« S'inspirer des bonnes pratiques » dans le milieu rural

« S’inspirer des bonnes pratiques » dans le milieu rural

L’économie rurale a tout à gagner à se tourner elle aussi vers la circularité. Pour toucher et inspirer les entreprises éloignées des villes, le Natur- & Geopark Mëllerdall a rejoint le projet transnational CIRCLE en 2020.

Plusieurs entrepreneurs de la région du Mëllerdall ont eu l’opportunité de rencontrer des confrères de Suède et de Finlande dans le cadre du projet CIRCLE. Ce dernier s’inscrit dans le programme LEADER (Liaison Entre Actions de Développement de l’Économie Rurale) financé par l’Union européenne et piloté, au Luxembourg, par le Natur- & Geopark Mëllerdall.

À l’origine du projet, une équipe LEADER de Suède, dont le souhait était d’échanger sur des pratiques circulaires dans une optique transnationale. La Suède a contacté la Finlande, qui, à son tour, a joint la région LEADER Mëllerdall avec cette initiative. « LEADER fonctionne comme une petite famille : quand on a des contacts avec des managers d’une autre région, on propose de lancer des projets ensemble », explique Christiane Francisco, responsable du service économie régionale – assistance aux PME du Natur- & Geopark Mëllerdall. Et c’est ainsi qu’a démarré CIRCLE en mars 2020.

S’identifier dans les similitudes

Après avoir déterminé trois groupes cibles – les entreprises, les communes et les consommateurs – à acclimater à l’économie circulaire, diverses initiatives ont été mises en place.

« Pour le premier groupe, comme les régions LEADER de Suède et de Finlande étaient déjà un peu plus avancées que nous sur le projet, nous avons décidé de cibler en fonction des entreprises représentées de leur côté et avons donc filtré pour garder uniquement le secteur des produits de consommation / alimentaires (produits régionaux dont vin, gin, jus, cidre, confiture, café, fromage etc.). Quand on parle d’économie circulaire, il est important que les entreprises puissent échanger avec des acteurs du même secteur, afin de pouvoir s’identifier et réellement s’inspirer des bonnes pratiques de chacun », développe la responsable.

Huit entreprises issues des 12 communes de la région se sont manifestées et ont alors pris part au projet. « Dans notre région, nous avons surtout de très petites entreprises, qui sont souvent intéressées par le sujet de la circularité mais n’ont pas les ressources financières, temporelles ou humaines pour s’intéresser à l’économie circulaire. Ce projet CIRCLE est un format intéressant, parce qu’il permet aux entreprises de comprendre et développer leurs connaissances et de se faire une première idée de ce qu’elles pourraient changer à leur niveau. »

N’échappant pas à la crise sanitaire, CIRCLE a démarré en mode « webinaire » afin de faire connaissance malgré la distance. Quand les conditions l’ont à nouveau permis, des visites de terrain ont été organisées : en Suède en octobre 2021, au Luxembourg en mars 2022 et en Finlande en juin 2022. « Nous avons alors pu découvrir, dans chaque zone LEADER, des pratiques circulaires d’initiatives privées et publiques, de façon très concrète, au sein des entreprises participantes ».

Le Luxembourg, plutôt inspirant ou en quête d’inspiration ?

Christiane Francisco : « Nous nous sommes bien complétés entre régions, il y a des leçons à tirer de chaque côté. On a souvent l’impression que les pays scandinaves sont plus avancés que nous au niveau de l’économie circulaire, mais il ne faut pas oublier qu’ici nous nous trouvons dans un contexte rural, avec des petites entreprises de secteurs similaires. La différence que nous avons remarquée, c’est que la Suède et la Finlande ont réussi à intégrer la thématique de l’économie circulaire très tôt dans l’éducation des enfants. Ce n’est pas encore le cas au Luxembourg ».

Carlo Hein, fondateur de la cidrerie Ramborn dans la commune de Rosport-Mompach, était l’un des participants de CIRCLE : « Je suis allé en Suède où j’ai pu rencontrer deux producteurs de cidre, l’un avec des pratiques plus industrielles, l’autre plus artisanales. On sort de là avec plein d’idées, mais aussi conforté qu’on est sur la bonne voie et qu’on peut aller encore plus loin. L’essentiel que j’en retire c’est la coopération, le faire ensemble. On a vu l’exemple d’un village qui a bien compris cela et qui est devenu très résilient grâce à la collaboration ». Suédois et Finlandais ont également pu visiter le site de Ramborn lors de la visite organisée en mars.

