Le dossier du mois

Une thématique dans chaque #DossierDuMois, avec la rédaction d’Infogreen et l’expertise de nos partenaires

Publié le 27 juin 2016
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juin 2016

L’affaire de tous et la responsabilité de chacun

Le développement durable est la matière transversale par excellence : elle englobe des thématiques aussi nombreuses que diverses, qui s’entrecroisent et influent les unes sur les autres selon le principe des vases communicants. Nous avons donc choisi, dans ce 1er Dossier du mois, d’aborder sous un angle de vue panoramique ce sujet qui l’est tout autant, afin de poser le contexte pour les prochains opus.

L'affaire de tous et la responsabilité de chacun
Edito
Edito

Le développement durable est la matière transversale par excellence : elle englobe des thématiques aussi nombreuses que diverses, qui s’entrecroisent et influent les unes sur les autres selon le principe des vases communicants. Nous avons donc choisi, dans ce 1er Dossier du mois, d’aborder sous un angle de vue panoramique ce sujet qui l’est tout autant, afin de poser le contexte pour les prochains opus.

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Le développement durable est l’affaire de tous et la responsabilité de chacun, donc celle des entreprises, chez lesquelles développement durable, responsabilité sociétale ou encore économie circulaire sont des notions qui résonnent de plus en plus fort, comme en témoigne, dans ce dossier, Norman Fisch, coordinateur de l’INDR, qui a labellisé 114 entreprises et sensibilisé 900 organisations à la RSE en 6 ans d’existence.

Du côté d’IMS aussi, on note un intérêt grandissant des organisations pour ces questions. Christian Scharff et Nancy Thomas, respectivement président et directrice de l’organisme, indiquent qu’avec 170 entreprises signataires de la Charte de la Diversité, soit 15% de la masse salariale, le Luxembourg est le 1er pays européen en la matière.

Luxembourg
Luxembourg - 1

Pour mieux comprendre comment ce sens des responsabilités se concrétise sur le terrain, nous avons rencontré Vincent Robinet, Project Manager chez Enovos. Le groupe constate une sensibilité grandissante des employés à l’égard de la marque employeur et il va dans ce sens en leur fournissant -certifications à l’appui- un environnement de travail moderne, confortable, sain et énergétiquement performant et, au-delà de cela, des plans de carrière et de formation pour leur permettre de “s’épanouir tout au long de leur carrière et de faire évoluer leurs compétences’’. 

Si la RSE fait son chemin, elle n’est toutefois pas nouvelle pour l’artisanat, qui a le développement durable dans les gènes. C’est en tous cas ce que scande Tom Wirion, directeur de la Chambre des Métiers : “Les entreprises artisanales sont naturellement socialement responsables, en ce sens qu’elles sont enracinées dans le tissu local et régional’’. Et Bruno Renders, directeur du CDEC, d’ajouter que les entreprises de construction ont su démontrer leurs capacités d’adaptation face aux exigences européennes en matière d’efficacité énergétique des bâtiments. Ce sont les entreprises artisanales aussi qui sont à l’origine d’initiatives comme la SuperDrecksKëscht qui incarnait déjà l’économie circulaire des années avant que l’expression soit en vogue.

Bernard Mottet, CEO de l’asbl Ecotrel qui chapeaute la collecte et le traitement des déchets au Luxembourg -donc la SuperDrecksKëscht-, souligne, quant à lui, que “L’économie circulaire ne peut fonctionner que si elle s’articule sur le principe de responsabilité du producteur qui doit, à la base, produire de façon écologique, idéalement utiliser des matières premières recyclées et concevoir ses produits avec une approche écodesign permettant de prolonger leur utilisation’’. Ceci dit, ce que le producteur conçoit et fabrique est fonction de ce que le consommateur est prêt à acheter.

Encore une fois, le développement durable est l’affaire de tous et la responsabilité de chacun, à commencer certainement par celle des pouvoirs publics qui, au Luxembourg, affichent leur engagement en faveur d’une croissance soutenable.
Le pays est, pour l’instant, en phase avec les objectifs qu’il s’est fixé dans le cadre des engagements pris lors de la Cop 21, fin 2015. C’est la bonne nouvelle dont nous fait part la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg, dans l’interview exclusive qu’elle nous a accordée. Elle ne se repose pas sur ses lauriers pour autant : “Beaucoup reste à faire si nous voulons atteindre nos objectifs nationaux à moyen et long terme en matière de protection du climat’’, précise-t-elle.
Le développement durable ne peut se concevoir sans une politique de mobilité qui favorise transports en commun et mobilité douce. La mobilité est, en effet, un des piliers sur lequel repose l’accès aux zones d’activités, de services ou de commerce, la sécurité, la réduction des émissions de CO2, donc une économie en bonne santé, une société saine et conviviale et un environnement préservé.

