
Retour vers le futur avec Rob Hopkins
Le fondateur du Mouvement de la Transition était ce 11 juin à Walferdange pour présenter son nouveau livre How to Fall in Love with the Future. A Time Traveller’s Guide to Changing the World, sur invitation de Citizens for Ecological Learning & Living (CELL). La rédaction vous propose quelques chosen pieces, traduites en français.
CELL, et plus particulièrement Norry Schneider, responsable Pactes Climat et Territoires en transition, a invité 250 personnes mercredi 11 juin 2025 au soir à « explorer une question : ‘Comment pouvons-nous construire un avenir désirable pour nos quartiers, nos communes et nos villes ? ».
Replay de la conférence en fin d’article
« C’est une invitation à joindre nos forces pour créer un futur que nous pourrons fièrement laisser aux générations à venir. »
Norry Schneider, responsable Pactes Climat et Territoires en transition de CELL
Le ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, Serge Wilmes, était présent pour dépeindre les actions mises en place par le gouvernement pour mener à ce futur plus désirable.
« Monsieur Hopkins, vous nous mettez au défi. Vous nous mettez au défi d’imaginer un avenir où les efforts pour réduire les gaz à effet de serre ne signifient pas moins de tout ce que nous pensons nécessaire — comme moins de consommation, moins d’autonomie, moins de flexibilité — mais plutôt moins de ce que nous ne voulons pas : moins de trafic, moins de bruit, moins de pollution, et surtout, davantage de bien-être et une meilleure qualité de vie. »
Serge Wilmes, ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité
La commune de Walferdange était représentée par sa Première échevine, Jessie Thill, également physicienne de l’environnement.
« L’avenir ne commence pas quelque part, loin, dans une capitale lointaine ou un forum mondial ; il commence ici même, dans des endroits comme Walferdange. Il commence avec nous, avec les décisions que nous prenons aujourd’hui. »
Jessie Thill, Première échevine de la commune de Walferdange
Tant cet événement, que celui organisé la veille par le MNHN, affichaient complet, preuve d’un engouement certain de la population sur cette thématique engageante.
Qui est Rob Hopkins ?
En quelques mots, par Norry Schneider :
« Rob est un visionnaire basé au Royaume-Uni, auteur et cofondateur du Mouvement de la Transition. Il croit fermement au pouvoir de l’imagination collective. À l’origine, il est enseignant en permaculture, puis il a écrit plusieurs livres. C’est la troisième fois que Rob vient au Luxembourg. Il était avec nous en 2015, lorsque notre mouvement venait de démarrer. Il est revenu en 2020 pour les Transition Days, donc probablement tous les cinq ans — vous pouvez le noter dans votre agenda — il reviendra. »
La conférence du fondateur du Mouvement de la Transition, en quatre citations :
« Le changement climatique est quelque chose de complexe, mais ce n’est pas vraiment compliqué. Je voudrais donc résumer pour vous ce défi, grâce à une organisation appelée Climate Science Basics, qui l’a réduit à cinq points très simples :
- Ça chauffe. Nous pouvons tous le constater. Cela se produit partout dans le monde. C’est un schéma, pas juste une petite fluctuation.
- C’est nous. Ce n’est pas un cycle naturel. Ce n’est pas un canular des Chinois. C’est nous, et notre obsession de brûler des choses — en particulier les combustibles fossiles et les forêts.
- Nous en sommes certains. À ce stade, toutes les personnes crédibles qui savent de quoi elles parlent s’accordent à dire que cela se passe, et que c’est nous qui en sommes responsables.
- C’est grave. Et ça ne fait que commencer. C’est le début de quelque chose. Nous avons déjà gagné 1,5 degré depuis le début de la révolution industrielle. Nous sommes actuellement sur une trajectoire de +4 degrés. Ca serait absolument catastrophique.
- Mais nous pouvons faire quelque chose ! »
« D’ici 2030 — soit dans cinq ans — nous devons avoir réduit nos émissions de 48 %. Nous pouvons choisir d’être ceux qui disent : ‘C’est beaucoup d’efforts, vraiment ?’ Ou bien ceux qui disent : ‘Génial, incroyable, waouh, nous avons l’opportunité de tout réimaginer en profondeur, c’est passionnant, peut-être que nous pouvons y arriver. Peut-être que cela pourrait être une aventure extraordinaire à laquelle participer.’ »
« S’il vous plaît, ne soyez pas pragmatiques. La dernière chose dont le monde a besoin, c’est d’une nouvelle génération de gens pragmatiques. Soyez audacieux, soyez téméraires, soyez déraisonnables — car c’est exactement ce que notre époque exige de nous. »
« En ce moment, je pense que le futur est en train d’être annulé. Le futur est colonisé. Et c’est profondément dangereux. Faire revivre le futur pour les gens, de manière pleine de possibilités, me semble être l’une des choses les plus radicales que nous puissions faire. »
Voyage dans le temps : la vie en 2030, telle qu’imaginée par Rob Hopkins
Voici un résumé - très schématique - du voyage immersif qu’a proposé le conférencier, sur fond de supports visuels. Régulièrement, le public était impliqué à cette co-création du futur, à travers plusieurs exercices réalisés en binômes.
