Photovoltaïque chinois : Bruxelles obligé de négocier

Photovoltaïque chinois : Bruxelles obligé de négocier

Dix-huit pays de l’Union européenne, dont l’Allemagne, refusent d’imposer des sanctions à la Chine pour protéger l’industrie photovoltaïque, contraignant la Commission européenne à chercher une solution négociée avec Pékin pour éviter des représailles commerciales.

Premier partenaire européen de la Chine, Berlin s’est publiquement prononcé contre la proposition de Bruxelles d’une taxation provisoire de 47% en moyenne sur les panneaux solaires importés de Chine afin de protéger les firmes européennes du secteur.

« De notre point de vue, les mesures de sanction ne sont plus nécessaires et c’est pour cela que l’Allemagne a dit non », a expliqué lundi le ministre allemand de l’Economie, Philipp Rösler, avant un déjeuner de travail avec le Premier ministre chinois Li Keqiang, en visite à Berlin.

Outre l’Allemagne, « 17 autres Etats ont transmis des prises de position défavorables et il est clair que la Commission européenne doit maintenant rechercher une solution négociée », a expliqué une source proche des discussions. L’information a été confirmée à l’AFP par une autre source communautaire. Ces sources n’ont pas précisé qui étaient les 17 autres pays qui ont émis un avis défavorable. Mais selon une troisième source, la plupart des pays d’Europe centrale ainsi que la Grèce et Chypre ont rallié la position de l’Allemagne.

La Commission européenne a reconnu les fissures dans le front européen et s’est déclarée prête à chercher une solution négociée avec Pékin lors d’une rencontre informelle lundi à Bruxelles entre le commissaire au commerce Karel De Gucht et le vice-ministre chinois au commerce Zhong Shan.

« M. De Gucht a fait savoir au vice-ministre chinois qu’il était parfaitement au courant des pressions exercées par la Chine sur un certain nombre d’Etats pour les contraindre à s’opposer à la position de la Commission européenne », a indiqué son porte-parole John Clancy. « Karel De Gucht a expressément dit au vice-ministre chinois qu’il était disposé à négocier une solution sur les panneaux solaires », a-t-il ajouté. « Les Chinois n’ont pas soumis de proposition particulière, ce qui est normal car les négociations n’ont pas encore commencé et que l’Union européenne a jusqu’au 5 juin pour prendre une décision ».

Pratiques déloyales ?

M. De Gucht a insisté sur la nécessité de conserver à la Commission européenne son indépendance pour les décisions sur des droits anti-dumping. Il avait proposé en décembre d’instaurer des droits temporaires dans l’attente de la fin de l’enquête sur les pratiques des entreprises chinoises du secteur car « il fallait protéger en urgence des compagnies européennes dont la survie est menacée par des pratiques déloyales de la part des industriels chinois ». « 30.000 emplois sont menacés dans ce secteur en Europe », a souligné le porte-parole.

La Commission européenne a été saisie de plaintes des fabricants de l’UE et a ouvert une enquête qui doit s’achever en décembre 2013. « C’est à ce moment que les Etats auront vraiment leur mot à dire », a rappelé John Clancy.

Mais le fait que 18 Etats aient communiqué, vendredi dernier, un avis négatif pèse sur la décision que M. De Gucht devra prendre le 5 juin.

Cette situation révolte l’eurodéputé écologiste français Yannick Jadot. « La Chine fait scandaleusement pression depuis des mois sur le secteur photovoltaïque européen pour éviter toute rétorsion », a-t-il accusé dans un communiqué. « La position très ambiguë de l’Allemagne offre à la Chine un espace inacceptable dans le processus de décision européen », a-t-il dénoncé.

Plusieurs firmes allemandes (Q-Cells et Solarhybrid) et françaises (Solar France, Evasol) ont déjà mis la clé sous la porte ou ont été reprises comme la française Photowatts par EDF. Or, le solaire est présenté comme étant un des piliers de l’industrie verte créatrice d’emplois dans l’UE.

« L’Europe ne peut céder au chantage », s’est insurgé lundi dans un communiqué Milan Nitzschke, président de EU ProSun qui représente les industries européennes du secteur, à l’origine de l’enquête.

Photos Angela Merkel et Li Keqiang, Premier ministre chinois © AFP / Texte AFP

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Publié le jeudi 30 mai 2013
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