A la une de notre dossier, François Bausch, ministre du Développement durable et des Infrastructures, annonce “un saut qualitatif gigantesque en matière de mobilité“, à l’horizon 2021. Et ce, tant dans la variété de l’offre que dans la qualité du transport. Il mise sur le covoiturage, le tram, mais aussi sur de nouvelles gares et des P+R supplémentaires, le tout interconnecté grâce à un système de pôles d’échange bien pensé. Tout cela devrait être d’autant plus efficace que plusieurs projets transfrontaliers sont relancés notamment par l’arrivée d’un nouveau ministre belge aux transports.

Christian Scharff insiste sur le fait que “ce qui fait le succès des actions d’IMS est l’implication de la sphère publique’’. Ce qui est vrai pour IMS s’applique à l’ensemble des initiatives prises par les différents acteurs privés emblématiques du développement durable. Et ce soutien politique très fort, cette volonté de travailler main dans la main avec le secteur privé, est sans doute une des forces du pays.

J’en veux pour preuve le lancement du projet 3e révolution industrielle, une 1re mondiale pour un état, à l’instigation conjointe d’IMS, de la Chambre de Commerce et du ministère de l’Economie.

Mélanie Trélat

Le bout du tunnel
Le bout du tunnel

Avec la mise en circulation du tram, la création de pôles de connexion avec les autres modes de transport, la prolongation de certaines lignes de train et l’incitation au covoiturage, François Bausch, ministre du Développement durable et des Infrastructures, promet “un saut qualitatif gigantesque en matière de mobilité” d’ici 2020.

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Avec l’arrivée de François Bellot au ministère des Transports belge, la création d’un P+R à Stockem est de nouveau à l’ordre du jour. Le projet se concrétisera-t-il ? Et dans quels délais ?

Cette question doit être discutée en juillet, mais les deux gouvernements ont déjà conclu un accord de principe et je suis très optimiste quant au fait que le projet aboutira rapidement, car le ministre est très dynamique sur ce dossier et il a pleinement conscience de l’opportunité qu’il représente.

Certains aménagements devront être réalisés, notamment les accès et le prolongement de certaines lignes d’Arlon jusqu’à Viville. Les deux gouvernements devront également élaborer un modèle de tarification transfrontalière pilote qui soit attractif pour les usagers.

Compte tenu de ces différents éléments, j’estime qu’un parking de 1.000 emplacements en surface pourrait être opérationnel pour le changement d’horaire en décembre 2017.

On démarre avec 1.000 places et à terme ?

Je crois que ce projet a un fort potentiel, mais il faudra le développer au fur et à mesure. Nous avons un intérêt commun à le faire : les usagers bénéficieront d’un meilleur accès à leur travail, les routes seront décongestionnées en Belgique comme au Luxembourg, et la SNCB aussi bien que les CFL gagneront de nouveaux clients en contrepartie d’un investissement modéré. En créant une tarification commune, les frais seront partagés entre les 2 pays et je suis persuadé que nous n’enregistrerons pas de pertes car la baisse des tarifs liée à la mise en place d’un système d’abonnement sera compensée par l’augmentation de l’utilisation des trains.

Le MDDI a-t-il d’autres projets dans les cartons visant à améliorer la mobilité transfrontalière ? Pourriez-vous nous citer quelques-uns ?

Le ministre belge a pris l’initiative de relancer le projet des trains à grande vitesse Pendolino entre Bruxelles et Luxembourg, ce que j’ai beaucoup apprécié et ce pour quoi je suis très partant. Si nous parvenons à nous mettre d’accord avec notre homologue suisse, également concernée par ce projet, Luxembourg pourra être reliée à Bruxelles en moins de 2 heures à raison de 4 trains par jour d’ici 2022, date à laquelle la rénovation de la ligne Bruxelles-Arlon sera achevée.

De notre côté, nous avons énormément investi dans la ligne jusqu’à Kleinbettingen qui sera bientôt terminée et, dès que la nouvelle gare Pfaffenthal sera opérationnelle, en 2019, nous prolongerons les trains en provenance d’Arlon vers Dommeldange, avec un arrêt à Pfaffenthal. Les usagers pourront alors emprunter le funiculaire pour rejoindre le Kirchberg.

