection de la nature. Il héberge également la centrale ornithologique du Luxembourg (COL).

Le moulin de Kalborn abrite le centre d’expérience sur l’eau (WEZ), la station d’élevage de moules d’eau douce (lire ci-après) et un point d’information sur la zone Natura 2000 de l’Our.

Le centre de soins pour la faune sauvage de Dudelange a pour but premier d’accueillir les animaux sauvages qui sont blessés, orphelins ou simplement affaiblis, pour leur donner une seconde chance.

Quant au centre de cultures écologiques et au jardin méditerranéen de Schwebsange, ils sont le point d’accueil pour tous les passionnés de jardin et de verger.

Alain Ducat avec natur&ëmwelt, partenaire Infogreen
Photos natur&ëmwelt : le centre d’expérience sur l’eau allie pédagogie, sensibilisation et joies de la baignade / La Haus vun der Natur, à Kockelscheuer, est aussi le siège de l’organisation d’utilité publique

Un centre de référence national
Un centre de référence national

Le Musée national d’Histoire naturelle de Luxembourg est bien plus qu’un musée, au demeurant très didactique et largement suivi par le grand public. Entre autres par ses missions de recherche, collecte, validation, analyse, conservation et diffusion de données de terrain, il est un centre de référence sur la biodiversité au Luxembourg. On en parle avec Thierry Helminger, biologiste du département Recherches & collections, conservateur et coordinateur de la section botanique du MNHN et de l’arboretum du Kirchberg.

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Comment le musée permet-il d’observer l’état et l’évolution de la biodiversité ?

Le musée est reconnu comme centre de référence national pour la biodiversité. Cela ressort de nos missions d’étude, d’archivage, de documentation, qui œuvrent à la conservation du patrimoine naturel. Nos collections remontent au début du XIXe siècle. Notre herbier national par exemple propose plus de 100 000 planches, dont la majeure partie a été digitalisée - 66 000 éléments numérisés l’année passée – et est donc consultable en ligne, sur nos bases de données, intégrées aussi dans des références internationales. On y conserve des spécimens de plantes et de champignons recensés avec leurs métadonnées (lieu de collecte, collecteur, date, etc.). Ce sont des preuves de l’existence d’une espèce végétale à un endroit précis et à un moment donné. Avec les documents de justification, on a des éléments scientifiques irréfutables, des témoins d’une biodiversité parfois passée hélas. Beaucoup d’espèces ont aujourd’hui disparu de notre flore, parfois remplacées par d’autres. Cette observation vaut évidemment pour tous les éléments du patrimoine naturel, botanique, ornithologique, entomologique…

Ce spécimen d’arnica est le témoin d’une population de cette espèce dans les prairies humides entre Troine et Hoffelt éteinte depuis la fin des années 1970.

Toutes ces données viennent donc du terrain ?

Ce sont des données d’observation, validées par nos spécialistes. Elles proviennent de campagnes de recensement d’espèces, de collectes menées par des collaborateurs du musée, ou d’autres scientifiques, des bénévoles associatifs ou des amateurs, d’achats, de dons… Tous ces éléments sont donc vérifiés pour intégrer les inventaires. On peut compiler ces données, les croiser avec les cartographies de biotopes, le remembrement agricole, les cartes des sols, les observations de stations biologiques… Tout est analysé et validé, pour alimenter des cadastres, des listes rouges d’espèces disparues ou menacées, des atlas et listes d’espèces indigènes…

De quoi dresser un état des lieux de la biodiversité, avec le recul du temps et du scientifique ?

Oui, on voit bien l’évolution. Et les listes rouges s’allongent. On constate qu’environ un tiers des espèces connues sont aujourd’hui menacées ou éteintes. En tant que botaniste, je peux déplorer que, sur un inventaire de 1 323 plantes, une centaine ait disparu du paysage et environ 450 sont menacées. Pour prendre un exemple connu, au tournant des années 2000, l’arnica subsistait encore sur 3 stations-sites dans le pays. 50 ans auparavant, on comptait encore une vingtaine de sites occupés par cette herbacée. On a pu lancer un projet de réintroduction dans des habitats propices et, peu à peu, la plante se rétablit. Idem pour les scorsonères, dont les populations étaient beaucoup plus denses jadis dans les prairies humides, avant l’assèchement et l’amendement des sols.

Voit-on des progrès poindre ?

Pas assez. Il faut encore appuyer la prise de conscience collective. On peut se faire une idée en observant le cadastre des biotopes en milieux ouverts, disponible sur le géoportail

Entre la cartographie réalisée avec les données observées sur la période 2007-2012 et les données mises à jour, il apparaît qu’un tiers des biotopes ont été détruits ou fortement dégradés. Il y a pourtant de belles initiatives, un soutien de l’État, notamment pour l’achat de terres, la renaturation ou une agriculture responsable, les contrats biodiversité, etc. Il y a du travail de terrain, avec des organisations comme natur&ëmwelt… Il reste beaucoup à faire cependant, pour sensibiliser à la nature des problèmes.

Le musée, à cet égard, fait œuvre éducative ?

Cela fait partie des missions. Le MNHN bénéficie d’un bon soutien et d’une belle reconnaissance, le grand public suit bien, découvre les expositions, les événements, les initiatives interactives de vulgarisation scientifique… Nous avons un vrai rôle pédagogique aussi, notamment en allant vers le public scolaire, pour y mener des activités ciblées, avec le « Natur Mobil » et le « Science Mobil ». C’est important de sensibiliser le jeune public. On parle de leur futur à améliorer en leur montrant comment on est arrivé à la situation présente.

Visite guidée dans l’arboretum du Kirchberg avec le botaniste Thierry Helminger (photo : MNHN)

Propos recueillis par Alain Ducat
Photos : Installation ayant pour thème la liste rouge des plantes vasculaires dans l’exposition Unexpected Treasures (photo : Romain Girtgen, 2018)

Des chiffres dans le vert
Des chiffres dans le vert

Il faut du courage politique pour assumer une vision environnementale, à l’échelle d’un pays comme le Luxembourg. Il faut aussi des investissements et du budget. Plongée dans les fonds de l’État.

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En matière de décisions politiques au bénéfice de l’environnement et du développement durable, Il y a des gouvernements qui reculent, des présidents qui vont en marche arrière, des hésitations, des reports… Et il y a des avancées. Force est de reconnaître que le Luxembourg se démarque par une note verte qui ne tient pas uniquement de la coloration décorative.

Pour assumer un courage politique, il faut (se donner) des moyens. Le budget 2020 du Luxembourg place, selon la déclaration gouvernementale, la protection du climat et l’amélioration du quotidien des citoyens au rang des priorités. La loi budgétaire prévoit des investissements pour un demi-milliard d’euros, dans la mobilité, le transport public, l’énergie durable ou le développement de la finance durable.

Trois fonds dédiés

L’analyse du budget montre une répartition des investissements environnementaux – 502 millions – qui mise beaucoup sur le train ou le tram (50 % vont au fonds du rail, 5 % aux CFL, 14 % à LuxTram).

Trois fonds dédiés se détachent ensuite : la gestion de l’eau reçoit 17 % du total des dépenses environnementales, le fonds climat et énergie 13 % et la « protection de l’environnement » 1 %.

Ce Fonds pour la protection de l’environnement a en fait plus de 20 ans (loi du 31 mai 1999). Mais, à l’origine, il englobait l’ensemble des actions : assainissement des eaux, lutte contre la pollution, changement climatique (déjà !), gestion des déchets, réhabilitation de décharges et de sites contaminés, protection de la nature et des ressources naturelles…

Désormais, avec des fonds dédiés, le ciblage des actions gagne du terrain.

Un capital dépenses, des recettes affectées

Les détails du budget de l’État permettent de mettre des chiffres sur les choix politiques. Sur 20,62 milliards d’euros de dépenses prévues au budget 2020, près de 2 % sont assignés au ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, soit 403,6 millions d’euros.

Ses dépenses en capital vont par exemple à l’alimentation du fonds pour la gestion de l’eau (97 millions). Qui reçoit aussi 9 millions, produit de la taxe de prélèvement d’eau et de rejet des eaux usées. Et 7 millions d’euros couvrent une participation extraordinaire de l’État dans les investissements du Syndicat des Eaux du Barrage d’Esch-sur-Sûre (SEBES), véritable vivier du pays (lire par ailleurs, article « Au chevet de l’or bleu »).

