Inclusive Finance 2025 : synergies, opportunités et connexions

Inclusive Finance 2025 : synergies, opportunités et connexions

Plus de 700 personnes ont participé, sur place ou en ligne, aux trois jours de conférences d’Inclusive Finance 25. Une session dédiée aux connexions entre climat et genres s’est tenue le mercredi, de même qu’une séance de speed networking qui a facilité la prise de contact entre des publics de secteurs variés, unis par la finance inclusive.

Transition durable, digitalisation, IA, coopératives, énergies propres… une large gamme de thématiques liées à la finance inclusive étaient abordées ces 12, 13 et 14 novembre à Neimenster lors de l’événement d’e-MFP. C’est également dans ce cadre qu’a été remis le Prix européen de la microfinance, au projet rwandais Radiant Yacu.

Comprendre le lien entre genre et climat

Un panel d’experts s’est exprimé sur cette thématique croisant crise climatique et genres. La discussion était modérée par Carmen Niethammer, senior gender specialist à la Banque européenne d’investissement. Les institutions européennes étaient également représentées par Ophelie Bouquet, policy officer à la Commission européenne et travaillant plus spécifiquement sur l’autonomisation économique des femmes en Afrique.

Dans son travail, elle a pu constater que les données liées aux finances et aux assurances, ne tiennent que rarement compte de critères de genres. Lorsque c’est le cas, toutefois, on constate que les activités professionnelles des femmes sont plus fortement impactées en cas de problèmes liés au climat.

Les femmes ont peu accès aux services financiers

Également présente dans ce panel, Dr. Sonja Kelly, global head du Women’s World Banking Institute, a notamment présenté quelques chiffres qui illustrent cette vulnérabilité :

  • 589 millions de femmes vivant dans des pays vulnérables au changement climatique ne possèdent ni compte bancaire actif ni portefeuille électronique.
  • 4 femmes sur 5 qui n’ont pas de compte bancaire, vivent dans un pays vulnérable au changement climatique.
  • Environ 812 millions de femmes n’ont aucun moyen de recevoir une aide financière en cas d’urgence.
  • Dans les pays à faible revenu et vulnérables au changement climatique, une femme sur quatre déclare avoir subi une perte de revenus ou une incapacité de travailler en raison de catastrophes naturelles survenues au cours des trois dernières années.

Plus conscientes des risques climatiques que les hommes, ces entrepreneures auraient pourtant plus tendance à acheter des produits d’assurances les couvrant en cas de problèmes.

Des chiffres avancés par Sowmya Suryanarayanan, head of Impact and ESG chez Aavishkaar Capital (Inde) appuient cette tendance : 99% des personnes empruntant via la micro-finance sont des femmes.

- ©Picto

Vulnérables, mais très actives

« La bonne nouvelle », insiste Sonja Kelly, « c’est que toutes ces femmes qui ne peuvent pas recevoir de paiement numérique, qui n’ont pas d’épargne dans un établissement financier formel, qui n’ont pas de compte, ne sont pas pour autant inactives financièrement. Elles sont très puissantes, elles prennent beaucoup de décisions. »


« Ces femmes sont des agriculteurs qui adoptent des cultures résistantes à la sécheresse. Ce sont des pêcheurs qui réinventent leurs activités face à la hausse des températures. Ce sont des entrepreneurs qui misent sur les énergies propres et les pratiques durables, et qui, de surcroît, en tirent profit. »

Sonja Kelly, Women’s World Banking Institute

Karl Deering, senior director Climate Justice chez CARE, a souligné pour sa part le rôle central des groupes d’épargne communautaires dans la résilience climatique. Ces dispositifs — très majoritairement composés de femmes — constituent à la fois un filet de sécurité et un levier de reconstruction, permettant aux communautés de renforcer leur résilience face aux chocs climatiques.


« Les groupes d’épargne offrent une formidable opportunité de permettre aux femmes de passer de l’anticipation et de l’absorption d’un choc à une véritable transformation. »

Karl Deering, CARE

Anticiper, absorber, adapter

Afin de mieux structurer la réflexion autour de la résilience des femmes dans leur travail, la Commission européenne a fait réaliser un rapport sur la résilience économique et financière des femmes en Afrique, présenté par Ophelie Bouquet.

Le rapport définit deux catégories de disruptions :

  • Les chocs : qui sont soudains et immédiats et ont un impact direct sur l’activité de l’entreprise (exemples : une inondation ou un incendie). Ceux-ci requièrent des actions immédiates.
  • Les facteurs de stress : des pressions latentes qui s’accumulent au fil du temps (exemples : la hausse des températures, la déforestation, le désertification). Ceux-là nécessitent de s’adapter non seulement rapidement, mais aussi sur le long terme.

Cette catégorisation a mené le groupe de travail à dresser un cadre de résilience en trois étapes :

  1. Anticipation et préparation : des stratégies pour gérer les risques et progresser.
  2. Absorption : c’est le moment où le choc survient et où il faut réagir rapidement.
  3. Adaptation : des ajustements à long terme destinés à réduire les vulnérabilités.

Carmen Niethammer (BEI) relève un autre lien fort entre les femmes et l’environnement : les startups créées par des femmes sont bien plus intéressées par la création d’entreprises durables, que celles créées par des hommes.


« Nous tenons peut-être là la solution miracle pour atteindre nos objectifs d’égalité des sexes et de climat, en nous concentrant plus efficacement et plus rapidement sur le leadership et l’entrepreneuriat féminins. »

Carmen Niethammer, BEI

Sans pouvoir entrer dans les détails d’une session d’une heure très approfondie sur le sujet, les experts semblent s’accorder sur le fait qu’il faut davantage de recherche sur l’influence du climat sur les réalités de terrain et sur les produits financiers à prévoir pour ces conditions spécifiques. L’influence de la répartition des genres dans les postes de leadership, et les implications culturelles des diverses régions vulnérables, sont également des facteurs à analyser.


« En Inde, bien que les femmes effectuent beaucoup de travaux manuels, lorsqu’il s’agit de négocier les prix des produits agricoles, ce sont toujours les hommes qui s’en chargent. »

Sowmya Suryanarayanan, Aavishkaar Capital

Tous semblent s’accorder sur un frein majeur, qui ne concerne pas tant l’existence de produits de banque et assurance adaptés, mais leur distribution, qui comporte trop de barrières pour un public vulnérable ayant peu d’accès aux technologies. Un public, qui, pourtant, a beaucoup à apporter dans cette crise climatique.

Créer des liens, faire naître des partenariats

IF25 avait pour vocation de créer de nouvelles synergies entre les experts présents, au sein des panels comme du public.

En sa qualité de réseau luxembourgeois de la finance inclusive, InFiNe, qui participait à cet événement en tant que membre luxembourgeois d’e-MFP, a organisé deux sessions de speed networking qui ont connu un succès immédiat.

- ©e-MFP


« Pour ces sessions de speed networking, j’avais identifié trois objectifs : maximiser les opportunités de réseautage, favoriser les liens intersectoriels, identifier les synergies. »

Anne Bastin, directrice d’InFiNe

Ayant elle-même pris part à ces sessions, elle a pu renouer des liens avec d’anciennes relations de son parcours professionnel et privé, au Sénégal et au Congo. Avec les bons outils, les grands défis du monde peuvent commencer à se résoudre depuis un de ses plus petits pays.

Marie-Astrid Heyde
Photo principale : Picto

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Publié le mercredi 26 novembre 2025
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