L'importance de la lutte contre la pauvreté des enfants

L’importance de la lutte contre la pauvreté des enfants

Le Luxembourg affiche le PIB par habitant le plus élevé d’Europe, mais un quart des enfants est à risque de pauvreté ou d’exclusion sociale. Interview d’Isabelle Hauffels et Alexandra Gardeur, respectivement responsable et chargée de plaidoyer à l’UNICEF Luxembourg qui appellent à une action politique coordonnée et inclusive.

L’UNICEF œuvre pour les droits de chaque enfant, en assurant leur protection, leur santé, leur éducation et leur bien-être, au Luxembourg comme dans le monde.

Comment expliquer qu’un pays aussi riche que le Luxembourg connaisse encore un taux aussi élevé de pauvreté infantile ?

I.H. : C’est en effet un paradoxe. Le Luxembourg bénéficie d’un solide système de protection sociale, mais le coût de la vie, notamment du logement, pèse lourdement sur les familles. Les disparités socio-économiques se sont creusées et en 2024, un enfant sur quatre vivait sous le seuil de pauvreté.

Quelles sont les personnes les plus touchées par la pauvreté ?

A.G. : Les familles monoparentales sont parmi les plus vulnérables. Si 86 % des parents à la tête des ménages monoparentaux sont des femmes, elles consacrent jusqu’à la moitié de leur revenu au logement.

Viennent ensuite les familles nombreuses. Alors que les familles avec un ou deux enfants ont un risque de pauvreté d’environ 15 %, ce chiffre grimpe à près de 40 % pour les familles de trois enfants ou plus.

Enfin, les familles issues de l’immigration sont également confrontées à des risques élevés. Étant donné que près de la moitié de la population n’est pas de nationalité luxembourgeoise, il est essentiel de tenir compte des disparités linguistiques et d’emplois pour favoriser une société socialement inclusive.

Quels sont les principaux obstacles à une réduction durable de cette pauvreté ?

I.H. : Plusieurs freins subsistent, par exemple la complexité administrative, un manque de ciblage et surtout une faible sensibilisation aux droits sociaux. Beaucoup de familles ne savent pas qu’elles peuvent bénéficier d’aides. De plus, certaines politiques comme le congé parental restent inaccessibles à une partie des parents en raison de critères trop stricts. Pour être efficace, la lutte contre la pauvreté doit mobiliser plusieurs leviers simultanément.

Quelles sont les recommandations de l’UNICEF Luxembourg pour inverser cette tendance ?

A.G. : Les résultats de la recherche commandée par UNICEF Luxembourg montrent qu’une réforme combinée des allocations familiales, du congé parental et des services de garde d’enfants aurait un impact majeur. Toujours selon cette recherche, en combinant des prestations universelles et un soutien plus ciblé, le Luxembourg pourrait réduire de moitié la pauvreté des enfants (soit de 1 sur 5 à 1 sur 10). Cela suppose des politiques plus cohérentes, un meilleur ciblage des besoins et une simplification des démarches administratives.

N’y a-t-il pas également une nécessité d’agir sur le coût de la vie ?

I.H. : Bien évidemment, l’une des racines du problème sont les inégalités de revenus. Cela passe notamment par des mesures fiscales plus progressives, un soutien accru aux bas salaires, et une tarification des services publics tenant compte du revenu. Ces leviers sont essentiels pour soulager les familles et renforcer la cohésion sociale.

Un retour sur investissement social et économique serait-il possible ?

A.G. : Réduire la pauvreté des enfants n’est pas qu’un acte de solidarité, c’est une obligation légale et un investissement collectif. Les enfants qui grandissent dans de meilleures conditions ont de meilleurs résultats scolaires, une santé plus solide et deviennent des adultes plus autonomes. À long terme, cela génère des économies pour l’État et une société plus résiliente.

Que manque-t-il aujourd’hui pour passer de la parole aux actes ?

I.H. : Tout est une question de volonté politique. La lutte contre la pauvreté des enfants a été reconnue comme une priorité nationale mais il faut maintenant agir. Les coûts de l’inaction sont énormes : selon une étude de l’OCDE, les désavantages socio-économiques de l’enfance représentent, chaque année, environ 3,4 % du PIB en Europe. Investir dans l’enfance, c’est investir dans l’avenir du pays.

Texte et photo d’UNICEF Luxembourg

Extrait du dossier du mois « Citoyens du changement »

Contribution partenaire in4green
Publié le lundi 15 décembre 2025
Partager sur
Avec notre partenaire
Nos partenaires