Le fonds climat et énergie reçoit une contribution prélevée sur les ventes de carburants (88,5 millions), 40 % du produit de la taxe sur les véhicules automoteurs (27,2 millions) ou encore le produit de la vente de droits d’émissions (estimé à 18 millions).

Quant à l’alimentation du fonds pour la protection de l’environnement (55 millions), elle se complète notamment par quelque 4 millions, fruits du nouveau système numérique d’évaluation et de compensation en éco-points pour la protection de la nature et des ressources naturelles.

Alain Ducat
Légende (passerelle ornitho) Le Luxembourg choisit des chemins politiques verts, en se donnant des moyens d’avancer (photo natur&ëmwelt)

Au chevet de l'or bleu
Au chevet de l’or bleu

L’eau est un trésor, qui n’est pas inépuisable et qui doit être protégé… Quelques éléments d’analyse à bonne source, avec Alexandra Arendt, biologiste spécialiste des milieux aquatiques, chez natur&ëmwelt.

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Quel est l’état de santé général de l’eau dans le pays ?

Selon le cadre européen (directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000), chaque Etat membre est tenu de faire le suivi de l’état de l’eau de surface et de l’eau souterraine, d’évaluer sa qualité et sa quantité. Tous les 6 ans le Luxembourg doit remettre un rapport en ce sens. Le monitoring des eaux de surface vise la qualité physico-chimique et biologique - poissons, macroinvertébrés, plantes aquatiques et diatomées (algues), plancton, ainsi que la qualité hydromorphologique (continuité et morphologie). Si l’un des facteurs ne répond pas aux exigences fixées, le cours d’eau est « déclassé ». Quant aux eaux souterraines, les sources d’eau potable sont prises en considération. La physico-chimie est analysée, de même que la présence possible de substances dangereuses.

C’est le cadre officiel. En fait, les sources à caractère naturel passent un peu par les mailles de nos actuelles lois traitant l’eau et la protection de la nature. Pour cette raison, nous essayons – voir le Plan d’action de protection des sources dans le Parc naturel du Mullerhal https://www.naturemwelt.lu/project/... - de restaurer les sources dégradées et de sensibiliser un peu plus à ce biotope.

Que dire de la qualité des eaux de surface ?

« L’objectif de la directive était d’atteindre le bon état de l’eau en 2015. Les résultats du monitoring de l’Administration de la Gestion de l’eau ont montré qu’en 2015, seuls 3 des 110 cours d’eau de surface étaient dans un bon état écologique…

La qualité de l’eau de surface dépend largement de la qualité de l’eau souterraine. Et un aspect qui touche nos eaux et qui a des répercussions graves sur les écosystèmes, c’est l’excès en nutriments organiques, c’est à dire le phosphore et l’azote, les facteurs limitant la croissance. Ils entrent de manière ponctuelle ou diffuse dans l’eau. Leur excès conduit à la disparition des espèces aquatiques sensibles et rend l’eau non potable ».

Doit-on s’inquiéter pour les ressources disponibles ?

« 2/3 de notre eau potable proviennent du barrage de la Haute Sûre, dont la SEBES est gestionnaire. Les 2/3 du bassin versant du lac (428 km2) se trouvent en Belgique. Il faut de gros investissements pour assurer une eau de bonne qualité à partir d’une eau de surface. Il est moins onéreux d’exploiter les eaux de source. Or actuellement, rien que dans le bassin versant de la Syre, plus de 5000 m3/jour d’eau de source sont indisponibles, car non conformes aux normes de potabilité, pour la majeure partie en raison des nitrates ou/et des pesticides. C’est une grande perte si on sait que la fourniture journalière moyenne de SEBES a été de 55.000 m3/jour de 2010 à 2016.

Et puis il y a le changement climatique ! Au Luxembourg, depuis que la température est mesurée, 16 des 17 années les plus chaudes ont eu lieu au 21e siècle. Les précipitations annuelles moyennes restent aux alentours de 830mm. Mais les hivers auront plus de pluie et moins de neige, les étés seront plus secs. II y aura plus souvent des événements de forte averse. Ces facteurs influenceront la recharge de la nappe. »

Les solutions durables sont, en fait, déjà dans la nature ?

« La nature, avec ses fonctions écosystémiques, dispose d’un potentiel énorme pour épurer l’eau, pour améliorer la qualité de l’eau potable. Avec des zones de protection et des mesures très ciblées, aux effets suivis, des améliorations sont constatées, parce que les micro-organismes présents dans le sol peuvent agir.

Même chose pour les eaux de surface. On doit laisser suffisamment d’espace au cours d’eau. Supprimer les aménagements rigides, remettre à ciel ouvert des tronçons busés, relever et élargir le lit mineur, redynamiser des zones inondables, restaurer des zones alluviales, tout cela améliore la qualité de l’eau, parce que cela active la capacité d’auto-épuration des cours d’eau. Il y a de bons exemples au Luxembourg, comme la faune piscicole qui s’est améliorée sur le tronçon renaturé de l’Alzette, près de Hesperange.

Une mesure clé est le rétablissement des berges le long des cours d’eau. La ripisylve protège le cours d’eau contre toutes sortes d’intrants (nutriments, pesticides), fournit de l’ombre, garde donc les températures plus fraiches. Les racines des arbres fixent les nutriments présents dans l’eau. Les feuilles sont à la base de la chaîne alimentaire du milieu aquatique. La ripisylve sur la berge joue le rôle de corridor écologique. Les arbres en soi sont des régulateurs du climat.

Oui la nature a ses solutions propres. Mais il faut l’aider… Aucun projet n’est simple, car on a toujours affaire à des humains, qu’il faut d’abord convaincre. »

Propos recueillis par Alain Ducat
Légende photo : Alexandra Arendt, biologiste : « La nature, avec ses fonctions écosystémiques, dispose d’un potentiel énorme pour épurer l’eau ». (Photo Natur&Emwelt) / Le Plan d’action de protection des sources dans le Parc naturel du Mullerthal veut aussi sensibiliser un peu plus à ce biotope. (Photo P. Haas)

La moule d'eau douce, une vraie perle
La moule d’eau douce, une vraie perle

Un exemple luxembourgeois d’espèce menacée ? La moule perlière, qui a la capacité de filtrer l’eau. Un service gratuit ! Un projet européen de la Fondation Hëllef fir d’Natur a pour objectif le rétablissement de l’habitat de ce mollusque.

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« La moule perlière, une espèce présente dans les ruisseaux de l’Ösling jusqu’à la moitié du XXe siècle, a certes régressé à cause des barrages de moulins ou des manufactures de cuir, mais elle a commencé à disparaître avec l’évacuation des eaux usées dans les cours d’eau et l’amendement artificiel des terres agricoles », résume Alexandra Arendt, biologiste chez natur&ëmwelt. La moule perlière a besoin d’une eau pauvre en nitrates. La valeur des nitrates a grimpé au-dessus du double supportable dans l’Our, le dernier cours d’eau où elle était encore présente jusqu’en 2010. « Ce dernier bastion n’a pas tenu, étant donné que des eaux de source dont les valeurs en nitrate sont encore bien plus élevées alimentent l’Our ». La moule perlière, comme les autres moules d’eau douce, est menacée de disparition. Or ces mollusques ont la capacité de filtrer l’eau. « Jusque 50 l d’eau par jour et par moule. Elles fournissent un service gratuit… », commente la biologiste.

Un projet soutenu par le programme européen LIFE (acronyme de l’instrument financier pour l’environnement, un fonds de l’Union européenne pour le financement de sa politique environnementale) a pour objectif le rétablissement de l’habitat de ce mollusque. www.margaritifera.eu

Un moulin, une station, un espoir

Le foyer de résistance se trouve au moulin de Kalborn https://www.naturemwelt.lu/nous-dec... où s’est mise en place une station d’élevage conchylicole. On y veille sur la moule perlière (Margaritifera margaritifera) et la mulette épaisse (Unio crassus). Objectif : réintroduire les mollusques dans la rivière dès qu’ils ont atteint une taille telle qu’ils ne vivent plus enfouis mais deviennent visibles dans le lit du cours d’eau. Cela augmente leur probabilité de survie. Et, en parallèle, les équipes tentent d’améliorer la qualité du cours d’eau comme habitat. Ces mesures profitent à tous les autres organismes aquatiques.

