
Planter pour demain à Hollenfels
À Hollenfels, la Journée nationale de l’arbre a réuni, ce jeudi 13 novembre, élèves, élus, bénévoles et acteurs de la protection de la nature pour une grande plantation collective. Une matinée lumineuse, marquée par des hommages, des messages forts et une mobilisation qui ne cesse de grandir face à l’urgence écologique.
Chaque mois de novembre, la Journée nationale de l’arbre marque le lancement officiel de la saison de plantation. « C’est un jour symbolique, mais qui prend de plus en plus de sens », a souligné Serge Wilmes, ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité. Il observe un changement notable dans la société. « De plus en plus de citoyens s’intéressent aux arbres. Pendant longtemps, ils étaient perçus comme quelque chose dont on pouvait facilement se débarrasser. Aujourd’hui, on sent que la conscience progresse. »
Un geste simple qui relie générations et paysages
Symbolique, oui, mais pas que. À Hollenfels, l’événement prend racine dans un site chargé d’histoire et d’émotion : la propriété de Marie Götzinger, grande amie de la nature et généreuse donatrice de terrains à la Fondation Hëllef fir d’Natur. « C’était une dame exceptionnelle, qui laissait les fenêtres de l’étable ouvertes pour que les chouettes puissent revenir chaque année », a raconté Patrick Losch, président de la fondation. « Elle avait un immense cœur pour la nature, et elle nous a transmis bien plus qu’un patrimoine : un exemple. » Une minute de silence a été respectée à sa mémoire.
Le lieu accueille aujourd’hui le verger planté en 2007, des haies restaurées, et désormais une nouvelle série de plantations. Une vingtaine d’arbres fruitiers ou forestiers — châtaigniers, pommiers, griottiers, pruniers, tilleuls, noguiers, érables — ont été mis en terre, complétés par 70 mètres de haies champêtres plantés par les élèves du cycle 3 de Helperknapp. « Ici, les enfants sont proches de la nature et apprennent à la respecter », a expliqué Paul Mangen, bourgmestre de Helperknapp. « C’est essentiel, et nous sommes fiers de contribuer à leur transmettre cela. »
Préserver, entretenir, relier : un effort collectif
Dans un contexte climatique tendu, les attentes sont fortes. « Nous avons d’énormes défis devant nous », a rappelé Michel Leytem, directeur de l’Administration de la nature et des forêts. « Aucun ministère ou administration ne peut les relever seul. Il faut travailler ensemble : communes, agriculteurs, syndicats de protection de la nature, associations. »
L’Union européenne fixe un cap ambitieux : trois milliards d’arbres à planter d’ici 2030. Pour le Luxembourg, cela représente près d’un million d’arbres supplémentaires. « Chaque initiative compte. Ce que nous faisons aujourd’hui contribue réellement à cette dynamique », poursuit-il.
Mais planter ne suffit pas. Le message est revenu dans toutes les prises de parole : il faut entretenir, suivre l’évolution des jeunes arbres, protéger les plantations des chevreuils, des rongeurs, de la sécheresse, des maladies. Un travail discret, loin des réseaux sociaux, mais déterminant.
« Ce qui m’inquiète, c’est que beaucoup d’arbres plantés lors d’actions publiques ne sont plus suivis ensuite », a insisté Paul Mangen. « Un verger, c’est énormément de travail : tailler, nettoyer les protections, surveiller les racines… Ce n’est pas très glamour, mais c’est indispensable. » Il appelle à un soutien renforcé aux associations et structures de terrain : « Elles ont besoin de moyens. Sinon, on plante pour la photo, et l’arbre ne survit pas. »
Serge Wilmes partage cette analyse, fort de son expérience d’ancien échevin de la Ville de Luxembourg. « En ville, un arbre ne se plante pas dans un simple trou. Il a besoin de 13 à 15 m³ de substrat, d’un suivi régulier, d’arrosage, d’espace. Même là, certains riverains se plaignent de l’ombre, des feuilles, des fruits… Mais c’est positif : cela prouve que l’arbre reprend sa place dans nos vies, qu’il est visible, qu’il est précieux. » Le ministre insiste : « Un arbre a une valeur. Et si on l’abîme, cela a un coût. Nous devons poursuivre cette évolution. »
Hollenfels, un site emblématique pour un avenir résilient
Si la Fondation Hëllef fir d’Natur a choisi Hollenfels pour lancer la campagne 2025, ce n’est pas un hasard. Depuis plus de 40 ans, elle protège et restaure les écosystèmes du pays, avec 2.000 hectares de réserves naturelles et 84 sites prioritaires en gestion. Le site de Hollenfels illustre parfaitement le lien entre patrimoine naturel, transmission et adaptation aux changements climatiques.
Le Ministre l’a souligné : « Nous devons nous donner les moyens d’agir, dans les milieux ruraux comme en ville. Les arbres et les haies jouent un rôle essentiel : ils filtrent l’eau, retiennent les sols, créent de l’ombre, abritent la biodiversité. »
Le dernier inventaire phytosanitaire de l’ANF, en 2023, révélait une situation préoccupante : plus de la moitié des arbres du pays montrent des signes de détérioration. Stress hydrique, parasites, maladies, conditions météorologiques extrêmes… Les forêts luxembourgeoises souffrent.
Planter devient donc un acte stratégique, soutenu par les communes, les bénévoles, les organisations et les citoyens. « Quand les jeunes qui plantent aujourd’hui reviendront dans 30 ou 40 ans, ils verront ce que leur geste est devenu. Et c’est comme ça que naît le respect des arbres », a résumé Michel Leytem. « Impliquer les enfants est essentiel », a ajouté Serge Wilmes. « Ce sont eux qui profiteront le plus de ces plantations. »
L’appel de la fondation résonne d’autant plus fort que la campagne se prolonge au-delà de cette journée : plus de 40 communes, associations et entreprises organiseront leurs propres plantations le 15 novembre, toutes recensées dans le numéro spécial du Regulus, le magazine de natur&ëmwelt.
Et pour celles et ceux qui ne peuvent pas planter, la Fondation propose une autre manière d’agir : un don pour soutenir la restauration des forêts, des haies et des vergers traditionnels.
« Chaque arbre compte, chaque don aussi », rappelle Patrick Losch. « Nous plantons aujourd’hui pour un avenir plus vert, plus résilient. » Chaque arbre compte, chaque don aussi : CCPLLUL IBAN LU89 1111 0789 9941 0000 ou www.hellefnatur.lu.
Sébastien Yernaux
Photos : infogreen / natur&ëmwelt}
















