Neischmelz, un quartier qui renaît de ses cendres

Neischmelz, un quartier qui renaît de ses cendres

Neischmelz ou la reconversion d’une friche industrielle en un quartier urbain durable et innovant, pilotée par le Fonds du Logement en partenariat avec l’équipe qui a remporté le concours d’architecture et d’urbanisme.

Rencontre avec Denis Ory, Manon Kirsch et Audrey Vit du Fonds du Logement, ainsi que Sala Makumbundu, architecte administrateur chez Christian Bauer et Associés Architectes

Dès la fermeture définitive de l’usine sidérurgique en 2005, la ville de Dudelange a commencé des réflexions visant à définir des pistes pour la réhabilitation de ce site industriel qui constitue une enclave au cœur de la ville. Un concours a été lancé en 2009, qui a été remporté par une équipe composée de Christian Bauer et Associés Architectes, Latz + Partners et R + T. Les études préparatoires ont ensuite pris un certain nombre d’années avant de pouvoir entrer dans une phase active lancée avec l’acquisition du site, au cours de l’été 2016, par le Fonds du Logement. Le lancement opérationnel du projet n’attend désormais plus que le règlement de certains points réglementaires, urbanistiques et financiers : la construction sera possible dès que la modification ponctuelle du PAG de la ville de Dudelange sera introduite et après validation des PAP.

Portant sur une superficie totale de près de 40 hectares, ce projet est perçu, non pas comme une simple extension de la ville destinée à accueillir davantage d’habitants, mais comme un quartier animé qui mettra en pratique le principe de mixité tant au niveau social qu’au niveau fonctionnel. Plusieurs catégories de logements, subventionnés ou non, pouvant accueillir différentes configurations de ménages seront disponibles à la location ou à l’achat et, sur ce point, le Fonds du Logement se veut novateur : « Nous voulons sortir de la typologie classique des logements qui est assez restreinte et la faire évoluer en proposant, par exemple, de la colocation. Nous avons d’autres idées encore et nous travaillons avec un sociologue pour les développer », souligne Manon Kirsch. « Nous orienterons les futures constructions vers des profils d’habitat plus flexibles et évolutifs dans leurs usages : deux petites cellules pourraient par exemple devenir à terme un grand logement. Nous essayons de nous inscrire dans l’innovation par rapport à la morphologie des logements de demain », complète Audrey Vit.

Le site ne sera cependant pas exclusivement dédié au logement, loin de là, puisqu’un peu plus de la moitié des locaux seront affectés à d’autres fonctions qu’elles soient commerciales, administratives ou culturelles. Neischmelz pourrait être un quartier où l’on habite et on travaille à la fois, comme c’était le cas par le passé.

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À titre d’exemple, l’ancien laminoir, une structure qui s’étend sur 600 mètres de long, deviendra un espace d’activités où seront réunies des start-up. Sa toiture pourrait, quant à elle, servir en partie de support à des panneaux solaires ou photovoltaïques. D’autres bâtiments existants ont déjà trouvé partiellement leur vocation. C’est le cas du château d’eau qui est devenu un lieu d’exposition. La conservation du laminoir et du château d’eau témoigne de la volonté de préserver l’identité et l’histoire du site. « Le site offre un grand intérêt en termes d’archéologie industrielle. Nous ne voulons pas faire table rase du passé, mais valoriser le patrimoine historique », indique Denis Ory.

Situé entre les quartiers existants Italie et Schmelz, le futur Neischmelz aura aussi pour fonction de relier ces deux portions de la ville naguère séparées par l’usine, aujourd’hui par les friches. « L’idée est de créer un site vivant, connecté avec les quartiers environnants, qui devienne un quartier à part entière de la ville de Dudelange », explique Sala Makumbundu, architecte administrateur chez Christian Bauer et Associés Architectes. Le lien entre les quartiers se fera par le biais de chemins directs qui traverseront le nouveau quartier à hauteur de la gare ferroviaire, qui est un maillon essentiel du projet dans le cadre d’un concept de mobilité multimodale. « Nous voulons construire un quartier où la voiture occupera beaucoup moins de place qu’on ne lui en laisse actuellement. L’ensemble des réseaux alternatifs seront surdéveloppés de façon à garantir la fluidité des flux des habitants et des actifs : la gare est un point névralgique à exploiter, les réseaux de bus internes à la commune seront déployés en tenant compte de l’étendue de ce nouveau projet et le futur bus à haut niveau de service qui sillonnera le Sud transitera par le nouveau quartier. Le partage de véhicules et la mobilité douce seront favorisés et le stationnement des voitures sera centralisé. Nous allons pousser les acteurs présents au sein de ce quartier à accepter l’idée de dépendre moins de leur voiture », déclare Denis Ory. « L’espace sera organisé en Shared Space pour maintenir un rapport équitable entre le piéton, le cycliste et la voiture, qui pourra passer mais ne sera pas prioritaire », ajoute Sala Makumbundu.

Le projet Neischmelz intègrera les principes de l’économie circulaire. L’économie circulaire désigne un concept économique qui s’inscrit dans le cadre du développement durable et dont l’objectif est de produire des biens et des services tout en limitant la consommation et le gaspillage des matières premières, de l’eau et des sources d’énergie.

Le concept énergétique du site sera novateur. Il est question d’analyser l’exploitabilité de la géothermie profonde (plus de 1 500 mètres), ce qui serait une grande première au Luxembourg, et, alternativement, en fonction des résultats des 1ers forages qui seront bientôt opérés, l’énergie solaire. Un projet pilote portant sur le traitement des eaux grises sera réalisé sur divers bâtiments.

Les choix des matériaux et techniques qui seront utilisés dans la construction des bâtiments ne sont pas encore arrêtés. Le Fonds veut en effet se donner la possibilité d’absorber et de décliner les innovations qui émergeront au cours de la dizaine d’années sur lesquelles le projet s’étalera après son démarrage opérationnel prévu pour 2019. Quoi qu’il en soit les écomatériaux, sains, démontables et réutilisables seront privilégiés suivant les critères de l’économie circulaire.

Sur la photo : Audrey Vit et Manon Kirsch

Mélanie Trélat

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Publié le lundi 16 octobre 2017
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