Un système français breveté de récupération d'énergie présente dans les eaux usées grises

Un système français breveté de récupération d’énergie présente dans les eaux usées grises

Boydens Engineering a récemment intégré au Luxembourg la solution française
ERS (energy recovery system) qui vise à récupérer la chaleur des eaux usées dans une démarche circulaire. Présentation avec son inventeur, Alain Mouré, également président et directeur général de la société Biofluides Environnement.

Interview d’Alain Moure, Président et Directeur Général de La Société Biofluides Environnement

M. Mouré, pouvez-vous présenter Biofluides en quelques mots ?

La société Biofluides a ouvert ses portes en 2006 dans le département de Seine-et-Marne. Dotée d’un bureau d’études thermiques et d’une équipe de techniciens de maintenance, notre entreprise développe des solutions de traitement des eaux et d’économie d’énergie. Depuis 2009, nous développons et commercialisons l’ERS, pour Energy Recovery System ou Système de récupération énergétique, protégé par cinq brevets.

Comment vous est venue l’idée de l’ERS ?

L’idée m’est venue d’un bailleur qui a suggéré d’utiliser la chaleur des eaux de cuisines et salles de bains. Ces eaux grises usées sont rejetées chaque jour vers les réseaux d’assainissement et représentent une perte d’énergie calorifique considérable. En France, une famille de quatre personnes consomme en effet plus de 150 litres d’eau chaude par jour, qui s’écoule à une température moyenne comprise entre 28 et 32 °C.

Grâce à notre système de revalorisation énergétique, les calories présentes dans les eaux usées ménagères sont captées puis réinjectées instantanément dans le réseau local afin de produire en préchauffage 80 à 100 % des besoins en eau chaude sanitaire, hors réchauffage de la boucle.

Comment fonctionne-t-il ?

Le réseau d’évacuation est divisé pour séparer les eaux usées, appelées eaux grises, des eaux des toilettes, appelées eaux noires. Nous ne gardons que les eaux des cuisine, lavabos, douches, lave-vaisselle et lave-linge. Ces eaux grises sont récoltées dans une cuve d’échange thermique qui récupère et transfère l’énergie vers une pompe à chaleur via des échangeurs se trouvant à l’intérieur de cette cuve et dans lesquels circule un fluide caloporteur. Les calories prélevées par les échangeurs thermiques sont transférées à la pompe à chaleur qui produit de l’eau chaude avec un COP d’environ 4 à 55/58 °C.

L’eau est stockée dans des ballons de préchauffage en attendant d’être utilisée, avant de servir à nouveau de source d’énergie.
N’ayant plus un potentiel énergétique suffisant, les eaux grises dont la chaleur a été récupérée sont renvoyées vers le réseau d’évacuation public via un système de vidange automatique entre 7 et 12 °C.

À quel(s) type(s) de bâtiments convient-il ?

Pour l’instant, le système requiert la mise en place de réseaux séparatifs eaux-vannes / eaux grises.
Composé d’une cuve d’échanges, d’une pompe à chaleur et de ballons, il faut donc prévoir un local technique ayant une emprise au sol de 15 à 25 m2, selon le nombre de logements, pour accueillir l’ERS. La majorité des installations Biofluides concerne des nouvelles constructions de résidences, des complexes hôteliers, centres sportifs, écoles et internats, restaurants d’entreprise, etc.

La technologie est aussi présente dans des bâtiments rénovés dans lesquels l’ERS pouvait être installé sans difficulté technique significative. Ainsi, une application en rénovation existe au Luxembourg avec l’installation d’assainissement énergétique du centre sportif d’Ettelbruck.

L’ERS a un petit frère, qui s‘appelle l’ERS compact, et qui vise les installations de 10 à 40 logements. Sa compacité et sa facilité d’installation le rendent particulièrement intéressant pour cette cible de bâtiments.

Qu’en est-il du nettoyage et de la maintenance du matériel ?

Durant la nuit, lorsqu’il n’y a plus d’activité, les vannes à servomoteurs s’ouvrent automatiquement pour vidanger la cuve et évacuer les éventuels déchets présents dans la partie décantation. La cuve est également nettoyée de manière automatisée, grâce à des buses placées dans le décanteur et au niveau des plaques d’échange. Elles projettent l’eau mitigée à 35°C puisée dans un bac de disconnexion. Ce nettoyage est réglé en usine à une fois par semaine. Cette fréquence peut être modifiée par l’installateur en fonction de l’utilisation. Ce nettoyage périodique permet de maintenir les échangeurs propres, et par conséquent de conserver la performance de l’échange thermique.

La pompe à chaleur est équipée d’un écran tactile indiquant les informations techniques de fonctionnement (températures, COP système, durées de fonctionnement, etc.). Ce système est connecté, ce qui facilite le suivi à distance. Une journée de maintenance annuelle est alors suffisante pour la maintenance de la cuve et de la pompe à chaleur. Notre société s’occupait initialement de cette étape, mais nous formons à présent les installateurs afin qu’ils assurent ce contrôle annuel.

De quelles manières l’ERS peut-il s’intégrer dans une réflexion énergétique plus globale ?

L’ERS est généralement installé au sein de projets visant une optimisation de l’usage des ressources énergétiques et optant pour une mixité énergétique. La pompe à chaleur peut par exemple être alimentée en électricité par des panneaux photovoltaïques, et l’énergie solaire peut intervenir en complément à l’ERS pour chauffer l’eau sanitaire. Les maîtres d’ouvrage couplent aussi régulièrement ces apports à de la géothermie, des dalles actives, etc.

Marie-Astrid Heyde
NEOMAG#19
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Publié le jeudi 10 janvier 2019
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