A partir de fin 2017, la mise en circulation du tram permettra d’améliorer considérablement la mobilité dans et autour de la capitale. 

Un dernier projet, enfin : nous envisageons de lancer, courant 2017, une application mobile de Car Pooling, qui sera probablement assortie à un système de bonification financière ou autre pour favoriser l’utilisation du covoiturage.

Selon les prévisions, 60.000 personnes se rendront chaque jour au Kirchberg en 2030. Est-ce que le tram sera suffisant pour endiguer ce flot ?

Le tram a une capacité journalière de 110.000 passagers et il roulera à une cadence d’une rame toutes les 3 minutes aux heures de pointe. Il offrira une qualité de transport très élevée (peu de secousses, une connexion wifi gratuite) et la garantie de ne pas rester coincé dans les embouteillages puisqu’il roule sur site propre. Je suis donc très confiant dans son succès.

Son efficacité sera renforcée par la création de 9 pôles d’échange avec le train, le bus et la voiture. 4 nouveaux P+R seront construits : à la Cloche d’or (2.000 places), près de l’aéroport (4.000 places), à Luxexpo (500 places) et, d’ici 2020, à Rodange (2.000 voitures), et le P+R d’Howald sera agrandi. 2 gares ferroviaires supplémentaires seront créées à Howald et Pfaffenthal, celle d’Hollerich sera transformée pour pouvoir accueillir les trains en provenance d’Arlon.

D’ici 2020/2021, nous ferons un saut qualitatif gigantesque en matière de mobilité.

Mélanie Trélat

Le développement durable dans les gènes
Le développement durable dans les gènes

Créatrices de valeur au niveau local et proches de leurs employés, clients et fournisseurs, les entreprises artisanales sont naturellement durables. Il ne leur reste plus qu’à structurer et à promouvoir leurs actions en la matière.
Interview de Tom Wirion, directeur de la Chambre des Métiers.

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L’artisanat contribue-t-il à un développement durable ?

L’artisanat embrasse le développement durable dans son entièreté : il produit, vend et crée de l’emploi localement et régionalement, il utilise les énergies renouvelables et applique la stratégie du gouvernement en termes d’efficacité énergétique des bâtiments.

Comment la Chambre des Métiers soutient-elle les entreprises dans la mise en place d’actions ou de politiques internes qui vont dans ce sens ?

La maison passive deviendra standard à partir du 1er janvier 2017, ce qui constitue une énorme opportunité pour l’ensemble du secteur de la construction et les métiers qui gravitent autour. A titre d’exemple, dans ce contexte, la Chambre des Métiers soutient les entreprises par des formations qui s’adressent d’une part aux planificateurs et sont alors validées par l’obtention du label Energie fir d’Zukunft + et, d’autre part, en partenariat avec l’IFSB, à ceux qui doivent faire les bons gestes sur le terrain.

Les entreprises artisanales se sentent-elles concernées par la responsabilité sociétale qu’elles peuvent avoir ?

Les entreprises artisanales sont naturellement socialement responsables, en ce sens qu’elles sont enracinées dans le tissu local et régional. Elles connaissent leurs clients, leurs fournisseurs et, avec une moyenne de 12 employés, elles sont proches de leurs collaborateurs. Elles manquent souvent de main d’œuvre qualifiée, elles ont donc un intérêt à garder leur personnel, à le former pour lui permettre d’évoluer. Elles jouent également un rôle dans la lutte contre le chômage car elles proposent des postes qui peuvent convenir à des personnes peu qualifiées. Enracinées, elles le sont aussi par leur implication dans la vie locale, hors du cadre du travail, par exemple à travers le soutien financier et opérationnel qu’elles apportent aux clubs de sport et autres associations.

Ce qui leur manque cependant, c’est la visibilité de leur engagement. Celui-ci est vécu naturellement sans qu’il y ait de communication autour de leurs initiatives, d’où l’intérêt de labels comme celui de l’INDR pour les aider à mettre en avant les efforts qu’elles font spontanément.

Est-ce que la nouvelle approche de la conception et de la production liée à la notion d’économie circulaire va révolutionner l’artisanat ? Si oui, pour le meilleur ou pour le pire ?

Tout d’abord, l’économie circulaire n’est pas un concept fondamentalement nouveau pour l’artisanat. J’en veux pour preuve l’initiative Valorlux ou la Superdreckskëscht qui est née, il y a de nombreuses années, de la nécessité pour les garagistes de trouver une solution pour traiter les huiles usagées et qui a aujourd’hui gagné tous les autres secteurs économiques.

