L'énergie produite et partagée au sein des quartiers

L’énergie produite et partagée au sein des quartiers

Buderus et sa maison mère Bosch développent des nouvelles technologies pour faire évoluer la production et la consommation d’énergie dans des systèmes qui privilégient le recours au renouvelable et au partage.

Rencontre avec Benoit Lespagnol, managing director de Ferroknepper Buderus

M. Lespagnol, quels sont les grands défis en matière énergétique ?

Peu de personnes le savent, mais les bâtiments comptent pour 40 % de la consommation énergétique en Europe. C’est plus que l’automobile et c’est donc avant tout dans les bâtiments qu’il faut agir.

Dans le cas des bâtiments existants, les choses n’avancent pas assez vite. Si je pense aux objectifs de la conférence de Paris en matière d’efficacité énergétique, il nous faut plus d’actions très concrètes, menées pas seulement par les politiques, mais aussi par tous les acteurs, nous y compris, qui pouvons proposer de nouvelles technologies et convaincre nos clients installateurs et leurs utilisateurs de leurs atouts.

Il y a bien entendu une évolution des produits. Avec la chaudière à condensation nous avons atteint les limites technologiques en matière d’efficacité énergétique avec un système de combustion, et c’est à présent le minimum légal si vous changez ou installez une chaudière au gaz.

Pour les bâtiments neufs, nous pouvons aller plus loin avec les pompes à chaleur, qui ne fonctionnent plus à la combustion et ont des niveaux de rendement bien supérieurs à ceux qu’on obtient avec du gaz. Toutefois, nous assistons à un repli de leur installation depuis que les réglementations se sont assouplies en octobre 2017. Beaucoup de promoteurs immobiliers repassent sur de la chaudière gaz à condensation, parce que c’est plus simple d’utilisation, les installateurs la maîtrisent mieux et les particuliers sont plus coutumiers de ce type de technologie. La chaudière est alors couplée en système à du solaire thermique.

Quelles sources d’énergie peut-on associer ?

Penser en système, c’est éviter de considérer un seul producteur de chaleur mais essayer d’en combiner plusieurs, pour la plupart à base d’énergie d’origine renouvelable. Ensuite, en fonction du prix de l’énergie et de la météo, la production est optimisée intelligemment. L’exemple typique, déjà employé, est de combiner la chaudière à condensation avec des panneaux solaires thermiques : dès qu’il y a du soleil, en été comme en hiver, l’énergie solaire est convertie directement en énergie thermique qui réchauffe l’eau du système du chauffage.

Au Luxembourg, 40 à 50 % des besoins d’eau chaude sanitaire dans un ménage peuvent être ainsi couverts par ce système et cette énergie est gratuite ! La chaudière à condensation se combine aussi idéalement avec une cheminée ou un poêle hydraulique, à bois ou à pellets. Avec ces poêles, 20 % de la chaleur sont utilisés dans la pièce, et 80 % sont récupérés dans l’installation de chauffage plutôt que d’être perdus au niveau de la cheminée.

Quelles sont les prochaines étapes ?

La suite, c’est je pense la transition énergétique avec la micro-cogénération à pile à combustible : une centrale énergétique domestique qui génère chaleur et électricité. Ce sont des produits qui existent déjà mais sont encore trop peu connus. Dans un projet en partenariat avec Neobuild et Enovos (cf. Neomag #05), nous avons testé avec succès la technologie pendant 2 ans et Bosch Thermotechnique vient juste de conclure un partenariat avec SOLIDpower pour accélérer le développement de cette technologie dans le cadre du programme européen PACE. L’énergie thermique est générée par la pile à combustible et la chaudière à condensation et peut être stockée localement dans le ballon tampon et le ballon d’eau chaude sanitaire.

Nous continuons d’aller encore plus loin avec un projet de production et stockage domestique d’hydrogène que notre maison mère Bosch mène depuis trois ans avec l’institut Fraunhofer en Allemagne et qui arrive à terme en octobre 2018.

D’ici 2050, 80 % de l’électricité outre-Rhin devront provenir du renouvelable. Le stockage est un vrai challenge. Dans ce projet, 100 ménages sont interconnectés dans un système et produisent leur électricité via des panneaux photovoltaïques. Le surplus d’énergie produit est converti et stocké localement sous forme d’hydrogène qui est utilisé ultérieurement par les véhicules électriques et micro-cogénérations à pile à combustible pour produire de l’électricité et de la chaleur (voir infographie). Pour faire face aux pics de consommation, le système reste connecté au réseau de gaz naturel qui est fourni par décomposition de l’hydrogène. C’est une technologie de transition en attendant qu’une option 100 % renouvelable remplace le gaz. Son gros atout est son moindre coût par rapport à son équivalent en batteries électriques. Le groupe Bosch développe par ailleurs des coopérations dans la technologie de la pile à combustible bien au-delà de sa division thermotechnologie, comme en atteste le tout nouvel accord entre Bosch et Ceres concernant des piles à combustible de plus grosses puissances.

Enfin, des solutions au niveau de l’infrastructure nationale existent aussi où le surplus d’énergie photovoltaïque ou éolien est transformé en gaz « vert » de synthèse qui est injecté ensuite dans le réseau de gaz naturel existant. Cela permet de réduire les importations sans investir dans de nouvelles infrastructures.

Le projet district Energy Storage and Supply System 2020 + réunit les différentes installations photovoltaïques d’un quartier de 100 ménages. L’électrolyseur à membrane de proton PEM permet de convertir l’électricité en hydrogène et oxygène. L’hydrogène nécessaire est utilisé immédiatement et les restant est stocké dans des réservoirs pour être ultérieurement utilisé dans des piles à combustible. Des compresseurs électrochimiques permettant de comprimer l’hydrogène à 800 bars pour s’adapter aux réservoirs très compacts des véhicules.

Marie-Astrid Heyde
Photo : Marie-De-Decker
NEOMAG#17
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Publié le vendredi 2 novembre 2018
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