Dans cette zone Natura 2000, au cœur du Parc Naturel de l’Our, sur le site estampillé XVIIIe siècle, le moulin de Kalborn appartient depuis 1997 à la Fondation Hëllef fir d’Natur. Depuis 2005, les bâtiments ont été progressivement rénovés avec l’aide de projets européens (LIFE, Leader) et de partenaires nationaux (Œuvre nationale de Secours Grand-Duchesse Charlotte, MECDD). Les bâtiments abritent un centre pédagogique d’expérience sur l’eau, une salle Natura 2000 et cette station d’élevage unique.

Au fond, on y alimente la Grande Région car le procédé, complexe (des larves recueillies sur place, un élevage en laboratoire puis en paniers extérieurs, une remise dans la nature après 4 à 5 ans), permet de repeupler les cours d’eau, plus clairs, en Belgique et en Allemagne, en espérant que les moules rejoignent l’Our et ses affluents.

La qualité de l’eau s’y stabilise. Mais le travail de sauvegarde de l’environnement des rivières est long, pour rattraper les outrages du temps et du « progrès » humain…
Jadis, les moules d’eau douce étaient abondantes. Dans le nord du Luxembourg, elles y vivaient par milliers, dans des eaux pures. Leur retour équivaudrait à retrouver une station d’épuration naturelle : les mollusques se nourrissent en filtrant l’eau, les particules organiques, les microalgues, etc., rejettent des sécrétions qui attirent les insectes, eux-mêmes attirant les poissons, notamment la truite fario, qui permettent aux larves de moules de grandir… Un cercle vertueux naturel.

Alain Ducat
Photos natur&ëmwelt et Life-Unio

Et si on recyclait l'eau comme on trie ses déchets ?
Et si on recyclait l’eau comme on trie ses déchets ?

Les ressources en eau ne sont pas inépuisables, loin s’en faut. Mais on peut changer notre rapport à l’eau et opter pour d’autres modes de gestion de cette ressource. Dans cette optique, la société luxembourgeoise Ama Mundu Technologies a mis au point une solution innovante et écologique de recyclage de l’eau.

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Au cours des dix dernières années, la moyenne d’eau consommée par habitant et par jour au Luxembourg a sensiblement diminué. Malgré cela, avec 200 litres utilisés chaque jour, le Luxembourgeois reste un gros consommateur de cette ressource qui, si elle est aujourd’hui facilement accessible, n’est pas inépuisable. Au regard de l’évolution socio-économique du pays, avec une démographie galopante et des projets de réindustrialisation, le Luxembourg pourrait faire face à de sérieuses pénuries d’eau potable dès 2035.

Il est donc essentiel de changer notre relation à l’eau. Depuis 2015, c’est ce que les équipes d’Ama Mundu Technologies s’efforcent de faire. « À l’heure actuelle, l’eau est considérée comme une ressource à usage unique. On la prélève, on l’achemine vers l’utilisateur. Une fois utilisée, l’eau usée doit encore être traitée pour être rejetée dans la nature, explique Vincent Popoff, le CEO d’Ama Mundu Technologies. Ce mode d’exploitation, coûteux et énergivore, atteint ses limites. Il faut dès à présent envisager d’autres modèles. »

S’inscrire dans une économie circulaire

Sur les 200 litres d’eau consommés chaque jour, seulement 2%, soit 4 litres, le sont à des fins alimentaires. Les 196 litres d’eau usée restants terminent leur course directement dans les canalisations. Un gaspillage contre lequel Ama Mundu souhaite lutter.

L’entreprise a développé une technologie visant à recycler localement les eaux usées. « Grâce à notre technique de filtration, il est désormais possible de recycler l’eau comme on revalorise de nombreux autres effluents du quotidien (verre, papier, plastique). L’eau de qualité récupérée peut être directement réutilisée localement », poursuit le CEO.

Ama Mundu Technologies permet d’inscrire cette ressource essentielle qu’est l’eau dans une logique d’économie circulaire et durable.

Jusqu’à 90% des eaux usées récupérées

Mais comment ça marche ? Ama Mundu Technologies développe des unités de recyclage compactes et autonomes. Au sein d’un éco-quartier, l’installation permet de capter les eaux grises des ménages (toutes les eaux usées à l’exception de celle des toilettes) et de les recycler en séparant d’une part, une eau de qualité́ directement réutilisable, et d’autre part, une fraction résiduelle valorisable sous forme d’engrais ou d’énergie. Cette eau recyclée sert à alimenter localement les chasses d’eau, machines à laver, systèmes d’arrosage….

Jusqu’à 90% des eaux usées peuvent ainsi être avantageusement réemployées. A l’échelle d’un site industriel, gros consommateur en eau, une telle solution permet de faire de substantielles économies tout en réduisant la pression sur l’environnement.

Des solutions techniques existent donc pour exploiter l’eau autrement. Qu’attendons-nous pour les mettre en œuvre ?

Ama Mundu Technologies, partenaire Infogreen

Le glyphosate out, le bio in !
Le glyphosate out, le bio in !

Avec des engagements forts du monde politique luxembourgeois, le secteur agricole fait face à ses défis environnementaux en misant sur la qualité durable, sans pesticides et bio.

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Souvent pointée du doigt comme un des acteurs coupables de la fragmentation des paysages, des pertes en terres arables ou de l’assèchement des sols par amendement excessif, l’agriculture fait face à ses défis, et le monde politique entend capitaliser sur son renouveau.

Deux grandes annonces font écho partout en Europe. D’ici peu, le ministre de l’Agriculture annoncera les mesures concrètes qui guideront le secteur vers un objectif majeur et ambitieux : 20 % des terres agricoles seront bio pour l’année 2025, contre environ 5 % aujourd’hui. Le plan est ficelé et doit recevoir l’aval du conseil du gouvernement, lequel s’était engagé clairement en ce sens.

L’autre annonce a été faite, et largement relayée : le bannissement des produits phytopharmaceutiques à base de glyphosate https://www.infogreen.lu/glyphosate... place le Luxembourg dans les pays pionniers, du côté de ceux qui osent.

Pour rappel, depuis le 1er février dernier, il n’y a déjà plus d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate. L’écoulement des stocks est permis jusqu’au 30 juin et les utilisateurs professionnels ou privés ne pourront plus se servir du produit au-delà du 31 décembre 2020.

Concertation et encouragement

La démarche qui conduit à un élargissement spectaculaire de l’agriculture biologique – un quadruplement des surfaces bio-cultivées en cinq ans ! – part de la même volonté et du même processus. Les acteurs concernés - agriculteurs, viticulteurs, maraîchers, etc. - ont été largement consultés et informés au préalable. Associés à la démarche, ils y adhèrent souvent, même si c’est par le biais de primes d’encouragement.

Le ministre Romain Schneider salue d’ailleurs le fait que les vignerons luxembourgeois sont les premiers au sein de l’Union européenne à avoir renoncé volontairement, à 100 %, à l’utilisation du glyphosate, dès cette saison 2019-2020.

Le Plan d’Action national vise une diminution de moitié de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques d’ici à 2030, et une réduction de 30 % des « big movers » (les produits les plus dangereux, voire les plus utilisés), dont fait partie le glyphosate, à l’horizon 2025.

En outre, un deuxième laboratoire d’écologie des sols ouvrira ses portes en septembre 2020 à Strassen. Celui-ci livrera des analyses complémentaires, plus pointues, sur la qualité biologique et bactérienne, et donc sur la santé, des sols.

La carte de la qualité

Il y a une cohérence et une stratégie, déjà présentes en toutes lettres dans l’accord de coalition 2018-2023. « Nous voulons préserver la biodiversité. Cela ne va pas sans efforts. Dans ce contexte, le secteur agricole est un partenaire important », expliquait le Premier ministre Xavier Bettel. « L’attachement à la nature est dans l’ADN du paysan, qui, ne vivant pas seulement dans et avec la nature, vit également de la nature, de son travail et, dans une moindre mesure, de ses subsides. Nous voulons renforcer le rôle de l’agriculture au Luxembourg en accordant la reconnaissance qu’elles méritent aux personnes qui, jour après jour, contribuent à ce que nous ayons des produits sains et de grande qualité dans nos assiettes et dans nos verres ».

L’idée est aussi de renforcer le lien entre produits régionaux et qualité. « Il faut davantage attirer l’attention sur le fait que ces produits sont aussi plus durables et, très souvent, plus sains (…) Notre pays a une opportunité exceptionnelle de renforcer la notoriété internationale des produits de grande qualité issus de ses secteurs agricole et viticole. L’objectif est de rendre inutiles dans notre pays les labels certifiant qu’un produit est sain, exempt de produits chimiques, régional et fait maison – le seul fait qu’il s’agit d’un produit provenant du Luxembourg devra suffire pour que la confiance soit grande et pour que le consommateur sache qu’on lui propose un produit de grande qualité (…) Tout cela implique une gestion responsable de nos ressources, de la nature et des terres disponibles pour l’agriculture ».