Ceci dit, elle offre de nouvelles perspectives, donc la nécessité de changer. Le potentiel se situe particulièrement dans le savoir-faire pour maintenir ou réparer des produits et dans la faculté à construire des immeubles 100% recyclables. On pourrait très bien imaginer un partenariat entre les fabricants de matériaux et les entreprises de construction, ce qui aboutirait à une configuration win-win pour le constructeur, le producteur, mais aussi pour le consommateur.

L’économie circulaire ouvre des perspectives, mais elle présente aussi des risques pour certains métiers, auxquels il faut rester vigilants et se préparer en revoyant nos business models de manière à ce que certains métiers continuent à exister. Citons, par exemple, les concessionnaires qui risquent de vendre moins de voitures. Sera-t-il possible que les garagistes puissent mettre à disposition de leurs clients des systèmes de carsharing du fait de leurs liens avec les constructeurs automobiles ?

Si on anticipe ce changement, il sera une chance, comme c’est le cas pour la digitalisation qui va ne fera pas disparaître l’artisanat, contrairement à ce qu’on entend parfois, mais le fera certainement changer de visage.

Mélanie Trélat

Les bâtiments prennent une dimension nouvelle
Les bâtiments prennent une dimension nouvelle

Le secteur de la construction est au cœur d’une révolution qui vise à donner aux bâtiments des fonctions que Bruno Renders, directeur du CDEC, qualifie de nobles dans le sens où elles rendent un service sociétal.
Interview.

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Développement durable et construction font-ils bon ménage ?

Beaucoup d’initiatives ont déjà été prises soit de manière volontariste, soit parce que le marché induit l’adaptation des entreprises.

A titre d’exemple d’initiative volontariste, beaucoup d’entreprises pratiquent le tri sélectif et sont donc labellisées SuperDrecksKëscht, ce qui est un modèle appliqué d’économie circulaire. La construction étant un gros émetteur de déchets, cette démarche a forcément du sens.

En ce qui concerne le marché, les exigences européennes en matière de performance énergétique des bâtiments ont obligé le secteur à passer en 5 ans -de 2012 à 2017- de la maison basse énergie à la maison passive, ce qui met en évidence sa capacité à intégrer des points de vue technique et économique le développement durable.

Sur le pilier social, il y a certainement beaucoup à faire encore, notamment en matière de sécurité, mais la nécessité de former les salariés est pleinement intégrée. Les chiffres le démontrent : l’IFSB enregistre cette année une croissance à deux chiffres de sa fréquentation par rapport à l’année passée, qui était déjà une année exceptionnelle.

Par quelles actions soutenez-vous la notion d’économie circulaire ?

Nous sommes en train d’élaborer une méthodologie qui permet d’attribuer les marchés de la construction autrement qu’en ne considérant que le facteur prix, mais en tenant compte également de critères extra-financiers. Ceci afin de permettre à des entreprises qui sont circulaires par excellence, puisqu’elles emploient du personnel local ou régional et qu’elles ont un rôle à jouer dans l’économie luxembourgeoise, de faire valoir leur capacité d’innovation, leur ancrage local, leurs investissements dans la sécurité ou la formation, par exemple.

Nous le faisons aussi à travers le recours à des matériaux développés localement, derrière lesquels il y a des emplois, des cotisations sociales, de la TVA… C’est le cas dans le Neobuild Innovation Center qui met en œuvre et va permettre de faire évoluer des matériaux locaux.

La serre qui se trouve sur le toit de ce bâtiment en est également un exemple concret…

L’agriculture urbaine fait partie des fonctions nobles des bâtiments au même titre que la production et le stockage d’énergie.

Elle repose sur un constat évident : il est plus logique de manger la salade qui vient de son toit que celle qui a parcouru 500 kilomètres en camion pour arriver dans notre assiette.

La toiture est un élément qu’on néglige. Pourtant, cet espace disponible peut être valorisé économiquement. Une serre urbaine permet de récupérer et de réutiliser l’air chaud extrait des bâtiments, et d’économiser ainsi environ 50% de la chaleur nécessaire pour réchauffer une serre sur un terrain agricole, tout en ayant un rendement de 30 kg de légumes par m2. La serre a, de plus, une fonction de filtration de l’air vicié puisque les plantes absorbent le CO2 pour ne rejeter que de l’oxygène. Sans parler du fait qu’elle ajoute du végétal en ville et qu’elle génère une distribution en circuit court, avec toutes les contraintes économiques et environnementales liées au transport que cela permet d’éviter.