Une brochure (voir ci-dessous) – réalisée conjointement par les trois pays participants – recense quelques-unes de ces bonnes pratiques et résume les visites réalisées dans le cadre de CIRCLE.

Citons pour exemples :

  • Le biochar, charbon végétal obtenu après pyrolyse des résidus de récoltes, un process qui permet également de produire de l’énergie calorifique à rediriger selon les besoins. Le biochar a de nombreuses propriétés intéressantes en agriculture : augmentation du niveau de pH des sols, rétention d’eau et d’humidité, stockage de carbone à long terme, atténuation de la nocivité des métaux lourds… Cette solution a été découverte en Suède où elle est produite par l’entreprise Skånefrö. L’entreprise wallonne GreenPoch en produit également.
  • L’Ecopull, une housse de transport en polyester, entièrement lavable et réutilisable, qui remplace le plastique à usage unique dans le transport de marchandises. L’entreprise luxembourgeoise Biogros (Oikopolis group) a elle-même développé ce produit pour réduire sa production de déchets pour ses livraisons de denrées alimentaires.
  • Shou Sugi Ban, une méthode japonaise ancienne de carbonisation du bois destiné à la construction, dans le but de le rendre plus résistant au feu, aux insectes, aux champignons, à la moisissure et même aux rayons UV. En Finlande, la réserve naturelle de Kintulammi emploie cette technique pour les panneaux indicateurs le long des trails.

Pistes d’amélioration

En parallèle, au niveau local, PositiveImpaKT a dressé le bilan d’identification du potentiel de chaque entreprise dans le but de donner un fil rouge et des pistes à suivre pour devenir plus circulaire. L’analyse s’étendait sur sept thèmes : mobilité et logistique, biodiversité et climat, valorisation des matières, emballage, eau, énergie et mutualisation.

Entreprises participantes :

« Comme la plupart des entreprises du projet proposent des produits alimentaires, le transport et l’emballage sont des aspects importants à prendre en compte dans une démarche de durabilité, tout comme l’optimisation de l’utilisation de l’énergie et de l’eau », précise encore la responsable.

Au-delà des entreprises

« Au niveau des communes, nous avons proposé des conférences thématiques pour les aider à mettre en place des démarches circulaires pour leurs achats, intégrer les critères circulaires dans leurs appels d’offres grâce à la plateforme B-Circular, etc. »

La dernière phase du projet s’adressera au dernier groupe cible : les consommateurs. Christiane Francisco : « Notre objectif est de les sensibiliser à l’économie circulaire. Cela commence par expliquer ce concept qui connaît plusieurs définitions, en l’opposant par exemple à l’économie linéaire. Et puis leur proposer des alternatives en faisant le recueil de lieux d’achats de seconde main pour les meubles et vêtements, par exemple, rappeler l’intérêt des repair cafés, etc. » Cette démarche sera réalisée courant 2023 et permettra aux consommateurs de mieux connaître les initiatives circulaires à vocation régionale ainsi qu’à l’échelle nationale, pour qu’ils puissent eux aussi mieux contribuer à une transition circulaire.

CIRCLE 2.0 ?

Au Natur- & Geopark Mëllerdall, on s’intéresse de près à une suite, un renouvellement de CIRCLE, qui est d’ailleurs prévu dans le programme LEADER 2023-2027. Christiane Francisco et ses collègues restent en contact avec leurs partenaires suédois et finlandais, et n’excluent pas l’ouverture à d’autres régions européennes. « On songe au secteur touristique : comment le rendre plus circulaire, plus durable ? Et également sensibiliser les touristes et visiteurs à la protection de l’environnement. »

L’inspiration étant une énergie renouvelable à l’infini, gageons que le projet CIRCLE a encore de beaux jours devant lui.

Marie-Astrid Heyde
Photo principale : Liz Hacken

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Publié le jeudi 24 novembre 2022
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