Diminuer les polluants climatiques à courte durée de vie

Diminuer les polluants climatiques à courte durée de vie

Un rapport d’orientation de l’OMS sur les polluants climatiques à courte durée de vie pour les responsables politiques

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1. Que sont les polluants climatiques à courte durée de vie ?

Les principaux polluants climatiques à courte durée de vie ayant un effet direct sur la santé sont le noir de carbone (ou suie), le méthane et l’ozone, qui contribuent à la fois à la pollution de l’air néfaste pour la santé et au réchauffement climatique. Le noir de carbone constitue une part importante des particules fines, principales causes de décès prématurés et de morbidité. Le méthane quant à lui contribue à la formation de l’ozone qui a des effets négatifs importants sur la santé respiratoire.

Les polluants climatiques à courte durée de vie, présents dans la pollution de l’air ambiant (extérieur) et intérieur, ont un effet considérable sur le changement climatique mais ne restent que peu de temps dans l’atmosphère – de quelques jours à une dizaine d’années. Du fait de cette courte durée de vie, des mesures énergiques prises aujourd’hui pour réduire les émissions peuvent améliorer rapidement la qualité de l’air et ralentir le rythme du changement climatique à court terme.

Selon les spécialistes de l’atténuation de la pollution, des mesures fermes pour réduire les émissions de ces polluants permettraient de ralentir le réchauffement climatique de 0,5° C dans les prochaines décennies. Il faut cependant noter que les mesures visant à réduire les polluants à courte durée de vie complètent, mais ne remplacent pas, celles nécessaires à la réduction des émissions de CO2 à durée de vie plus longue pour stabiliser le climat.

2. D’où viennent ces polluants ?

Les feux à ciel ouvert (notamment incendies, feux de forêts/brousse volontaires et incinération des déchets urbains et agricoles) constituent la principale source d’émissions de noir de carbone. La combustion de combustibles dans les bâtiments résidentiels et commerciaux, ainsi que dans les transports, représente environ 80 % des émissions de noir de carbone à partir d’activités humaines liées à la production et l’utilisation d’énergie. Les émissions liées à la combustion du diesel, de la biomasse et du kérosène sont parmi celles ayant la plus forte concentration de noir de carbone, et de ce fait sont considérées comme prioritaires pour la réduction des émissions contribuant au changement climatique à court terme.

Les émissions de particules provenant d’autres sources, notamment les centrales électriques alimentées au charbon, contiennent elles aussi du noir de carbone, mais dans ce cas il est émis avec d’autres polluants ayant un effet de refroidissement du climat ; de ce fait, l’atténuation dans ce secteur aurait moins d’impact sur le changement climatique à court terme. Toutefois, en termes de santé, les mesures visant à réduire les particules fines d’autres sources restent bien entendu bénéfiques et peuvent également réduire les émissions de CO2 et donc atténuer le changement climatique à plus long terme.

L’ozone n’est pas émis directement mais se forme à la suite de l’interaction de plusieurs polluants précurseurs sous l’effet des rayons du soleil. Les principaux précurseurs d’ozone sont le méthane, les oxydes d’azote, les composés organiques volatiles et le monoxyde de carbone. L’ozone est le second polluant à courte durée de vie ayant des effets nocifs sur le système respiratoire, qui peuvent aller de la modification de la fonction pulmonaire et l’incidence accrue de l’asthme à la mortalité prématurée.

Le méthane est un puissant polluant à courte durée de vie en soi, émis principalement dans le secteur de l’agriculture, notamment la production animale, la gestion des déchets, mais aussi en tant que sous-produit de l’extraction et de la distribution de combustibles fossiles. Les émissions de méthane ont une incidence sur la santé du fait de leur rôle dans la formation de l’ozone.