Le Luxembourg a l’espace et le dynamique immobilier nécessaires pour pouvoir cultiver sur ses toits 100% des légumes qu’il consomme. La serre urbaine de Neobuild et les projets d’installation de serres de plus grande taille sur d’autres toitures au Luxembourg sont là pour démontrer que c’est possible.

Mélanie Trélat

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Faire bouger les lignes
Faire bouger les lignes

Ne pas subir les évolutions inéluctables de notre modèle économique, mais en être acteur à travers une véritable stratégie sur les sujets liés au développement durable, c’est l’objectif d’IMS pour le Luxembourg.

Interview de Nancy Thomas, directrice, et Christian Scharff, président d’IMS Luxembourg.

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En introduction, quelle est votre vision du développement durable aujourd’hui au Luxembourg ? Est-ce qu’il y a une conscience et une intégration de ses enjeux ?

CS : Le sujet commence véritablement à s’enraciner dans le monde de l’entreprise et le monde politique. Nous constatons une réelle volonté de faire avancer le pays sur ces sujets. Nous sentons qu’il y a de plus en plus de curiosité sur le sujet et d’envie de prendre des initiatives qui vont dans le bon sens. Toutes les organisations ne sont néanmoins pas au même niveau. Le développement durable est une notion extrêmement large, certains sujets sont plus simples à aborder que d’autres, certains processus plus légers à intégrer que d’autres, mais il n’y a plus beaucoup d’entreprises qui ne sont pas actives sur au moins une des thématiques.

A quoi les différences de niveau entre les organisations tiennent-elles ?

CS : C’est une question de leadership. Il faut que le sujet soit porté par une ou plusieurs personnes qui ont une conviction forte et qui ont l’autorité, la visibilité ou les compétences nécessaires pour le faire.

Vous êtes à l’origine du projet de 3e révolution industrielle avec le ministère de l’Economie et la Chambre de Commerce. Où en sont les travaux ?

NT : Le projet a été lancé en septembre 2015, lors du forum d’IMS. Il s’agit d’une étude stratégique portant sur 6 piliers (énergie, mobilité, alimentaire, finance, agriculture, industrie et bâtiments) et 3 axes transversaux (digital et smart economy, économie circulaire, modèle social et prosumers), avec une approche “bottom up“.
Les groupes de travail ont commencé à réfléchir sur chacun de ces points en janvier. 250 personnes issues d’entreprises de tous secteurs, d’institutions et de la société civile y ont participé et ont fourni 2.500 heures de volontariat.

Ces groupes ont envoyé des notes aux équipes de Jeremy Rifkin (ndlr : économiste américain dont les théories ont inspiré le projet de 3e révolution industrielle), qui ont réagi sur chaque thématique. Les 18 experts de Rifkin et les 18 experts nationaux qui ont piloté les groupes se sont réunis il y a quelques semaines. Ils ont confronté leurs vues et dégagé des pistes de travail en vue d’élaborer une vision stratégique nationale pour 2050. Nous faisons maintenant des aller-retours entre les deux équipes pour valider la stratégie et les projets concrets qui seront développés. Tout cela sera présenté le 14 novembre, lors du forum d’IMS.

Vous menez également des activités pour favoriser la ‘durabilité’ des territoires. De quels types d’initiatives s’agit-il ?

NT : Nous sommes actifs sur plusieurs territoires où notre objectif est de déterminer comment mutualiser, échanger et partager entre voisins sur des questions aussi diverses que la mobilité, les achats, le bien-être, l’alimentation, les déchets ou l’énergie.

CS : Nous obtenons des résultats très concrets. Par exemple, sur la zone d’activités Bourmicht à Bertrange qui regroupe 6.000 salariés et qui, jusqu’à il y a peu, n’était pas desservie par les transports en commun, nous avons réuni les politiques, les entreprises, les sociétés de transports et aujourd’hui, une ligne de bus qui relie la gare au Cactus avec un arrêt à Bourmicht. Nous sommes des facilitateurs.

On ne peut pas parler d’IMS sans parler de diversité. Un état des lieux de la situation et des actions menées pour la faire progresser ?

CS : Le Luxembourg, avec 48% de ses habitants qui sont des non-nationaux, présente, par essence, une diversité culturelle extrêmement forte.

