
COP30 : saisir les chances !
À cinq semaines du début du Sommet climatique COP30 à Belém, l’Action Solidarité Tiers Monde (ASTM) a présenté, lors d’une conférence de presse lundi 6 octobre 2025, ses positions et revendications en matière de politique climatique.
Mitigation du changement climatique : on va droit dans le mur !
Les Nations Unies sont en train de faire le compte des engagements de réduction d’émissions de gaz à effet de serre des pays (NDC : « Nationally determined contributions »), et il est clair que ces engagements seront insuffisants à maintenir le réchauffement en dessous de 2, voire 1,5 degré, comme prévu dans l’accord de Paris.
Le problème n’est pas seulement que certains acteurs mettent en doute la réalité du changement climatique, que les États-Unis ont quitté l’accord de Paris et que d’autres, comme l’Union européenne, tardent à afficher leurs engagements. La majeure partie de la communauté internationale affirme l’importance de limiter le réchauffement à 1,5 degré – mais elle n’agit pas en conséquence.
« Il est scandaleux que les élites politiques se réfèrent à l’accord de Paris et à 1,5 degré, tout en proposant des NDC qui risquent de conduire vers un monde à 2,5 degrés et plus », a critiqué Raymond Klein, coordinateur du groupe climat de l’ASTM. Mais la prise de conscience de ces insuffisances, juste avant la COP30, constitue une chance pour la communauté internationale de se ressaisir et de faire suivre les paroles par des actes.
L’ASTM demande que l’ensemble des pays retravaillent les NDC, déjà annoncés ou pas, et les corrigent vers le haut afin de se conformer à l’accord de Paris. L’Union européenne, en particulier, devrait cibler la neutralité nette climatique (« net zero ») dès 2040 au lieu de 2050, réduire ses émissions nettes de 94 % en 2035 (par rapport à 1990), et adapter son objectif pour 2030 en conséquence.
L’ASTM demande au gouvernement luxembourgeois et à l’ensemble des acteurs politiques d’œuvrer en ce sens au sein des institutions européennes, et de revoir les objectifs nationaux de manière à contribuer à des engagements européens plus ambitieux.
Un financement climatique ambitieux pour une transition juste
« Une blague », telle a été la réaction des négociateurs du Sud à Bakou lorsqu’ils ont entendu la proposition du New Collective Quantified Goal (NCQG) présentée par les pays dits développés.
À Belém, le financement climatique restera un enjeu central pour les pays du Sud. Ces derniers peuvent désormais s’appuyer sur le récent avis consultatif de la Cour internationale de justice, qui rappelle aux pays développés leur obligation de fournir des ressources financières aux pays en développement aux fins tant de la mitigation que de l’adaptation.
À la COP29, le Nord global a bafoué cette obligation en obtenant in extremis un accord sur un NCQG de 300 milliards par an, loin des 1.300 milliards exigés par les pays du Sud, et c’est précisément là que [nous constatons une triple injustice à l’égard des populations du Sud.
Les « besoins » chiffrés des pays en développement en matière de financement climatique sont presque inimaginables : ils s’élèvent à la somme astronomique de 5.012 à 6.852 milliards de dollars américains cumulée jusqu’en 2030. Mais remettons les choses en perspective : ces besoins représentent environ 5 % du PIB mondial de 2024 et ne sont que deux fois supérieurs aux bénéfices combinés des entreprises du classement Global Fortune 500 pour cette même année.
Il serait naïf d’en conclure que l’argent est simplement disponible, mais ce que nous pouvons affirmer avec certitude à la lumière de ces chiffres et de nombreux rapports, c’est qu’une réforme de l’architecture financière mondiale, principalement contrôlée par les pays du Nord, est absolument nécessaire.
« Des excuses telles que prétendre qu’il n’y a pas d’argent sont perfides alors que la consommation des élites mondiales augmente, que les dépenses militaires explosent et que des allègements fiscaux sont annoncés pour les multinationales », a précisé David Hoffmann, responsable du plaidoyer politique à l’ASTM.
« Afin de rétablir la confiance, la transparence et l’ambition indispensables dans le processus de la CCNUCC avant la COP30 à Belém, les pays industrialisés doivent mettre de l’argent sur la table et renforcer leurs engagements au titre de l’article 9, paragraphe 1, de l’accord de Paris », a continué David Hoffmann.
Confrontés à des défis illégitimes, à des conditions d’emprunt injustes et à des niveaux déjà élevés de « pertes et préjudices » dus à la crise climatique, les pays du Sud doivent obtenir les moyens de faire face aux effets du changement climatique.
« Dans ce contexte, nous demandons au gouvernement luxembourgeois de payer sa part, évaluée à au moins 600 millions d’euros par an », continue David Hoffmann.
S’engager en faveur d’un financement climatique juste n’est pas seulement une obligation légale ou un simple principe de justice climatique, c’est aussi une chance de limiter les coûts d’adaptation futurs ainsi que les loss and damages.
Nous demandons par ailleurs que le Luxembourg, avec ses homologues européens, s’engage concrètement à soutenir la « Baku to Belém Roadmap to 1,3 trillion », qui vise à proposer une trajectoire claire pour combler l’écart entre le nouveau montant plancher de 300 milliards par an et les 1.300 milliards nécessaires pour atteindre un financement climatique juste.
Cette feuille de route ne constitue pas une simple ambition supplémentaire, mais bien la condition minimale pour que les promesses de justice climatique deviennent tangibles.
L’ASTM s’engage depuis des décennies sur le réchauffement global et la justice climatique, aussi bien dans le travail avec ses partenaires dans le Sud que dans la coordination du Klima-Bündnis Lëtzebuerg avec le Mouvement écologique, ou encore au sein de la plateforme Votum Klima.
L’ASTM participera sur place à la COP30 à Belém du 10 au 21 novembre, ainsi qu’au sommet alternatif Cúpula dos Povos.
Notre présence sur place permettra de rappeler les revendications d’ambition et de justice aux délégations luxembourgeoise, européenne et internationale. Jour après jour, nous suivrons les débats et partagerons un regard critique avec les médias et le public luxembourgeois.
Texte d’ASTM - Actions Solidarité Tiers Monde
Photo de Raymond Klein : © Picto / Eve Millet (lors de la Marche pour la Terre 2025)