3. Quel est l’impact des polluants à courte durée de vie sur la santé ?

Les polluants à courte durée de vie contribuant aux niveaux d’ozone et de PM2,5 (particules dont le diamètre n’excède pas 2,5 µm) dans l’air ambiant, leurs émissions sont directement liées aux maladies cardiovasculaires et respiratoires, notamment cardiopathies, maladies pulmonaires, infections respiratoires et cancer du poumon, et contribuent ainsi de façon significative à plus de 7 millions de décès prématurés par an liés à la pollution de l’air.

Indirectement, l’ozone et le noir de carbone de ces polluants réduisent la photosynthèse et la croissance des plantes, entraînant une baisse des rendements agricoles, qui à son tour menace la sécurité alimentaire. Ils ont également une influence sur les conditions climatiques et la fonte des neiges et des glaces, entraînant des phénomènes météorologiques extrêmes comme des inondations susceptibles de menacer la santé.

4. Peut-on réduire les émissions de polluants climatiques à courte durée de vie ?

Oui, les polluants climatiques à courte durée de vie proviennent de sources diverses dans les domaines du transport, de l’agriculture, de la gestion des déchets ainsi que dans les secteurs résidentiels et industriels, et par conséquent plusieurs mesures d’atténuation peuvent être très bénéfiques pour la santé.

En fait, la lutte contre ces polluants présente de sérieux avantages étant donné que les bienfaits pour la santé de nombreuses mesures peuvent être ressentis à court terme et, outre le ralentissement du changement climatique à court terme, ces mesures peuvent être très complémentaires des réductions d’émissions de CO2 à plus long terme nécessaires pour atténuer le changement climatique à long terme. Il s’agit donc de politiques avantageuses pour les secteurs de la santé, de l’environnement et du climat.

5. Quelles sont les mesures d’atténuation ?

Le rapport porte sur de nombreuses stratégies et donne des appréciations indicatives sur les bénéfices potentiels pour la santé et l’atténuation des polluants pour 19 d’entre elles. Leur potentiel pour réduire le CO2 a également été étudié, car l’atténuation de ces polluants est considérée comme complémentaire de celle des émissions de CO2 nécessaires pour stabiliser le climat et assurer la santé des générations futures. Quatre stratégies ayant le plus fort potentiel pour la santé ainsi que pour atténuer les effets des polluants climatiques à courte durée de vie et réduire les taux de CO2 ont été identifiées.

 Les politiques et investissements qui privilégient les transports rapides ainsi que les pistes cyclables et rues piétonnes dans les villes compactes peuvent agir en faveur de la santé de multiples façons, notamment en réduisant l’exposition à la pollution de l’air et les risques de blessures, et en offrant plus de possibilités pour des déplacements actifs sûrs.

 Promouvoir une alimentation plus saine riche en aliments d’origine végétale et pauvre en viandes rouges et transformées auprès des populations aisées exposées au risque de maladies non transmissibles liées à l’alimentation aura un effet positif sur la santé et permettra également de réduire les émissions.

 Fournir et promouvoir l’utilisation de poêles à charbon et combustibles propres et efficaces, et de sources d’énergie plus propres, auprès des quelque 2,8 milliards de foyers à revenu faible qui utilisent actuellement des combustibles solides pour le chauffage et la cuisine.

 Réduire les émissions des véhicules à la fois de particules et de précurseurs d’ozone (par ex. le NO2) en appliquant des normes plus strictes en matière d’émissions et d’efficacité énergétique des véhicules et des combustibles.

Ce rapport mentionne de nombreuses autres mesures de lutte contre les polluants climatiques à courte durée de vie également très bénéfiques pour la santé. Par exemple, une gestion des déchets optimisée, des maisons et bâtiments à meilleur rendement énergétique, une élimination progressive des lampes à pétrole et le recours à des sources lumineuses et énergétiques plus propres, notamment des énergies renouvelables, pour les maisons et les centres de santé, une industrie de la brique et des fours à coke plus propres, etc.