IMS a créé une Charte de la diversité il y a 5 ans. Elle est la 1re charte européenne avec 170 entreprises affiliées, soit 15% de la masse salariale. C’est un sujet que les entreprises ont pris à bras le corps car il est stratégique, en ce sens que la ressource humaine est aujourd’hui de plus en plus compliquée à trouver et à garder. Nous avons également institué une Journée nationale de la diversité. Ce qui fait le succès de nos actions en la matière est l’implication de la sphère publique. IMS est une émanation patronale. Nous travaillons avec et pour les entreprises mais, sur de nombreux sujets, dont la diversité, nous le faisons en un partenariat très proche avec le public. Lors du Diversity Day, le 12 mai, Corinne Cahen, ministre de la Famille et de l’Intégration, s’est rendue avec nous dans les entreprises pour répéter l’importance du sujet et ce n’est pas que ce jour-là qu’elle est à nos côtés.

La RSE gagne du terrain
La RSE gagne du terrain

A travers son Guide ESR, l’INDR propose une approche holistique et structurée de la RSE pour permettre aux organisations d’évoluer efficacement.
Interview de Norman Fisch, coordinateur de l’INDR.

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Comment définissez-vous la RSE ?

L’INDR promeut la RSE comme l’ensemble des moyens et outils mis à la disposition des entreprises pour contribuer au développement durable, le développement durable étant défini par des thématiques liées à l’environnement, au social et à l’économique.

Le concept avance-t-il au Luxembourg ?

La 1re version de notre Guide ESR a été élaborée en 2010 en collaboration avec les pionniers de la RSE au Luxembourg : la Chambre de Commerce, la Chambre des Métiers, mais aussi des entreprises et des acteurs du monde associatif. Il a été réévalué il y a 3 ans pour proposer une approche simplifiée de la thématique.

En 6 ans, nous avons sensibilisé plus de 900 organisations et attribué 114 labels. Nous constatons que le concept est de mieux en mieux compris par les entreprises, qui commencent à afficher qu’elles l’ont entendu.

Quel type d’impact les entreprises peuvent-elles avoir sur la société ?

Elles peuvent avoir un impact en réduisant leur consommation de matière première, d’énergie, en essayant de faire mieux avec moins de ressources. Mais la véritable dimension du changement s’opère lorsque l’entreprise réévalue son modèle de fonctionnement, ses processus, sa stratégie pour préserver l’environnement et la société tout en créant de la valeur pour elle-même. Et ce, à l’aide d’outils de gouvernance. Les entreprises ont un rôle à jouer et il est fondamental qu’elles ne mettent pas en péril leur projet en ne regardant que des aspects externes, mais qu’elles considèrent aussi leur organisation interne.

Le gouvernement se positionne sur le sujet de l’économie circulaire, à travers des projets comme celui de 3e révolution industrielle, qui est aussi porté par la Chambre de Commerce, qui est un des membres de l’INDR. Y a-t-il un lien ou une différence à faire entre RSE et économie circulaire ?

L’économie circulaire se concentre, comme son nom l’indique, sur le volet économique, sur la manière dont l’entreprise peut, à travers une reconfiguration de ses processus et le recyclage des ressources qu’elle utilise, impacter le moins possible l’environnement. La transformation des produits en services en est une conséquence.

La RSE prend en compte ces aspects, mais elle est plus holistique. Elle concerne les 3 piliers du développement durable, à savoir les dimensions économiques, sociales et environnementales, mais aussi la sphère des produits et services, qui sont des ressources transformées pour nous simplifier la vie et apporter des solutions à nos problèmes quotidiens. La RSE considère la façon dont l’entreprise agit sur ces 4 points et dont elle se positionne par rapport à une société dont elle dépend en même temps qu’elle influe sur elle à travers ses actions, ses décisions, ce qu’elle produit et ce qu’elle consomme.

Les principes d’économie circulaire sont donc repris dans votre référentiel. De quelle manière ?

Absolument ! Et ils en sont une partie très importante. Nous insistons sur le fait que les entreprises doivent adopter une approche d’écoconception, considérer la notion de “cradle to cradle’’, imaginer comment leurs produits sont utilisés, ce qui se passe après leur utilisation, de quelle manière on peut récupérer les matières premières pour les réutiliser… Mais la RSE est une approche qui dépend du contexte. Le Guide ESR est donc adapté à la taille de l’entreprise et à son secteur d’activité.

