
Pollution plastique : le Luxembourg aux négociations de Genève
Les pourparlers onusiens de Genève sur un traité contraignant contre la pollution plastique ont échoué. Pour le Luxembourg, qui s’implique activement depuis 2022, l’urgence demeure. Seule une action collective et cohérente permettra de réduire un fléau environnemental mondial.
C’est un échec qui résonne comme un signal d’alarme. Après dix jours de négociations intenses, les 185 pays réunis à Genève n’ont pas réussi à s’entendre sur un texte juridiquement contraignant visant à enrayer la pollution plastique. Un revers attendu mais amer pour les États européens, qui espéraient franchir une étape décisive.
Le climat de division est palpable. D’un côté, l’Union européenne, le Canada, l’Australie, ainsi qu’une large coalition de pays d’Amérique latine, d’Afrique et du Pacifique plaidaient pour une réduction nette de la production mondiale de plastique et une limitation stricte des substances dangereuses. De l’autre, des nations pétrolières, arguant de leurs intérêts économiques, ont refusé toute contrainte sur les hydrocarbures, matière première de l’industrie plastique.
Un texte de compromis, présenté dans la nuit de jeudi, contenait encore plus d’une centaine de points en suspens. Trop de divergences ont empêché son adoption. « Nous n’aurons pas de traité sur la pollution plastique ici à Genève », a résumé avec amertume le représentant de la Norvège au petit matin.
Le Luxembourg mise sur la coopération internationale
Au sein de l’Union européenne, le Luxembourg a pris une part active à ces discussions. Présent depuis le début du processus en 2022, le ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité (MECB) a rappelé l’importance de considérer le cycle de vie complet des plastiques pour trouver des solutions durables.
Pour le ministre Serge Wilmes, la déception ne doit pas masquer les progrès accomplis.
« La pollution plastique constitue un défi global majeur qui ne peut être relevé qu’à travers un effort collectif et en considérant le cycle de vie entier des plastiques. Il est regrettable qu’aujourd’hui, aucun accord n’ait pu être trouvé malgré les efforts et la volonté de compromis dont nous avons fait preuve en tant qu’Union européenne tout au long des négociations. La lutte contre la pollution plastique est un combat de longue haleine, mais il est impératif d’avancer ensemble. »
Serge Wilmes, ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité
Si la réunion a été ajournée, elle a néanmoins permis de produire un nouveau projet de texte, considéré comme une base plus solide pour la suite. Le Luxembourg insiste sur la nécessité de poursuivre le dialogue, convaincu que seule une action multilatérale peut infléchir la trajectoire actuelle.
Un engagement national déjà tangible
Au-delà des négociations internationales, le Grand-Duché a déjà entrepris plusieurs initiatives pour limiter son empreinte plastique. Ces dernières années, le pays a renforcé sa législation sur les produits à usage unique, en interdisant progressivement la mise à disposition gratuite de sacs en plastique dans le commerce et en encourageant les alternatives réutilisables.
Le Luxembourg a également mis en place des systèmes de consigne volontaire et de collecte sélective performants, qui affichent des taux de recyclage parmi les plus élevés de l’Union européenne. Des campagnes de sensibilisation, menées en collaboration avec les communes et les associations, incitent la population à réduire sa consommation de plastiques superflus et à privilégier une économie circulaire.
Pour le gouvernement, ces mesures nationales ne peuvent toutefois suffire à elles seules. « Nous faisons notre part au niveau local, mais sans un accord mondial ambitieux, l’impact restera limité », insiste Serge Wilmes. C’est cette conviction qui pousse le Luxembourg à défendre ardemment une approche globale, intégrant la production, la consommation, la gestion des déchets et l’innovation technologique.
Un optimisme prudent en Belgique
Du côté belge, le ministre du Climat et de la Transition environnementale, Jean-Luc Crucke, parle d’« échec » lors d’une interview accordée à la RTBF, tout en affichant une forme d’optimisme. Il fustige « l’entêtement des pays producteurs de pétrole », accusés de privilégier les bénéfices à court terme au détriment de la planète. À ses yeux, il y a urgence.
« Si on ne prend pas les mesures maintenant, vous aurez en 2050 plus de plastique dans les mers et les océans que de poissons. »
Jean-Luc Crucke, ministre du Climat et de la Transition environnementale
La Belgique, aux côtés de l’Union européenne, défendait une régulation stricte de la production et un soutien accru à la recherche d’alternatives scientifiques. Jean-Luc Crucke estime toutefois que la coalition en faveur d’un traité ambitieux n’a jamais été aussi large. Il mise sur de futures sessions de négociations pour convaincre les plus réticents.

Entre blocage et persévérance
L’échec de Genève reflète l’ampleur du fossé entre deux visions du monde : celle qui vise à transformer en profondeur la production et l’usage des plastiques, et celle qui cherche à préserver des intérêts économiques liés aux hydrocarbures.
Pour le Luxembourg comme pour la Belgique, ce revers ne marque pas la fin du combat. Les deux pays rappellent que la pollution plastique est une menace croissante pour la santé humaine, les écosystèmes et l’économie mondiale. Et si la route vers un traité contraignant reste semée d’embûches, la conviction européenne demeure : seule la coopération internationale pourra offrir une réponse à la hauteur du défi.
Sébastien Yernaux
Portraits : ministère de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité (MECB) / ministère des Affaires étrangères et européennes (MAE)
Illustrations : Licence CC