Actions antigaspi

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La meilleure nourriture est évidemment celle qu’on ne jette pas. Et pourtant, un tiers des aliments produits à l’échelle mondiale sont gaspillés. Zoom sur les solutions.

Au Luxembourg, les aliments jetés le sont en priorité au sein des ménages - à 75% contre 55% pour la moyenne européenne (chiffres 2018) ! Les cuisines collectives représentent 10% du problème, la restauration 8% et enfin 7% des aliments jetés le sont par les commerces.

Des chiffres que le gouvernement luxembourgeois souhaite faire diminuer de 50% d’ici à 2030. Pour parvenir à cet objectif, le site antigaspi.lu, géré par le ministère de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural est en ligne depuis 2019 et publie entre autres les démarches mises en place au niveau ministériel, des conseils pour réduire le gaspillage alimentaire à titre personnel, ainsi qu’un listing des initiatives nationales. Des initiatives de plus en plus nombreuses et qui s’attaquent à la problématique à différents stades de la chaîne.

Les distributeurs disent non au gaspillage

Dans les commerces par exemple, les prix réduits pour dates courtes sont de plus en plus fréquents et appréciés des consommateurs. Food4All (F4A) l’a compris et a développé une app pour faciliter la communication des bonnes affaires entre acheteurs et détaillants. Too good to go - une app danoise lancée en 2016 maintenant active dans 17 pays dont l’Allemagne, la Belgique, la France mais pas le Luxembourg - fonctionne de façon similaire en proposant des paniers à prix réduits à ses utilisateurs.

Les supermarchés Auchan, Delhaize, Match, Lidl et Cactus font également don d’invendus encore consommables à des épiceries sociales (Caritas Buttek, Croix-Rouge Buttek, Cent Buttek) et restaurants sociaux (Stëmm vun der Strooss). En plus d’éviter le gaspillage, ces dons permettent à des personnes en situation précaire de maintenir une alimentation quotidienne équilibrée. La Stëmm vun der Strooss a par ailleurs inauguré un nouveau bâtiment qui permet dorénavant à son service Stëmm Caddy d’éviter 500 tonnes de déchets alimentaires annuels.

Consommateurs et consomm’acteurs

Certains aliments n’atteignent même pas les rayons des supermarchés. Loin d’être mauvais, ils ne collent tout simplement pas aux attentes esthétiques des consommateurs.

Ces aliments imparfaits ont depuis septembre 2022 leur propre point de vente dans le nord du Luxembourg grâce à la société coopérative on.perfekt. Une épicerie qui a vu le jour à Clervaux grâce au crowdfunding, donc à la générosité du grand public.

Au sud du pays, le service traiteur et futur restaurant de BENU Village propose des plats cuisinés à partir de rescued food, des aliments frais sortant des champs sans pour autant être présentés à la vente dans les supermarchés locaux. « La raison principale en est l’expérience des magasins, car leurs clients s’attendent, même dix minutes avant la fermeture du magasin, à des rayons pleins. S’en suit une pratique de ’sur-commande’ menant à un surplus de marchandise fraîche qui, malgré sa présentation impeccable, ne trouve pas son chemin jusqu’au rayon des magasins » (Georges Kieffer, fondateur). Un atelier de conservation, notamment par lacto-fermentation, est également en train de voir le jour au sein de cette asbl engagée dans la circularité et ce, afin de toujours disposer de matières premières en suffisance pour sa cuisine.

À quelques kilomètres de BENU, la ferme biologique an Dudel s’est lancée dans la fabrication de pâtes afin d’utiliser les œufs « qui n’ont pas pu être commercialisés parce qu’ils ne correspondent pas aux normes ». Résultat : des pâtes locales commercialisées dans les épiceries du pays, en circuit court.

Des frigos dans les rues

En rue, les frigos anti-gaspi ne tarderont plus à être pratique courante. Diverses formules co-existent. à Hobscheid, on y trouve les plats invendus de la cantine scolaire, au prix dérisoire de 3 euros - la cantine est par ailleurs labellisée Sou schmaacht Lëtzebuerg et privilégie donc le local et le bio. Même démarche à Tuntange avec les plats invendus de l’auberge de jeunesse de Hollenfels, adepte du commerce équitable Fairtrade.

Les frigos de Foodsharing sont eux alimentés par les particuliers, pour les particuliers. Une équipe de bénévoles veille à la propreté des réfrigérateurs, qu’on trouve à Bonnevoie, Esch-sur-Alzette et Lintgen. Ici, les consommateurs se servent « à leurs risques et périls ».

Pas que pour les chiens

L’ecobox de la SuperDrecksKëscht a retiré au célèbre doggy bag sa connotation péjorative et lui a ajouté une valeur circulaire. Emporter les restes de plats au restaurant est facilité par ces boîtes consignées lavables que beaucoup d’établissements du Luxembourg mettent à disposition de leurs clients. Ecobox se décline également sous la forme de plats, type salades, à emporter ou consommer sur place, dans les cantines Sodexo. Finies les barquettes jetables en plastique ou en alu, qui créent finalement autant de déchets qu’elles en évitent.

« Manger bien, c’est jeter moins »

Telle est la devise de Restopolis, le service de restauration scolaire et universitaire du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse. On compte bien entendu sur les acteurs publics pour montrer l’exemple et c’est la direction que prend Restopolis en adoptant toute une série d’« actions pour une cuisine antigaspi ». Cela passe par la formation des collaborateurs à l’antigaspi, les commandes plus régulières pour éviter des stocks trop importants et plus difficiles à gérer, la gestion des absences ou changements d’horaires qui ont un impact sur la quantité de plats à produire, etc.

« Manger bien, c’est jeter moins » devrait finalement être la devise de tous. Gérer sa liste de courses, fermer les yeux sur les imperfections, connaître le contenu de son frigo et être créatifs avec les restes sont quelques-unes des pistes à envisager pour une consommation plus responsable.

Marie-Astrid Heyde
Extrait du dossier du mois « Thoughts for food »

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Publié le mercredi 11 janvier 2023
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