Mélanie Trélat

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En route pour demain
En route pour demain

Conscient que le personnel est de plus en plus en recherche de sens dans son travail, le fournisseur d’énergie verte Enovos offre d’ores et déjà à ses employés un environnement qui augure l’entreprise du futur.
Interview de Vincent Robinet, Project Manager chez Enovos.

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Le slogan d’Enovos est “Energy for today. Caring for tomorrow“. Comment se traduit-il dans les faits ?

Il est directement en rapport avec la mission d’Enovos, dont l’objectif est de fournir une énergie fiable, durable et pas uniquement ancrée dans le présent. Il suppose la prise en compte des intérêts de toutes nos parties prenantes pour assurer l’approvisionnement énergétique aujourd’hui et demain.

Plus concrètement, ce slogan rappelle, en une ligne, à tous nos collaborateurs, la vision du groupe et nous permet d’étalonner nos actions. Pour chacune des décisions stratégiques que nous prenons, nous nous posons la question de savoir si elle est en adéquation avec cette vision.

A travers quelles actions mettez-vous en œuvre les enjeux du développement durable ?

Au niveau économique, l’investissement dans les énergies renouvelables, qui est au cœur de notre métier, est intrinsèquement durable. Enovos veut être un acteur moteur de la transition énergétique, dans le cadre de laquelle on passe d’une production énergétique centralisée à une production décentralisée, d’où la décision d’investir dans des installations de production d’énergie renouvelable et de développer des services énergétiques innovants.

De nombreux efforts sont également affectés à l’éthique d’entreprise, un sujet très important pour nous notamment dans le cadre de la loi sur la séparation entre l’opérateur de réseau et le fournisseur d’énergie. Ces efforts se traduisent notamment par des formations Compliance & Business Ethics dédiées au personnel.

Au niveau social, nous constatons que le personnel est de plus en plus sensible à la marque employeur. Il attend plus qu’une rémunération pour son travail. Enovos va dans ce sens en fournissant un cadre de travail agréable, dans un bâtiment certifié BREEAM et HQE, aussi bien pour sa qualité de conception et les matériaux qui le composent, que pour ses caractéristiques en matière de qualité de vie.
Le label Sécher & Gesond mat System montre l’intérêt du groupe pour les thématiques liées à la santé et à la sécurité.

Le mois dernier, nous avons également obtenu la certification ISO 50.001 pour notre management de l’énergie dans nos bâtiments.
Au-delà de cela, les plans de carrière et de formation sont un sujet que notre service de ressources humaines a à cœur et il travaille pour que les employés du groupe s’épanouissent tout au long de leur carrière et que leurs compétences évoluent au même rythme que les métiers de l’énergie.

Quelle est votre vision du rôle et du fonctionnement de l’entreprise de demain ?

Nous nous dirigeons vers des modèles décentralisés et collaboratifs où l’employé ne considère plus uniquement son travail comme un moyen de subsistance, mais cherche à participer pleinement à un projet d’entreprise, à communiquer son opinion au sein d’une équipe avec un management moins directif qu’auparavant. Cela a un impact énorme sur la façon de recruter et de garder des talents. Je pense que les entreprises qui seront à même de proposer des conditions en adéquation avec la recherche de sens des talents d’aujourd’hui auront un avantage décisif sur leurs concurrentes.

Les progrès technologiques ont une incidence sur de nombreux métiers. Cette évolution, qui peut faire peur, est à considérer comme une opportunité : les personnes seront formées sur des thématiques sur lesquelles la réflexion humaine est nécessaire et les métiers de demain seront d’autant plus intéressants qu’ils seront débarrassés des tâches répétitives qui peuvent être robotisées ou déléguées à des intelligences artificielles.

Mélanie Trélat

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Enovos enovate mobility
Enovos enovate mobility - 1
Donner ses anciens appareils en vue de leur réutilisation peut s'avérer être une fausse bonne idée
Donner ses anciens appareils en vue de leur réutilisation peut s’avérer être une fausse bonne idée

CEO d’Ecotrel, l’asbl qui chapeaute la collecte et le traitement des équipements électriques et électroniques en fin d’utilisation, Bernard Mottet nous livre son point de vue sur la notion de responsabilité du producteur et du consommateur et sur le trafic illégal de déchets vers les pays en développement.
Interview.

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Le Luxembourg est-il un gros consommateur et un bon recycleur d’équipements électriques et électroniques ?

