« Pourquoi jeter des objets qui fonctionnent ? »

« Pourquoi jeter des objets qui fonctionnent ? »

Concept4 S.A. SIS est notamment spécialisée dans le curage de bâtiments. L’économie circulaire est au cœur de la philosophie du groupe. De nombreux objets et matériaux récupérés sont remis sur le marché de la seconde main pour répondre à de nombreux besoins.

Parmi les principes de l’économie circulaire, redonner une seconde vie occupe une place de choix. Dans le milieu de la construction, cette philosophie prend encore plus son sens dans la mesure où les déchets sont nombreux. Mais ils ne sont pas tous destinés aux centres de tris. Que du contraire !

Chez Concept4, on en a conscience. « Nous sommes en première ligne de cette économie circulaire », souligne Yohan Colombeau, administrateur délégué. « Quand on nous demande le curage d’un bâtiment, en vue de le rénover par exemple, la plupart du temps, tous les éléments sont laissés sur places comme les meubles, les équipements et autres. C’est pour cette raison que j’ai transformé la société en SIS pour bénéficier d’aides de la part de l’État. J’ai notamment pu engager des personnes en difficultés et acheter du nouveau matériel. »

La raison de cette décision ? « Nous étions arrivés dans un système où on mettait différentes bennes sur le chantier et tout allait en déchèterie. On ne réfléchissait pas alors qu’il y avait beaucoup de produits qui pouvaient profiter d’une seconde vie. Le fait que tout soit jeter systématiquement m’a toujours interpellé. Les clients ne souhaitaient pas non plus que leurs objets soient réutilisés.  »

Aujourd’hui, les mentalités ont évolué. « Beaucoup ont compris notre esprit circulaire qui nous permet de réinsérer des personnes au chômage dans le monde du travail. Nous intervenons avant la démolition pour récupérer tout ce qui est réutilisable. Je pense, par exemple, au mobilier, à l’éclairage, aux groupes électrogènes, aux moquettes, ou encore aux planchers techniques. Nous nous inscrivons totalement dans l’esprit du guide de la déconstruction. Ce dernier impose de réaliser un plan d’économie circulaire. »

Pour Yohan Colombeau, il s’agit d’un belle avancée, car on en parle beaucoup mais tout le monde ne passe pas spontanément à l’action. « Avec mes partenaires, nous observons des difficultés dans certains domaines. C’est notamment le cas chez les chauffagistes qui galèrent au niveau des pièces détachées pour les chaudières. Au-delà de 7 ou 8 ans, ils ne trouvent plus de pièces, même dans les grandes marques. Et donc, ils sont obligés de changer la chaudière. Je suis donc en train d’étudier la possibilité́ de développer un service consacré à ce secteur, en partenariat avec deux grands fournisseurs de chauffage.  »

Et le principe est très simple. « Je viens chercher la chaudière qui doit être changée. Je la garde dans un entrepôt et mon partenaire me met à disposition un technicien en fin de carrière qui m’explique ce qui peut être démonté. Toutes les pièces sont alors stockées et répertoriées numériquement dans un magasin pour proposer des pièces détachées de seconde main. Tout ce qu’il me manque actuellement, c’est un grand entrepôt au Luxembourg de 2 ou 3000 m2 qui me permettrait de stocker et de vendre sur le même lieu. Avec un bâtiment au Grand-Duché, je pourrai boucler la boucle avec des véhicules électriques pour acheminer les produits. L’impact carbone sera donc totalement nul.  »

Pourquoi jeter ?

L’expérience de la vente est déjà au rendez-vous. « Nous sommes confiants dans la mesure où nos deux magasins en ligne, destinés à la vente des objets et matériaux récupérés sur les chantiers, fonctionnent très bien. Notre but est d’exploiter, dans un même lieu, des ateliers de démontages dédiés à différents produits. Et ces derniers sont proposés à des prix abordables à des clients, professionnels comme particuliers, qui n’ont pas forcément les moyens d’investir dans du neuf. »

Concept4 est vraiment au cœur du principe de l’économie circulaire. « Pour moi, c’est la moindre des choses que de réduire les déchets de manière intelligente. Même si on ne fait pas de bénéfices, ça permet aussi d’aider les gens dans le besoin. Surtout à notre époque ! Mon principe, c’est d’arrêter de jeter. Il y a tellement de produits qui pourront servir plus tard. Je prends l’exemple d’une clôture. Au lieu de l’arracher, autant la retirer proprement. Certaines personnes auront peut-être besoin de quelques mètres, certes déjà utilisés mais toujours en bon état. Elles viennent donc chez nous plutôt que de se rendre dans un magasin pour payer plein pot. Je trouve ça grotesque de jeter quelque chose qui fonctionne. Dans notre boutique, nous donnons certains objets. Si nous avons un canapé qui est un peu griffé par un chat, et bien il fera toujours le bonheur d’une personne qui traverse peut-être une mauvaise phase. »

Une méthode qui en a surpris plus d’un. « Dès le moment où j’explique que nous sommes une société d’impact social, ils comprennent mieux notre démarche. Même si certains proposent encore de nous vendre les biens. Ce qu’ils oublient, c’est que nous ne les remettons pas directement à la vente. Il y a la démarche de venir tout récupérer, ce qui engendre un coût. A cela, on ajoute le nettoyage, la gestion du stock et du site par une personne, ou encore le remplacement éventuel de certaines pièces. Donc, si bénéfices il y a, ce n’est pas sans effort et gratuitement. Cette idée nous a permis d’engager cinq personnes à plein temps. »

Yohan Colombeau a confiance en ce processus. « Le chemin est encore long mais je sais que la ligne d’arrivée ne sera que positive pour la planète. Ici, nous sommes au début. Cela ne fait que 2 ans que nous sommes SIS. Nous nous sommes adaptés progressivement pour que la mécanique se mette en place. C’est encourageant en tout cas ! »

Sébastien Yernaux
Photos : ©Concept4 / ©Infogreen
Extrait du dossier du mois Circul’ère

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Publié le jeudi 27 avril 2023
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