Enovos conjugue énergie et biodiversité avec l'agri-PV

Enovos conjugue énergie et biodiversité avec l’agri-PV

Un nouveau chapitre de la transition énergétique s’ouvre au Luxembourg : avec l’agriculture photovoltaïque, Enovos mise sur une synergie entre production agricole, énergie solaire… et renforcement de la biodiversité.

Enovos ne part pas d’une page blanche. Dès ses premières installations à Beidweiler et Junglinster, le groupe souhaitait intégrer une logique agricole et environnementale à ses projets. « On a proposé dès le départ de faire paître des moutons autour des installations, sans qu’aucune exigence officielle n’aille dans ce sens », explique Anouk Hilger, responsable du département Renouvelables chez Enovos. « Une manière naturelle de limiter la tonte mécanique et de favoriser les équilibres biologiques. »

Dans le cadre des appels d’offres lancés par les ministères de l’Agriculture, de l’Économie et de l’Environnement, Enovos s’est naturellement tourné vers l’agri-PV : une solution qui permet d’associer agriculture, production d’énergie solaire et préservation de la biodiversité sur un même site. Cette approche vise à maximiser l’usage du sol, tout en créant de nouvelles synergies économiques pour les agriculteurs.

Anouk Hilger
Anouk Hilger

Des installations conçues autour de l’agriculteur


« Chaque projet commence avec l’agriculteur : ses besoins, sa façon de travailler sa terre. Ensuite, on conçoit l’installation autour de ça. »

Anouk Hilger, responsable du département Renouvelables

Cette logique de co-développement permet des solutions techniques variées : panneaux surélevés pour laisser paître les animaux, panneaux verticaux bifaciaux espacés de 12 mètres pour faire passer un tracteur, en combinaison avec des aménagements floraux pour attirer les insectes pollinisateurs.

À Bastendorf, ce sont des porcs ibériques bio qui évolueront librement sous les structures solaires. À Sprinkange, des poules pondeuses profitent de l’ombre et s’aventurent plus loin sur le terrain, moins stressées par le passage des trains. « Elles se regroupent sous les panneaux à la moindre alerte sonore, mais n’ont plus peur comme avant. Elles se sentent en sécurité », sourit Patrick Jeitz, ingénieur projet.

Dans ce projet, les œufs pondus sont vendus dans des magasins de ferme et dans la grande distribution, ou transformés en pâtes maison par l’agriculteur lui-même. « C’est une chaîne de production complète et locale », se réjouit Anouk Hilger. Et quand l’installation électrique permet aussi d’alimenter les toitures agricoles avec du photovoltaïque, la boucle est bouclée.


« C’est une optimisation des ressources, qui permet aussi à l’agriculteur d’être plus autonome énergétiquement. »

Patrick Jeitz, ingénieur projet


L’aspect financier n’est pas en reste : les agriculteurs peuvent percevoir un loyer pour la mise à disposition de leur terrain, bénéficier de subventions agricoles classiques, mais aussi participer au projet en tant que partenaires, partageant les bénéfices de la production énergétique.

Des bénéfices environnementaux bien réels

Ces projets sont systématiquement précédés d’inventaires faunistiques et floristiques. « On commence souvent plus d’un an avant les travaux pour suivre les cycles naturels sur quatre saisons », explique Anouk Hilger. Les résultats orientent la configuration des installations : hauteur des panneaux (80 cm minimum), distance entre les lignes (12 mètres), préservation des prairies fleuries, protection des espèces sensibles.

À Beidweiler, six nouvelles espèces ont été observées. À Junglinster, la Salvia pratensis, une sauge sauvage protégée, a été sauvegardée grâce à des zones d’exclusion pour les engins de chantier. « Ce sont des signes clairs que l’agri-PV, bien conçu, peut même améliorer la biodiversité locale. »

La tonte est assurée par des moutons, selon un protocole défini avec l’Administration de la nature et des forêts. À Junglinster, une pause est respectée durant la floraison pour laisser les plantes se reproduire. À Beidweiler, quatre parcelles sont pâturées à tour de rôle. Les oiseaux, eux, continuent de chasser dans les zones dégagées. Des corvidés ont même été observés en train de briser des noix sur les structures des panneaux.

Certaines installations intègrent également des couloirs fleuris à proximité des poteaux pour attirer abeilles, bourdons et autres pollinisateurs.


« On prévoit systématiquement ces bandes, et l’espacement des panneaux laisse une vraie place à la nature. »

Patrick Jeitz, ingénieur projet

Patrick Jeitz
Patrick Jeitz

Une dynamique bien engagée au Luxembourg

Le modèle fait des émules. « Certains agriculteurs nous contactent spontanément . D’autres, nous les approchons. Dans tous les cas, on construit le projet ensemble », résume Anouk Hilger. Les conditions de l’appel d’offres imposent une vision claire du volet agricole et des engagements concrets en matière de biodiversité. L’objectif : passer d’une gestion intensive à une approche plus extensive, plus respectueuse des équilibres naturels.

Et les retours sont bons. « Les voisins trouvent souvent les installations jolies, surtout avec les haies et les fleurs autour. Et on veille à laisser de l’espace, ce n’est jamais une masse compacte de panneaux », précise Patrick Jeitz.

Le volume de l’appel d’offres au Luxembourg a récemment été porté de 50 à 75 MWc. Le potentiel de l’agri-PV ne se limite pas au Luxembourg. Enovos participe aussi aux réflexions européennes sur le sujet. Reste à adapter les infrastructures pour absorber cette nouvelle production d’énergie renouvelable.


« On ne peut plus produire à la demande, c’est désormais à la consommation de s’adapter à la production. C’est tout un modèle qui évolue. »

Anouk Hilger

« L’agri-PV est une voie d’avenir pour rendre l’énergie renouvelable plus intégrée, plus durable, et surtout plus en phase avec les réalités du terrain », conclut-elle.

Sébastien Yernaux
Photos : ©Enovos
Portraits : ©Picto
Extrait du dossier du mois « inTERREdépendance »

Article
Publié le mercredi 28 mai 2025
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