La rue comme espace de rencontre et de partage

La rue comme espace de rencontre et de partage

David Koch, architecte urbaniste à Wiltz, nous explique comment sa commune se prépare à devenir une ville de demain.

« Pour moi, la ville de demain est une ville où, lorsque l’on se lève le matin, on sait qu’on peut prendre son temps. Boire un café. Regarder les enfants partir tranquillement à l’école avec leurs amis et prendre de l’autonomie, sachant qu’ils ne courent aucun risque car les rues sont Auto-arm, voire Auto-frei. Principalement piétonnes, elles ne génèrent quasiment pas de particules nocives, ni de pollution sonore d’ailleurs, mais elles (re)deviennent, un espace de rencontre et de partage.

Marcher dix minutes pour rejoindre la gare où le train nous attend pour nous amener au travail. Avoir des contacts, ou ne fût-ce qu’un sourire, avec ses voisins dans la rue, avec ses collègues ou d’autres personnes qui partagent le trajet du matin. Savoir que notre journée de travail en sera d’autant plus productive et valorisante.

Et vivre sereinement, à l’opposé de la vie de beaucoup d’entre nous pour qui commence, dès tôt le matin, la course contre la montre : « dépêche-toi, on-dépose-le-petit-à-la-crèche, la-grande-à-la-primaireschoul, oh ! encore-un-bouchon/un-accident/un-chantier, pardon-je-suis-en-retard (et je n’ai pas pris de café) ». Et il n’est que 8 h 30…

Le soir, profiter d’un repas cuisiné avec les légumes que l’on cultive dans la serre installée sur le toit de notre immeuble. Discuter avec le voisin qui, lui aussi, aime y passer du temps. Être conscient que les plantations sur la toiture filtrent l’air que l’on respire qui, de toute façon, est pur parce qu’aucun matériau utilisé pour la construction du bâtiment ne contient de matière polluante. Toute une série de détails qui contribuent à la sérénité.

À Wiltz, les projets qui vont dans ce sens sont multiples. Le plus important en termes d’envergure est le grand projet de développement urbain « Wunne Mat der Wooltz », développé avec le Fonds du Logement et avec le soutien du ministère de l’Intérieur. La plus grande satisfaction que nous en tirons est celle de donner une 2e vie à un espace de la ville qui a déjà été urbanisé par le passé. Non seulement nous construisons 750 logements sans consommer d’espace supplémentaire, mais en plus nous donnons à cet ancien site industriel un nouveau visage, bien plus avenant.

Cela passe surtout par la renaturation, sur toute sa longueur, de la rivière Wooltz, qui était auparavant réduite à s’écouler entre deux murs de béton entre les bâtiments industriels. Cette renaturation s’accompagne de la création d’un parc avec une coulée verte d’une largeur imposante, véritable poumon du nouveau quartier.

Un atout de ce projet d’urbanisation d’envergure est la présence de la gare ferroviaire, dont nous allons décupler le potentiel en en faisant une plateforme intermodale qui combinera trains, bus, vélos et voitures électriques partagés. Sans compter que les nouveaux logements et espaces de travail seront accessibles à pied, dans des conditions très agréables.

Car cette nouvelle partie de la ville sera bien Auto-arm. Les automobilistes seront dirigés dans des Parkhaus se situant, pour la plupart, sous les bâtiments. Elles sont conçues comme des zones de mutualisation des véhicules, mais elles intégreront également bien d’autres services : tri des déchets, mise à disposition d’outils partagés (pourquoi acheter chacun sa foreuse quand on peut la partager ?), locaux pour organiser des Repair Café, etc.

La mutualisation et le partage sont partout facilités, jusque sur les toitures ou l’on permet aux habitants de cultiver leurs légumes dans des potagers et des serres, en fonction de la demande. L’adaptation est aussi un maître mot.

Certaines surfaces ont été pensées pour remplir d’autres fonctions que leur fonction première. C’est notamment le cas d’une partie des places de stationnement dont la hauteur de plafond a d’ores et déjà été prévue pour qu’ils puissent trouver une affectation différente si, à l’avenir, moins de parkings étaient nécessaires. Les surcoûts liés à la flexibilité sont minimes, par rapport aux économies qu’ils permettront de réaliser en cas de besoin. De plus, une liberté de mouvement est recherchée. Personne ne peut prédire avec exactitude comment un espace urbain ou une ville va se développer, mais le fait de s’être posé une série de questions en amont (et encore sans doute pas toutes !) et d’y apporter des pistes de réponses lui donne une adaptabilité qui fera sa force.

Un autre aspect très important du processus de développement est de permettre la plus grande appropriation possible des lieux par les futurs habitants comme par les riverains. Pour ce faire, une communication optimale et une approche participative sont requises. Un point d’information et de rencontre visant à la fois à informer les riverains sur les avancées des projets et à promouvoir la philosophie du nouveau quartier auprès des personnes intéressées sera mis en place dans les locaux de l’ancienne gare.

La localisation du projet est en soi un indicateur de la volonté de faciliter la communication entre les habitants de Wiltz, actuels et à venir. En effet, les anciennes friches formaient une césure suivant l’axe est-ouest de la vallée à travers le tissu urbain, empêchant les relations entre les quartiers implantés sur les versants nord et sud de la vallée. À l’avenir, les habitants de ces deux versants opposés auront une vue sur un nouveau quartier très arboré et végétalisé (y compris en toitures et façades) et ils bénéficieront d’un accès direct aux nombreux espaces publics qu’il contiendra. Étant donné la topographie de Wiltz, l’implantation d’ascenseurs publics de part et d’autre permettra de compléter un réseau de chemins piétons déjà bien présent, tant au nord qu’au sud de la vallée. Au cœur de ce nouvel espace urbain, une école fondamentale et une structure intégrée, construite sur les principes de l’économie circulaire (Wiltz a été désignée comme hotspot de l’économie circulaire), offriront le confort d’un équipement de pointe et la garantie des techniques constructives, donc des lieux de vie, les plus sains.

Cette aventure ne s’arrête évidemment pas aux limites des anciennes friches. D’autres projets, à la fois basés sur la même philosophie durable et flexible et complémentaires par les typologies différentes qu’ils proposent, viennent compléter les interventions et les nouvelles facettes du développement de Wiltz. Enfin, un souci du détail tout particulier est appliqué sur le traitement des plus petites interventions, constructions d’appartements ou de maisons, mais aussi extensions, afin de préserver les spécificités paysagères, socioculturelles et patrimoniales de la ville.

Sans parler du développement harmonieux de potentialités de développement des activités et des équipements, afin que les emplois créés, mais aussi les infrastructures, suivent la courbe de croissance de la population ».

Légende photos : projet Wunne Mat der Wooltz simulation 3D Vues de IVC -Wooltz renaturée- vers l’Est / Source : HSA, Heibourg Strotz Architectes

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Publié le lundi 8 octobre 2018
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