Une passerelle piétonne en fibres de lin à Almere, Pays-Bas

Une passerelle piétonne en fibres de lin à Almere, Pays-Bas

Le lin est un matériau qui nous accompagne depuis des milliers d’années, plus souvent sous la forme de vêtements, de sacs ou de cordages.

Sous la direction de la TU Eindhoven (Technische Universiteit Eindhoven) aux Pays-Bas, quinze partenaires ont mené le projet européen « Smart Circular Bridge » visant la construction de trois ponts urbains à partir d’un matériau bio-composite fait de lin et d’une bio-résine spéciale - dont ce premier exemplaire récemment inauguré et installé au salon international d’horticulture Floriade à Almere.

La première passerelle bio-composite au monde issue de cette technologie, construite en 2016, émanait déjà d’un consortium d’universités et d’écoles professionnelles néerlandaises ; Rijk Blok du département de l’environnement bâti de la TU Eindhoven : « C’était un moment passionnant pour toutes les personnes impliquées dans le projet, et un excellent moyen d’explorer la possibilité de réaliser des structures avec des matériaux bio-composites ».

Contrairement au bois et à l’instar d’autres plantes telles que le chanvre ou le miscanthus, le lin est une plante à croissance rapide ; dans le cadre de la décarbonation du secteur de la construction, de la réduction de la consommation de ressources et d’énergies ainsi que dans une perspective de développement d’une économie circulaire biosourcée, les bio-composites offrent un potentiel gigantesque et encore peu exploité.

Le lin est léger, très stable, avec certaines propriétés mécaniques comparables à celles de l’aluminium ou de l’acier léger. La passerelle piétonne d’Almere, qui relie deux parties de l’exposition, mesure 15 mètres de long et peut facilement supporter le poids de 275 personnes à la fois : « La construction du pont d’Almere nous rend optimistes et nous prévoyons de construire à l’avenir des ponts avec des portées nettement plus grandes et des charges plus élevées », déclare Patrick Teuffel de TU Eindhoven, le partenaire principal du consortium international Smart Circular Bridge. Outre les fibres de lin d’origine 100 % naturelles, la résine proviendra également de sources non fossiles dans la mesure du possible. La proportion de bio-résine dans la quantité totale de résine utilisée est de 25 % pour cette première passerelle, mais devrait atteindre 60 % ou plus pour les projets suivants. Ce résultat est obtenu en utilisant des déchets issus de la production de biodiesel et des bouteilles en PET recyclées.

Avec l’aide de l’intelligence artificielle

Afin de suivre en temps réel la réaction des matériaux, une centaine de capteurs ont été installés, fournissant des données sur le comportement de l’ouvrage lors de son utilisation. « Ils nous permettront de surveiller les performances du matériau dans des situations spécifiques », explique Rijk Blok : « Par exemple, comment le pont se comportera-t-il lorsque deux cents personnes le traverseront simultanément ? Ou encore, que se passera-t-il en fonction des saisons ou des différentes conditions météorologiques ? ». Des capteurs en fibre optique mesurent les déformations des matériaux tandis que des capteurs d’accélération détectent les vibrations et mouvements les plus fins ; ces données sont ensuite évaluées à l’aide de l’intelligence artificielle pour fournir des modèles de comportement des matériaux et de l’ouvrage. Les ingénieurs pourront ensuite affiner leurs modèles afin de concevoir les prochains ponts ou d’autres ouvrages comme des colonnes, des éléments de façade ou des pales de rotor pour éoliennes. Un site web public permet déjà de consulter les données récoltées : https://dashboard.smartcircularbridge.eu/?orgId=1&refresh=30s

Une fin de vie réfléchie

Le projet explore plusieurs des meilleures options quant à la fin de vie de l’ouvrage, après plusieurs décennies d’utilisation ; Patrick Teuffel : « Nous étudions trois façons de recycler les matériaux : mécaniquement (déchiquetage les éléments et réutilisation dans de nouveaux produits), chimiquement (par pyrolyse afin de décomposer les molécules en fractions plus petites) et biologiquement grâce à l’aide de champignons  ». Deux autres passerelles pour piétons et cyclistes seront construites à Ulm en Allemagne et à Bergen op Zoom aux Pays-Bas, respectivement en 2022 et en 2023 ; ce projet est un pas essentiel dans la réflexion engagée au cours des prochaines années pour le remplacement de dizaines de milliers de ponts à travers toute l’Europe, pour lesquels l’usage de matériaux alternatifs est une option cruciale. Le budget total pour la recherche, le développement et la construction des trois ponts s’élève à 6,86 millions d’euros, dont 3,93 millions d’euros de fonds européens provenant d’Interreg Europe Nord-Ouest ; retrouvez d’autres informations pertinentes du projet sous le lien suivant : https://www.nweurope.eu/projects/project-search/smart-circular-bridge-scb-for-pedestrians-and-cyclists-in-a-circular-built-environment/#tab-1

Régis Bigot - Architect - Innovation project Manager
Extrait du NEOMAG#48
Plus d’informations : http://neobuild.lu/ressources/neomag
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Publié le vendredi 2 septembre 2022
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