Les mesures présentées permettent de réduire beaucoup d’autres risques sanitaires, dont les maladies liées aux conditions de logement associées à l’exposition à une chaleur, un froid ou une humidité extrême, les maladies liées à l’absence de services d’assainissement, la pollution de l’air par les fumées de kérosène et de générateurs, les maladies liées au travail, etc. Ces méthodes sont également examinées en détail, par secteur.

6. Comment la réduction des émissions sera-t-elle bénéfique pour la santé ?

En résumé, la réduction des émissions de polluants climatiques à courte durée de vie peut avoir des effets bénéfiques sur la santé de trois manières :

1. directement, en réduisant l’exposition à la pollution de l’air et les maladies associées ;

2. indirectement, en réduisant les effets négatifs de l’ozone et du noir de carbone sur les conditions climatiques et la production alimentaire, qui ont une incidence sur la sécurité alimentaire ;

3. Certaines mesures d’atténuation des polluants climatiques à courte durée de vie, notamment l’amélioration des systèmes de transport, l’adoption d’une alimentation plus saine ou une gestion améliorée des déchets, entraîneront d’autres bienfaits pour la santé, par exemple plus d’occasions de pratiquer une activité physique, moins de risque d’accidents de la circulation, une baisse des risques de maladies chroniques liées à l’alimentation, ou une exposition réduite aux risques sanitaires liés aux déchets et aux problèmes d’assainissement.

7. Pourquoi devons-nous agir maintenant ?

De plus en plus d’éléments tendent à montrer qu’une exposition directe à certains polluants climatiques à courte durée de vie est associée à des problèmes de santé. Comme leur nom l’indique, ces polluants ont une courte durée de vie dans l’atmosphère et donc, si l’on réduit les émissions, ils disparaissent relativement rapidement et les bienfaits pour la santé commencent à se faire sentir peu de temps après, voire presque immédiatement dans certains cas. Autre point important, les bienfaits se manifestent à proximité de l’endroit où sont appliquées les mesures d’atténuation, avec un effet bénéfique direct sur la santé des collectivités.

8. Pourquoi est-ce important pour les responsables politiques ?

Les bienfaits pour la santé des mesures d’atténuation des polluants climatiques à courte durée de vie se font sentir dans les communautés où les mesures sont prises et à court terme, ce qui les rend particulièrement intéressantes d’un point de vue politique.

Les mesures d’atténuation sont largement compatibles avec les priorités de développement immédiates des responsables politiques locaux et nationaux car elles permettent de réduire la pollution de l’air nocive, de rendre les villes plus saines et plus attirantes pour y vivre et y travailler et d’offrir plus de possibilités pour adopter des modes de vie plus sains.

Du fait de la courte durée de vie de ces polluants climatiques, les bienfaits commencent à se faire sentir peu de temps après la mise en place des mesures visant à réduire leurs émissions.

9. Que puis-je faire ?

Des choix de vie simples au niveau individuel peuvent avoir des effets bénéfiques sur la réduction des émissions et contribuer à améliorer la santé. Si les décisions politiques représentent une grande part des mesures d’atténuation, les choix que nous faisons sur ce que nous mangeons, notre façon de nous déplacer et les sources d’énergie que nous utilisons, par exemple opter pour les transports publics plutôt que la voiture et être actif en marchant ou en faisant du vélo, contribueront à réduire les émissions et les nuisances sonores tout en améliorant la santé et le bien-être.

10. Sur quels autres aspects agit-on ?

La réduction des émissions de polluants climatiques à courte durée de vie présente d’autres avantages. Outre les bienfaits importants pour la santé publique, nombre des stratégies pour réduire les émissions de polluants favorables à la santé peuvent également faire baisser de façon considérable les émissions de CO2 et donc contribuer à atténuer les changements climatiques à court et à long terme.

Source : Organisation mondiale de la Santé - www.who.int

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Publié le jeudi 31 décembre 2015
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