Alain Ducat
Photo © SIP / John Zeimet

Racheter des terres pour bien faire
Racheter des terres pour bien faire

Les 20 et 21 janvier dernier, l’expert français René Becker était l’invité de la Fondation OIKOPOLIS. Il a expliqué comment « Terre de Liens » réussit à récupérer des terres pour l’agriculture biologique et donc pour le bien commun.

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Au Luxembourg, les investisseurs fuyant la baisse des taux d’intérêt font grimper les prix des terrains. Mais la spéculation immobilière n’est pas la seule raison qui rend difficile le maintien ou l’extension des terres agricoles. De nombreuses exploitations familiales deviennent les victimes d’une succession générationnelle non adaptée aux besoins actuels. En mode durable, partager le patrimoine terrien entre les héritiers pour finalement relouer n’est pas non plus rentable.

Mais, avec les progrès du développement durable, de plus en plus de personnes veulent s’impliquer activement dans l’agriculture biologique. Mais sans ferme familiale, cela n’est guère possible. Voilà pourquoi, surtout dans le secteur bio, une grande partie de la motivation se perd suite au manque de terres. L’objectif de la Fondation OIKOPOLIS est de changer cette situation et « Terre de Liens » sert de modèle à bien des égards.

Des fermes durables

Terre de liens (TdL) est passée d’une association (fondée en 2003) à un réseau actif dans toute la France continentale. L’association a donné naissance en 2006 à la société anonyme et holding « La Foncière », qui collecte des investissements solidaires. Depuis 2013, s’est ajoutée une Fondation caritative, de sorte que les contributions financières d’investisseurs privés ou institutionnels sont fiscalement privilégiées.

Avec les fonds collectés grâce à des dons, des participations et des successions, TdL acquiert des entreprises agricoles, habitations et autres bâtiments, champs, forêts, prés ou vignobles. Les biens sont expertisés, pour déterminer la valeur actuelle et future de l’exploitation. Les souhaits particuliers des anciens propriétaires sont pris en compte. La seule condition que TdL lie à la location des exploitations est qu’elles soient gérées de manière biologique ou biodynamique. Pour le reste, tous ceux qui souhaitent reprendre l’exploitation bénéficient d’une égalité des chances. Ainsi, à fin 2019, 207 fermes ont pu être acquises et 5.500 hectares de terres agricoles ont été sauvés.

Besoin d’une bourse bien remplie

« Nous voulons racheter le terrain », dit René Becker (Terre de liens) « et ceci pour une longue période. » Les baux sont conclus à des prix modérés, et pour une durée d’au moins sept ans. Et même par la suite, si les exploitants décident de se réorienter, les terres bio devront toujours être gérées de cette façon, par un nouveau locataire à trouver. En France, il y a plus de personnes intéressées à la création ou à la reprise d’une ferme bio qu’il y a de terres à transmettre. Terre de Liens s’appuie sur une base financière solide - la Foncière dispose actuellement de 80 millions d’euros et la Fondation a des fonds propres d’1,9 millions.

Si la fondation OIKOPOLIS dispose d’un bon capital, à 2,24 millions d’euros, des dons sont nécessaires. « Il faut avoir une bourse bien remplie pour sauver les terres luxembourgeoises de la spéculation immobilière ». Toute personne souhaitant soutenir ce travail financièrement ou idéologiquement est bienvenue.

En attendant, la fondation OIKOPOLIS se consacre à d’autres volets de sa mission :
promouvoir une culture agricole et alimentaire durable en développant de nouvelles formes juridiques et de propriété pour l’utilisation des terres, promouvoir la recherche, le conseil et la formation dans le domaine de l’agriculture durable et la sélection de semences biologiques. D’autres facettes de la mission que s’est fixée l’OIKOPOLIS Foundation sont l’optimisation des méthodes biologiques et biodynamiques, des contributions de grande envergure à la protection de l’environnement et de la nature ainsi qu’à la pédagogie environnementale et naturelle - dans le sens du bien commun ou au profit du grand public.

Infos sur www.oikopolis.lu ou foundation@oikopolis.lu
Alain Ducat, avec Oikopolis
Article partenaire Naturata
Photos : Terre arc en ciel / René Becker « Nous voulons racheter le terrain, et pour une longue période »

Les jardins communautaires, refuges pour la biodiversité
Les jardins communautaires, refuges pour la biodiversité

Avant- goût d’un livre inspirant que le CELL éditera au printemps prochain sur les jardins communautaires au Luxembourg.

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L’un des grands problèmes de nos jours est le déclin rapide de la biodiversité, soit la disparition des espèces et l’appauvrissement des écosystèmes. On parle même de la 6e extinction de masse. Mais à l’opposé des périodes de grandes extinctions de la préhistoire, celle-ci est anthropogène, donc causée par les activités humaines. Force est de constater que l’agriculture « moderne » contribue, sauf changement de paradigme, à la disparition d’espèces dans la nature.

Par définition, l’agriculture a pour but de nourrir la population, donc aussi de préserver les ressources et les écosystèmes naturels. Toutefois, par la pratique des grandes monocultures aidées de pesticides, elle est aujourd’hui co-responsable de la disparition des fleurs sauvages, des insectes, des oiseaux et bien d’autres acteurs des symbioses et chaînes alimentaires écosystémiques. Le livre de Rachel Carson « Le printemps silencieux », paru en 1962, indiquait déjà dans son titre la disparition d’oiseaux (qui ne chanteraient donc plus au printemps) à cause des pesticides.

Agroécologie et permaculture

En découvrant les jardins urbains, on constate que la biodiversité trouve refuge dans des endroits qui paraissent improbables au premier égard : des cours des maisons, des toits, des petits jardins, des bacs sur les balcons… Plantes sauvages, insectes (abeilles incluses, bien sûr !) ou autres oiseaux y trouvent asile après avoir été forcés de quitter les campagnes aux grandes étendues en monocultures, de plus en plus dépourvues d’espaces vitaux pour la flore et la faune sauvages.

Les jardins communautaires s’inscrivent pratiquement tous dans la logique de la culture naturelle sans produits chimiques. C’est justement le caractère collectif de ces jardins qui l’impose, ainsi que l’application des principes de l’agroécologie et de la permaculture.

Ces principes s’appliquent beaucoup localement par la promotion de la diversité biologique naturelle et la préservation de la vitalité et la fertilité du sol.

Créer des îlots

Les mares, les murs en pierres sèches, les nichoirs, les tas de bois mort, les « hôtels » à insectes, le compost, les cultures fleuries d’engrais verts et les « coins sauvages » dans les jardins témoignent de la volonté de ceux qui s’en occupent de créer des îlots de biodiversité.

Quand on observe ces jardiniers amateurs, on peut presque penser que la culture de légumes, de fruits, d’herbes aromatiques ou de fleurs est un objectif subordonné, comme un effet secondaire agréable, mais pas essentiel.

Ainsi, les jardins communautaires deviennent des lieux de rencontre, où on n’invite pas seulement des humains (de tous âges et cultures), mais aussi la nature sauvage. Les jardins communautaires sont aussi des lieux pédagogiques où l’on peut observer la nature à l’œuvre et apprendre en direct le fonctionnement des écosystèmes.

Il est donc grand temps que les jardins communautaires ne soient plus seulement considérés comme des endroits ou des gens stressés poursuivent un hobby relaxant, mais que leur importance sociétale soit reconnue aussi. Plus d’infos sur www.eisegaart.lu

Contribution de Frank Adams pour le CELL Partenaire Infogreen
Photos : eisegaart.lu/CELL

L'horticulture urbaine à Schifflange
L’horticulture urbaine à Schifflange

La commune de Schifflange mène une lutte quotidienne contre la perte de la biodiversité. Notamment avec le projet « Urban Gardening ».

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La commune de Schifflange tente de parer la perte de biodiversité par de nombreuses initiatives ciblées.

Outre la plantation régulière d’arbres et de buissons, la mise en place de petits « hôtels » pour les insectes, la plantation de jardins d’herbes et la plantation de vergers, les responsables de la commune veillent à l’expansion continue du projet dénommé « Urban Gardening ».

