La durabilité dans l'ADN

La durabilité dans l’ADN

Rencontre avec Pit Thines, associé – directeur du département études des structures chez Simon-Christiansen & Associés.

Le bureau d’études spécialisé dans le gros œuvre Simon-Christiansen & Associés, entité de LSC Engineering Group, prend en compte les considérations environnementales dès les prémices des projets qu’il conçoit. Cela se traduit par une utilisation économique des matériaux, la conception de structures flexibles et facilement démontables.

Comment est née la conscience qu’il faut construire durablement au sein de votre bureau ? À partir de quand vous êtes-vous intéressés à la construction durable et pour quelles raisons ?

La conscience de construire de manière durable a toujours été présente au sein de LSC-Group. Nos collègues des départements environnementaux travaillent depuis 30 ans dans ce domaine et nous avons toujours pu échanger facilement sur ces sujets.

Cet intérêt est aujourd’hui renforcé par les évolutions qui touchent notre secteur. La crise climatique nous impose de construire encore plus durablement dans le futur. Et, plus récemment, la hausse des prix des matériaux de construction nous pousse aussi à réfléchir autrement.

Comment sensibilisez-vous vos clients aux thématiques environnementales ?

Nous les sensibilisons au tout début d’un projet car c’est à ce stade précoce que les décisions prises ont le plus d’impact. Nous leur proposons différents types de construction - traditionnelle, en bois, hybrides, etc. - et nous leur présentons une estimation de l’empreinte carbone pour la réalisation du gros œuvre de chaque variante.

Quels retours recevez-vous de leur part ? Y sont-ils ouverts ou pas ?

Malheureusement, tous les clients ne sont pas encore convaincus d’opter pour une construction plus durable, car cette voie est moins connue et, dans certains cas, liée à des coûts plus élevés. Nous constatons cependant que certains - notamment les institutions publiques - envisagent de plus en plus de construire de manière durable.

De quelle manière prenez-vous en compte l’incidence négative de la construction sur l’environnement dans vos projets ? Est-ce que vous collaborez avec d’autres entités du groupe ?

D’abord, par nos choix conceptuels, nous essayons de réduire au maximum l’empreinte carbone des bâtiments. Cela passe en premier lieu par une utilisation économique des matériaux.

Ensuite, pour que ces bâtiments puissent être facilement adaptés au lieu d’être démolis en cas de changement d’utilisation au cours de leur vie, nous essayons également de convaincre nos clients d’utiliser des structures porteuses flexibles comme vous le voyez dans notre nouveau siège social, où nous avons prévu des colonnes et des dalles sans poutres, ce qui permettra de conserver la structure en cas de nouvel usage.

Alternativement, une construction modulaire avec liaisons mécaniques - donc assez facilement démontable - peut également s’avérer intéressante afin de pouvoir transformer facilement les bâtiments en cas de besoin.

Il faut préciser que notre bureau d’études est spécialisé dans le gros œuvre, et que le gros œuvre n’est qu’une vision partielle d’un projet. Les corps de métier suivants et l’utilisation subséquente pendant toute la durée de vie du bâtiment ont également une grande importance, et c’est là que les collègues de nos départements environnementaux peuvent aussi nous aider. Nous bénéficions de leur expertise pour cette approche globale d’un chantier, tandis que nous pouvons leur apporter notre savoir-faire pour le gros œuvre.

Photos : ALLEGRA ©Simon-Christiansen & Associés

Quel type d’actions proposez-vous de mettre en place ?

Il faudrait des incitations financières pour soutenir la construction avec des matériaux plus durables. Dans le domaine de la mobilité, cela passe par exemple par une aide au financement des voitures électriques. Il devrait exister quelque chose de similaire pour le secteur de la construction.

Mais nous devons aussi être conscients que nous ne pouvons pas construire du jour au lendemain avec uniquement des matériaux durables, car ceux-ci ne sont pas disponibles en quantité suffisante pour le moment. Les constructions en béton et en acier, par exemple, continueront à avoir leurs domaines d’application justifiés, c’est pourquoi il est important de soutenir leur développement en permanence. L’empreinte carbone peut être réduite, par exemple, dans le cas du béton, par l’utilisation de ciment à faible émission et, dans le cas de l’acier, par un recyclage basé sur les énergies renouvelables.

Une plus grande standardisation des différentes méthodes de construction serait également utile, car de nombreux projets tentent encore de réinventer la roue. Pour le gros œuvre, on pourrait par exemple définir des grilles uniformes pour la construction de la structure porteuse des bâtiments, ce qui permettrait également de réduire les coûts. Malheureusement, toutes les réglementations au niveau des PAP ne sont toujours pas conçues pour cela, il faudrait aussi faire quelque chose.

Y a-t-il un lien entre l’impact environnemental d’un bâtiment et le choix des matériaux ?

Le choix des matériaux de construction a une grande influence au départ, car ils sont l’origine de l’empreinte carbone primaire. Après, il faut envisager le projet dans sa globalité et tenir compte des matériaux de second œuvre, ainsi que de l’utilisation ultérieure et des coûts d’exploitation, qui ont une incidence au moins aussi importante sur le bilan écologique. Mais l’impact le plus important reste le choix de construire (ou non) des sous-sols qui produisent la majorité des émissions lors de la construction d’un bâtiment.

Quelle est la valeur ajoutée du bois dans ce contexte ?

Le bois est une matière première renouvelable qui, si elle est bien gérée, sera encore disponible à l’avenir. Mais son plus grand avantage est qu’il a un bilan de carbone négatif grâce à sa capacité à fixer le CO2. Ceci permet de réduire l’empreinte carbone globale d’un projet de construction.

Notre cellule bois est très expérimentée dans ce domaine, aussi bien en matière de constructions bois que de constructions bois hybrides.

À quel type de projet le bois se prête-t-il le mieux ? Pouvez-vous nous parler de quelques projets emblématiques que vous avez réalisés ?

Le bois peut être utilisé pour tous types de projets. D’une maison à une résidence, en passant par un bâtiment de bureaux jusqu’à des écoles, tout est possible. Pour citer deux exemples, nous avons conçu la nouvelle école et maison relais Howald (en bois) et l’immeuble ALLEGRA, le premier bâtiment bureau selon la méthode CREE (en hybride bois-béton) au Luxembourg.

Photos : École Howald ©That Design Lux

Est-ce qu’il y a des points d’attention particuliers que l’on doit considérer lorsque l’on construit en bois par rapport à une construction traditionnelle ?

La construction bois requiert une planification plus détaillée et nécessite des études qui vont se faire à un stade beaucoup plus précoce car elle présuppose la mise en œuvre d’éléments préfabriqués. Notre approche traditionnelle de la conception et de la construction doit donc être adaptée pour tenir compte de cette situation.

Mélanie Trélat

Extrait du NEOMAG#53
Plus d’informations : http://neobuild.lu/ressources/neomag
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Publié le vendredi 28 avril 2023
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