Un défi pour notre cadre de vie

Un défi pour notre cadre de vie

Comment mettre l’économie circulaire en pratique dans le secteur de la construction ? Comment gérer ce nouveau processus ? Comment marier l’économie « classique » et l’économie circulaire ? Comment relever les défis qu’elle représente pour les membres de l’OAI qui doivent se lancer dans des activités de R&D (recherche et le développement) pour y faire face ?

Table ronde : « Construction – circulaire. Comment soutenir l’innovation des entreprises »

Devant une centaine de personnes attentives réunies à la Coque, Jos DELL, président de l’Ordre des Architectes et des Ingénieurs-Conseils, dresse le cadre de la table ronde organisée par l’OAI en collaboration avec Luxinnovation.

Cependant, avant que Jean-Michel GAUDRON de Luxinnovation lance et anime le débat qui réunit Claude TURMES, ministre de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire, Christian TOCK, Director Sustainable Technologies du ministère de l’Économie, Marc FEIDER, président du Conseil national pour la construction durable et vice-président de l’OAI, et, Sala MAKUMBUNDU, secrétaire générale de l’OAI, il est nécessaire d’en poser les bases.

C’est ce à quoi s’attelle Sasha BAILLIE, CEO de Luxinnovation. Elle présente ainsi les principales missions de l’agence nationale pour la promotion de l’innovation et de la recherche : le soutien aux entreprises, l’aide aux projets innovants et le « Business Development » afin d’attirer des sociétés innovantes au Luxembourg.

Vint alors le tour de Philippe GENOT, Charles-Albert FLORENTIN et Marc LIS, tous trois managers, afin qu’ils présentent leur cluster respectif : Wood, Clean Tech et Creative Industries. Le premier présente les chaînes de valeurs régionales du bois et les méthodes « industrie 4.0 » pour augmenter les capacités de production. Le deuxième s’attache à la déconstruction pour répondre aux défis en matières premières et en matériaux. Le troisième s’intéresse, quant à lui, aux méthodes « design for circularity » afin de mener des projets cross-sectoriels.

L’entrée dans le vif du sujet est consacrée par la présentation de trois projets pilotes architecturaux : le projet « JFK » (logements collectifs) de Nico STEINMETZ, une maison individuelle déjà réalisée à ossature acier et bois démontable de François THIRY et le projet « Kiem 2050 » (156 logements à coût abordable) d’Anabel WITRY.

Tous ces projets ont en commun d’avoir été menés par des équipes pluridisciplinaires. Les similitudes ne s’arrêtent pourtant à ce niveau. La boucle de l’économie circulaire doit se fermer et tous s’attachent à la réutilisation, voire au recyclage des matériaux une fois les bâtiments arrivés en fin de vie, même s’ils sont conçus pour faire preuve de résilience. Du point de vue des matériaux, le béton n’apparaît plus comme la panacée. Trop énergivore. Acier, bois et leur corollaire, l’assemblage mécanique pour permettre le démontage du bâtiment, deviennent dès lors récurrents.

L’autre point commun de ces projets est de s’adapter aux nouveaux modes de vie. Le logement est évolutif et prêt à suivre la composition familiale au fil des années, de l’arrivée des enfants à leur départ puis, leur retour en passant par les familles recomposées ou monoparentales.

Créer du vivre-ensemble

Ce dernier élément repris par les trois projets montre que l’économie circulaire est aussi appréhendée à travers la capacité du bâti à s’adapter aux usages actuels, tout en sachant que les deux projets concernant les logements collectifs font état d’une réflexion sur la mobilité, les espaces partagés, conviviaux (création de jardins verticaux) ou encore culturels (création d’un théâtre de 49 places) afin de créer de la sociabilité, du vivre-ensemble.

C’est donc sur la base de ces différentes descriptions que le débat s’est appuyé avec, d’une part et du côté de l’État, les réflexions qui se développent pour donner corps à l’économie circulaire et, d’autre part, les femmes et hommes de terrain qui se retrouvent face aux difficultés de la mise en application, voire face aux incohérences réglementaires.

Pour le ministre de l’Aménagement du territoire, Claude TURMES, le processus de la construction circulaire est encore à mettre en place. Ainsi, les différents acteurs de la construction durable, dont l’OAI, ont entamé des discussions afin d’apporter une réponse aux défis de l’économie circulaire.

Le ministre mise également sur les éco-quartiers dont il souhaite que les projets actuels puissent permettre de créer un « label » made in Luxembourg. Il s’agit de « valoriser ce qui a été fait, s’aider mutuellement et aller vers la généralisation ».

Christian TOCK du ministère de l’Économie est sur la même longueur d’onde puisqu’il voit dans les différentes expériences menées ici ou là, la possibilité de développer un savoir-faire exportable et donc d’accéder à de nouveaux marchés. Pour lui, il est évident que le Luxembourg a une carte à jouer à ce niveau.

Marc FEIDER et Sala MAKUMBUNDU sont plus pragmatiques. Si les synergies sur le terrain existent et s’articulent à travers les groupes de travail, si l’OAI s’engage dans des collaborations dans le domaine de la construction durable, la réalité du terrain s’impose. « Le dialogue n’est pas aussi intense qu’il pourrait l’être », affirme ainsi Sala MAKUMBUNDU en prenant l’exemple de la revitalisation de friches industrielles. La crainte est que l’on se perde en multipliant les projets dit-elle en substance. Et ce d’autant plus que les normes actuelles ne sont pas forcément adaptées et que les PAG/PAP peuvent finalement s’avérer être des obstacles à l’économie circulaire. Car en définitive si les concepteurs se sont emparés des projets, le cadre législatif ne suit, lui, pas assez vite. Sans parler des problèmes inhérents aux professions OAI lesquelles ont besoin de soutien pour faire face financièrement et mener à bien des projets qui répondent aux défis de l’économie circulaire. En d’autres termes, si l’État joue le rôle de locomotive, il se doit d’attacher tous les wagons afin que l’ensemble des acteurs suivent la même voie.

C’est finalement ce que résumera Pierre HURT, directeur de l’OAI, qui précise que l’OAI vient de mettre en place un nouvel outil, la Maîtrise d’œuvre OAI (MOAI.LU) dont l’ambition est de rendre la construction plus efficiente tout en assurant une haute qualité des ouvrages au service des maîtres d’ouvrage et des utilisateurs. Il en profite pour ajouter deux points essentiels non abordés mais qui mériteraient d’être développés. Il s’agit aussi du cadre financier et fiscal à adapter à l’économie circulaire et surtout, du rôle central des prestations intellectuelles des concepteurs architectes et ingénieurs-conseils. La « matière grise » constitue la valeur ajoutée de tout projet et à ce titre, devrait être au centre de l’économie circulaire. Une valorisation essentielle afin d’éviter tout risque d’uniformisation ou, comme il l’a dit, de « Mcdonalisation » de la société.

Retrouvez la table ronde en images

Actualité de notre partenaire l’OAI
Photo : Les orateurs de la table ronde de l’OAI du 7 octobre 2019 (de g à d) : François THIRY, Anabel WITRY, Philippe GENOT, Charles-Albert FLORENTIN, Christian TOCK, Claude TURMES, Marc FEIDER, Sasha BAILLIE, Sala MAKUMBUNDU,
Jean-Michel GAUDRON, Nico STEINMETZ, Pierre HURT, Marc LIS et Jos DELL / © OAI

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Publié le jeudi 31 octobre 2019
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