Production respectueuse et consommation raisonnable

Par « Urban Gardening », ou horticulture urbaine, on entend généralement la mise en place et la gestion de petites exploitations maraîchères et de potagers dans les quartiers urbains. Une gestion durable des cultures horticoles, la production respectueuse de l’environnement et une consommation raisonnable des produits agricoles caractérisent cette tendance « Urban Gardening ». Il va sans dire que l’utilisation de quelconques pesticides est prohibée.

Dans la commune de Schifflange, les premiers potagers ont été érigés en 2017 à la cité op Hudelen, avec le soutien inconditionnel de la commission de l’environnement.

D’autres sites ont suivi en 2018 et 2019, à savoir le « Mittelsten Dorf » et la cité Emile Mayrisch, sachant qu’un quatrième site va voir le jour à la « Maison des Générations » dans le courant de cette année 2020.

Une cinquantaine de potagers et des ateliers bien suivis

Ainsi, plus de cinquante potagers sont exploités par les habitants de la commune dans le milieu urbain.

Chaque année, à l’initiative de la commission de l’environnement et sous la direction de Marianne Kollmesch de l’EBL (Ëmweltberodung Lëtzebuerg), des ateliers sur le jardinage urbain sont organisés. Cette experte conseille les nombreux participants sur la façon de planifier et de créer un jardin, en tenant entre autres compte de l’interaction entre les plantes ou de l’infestation par les parasites.

En outre, à Schifflange aussi, on souligne que, à côté de l’effet bénéfique pour la nature, ce projet « Urban Gardening » soutenu par la commune se caractérise également par sa dimension sociale non négligeable.

Un article de la commune de Schifflange

Corridors verts à Differdange
Corridors verts à Differdange

La 3e ville du pays est engagée pour l’environnement depuis bien longtemps. L’écologie s’intègre en amont de chaque projet de développement. Couloirs naturels recréés entre forêts périphériques et centre urbain, parcs renaturés, retour d’espèces dans la faune et la flore, gestion de plantations dans la cité… : l’arborescence bien réfléchie porte ses fruits.

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La ville de Differdange marquait le coup pour son centenaire, en plantant symboliquement 2007 arbres. « Cela a bien plu à tout le monde et on a senti qu’il y avait un engagement politique et citoyen, à long terme, en faveur du développement durable, de l’importance de la nature jusque dans la ville. 13 ans plus tard, on voit bien les résultats », observe Gilles Wagener, du service écologique de la ville de Differdange, où avec son collègue Michel Drouard, il est un des spécialistes des arbres.

Rien que l’existence de ce service pluridisciplinaire, qui regroupe 7 personnes, est un indicateur d’intérêt par la 3e ville du pays. Le service est impliqué d’emblée, le plus en amont possible de chaque projet de développement – nouveaux quartiers, aménagements urbains, parcs, etc -, dans une reconversion exemplaire au fil des ans.

Espaces naturels

« On a travaillé sur un reverdissement général. Notamment avec des corridors verts, en profitant des ressources naturelles à l’extérieur de la ville, pour ramener de la biodiversité dans la ville », explique M. Wagener. Ainsi, l’espace où passaient les anciennes conduites d’air liquide de l’Arbed a été réaménagé, devenant un couloir naturel, connecté aux friches sidérurgiques reconverties. Du côté du plateau du funiculaire ou du quartier résidentiel Arboria, le vert domine, au cœur de quartiers d’habitation et de services.

Le nouveau parc de la Chiers a été pensé comme un espace de respiration, un site naturel plus qu’un terrain de golf ! « Il y a de vieux arbres, morts ou presque, qui ne présentent pas de danger. On aurait pu les évacuer. On les a laissés. Et les pics y sont de retour ». Le lieu boisé a aussi vu revenir quelques chevreuils qui y trouvent refuge en période de chasse alentour...

La flore se manifeste aussi : « À côté du plateau du funiculaire, près du chemin de fer et de la route, on a trouvé une espèce d’orchidée, plutôt habituée des prairies sèches, que l’on ne voyait plus que dans la réserve naturelle Prënzebierg - Giele Botter. On pratique le fauchage tardif et on essaie de favoriser l’habitat naturel de cette plante, mais aussi d’insectes, de papillons… »

Le pouvoir des arbres

Partout en ville, la fonction des arbres est vue différemment, pas seulement comme un embellissement. « On choisit les essences, indigènes ou/et qui favorisent le lien à la faune et la flore. Pour la taille, on se contente d’orienter la pousse des branches et des feuillages, pour permettre aux arbres de faire leur gros travail : capturer le carbone et les poussières, donner de l’ombre, apporter de l’humidité, filtrer lentement les précipitations et donc participer à la prévention d’inondations par exemple ».

Et les arbres sont envisagés dans tout leur cycle de vie, à très long terme. « Ils vivent plus longtemps que les humains et leur carrière professionnelle », sourit Gilles Wagener. Et quand l’arbre voit la fin, il sert encore. Un « vieillard » en ville, plutôt qu’un problématique déracinement, a connu une coupe à 2 mètres et le travail d’un artiste sculpteur. Les débris de coupe et les branchages finissent en chaufferie collective. Rien ne se perd. Et tout gagne à être pensé.

Alain Ducat

Photos : Le parc de la Chiers, espace naturel de respiration / Michel et Gilles, spécialistes des arbres (Ville de Differdange)

Engagement pour la protection de la nature et le climat !
Engagement pour la protection de la nature et le climat !

La crise du climat et de la biodiversité ne souffre plus d’aucun doute, entre les preuves scientifiques et ce que chacun d’entre nous, même ici au Luxembourg, expérimente au quotidien – la chaleur en été, les hivers tempérés, les tempêtes et inondations, sans parler des catastrophes apocalyptiques ailleurs dans le monde.

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Raymond Aendekerk, directeur Greenpeace Luxembourg

En ce qui concerne la biodiversité, les scientifiques et les ONGs de protection de la nature parlent très clairement depuis des décennies d’une extinction massive de la flore et de la faune partout sur la planète et y compris chez nous, au Luxembourg. Pourtant, protéger la biodiversité, c’est protéger notre planète, humains compris !

Saviez-vous, par exemple, que les baleines contribuent de façon essentielle au stockage du carbone dans les océans ? Leurs migrations annuelles, longues de plusieurs milliers de kilomètres, contribuent à disperser, avec leurs excréments, des substances essentielles pour la croissance du phytoplancton. Ce plancton végétal est non seulement à l’origine de la production d’une grande quantité de l’oxygène que l’on respire, mais permet aussi de capturer des milliards de tonnes de CO2 de notre atmosphère. Pourtant, notre modèle économique n’a jamais vraiment pris la protection de la nature au sérieux, bien que cela change lentement : le Fonds monétaire international (FMI) lui-même a proposé d’intégrer la protection des baleines dans l’accord de Paris !

Mais la mer n’est pas le seul endroit qui nécessite d’être protégé. Plus notre agriculture et nos modes de production – et donc notre alimentation – seront variés, diversifiés, plus nous serons résilients aux changements climatiques. Les légumineuses, comme les différentes espèces de trèfles dans nos pâturages, ont la capacité, en symbiose avec des bactéries, de transformer l’azote contenu dans l’air pour leur besoin. Ainsi, en utilisant des engrais d’azote produits eux-mêmes, nos agricultures pourraient se passer des engrais chimiques produits grâce aux énergies fossiles et, à terme, éviter la disparition des légumineuses et de la biodiversité agricole à cause des changements climatiques et des produits phytosanitaires. Et ces exemples pratiques n’évoquent même pas la beauté de la nature, son esthétique, l’inspiration qu’elle représente pour nous et les artistes.

À vrai dire, la peur de voir la nature disparaître, le fondement de la vie, et de ne pas survivre dans un climat trop chaud, est une posture très égoïste de l’espèce humaine. Comme le disait l’humoriste Georges Carlin “The planet is fine, but we are fucked” (La planète va bien, mais nous sommes foutus). La planète se remettra des changements ; mais nous, l’humanité, nous ferons partie des milliers et des milliers d’espèces qui s’éteindront. Alors il est temps de changer de paradigme dans tous les domaines, d’adopter un nouveau mode de vie ainsi qu’une économie de bien commun, qui respectera la nature et nos ressources naturelles limitées.