Le pays est naturellement un gros consommateur de ce type d’équipements, vu le nombre de sociétés à caractère administratif, donc d’ordinateurs, qu’il regroupe. Son P.I.B. y est également pour quelque chose. Mais il est aussi un des meilleurs collecteurs d’Europe avec plus de 10 kilos par habitant en 2015.

Qu’advient-il de ces objets une fois collectés ?

Nous mettons à disposition des professionnels deux centres de tri et de regroupement : un à Colmar Berg, celui de la SuperDrecksKëscht, et l’autre à Bettembourg, celui de Lamesch.
A Bettembourg, nous procédons au démontage manuel des déchets, ce qui permet d’obtenir des fractions plus pures en sortie, fractions qui sont ensuite réparties dans 35 usines de traitement spécialisées dans un rayon de 300 km autour du Luxembourg. Par exemple, après broyage, électrolyse et refonte des différents métaux, les circuits imprimés peuvent receler de l’or.

Ce rayon devrait encore se restreindre dans les années à venir à la suite de l’introduction d’écotaxes sur les autoroutes. Notre système ne peut fonctionner que s’il est économiquement supportable, les coûts de transport ne doivent donc pas dépasser les coûts de traitement.

Pourquoi ne pas traiter les déchets au Luxembourg ?

C’est une question de volume. Nous ne produisons pas assez de déchets pour rentabiliser des installations de traitement et les procédures administratives très complexes qu’il faut respecter pour traiter ces déchets dans un autre pays dissuaderaient sans doute nos voisins de le faire chez nous.

Comment vous financez-vous ?

Les coûts administratifs de notre microstructure, ainsi que les coûts de collecte et de traitement des déchets se répercutent dans une cotisation de recyclage que nous demandons à la mise sur le marché des appareils. Par exemple, pour un smartphone, elle est de 8 cents et, pour réfrigérateur, de 10,06 euros.

Comment cette cotisation est-elle calculée ?

Le traitement de certains composants coûte de l’argent et la vente d’autres composants en rapporte. C’est le cas notamment des métaux précieux et des terres rares. Nous déduisons les dépenses des bénéfices pour déterminer le montant de la cotisation.

C’est donc au fabricant de payer ?

Ecotrel a été créée dans le cadre de la transposition d’une directive européenne qui induit la notion de responsabilité élargie des producteurs. Cela signifie que tout producteur mettant un appareil sur le marché est responsable d’un certain nombre d’obligations, à savoir la collecte gratuite de l’équipement en fin d’utilisation et les filières de recyclage et de réutilisation.

L’économie circulaire ne peut fonctionner que si elle s’articule sur ce principe. C’est le producteur qui doit, à la base, produire de façon écologique, idéalement utiliser des matières premières recyclées et concevoir ses produits avec une approche écodesign permettant de prolonger leur utilisation, donc de ralentir leur cycle de vie et générer des microcycles de réutilisation.

Pour ce faire, la souveraineté des états membres doit être maintenue, pas de façon exacerbée, mais dans le respect des particularités et des identités de chacun. Il en va de la sauvegarde du commerce local.

Et le consommateur dans tout ça ?

Notre credo est que c’est le consommateur qui dirige, en ce sens que le producteur fabrique ce que le consommateur veut acheter.

Le consommateur engage sa responsabilité lorsqu’il achète un produit, mais aussi à travers la façon dont il l’utilise et dont il s’en débarrasse…

En la matière, les fausses bonnes idées sont nombreuses. Prolonger l’utilisation d’un vieux congélateur en l’offrant à un nécessiteux en est une. Ce faisant, on croit faire une action sociale, mais c’est sans compter la notion de consommation énergétique : un appareil ancien peut consommer en 15 jours ce qu’un appareil moderne consomme en un an.

A une échelle plus grande, l’exportation des déchets d’équipements électriques et électroniques vers l’Afrique ou l’Asie est criminelle si elle n’est pas contrôlée. Même envoyer un appareil d’occasion en Afrique, c’est déjà y envoyer un futur déchet. D’où l’importance de vérifier que le futur utilisateur pourra effectivement s’en servir – s’il n’a pas l’électricité et/ou une connexion Internet, la machine ne lui servira à rien-, mais aussi que cette machine sera collectée en fin de vie. Plus de 200.000 tonnes d’équipements ont ainsi illégalement quitté l’Europe en 2012 alors que, dans le même temps, nous collections 5.000 tonnes au Luxembourg. Interpol a créé un groupe de travail pour lutter contre le trafic illégal de déchets, au sein duquel nous collaborons activement.

Mélanie Trélat

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