Qualité de l’air et ambiance urbaine
- Air plus pur, chants d’oiseaux audibles, regards lumineux : l’ambiance urbaine est profondément transformée.
- Un sentiment collectif d’enthousiasme et de capacité d’agir remplace la résignation.
Mobilité
- Heures de pointe à vélo : de véritables « rivières de vélos » circulent matin et soir grâce à une infrastructure cyclable de qualité.
- Conversion des parkings souterrains en lieux sûrs, propres et gratuits pour les vélos.
- Les panneaux de stationnement pour voitures ont été remplacés par des indicateurs de places pour vélos.
Construction et logement
- Prise de conscience en 2025 que le secteur du bâtiment génère 35 % des émissions carbone.
- Abandon du béton au profit de matériaux locaux : paille, argile, bois, chaux.
- Naissance de filières locales de transformation des matériaux.
- Au Luxembourg, fort développement des matériaux à base de mycélium.
Espaces publics et enfants
- Rues fermées à la circulation et rendues aux habitants, aux enfants.
- Nouveau mode d’évaluation du progrès : nombre d’enfants jouant dehors, femmes pouvant faire du vélo en sécurité, santé dentaire, etc.
- Développement rapide du secteur du « débitumage » pour lutter contre les îlots de chaleur.
Éducation
- Fin des tests scolaires dès 2027.
- Les enfants participent à la conception de leurs écoles, intégrant parfois… des forêts tropicales intérieures (objectif : 60 % des écoles au Luxembourg).
- Accent sur l’imagination, la collaboration et les compétences utiles pour la transition écologique.
Nature et biodiversité
- Réensauvagement par les castors, devenus ingénieurs hydrologiques naturels.
- Forte augmentation de la biodiversité et meilleure gestion des inondations.
Alimentation et agriculture urbaine
- Municipalités cultivant la nourriture pour les écoles dans des fermes maraîchères locales. Résultats :
- 100 % de repas scolaires bio.
- 80 % cultivés localement.
- Moins de gaspillage et de viande.
- Éducation alimentaire pour les enfants.
- Changement durable des habitudes alimentaires dans la population (moins de produits ultra-transformés).
- Développement d’exploitations urbaines intensives (ex. : 200. 000 euros de production sur 1 hectare, 2 salariés, en pleine ville).
Énergie
- 100 % renouvelable, avec plus de la moitié de l’énergie produite en coopératives citoyennes.
- Argent investi localement, transition énergétique participative.
Nouveaux métiers
Métiers « cool » de 2030 :
- Débitumeur
- Agriculteur urbain (plus tendance que les rappeurs)
- Fermier d’algues
- Architecte low-tech
- Activiste de l’imagination
Lien social et transition culturelle
- Montée en puissance des expériences analogiques : gens qui se rencontrent, cuisinent ensemble, passent du temps dans l’espace public.
- Priorité donnée à l’imaginaire collectif et au désir de changement, au-delà de l’innovation technologique.
« Toutes les histoires que je vous ai racontées de mon voyage en 2030 existent en réalité déjà en 2025. Toutes. Je n’en ai inventé aucune. [...] Ce dont nous avons besoin, c’est d’une innovation sociale sur la manière de créer le désir que cela se produise. »
Rob Hopkins, fondateur du Mouvement de la Transition
Inspirant et inspiré, l’auteur a cité de nombreux penseurs et artistes, qui, comme lui, songent à ce monde de demain : Rashida Philips et More Mother (Black Quantum Futurism), Ruth Ben-Tovim (Town Anywhere), Camille Turner, Sun Ra, Extinction Rebellion, etc.
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Son livre How to Fall in Love with the Future. A Time Traveller’s Guide to Changing the World est en vente à partir du 17 juin.
Marie-Astrid Heyde
Photos : © Picto / Photos prises lors de la conférence, par Frédéric Liégeois
Le replay de la conférence :