Un engagement collectif de masse est indispensable à la restauration des dégâts déjà conséquents. Une conscience globale de la nécessité de construire un futur vert et durable existe déjà particulièrement chez les jeunes partout à travers le monde, mais aussi chez les plus âgés. Pour résister aux forces de destruction à l’œuvre partout dans le monde, engagez-vous dans votre vie quotidienne et soutenez des ONGs comme Greenpeace, active pour la planète depuis presque 50 ans. Nos adhérents nous soutiennent dans notre engagement pour la protection du climat, des océans et des forêts de la biodiversité, pour une agriculture durable et résiliente et dans notre lutte contre le nucléaire.

Récolter les fruits de l'engagement
Récolter les fruits de l’engagement

Picto Communication Partner a pour vocation de communiquer sur et de sensibiliser aux enjeux du développement durable au Luxembourg. L’entreprise est structurée et agit comme une agence médias classique, à ceci près qu’elle est le fruit d’une réflexion profonde, menée dès sa création il y a 8 ans, sur la réduction des impacts environnementaux et sociétaux de ses activités.

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Son 1er projet, la plateforme Infogreen.lu, de par les thématiques qu’elle aborde, est durable par essence. Elle l’est aussi dans son fonctionnement puisqu’elle est hébergée dans un datacenter green (le DC2 Tier IV Design de Luxconnect à Bissen) et que ses émissions de CO2 sont compensées via myclimate.

« Dès le départ, il nous a paru logique d’être exemplaires », indique Frédéric Liégeois, fondateur de Picto et 4x3. « Nous avons ensuite fait évoluer notre démarche en mettant en œuvre les savoir-faire acquis par Picto dans 4x3 sàrl. Nous avons lancé ce projet avec la volonté de pousser au maximum ce qu’il est possible de faire en termes d’engagement et d’action aux niveaux sociétal et environnemental en devenant l’unique média à avoir décroché l’agrément SIS, société d’impact sociétal ». Les statuts de l’entreprise, dont les parts sociales sont remplacées par des parts d’impact, exigent l’émission d’un rapport annuel au ministère de l’Économie sociale et solidaire, la réalisation d’un audit externe chaque année et la définition d’une série de points d’impact. Certains ont trait à l’environnement.

Points d’impact environnementaux

Le premier, c’est la compensation systématique des émissions carbone (environ 800 g de CO2 par numéro, soit 4 t par parution et 16 t par an) par le financement, via naturOffice, de la station hydroélectrique Bujagali Hydropower, située au pied de cascades africaines, qui alimente en énergie les villages avoisinants ; une initiative certifiée Projet de protection climatique reconnu.

Le deuxième est l’impression de tous les magazines et brochures au Luxembourg et leur distribution en circuit court. « L’Imprimerie Centrale, notre partenaire privilégié, est aussi au cœur d’une réflexion sur les moyens de réduire autant que possible notre empreinte. Elle nous propose régulièrement des nouvelles solutions d’impression ». Parmi ces points d’impact environnementaux, le fait aussi que 4x3 magazine est fabriqué à partir d’encres et colles naturelles, et de papier circulaire composé de 30 à 40 % de papier FSC recyclé et de 60 à 70 % de restes industriels de fibres végétales, en l’occurrence du maïs. « Nous sommes les seuls à utiliser le papier Crush au Luxembourg. Cela nous permet d’avoir l’impact le plus minime possible sur la nature et la biodiversité ».

Dans cette optique, Picto oriente systématiquement ses clients vers cette démarche pour la réalisation de projets print externes. « C’est aussi pour ces compétences que nous sommes reconnus et qu’on nous sollicite », ajoute Frédéric Liégeois.

Acteurs de terrain

Pour aller encore plus loin, Picto et 4x3 se positionnent comme acteurs de terrain. « Nous parrainons 3 ruches installées au Limperstberg par notre partenaire Hunnegkëscht, qui promeut la plantation et la renaturation autour des ruches pour favoriser la biodiversité. Nous lançons aussi cette année notre programme de reforestation, baptisé 1 invité = 1 m2, en faisant appel aux services de notre partenaire Natur&Ëmwelt. Cela nous permet de planter 300 à 400 m2 d’arbres et d’arbustes (autant que d’invités à nos évènements) par an à partir de 2020, au Luxembourg. Même démarche pour les mécènes qui soutiennent le magazine : chacun d’entre eux participe à la plantation d’un verger composé de variétés rares et anciennes. Une dizaine d’arbres fruitiers seront plantés en leur nom en novembre prochain et le verger grossira d’année en année ».

Il faut savoir que la haie, véritable biotope à elle seule, protège du vent, retient l’eau, apporte de l’ombre et génère un microclimat propice à la flore ; elle fournit de quoi se nourrir, mais aussi s’abriter et se protéger à de nombreux insectes, reptiles et petits mammifères. Quant aux vergers, ils apportent une biodiversité intéressante : le bois mort laissé sur place offre un refuge à des chouettes, des chauves-souris, des insectes, des oiseaux ou des reptiles.

Enfin, Picto est signataire du manifeste Zero Single Use Plastic d’IMS, en partenariat avec le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, qui confirme son engagement pour la réduction des plastiques à usage unique, tels que gobelets ou couverts, dans l’entreprise.

« Nous sommes très fiers de voir que de plus en plus d’entreprises nous font confiance, suivent nos conseils, nous rejoignent sur nos plateformes et participent à nos évènements lors desquels nous soutenons largement nos partenaires en renforçant le networking entre eux. Nous récoltons les fruits des engagements que nous avons semés au cours des années », conclut Frédéric Liégeois.

Mélanie Trélat

« Les insectes ont besoin des plantes, mais ils les aident aussi »
« Les insectes ont besoin des plantes, mais ils les aident aussi »

Les pollinisateurs sont reconnus pour le rôle fondamental qu’ils jouent dans notre sécurité alimentaire, la santé des écosystèmes et de l’environnement, la préservation et l’enrichissement de la diversité biologique. L’abeille, particulièrement, en est le symbole. Mais ce système est basé sur l’interdépendance : sans végétaux, pas d’abeilles et sans abeilles, pas de végétaux.

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«  Les fruits et légumes dépendent directement des pollinisateurs, notamment des abeilles. Dès qu’on installe une ruche à côté d’un fruitier, on voit les rendements de cet arbre augmenter », explique Hugo Zeler, apiculteur urbain et fondateur de Hunnegkëscht.

Mais leur population est en baisse partout dans le monde ; c’est le fameux « syndrome d’effondrement des colonies » observé pour la première fois au début des années 1990 aux États-Unis. Pour Hugo Zeler, ce déclin n’est pas que lié aux pesticides, mais aussi aux parasites et au « manque de fleurs, de végétaux, de ressources ». Il en a fait lui-même l’expérience : « J’avais des ruches à la campagne et mes populations se développaient énormément, mais je dépendais fortement de grandes cultures, type colza. Il suffisait qu’un type de culture soit fauché pour que, du jour au lendemain, les abeilles aient faim ».

Nous sommes dans un cercle vicieux : moins il y a de fleurs et d’arbres, moins il y a d’abeilles, et moins il y a d’abeilles, moins il y a de fleurs et d’arbres. « Les pollinisateurs favorisent la dissémination du pollen, la fructification, donc le couvert végétal. On le constate dans les zones incendiées : quand les pollinisateurs reviennent, la végétation renaît grâce à eux. Les insectes ont besoin des plantes, mais ils les aident aussi ».

Planter pour nourrir

L’une des solutions, pour contribuer au maintien de la biodiversité, est donc de planter. C’est d’ailleurs une condition pour l’installation de ruches sur les toits des entreprises ou dans leurs parcs et ce, dans un souci de cohérence de la démarche : « Tout le monde a bien intégré qu’il faut limiter l’usage des pesticides qui désorientent et affaiblissent les insectes. Ce qu’il reste à faire, c’est planter des arbres qui font des baies ou des fleurs. La moindre des choses est de nourrir ces insectes qui nous nourrissent. Si on le fait, ils s’installent d’eux-mêmes ».

Résultat : un de ses clients a semé plus de 2 000 m2 de jachère fleurie, du côté de Mondorf, et projette de planter des fruitiers ; un autre a instauré le fauchage tardif sur son site de la Cloche d’Or et la couleur jaune des pissenlits s’est immédiatement retrouvée dans les cadres où les abeilles stockent le pollen pour les larves. Enfin, un groupe immobilier va aménager un verger qui aura une vocation pédagogique auprès des enfants d’une crèche voisine.

