L'auto-partage : plus simple, moins cher

L’auto-partage : plus simple, moins cher

Économique et facile, l’auto-partage prend progressivement de l’ampleur à Luxembourg-Ville. État des lieux et perspectives avec Patrick Hein, fondateur de Carloh, qui propose une douzaine de véhicules répartis sur le territoire de la capitale.

Patrick Hein, fondateur de Carloh
Patrick Hein, fondateur de Carloh - 1

Combien d’utilisateurs comptez-vous aujourd’hui à Luxembourg-Ville et quel est leur profil-type ?

Nous comptons 280 clients qui utilisent une voiture en carsharing 1 à 2 fois par mois, voire 1 à 2 fois par semaine. 85.000 kilomètres ont déjà été parcourus en 10 mois, dans le cadre principalement de petits, mais aussi de grands trajets, dans la ville et hors de la ville.

Nos clients ont des profils variés : il peut s’agir de l’employé d’une micro-entreprise qui a des besoins occasionnels en termes de déplacements professionnels et dont le patron a opté pour ce service plutôt que d’investir dans une flotte de véhicules ; il peut s’agir aussi d’un particulier qui roule moins de 5.000 km/an et qui a renoncé à son véhicule personnel parce que cela lui coûte plus cher d’acheter, d’entretenir et d’assurer sa voiture que de recourir au carsharing, et que cela est, en outre, plus facile ; il peut encore s’agir de quelqu’un qui est en mission au Luxembourg pour quelques mois et qui n’a pas souhaité emporter son véhicule. D’une manière générale, il s’agit de personnes qui ont besoin d’un véhicule pour une durée moyenne d’une demi-journée et pour parcourir une quarantaine de kilomètres environ, et ceci principalement en complément de l’utilisation des transports en commun. Leur profil correspond à celui des habitants de la Ville de Luxembourg, à savoir 20 à 25 % de Luxembourgeois et 75 à 80 % d’étrangers.

Quels sont les obstacles à une utilisation plus large de ce mode de déplacement ?

Le 1er est la mentalité. Au Luxembourg, nous sommes très attachés à notre véhicule et nous considérons que nous en débarrasser revient à perdre une certaine forme de liberté. Posséder son propre véhicule est bien ancré dans notre culture, mais les jeunes sont de plus en plus ouverts au fait de partager une voiture pour diverses raisons : pour des raisons financières d’abord, mais aussi parce que trouver un appartement qui offre une place de stationnement devient de plus en plus difficile et de plus en plus cher.

Le 2e est que ce service est nouveau à Luxembourg et que les utilisateurs potentiels attendent d’avoir un certain recul pour s’assurer que le système fonctionne.

Y a-t-il des pays pionniers sur le sujet et quels sont-ils ?

L’Allemagne est pionnière en la matière avec 1 million d’utilisateurs et la mise en place de solutions dans les communes depuis 25 ans déjà. La Suisse aussi mène de nombreuses initiatives sur tout son territoire à travers le réseau Mobility. Chaque commune, à partir d’un millier d’habitants, propose dans le cadre de ce partenariat, des services de carsharing. D’autres pays y viennent peu à peu, notamment pour des raisons financières.

Quelle est la recette du succès dans ces pays ?

La recette du succès, c’est encore une fois la mentalité. Les Allemands et les Suisses sont plus sensibles aux questions écologiques et plus réceptifs quand on parle de pollution liée aux véhicules thermiques. La taille des pays et des villes y est aussi pour quelque chose : pour être rentable, un véhicule de carsharing doit être partagé par 30 à 40 utilisateurs.

D’une manière générale, le succès du carsharing repose sur la complémentarité avec les autres moyens de transport. 95 % de nos clients vivent à moins de 800 mètres d’une station de carsharing, mais il reste encore 5 % de ces clients qui ont besoin d’emprunter les transports publics pour se rendre à la station la plus proche de chez eux.

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Le modèle de carsharing est-il applicable en dehors des zones urbaines, selon vous ?

Oui, à condition que la connexion soit faite avec un système de transports publics efficace et intelligent. Nous entamons des discussions avec le ministère du Développement durable et des Infrastructures sur la façon dont nous pourrions mettre en place notre modèle dans des espaces où la population est moins dense. Nous cherchons aujourd’hui à proposer nos services dans les quartiers où nous ne sommes pas encore présents et, dans les 12 à 24 prochains mois, dans d’autres communes.

Est-ce que vous croyez à la fin de la voiture en ville comme le préconise l’OCDE ?

La fin des véhicules thermiques en ville dans les 10 à 20 prochaines années, certainement, mais la fin des voitures tout court, non. On aura toujours besoin de voitures en ville, par exemple pour faire des livraisons et fournir des services de proximité. Les véhicules électriques s’imposeront pour des raisons liées à la pollution, d’autant plus que d’ici 4 à 5 ans, les progrès technologiques feront que ces véhicules auront une autonomie bien supérieure à celle qu’ils ont aujourd’hui. Notre objectif est d’ailleurs de nous développer au niveau électrique, un développement qui est motivé par l’innovation technologique et l’accroissement de l’autonomie des véhicules.

Crédit photo : Carloh

Mélanie Trélat

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Publié le lundi 26 septembre 2016
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