Urbaine et didactique

La démarche de Hunnegkëscht, au-delà de la production de miel de quartier (Kirchberg, Limpertsberg, Gasperich…) a une vocation didactique, celle de montrer aux usagers à quel point la flore qui les entoure, même en ville, est typique. Les miels sont analysés en laboratoire afin de connaître précisément les fleurs qui le compose : tilleuls, haies de troènes, marronniers… tous donnent un goût différent au miel. De plus, sa production annuelle est « lissée » dans un environnement urbain par rapport à un environnement agricole : « C’est lié au fait que les citadins sèment encore dans leurs jardins, la floraison commence plus tôt et dure plus longtemps et je fais des bien plus belles récoltes d’été en ville que j’en faisais à la campagne. Il n’y a pas cette dépendance aux grandes cultures qui est difficile à gérer », conclut-il.

Mélanie Trélat

Quand l'architecture contribue à la biodiversité
Quand l’architecture contribue à la biodiversité

Ces dernières années, les critères environnementaux sont devenus prépondérants dans le travail du bureau d’architecture Coeba, qui s’est attelé à la recherche de matériaux durables et locaux.

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À l’origine de cette démarche, quelques chiffres alarmants : le Luxembourg consomme 7 fois plus de ressources qu’il en a à sa disposition, 84,5 % des déchets qu’il produit sont issus des bâtiments et, au niveau mondial, 40 % de l’énergie et 50 % des matières premières consommées le sont par le secteur de la construction. « Nous avons un levier énorme pour faire avancer les choses dans le bon sens », en déduit Dave Lefèvre, co-dirigeant de Coeba. https://www.infogreen.lu/le-potenti...

« D’où cette approche qui consiste non pas à essayer de réduire l’empreinte écologique négative des bâtiments que nous concevons, mais à maximiser leur empreinte positive. Nous promouvons toutes les pistes qui s’inscrivent dans la philosophie Cradle to Cradle ». Différents facteurs de durabilité accompagnent les architectes dans le choix des matériaux. Ils prennent en considération l’ensemble de leur cycle de vie, de la production à la décharge.

La paille bio

La paille a retenu leur attention parce qu’elle est une ressource renouvable chaque année, un résidu agricole qui ne doit pas être spécifiquement produit ou transformé, disponible dans la Grande -et très Grande- Région, récupérable lors de la déconstruction d’un bâtiment et réutilisable, soit dans un nouvel immeuble, soit, comme le veut sa fonction première, dans les étables. « La paille représente un potentiel très important, qui n’est pas du tout exploité au Luxembourg à ce jour », souligne Dave Lefèvre. « En tant que matériau naturel, elle peut jouer un rôle dans la préservation de la biodiversité. Mais, étant souvent un produit de monoculture, il faut quand même garder un regard critique sur le sujet. Oui, la paille peut contribuer à la biodiversité, à condition qu’elle provienne d’une agriculture biologique ».

Elle peut avoir une fonction statique. Elle est alors utilisée en ballots, mais les épaisseurs nécessaires (jusqu’à 1 m) induisent des pertes d’un espace qui est de plus en plus précieux. Elle peut également servir d’isolant, comme c’est le cas dans la maison relais pilote de Fischbach, livrée en 2017.

Vidéo https://vimeo.com/389723962

Il s’agit alors d’éléments en bois remplis de paille compressée à une densité de 120 kg/m3, préfabriqués en usine. Le grand avantage du système, outre la vitesse de construction qui se trouve largement augmentée, est son excellente inertie thermique. La paille stocke naturellement la chaleur ou la fraîcheur pour la restituer progressivement vers l’habitat, ce qui permet aux usagers de réaliser de substantielles économies d’énergie. Seul bémol, elle peut être disponible ou non selon les années en fonction des conditions météorologiques.

Le hêtre régional

Une autre option explorée par Coeba est le bois de hêtre régional qui, lui, n’est pas tributaire du climat : « Le hêtre est un arbre propre au Luxembourg, contrairement aux différentes variétés de pins qui ne le sont pas, ou en tous cas pas dans les quantités nécessaires. Nous avons à notre disposition une masse de beaux arbres qui ne sont pas du tout exploités en tant que matériau de construction. Et le ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable va dans une direction de plus en plus positive en termes de gestion des forêts locales ». Forêts qui offrent le gîte et le couvert à de nombreux mammifères et insectes, et sont le poumon de notre planète.

Le miscanthus : avenir circulaire

Enfin, Coeba s’intéresse de près au miscanthus qui va plus loin que la paille en termes de biodiversité. « Nous sommes en train de développer un système constructif basé sur ce matériau qui est malaxé et mélangé avec de la chaux pour la stabilité, puis inséré dans une ossature bois », précise Dave Lefèvre. Cette graminée présente de nombreux atouts sur le plan écologique. En tant que plante vivace, il ne doit être entretenu que pendant les 3 années qui suivent sa plantation, puis il repousse automatiquement pendant 25 ans. Lorsque le bâtiment arrive en fin de vie, il peut être réintégré dans le domaine de la construction ou réparti sur des champs pour créer de l’engrais. Il filtre les eaux pluviales, attire les insectes et, la plupart du temps implanté en bordure de forêt, il permet, de par sa hauteur, de créer une zone tampon qui protège les animaux lorsqu’ils sortent du bois pour entrer dans les champs.

« Si nous voulons soutenir la biodiversité au Luxembourg, nous devons promouvoir ces trois matériaux : le miscanthus, le hêtre et la paille, sous réserve. Utiliser la terre crue, plutôt que la mettre en décharge, peut également avoir des répercussions positives, indirectement. Car il faut avoir une réflexion sur toutes les étapes, notamment sur la nocivité du matériau en fin de vie, sur la pollution des eaux potables et des sols qu’il peut engendrer, sur le traitement des déchets spécifiques. L’architecture elle-même peut aussi contribuer à la biodiversité. Nous disposons de nombreuses surfaces en toiture à couvrir de plantations indigènes. On peut même y poser des ruches ! »

Coeba partenaire Infogreeen
Mélanie Trélat

Photos légendes : Dave Lefèvre (Coeba) : « Maximiser l’empreinte positive de nos bâtiments ». (photo Fanny Krackenberger) / Un système constructif basé sur le matériau miscanthus (photo nawaro.ch)

Une prairie sur le toit
Une prairie sur le toit

Le végétal dans la conception des bâtiments se démocratise au Luxembourg. Et devient dès lors un outil indispensable à la biodiversité de nos villes. Depuis de longues années, la société allemande Optigrün propose des systèmes pour les toitures végétales.

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« La nature fait toujours selon les conditions dont elle dispose et, autant que possible, les choses les plus belles et les meilleures ». En citant Aristote, Xavier Duboisdendien pense à un outil pour promouvoir la biodiversité urbaine, les éléments végétaux pour toitures.

Représentant commercial et prescripteur des systèmes de toitures végétales chez Optigrün International AG, il observe : « Le végétal se démocratise au Luxembourg dans le bâtiment et devient dès lors un outil indispensable à la biodiversité de nos villes. Depuis de longues années, la société Optigrün fournit, en Allemagne ainsi qu’en Europe, aujourd’hui dans le monde, des systèmes pour les toitures végétales ».

Toute une gamme de solutions naturelles

On parle bien de systèmes, qui s’adaptent aux réalités de la conception architecturale, urbanistique et paysagère.

Par exemple, la toiture inclinée végétale, selon le concept Optigrün, peut équiper tout type de toiture de 0-45°. Cela privilégie l’écologie, l’isolation, le recyclage des fines particules de pollution ainsi que l’abattement et la filtration des eaux de pluie, qui retournent au réseau ou s’évaporent dans l’air, procurant une chaleur humide et bien plus acceptable dans nos villes.

Et le concept, qui ne se contente pas de poser une fine couche de gazon mais propose jusqu’à de véritables prairies sauvages autant que fleuries, offre toute une gamme de toitures naturelles, ornementales, à rétention d’eau, en jardin potager, en terrasse-jardin, en version circulable…

Xavier Duboisdendien souligne : « Il existe des subsides et l’État Luxembourgeois favorise ce choix. Dès lors, l’essor de la toiture végétale peut accompagner tous vos projets. Rien de tel que de retrouver la nature par la fenêtre de votre bureau ou depuis votre canapé. Nos services études et nos services commerciaux se feront une joie d’étudier votre projet ».

Article Xavier Duboisdendien

Concevoir durable
Concevoir durable

Pour réduire la consommation d’espace, la planification reste le point d’attaque le plus important. Si possible, éviter l’intervention ; si elle est nécessaire, la réduire.

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Avec notre partenaire

Certains biologistes parlent de la 6e grande vague d’extinction. Nous connaissons tous l’histoire des dinosaures. Il est également compréhensible que de nombreux animaux n’aient pas survécu aux périodes glaciaires. Mais aujourd’hui ? Quelles peuvent en être les raisons ? Les études actuelles montrent que dans le cas des oiseaux, le changement climatique n’est pas le principal facteur. Au contraire et surtout sous nos latitudes, certaines espèces d’oiseaux bénéficient du développement actuel. Mais l’homme est quand même responsable - et cela est dû à sa consommation d’espace.

Le Luxembourg est marqué par de magnifiques paysages naturels tels que les collines boisées de l’Ösling, les terres cultivées variées de la Minette et de la Moselle, et une mosaïque colorée de zones agricoles et d’agglomérations.

Fragmentation

Cependant, au vu de la croissance démographique actuelle, ces agglomérations s’étendent de plus en plus, autant pour les villes que pour les villages. Ainsi, des structures développées au fil des années à proximité des agglomérations comme les vergers ou d’autres bosquets, doivent parfois céder la place au développement.

Parallèlement, l’agriculture continue de se développer. Afin de rester compétitif au niveau national et international, les méthodes de cultivation s’adaptent et se technologisent. Des terres auparavant non cultivées - des sites à faible rendement ou des bords difficilement accessibles - sont désormais utilisées.

Et parce que l’homme moderne est mobile et qu’il exige un haut degré d’échange de biens, nous avons également besoin d’infrastructures suffisamment dimensionnées. Celles-ci sont inévitablement réalisées dans les espaces libres restants. La fragmentation du paysage qui en résulte entrave les voies de migration des animaux sauvages et empêche l’échange génétique des populations.

Même si un changement de mentalité de la population est perceptible, la pression d’utilisation sur les zones libres si précieuses pour les espèces animales et végétales sauvages, ne cesse d’augmenter. Mais quoi faire ? Dans un pays d’environ 2500 km2, la surface est une denrée rare.

En cas de fragmentation du paysage, des ponts verts ou des passages souterrains peuvent être mis en place. Bien qu’idéalement intégrée lors de la planification d’un projet, une installation postérieure peut encore s’avérer efficace.

Un fil conducteur dans les projets

L’intensification de l’agriculture est contrée par des programmes soutenus par l’État. Le guide agricole de 2017 sur la biodiversité est à l’origine de programmes ciblés pour générer des niches et des retraits écologiques. Les programmes relatifs aux prairies et aux pâturages, ainsi que les programmes concernant les bordures des champs tels que les bandes fleuries ou jachères ne sont que quelques exemples.

Pour réduire la consommation d’espace, la planification reste le point d’attaque le plus important.

Pour L.S.C. Engineering Group, l’utilisation durable de nos ressources est le fil conducteur de nos projets. Il est de notre responsabilité non seulement de conseiller et d’accompagner nos clients lors de la réalisation de leur projet de construction, mais aussi d’attribuer une importance toute particulière à la durabilité du projet.

Cela signifie concrètement : éviter l’intervention si possible, la réduire si nécessaire.

Une mesure d’évitement est de préserver les structures hébergeant un habitat et de les intégrer dans la planification. La préservation d’un arbre remarquable ou d’une rangée d’arbres a toujours une valeur écologique nettement supérieure à celle d’une nouvelle plantation qui ne remplit une fonction écologique importante qu’après plus de 20 ans.

Parmi les bonnes-pratiques d’aménagement paysager, les bandes vertes, les prairies fleuries, les zones de rétention d’eau de haute qualité écologique ou même les toitures vertes ou façades végétalisées peuvent fournir un habitat supplémentaire. Certaines solutions techniques peuvent aider à optimiser l’habitat des chauves-souris et oiseaux par exemple. Ainsi, des solutions élégantes de nichoirs intégrés ou non dans les immeubles peuvent créer de nouveaux habitats.

Certes, cela favorise surtout les espèces qui suivent l’être humain dans les agglomérations, mais ces quartiers restent structurellement plus riches. Dans ces conditions nous pouvons encore, espérons-le, observer les oiseaux dans le jardin avec nos petits-enfants.

Article de Markus QUACK, Coordinateur de Service Environnement (LUXPLAN/L.S.C. Engineering Group) et Carine KOLBER, Directrice de Département QSE2 (SIMON-CHRISTIANSEN & Associés/L.S.C. Engineering Group)

Connaissez-vous la Pie-grièche grise (Lanius excubitor) ? Les chances sont petites… Il est probable que personne au Luxembourg ne la reverra. Actuellement, les peuplements sont en forte diminution. Vers 2000, 137 sites de reproduction étaient connus sur l’ensemble du territoire luxembourgeois. En 2012, il ne restait plus que 26 sites - et ceux-ci se trouvaient uniquement dans l’est et au nord du pays. Statut 2018 : 6 sites de reproduction !

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Enjeux sans frontières
Enjeux sans frontières

La nature a ses limites, mais ce ne sont pas celles des États ou des régions. L’Union européenne a ses priorités politiques bien définies et des programmes financiers pour les implémenter. La capillarité des aides permet de mener à bien des programmes locaux qui pensent et agissent globalement.

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En avril dernier, un document de travail des services de la Commission européenne faisait l’examen du Luxembourg en regard de la mise en œuvre de la politique environnementale de l’Union européenne. Les conclusions du rapport notent des « progrès concernant la pollution des eaux par les nitrates », tout en soulignant que la « concentration en nitrates dans les eaux souterraines et l’état trophique des eaux de surface continuent de poser problème » et en observant que le pays « a respecté les exigences de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires ».

Sur le volet protection de la nature, le rapport salue des « progrès considérables réalisés grâce à l’adoption de mesures de conservation et à la définition de plans de gestion pour l’ensemble des sites depuis 2015 ». Et remarque que 27,03 % de la superficie nationale relèvent de Natura 2000, alors que la moyenne dans l’Union est à 18,1 %.

L’ambition remarquée

Même si « la fragmentation de l’habitat et la perte de biodiversité continuent d’exiger une attention particulière », l’instance cite quelques bonnes pratiques. Comme les aspects environnementaux du développement rural : « presque 28 % des terres agricoles au Luxembourg devraient faire l’objet de contrats de gestion pour améliorer la gestion des eaux. Près de 11 % feront l’objet de contrats pour améliorer la gestion des sols. Plus de 90 % feront l’objet de contrats de gestion pour stimuler la biodiversité ».

La Commission salue le côté « ambitieux » du plan national pour la protection de la nature (PNPN) et de ses objectifs - actions « Espèce » et « Habitat », rétablissement des écosystèmes, défragmentation des paysages, accélération de la mise en place des zones de protection et de leur gestion, achat d’espaces naturels... Le tout étant encadré par une loi (juin 2018) pour la protection de la nature et des ressources naturelles, venue renforcer la législation existante.

Transfrontaliers et locaux

La stratégie européenne pour la biodiversité a pu appuyer des actions nationales et transnationales, notamment via un Programme européen d’actions Environnement de l’Europe, des programmes Life, ou encore par le biais des programmes de soutien à la coopération transfrontalière, type Interreg, Feder...

Interreg III A Wallonie-Lorraine-Luxembourg (un espace de plus de 24 000 km2 pour une population de 2,6 millions d’habitants), dont un des axes visait la biodiversité et les milieux naturels, a encouragé les initiatives cofinancées par l’Europe, des budgets nationaux ou régionaux, avec des apports du secteur privé. Idem pour Interreg V Grande Région.

Par capillarité, il existe désormais des stations d’épuration transfrontalières et des programmes de gestion de l’eau (entre Lorraines française – Gorcy - et belge – Musson - par exemple, ou entre Arlon et Steinfort) ou des gestions communes de bassin hydrographique (les eaux de l’Attert qui s’écoulent vers la Sûre et le bassin de la Moselle).

Les projets locaux s’enhardissent aussi. À l’image de la ville de Metz, inscrite dans le Quattropole (Luxembourg, Metz, Sarrebruck et Trèves, à l’origine de ce groupement de villes, qui a notamment lancé un programme biodiversité dès 2010), qui anticipe des prévisions de solide hausse des températures dans 25 ou 30 ans : 85 essences d’arbres, arbustes et végétaux ont été identifiées, dont les vertus pourront aider à survivre dans la cité.

Alain Ducat
Légende photo : Des programmes européens, comme Life, appuient des projets régionaux, de renaturation par exemple. (photo natur&ëmwelt)

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