Le plan du gouvernement pour soutenir la construction et le logement

Le plan du gouvernement pour soutenir la construction et le logement

Rénovation énergétique, accès au logement ou développement des compétences professionnelles : ces vecteurs font partie d’un paquet de 13 mesures par lesquelles le gouvernement entend relancer le secteur de la construction et le marché immobilier luxembourgeois.

Des mesures pour les PME, les communes et les ménages

Le ministre du Logement, Henri Kox ainsi que ses homologues des Classes moyennes, Lex Delles et de l’Économie, Franz Fayot, ont détaillé les dispositions élaborées par un groupe interministériel et qui seront pilotées par le ministère du Logement.

Pour répondre au ralentissement du secteur du bâtiment dont les acteurs et les médias se sont assez largement fait l’écho, le gouvernement préfère garder la main en dirigeant son action vers les PME, les communes et les ménages.

La Chambre des Métiers (CDM) s’est fendue d’un communiqué de presse saluant les initiatives prises par cette Task Force Logement, ne regroupant pas moins de sept ministres.

Elle estime toutefois que « des mesures plus incisives auraient pu être prises en vue de donner un signal clair en direction des investisseurs privés (…), notamment par une reconsidération de la baisse de taux de l’amortissement décidé en 2022 et les retraits des amendements gouvernementaux bail à loyer, plus particulièrement en relation avec le taux de rendement et le calcul du capital investi. »

Marché de l’immobilier : morosité conjoncturelle

Les tenants sont connus, désormais, les aboutissants le sont tout autant. La guerre en Ukraine au sortir de la pandémie de COVID 19, l’inflation généralisée qui s’est ensuivie, plus particulièrement celle touchant les matières premières de la construction, la hausse des taux d’intérêts ou encore la baisse du volume du bâti autorisé, ont entraîné l’érosion régulière de l’activité immobilière.

Le gouvernement indique que « face aux prix qui ont commencé à baisser au 4e trimestre 2022, de nombreux acquéreurs potentiels restent (pourtant) en position d’attente ».

La cause de cette frilosité ? Les taux d’intérêt hypothécaires et les verrous de sécurité pour prévenir une bulle immobilière, notamment le surendettement des ménages, ont fini par limiter les capacités d’emprunt.

Si ces temps de disette appellent le marché à une réflexion structurelle – les difficultés sont toujours une opportunité pour se remettre en question –, il faut vite répondre à la conjoncture qui impacte principalement les petites et moyennes entreprises.

Rappeler les aides supplémentaires dans le cadre de la transition vers les énergies renouvelables et la rénovation énergétiques présentes entre autres dans le « Solidaritéitspak 2.0 » du 28 septembre 2022, est un préalable.

Le rappel aidant, quelles sont les décisions à même de contrecarrer l’atonie des secteurs du bâtiment et du génie civile ?

Stimuler le bâtiment et le logement : les mesures mises en œuvre par l’État

1. Maintenir les investissements publics à un niveau élevé
2. Acquérir des projets de logements en VEFA par l’État
3. Accélérer les projets pilotes, simplifier la mise en œuvre des projets de décarbonation et d’assainissement énergétique dans les logements
4. Adapter de 40 à 60 millions d’euros le seuil prévu à l’article 80 de la loi du 8 juin 1999 sur le budget, la comptabilité et la trésorerie de l’État.
5. Renforcer les aides financières pour les investissements des infrastructures de l’éducation non formelle et de l’aide à l’enfance et à la Famille


La chambre des métiers du Luxembourg indique que « le maintien des investissements à un niveau élevé (…) permettra de mettre en œuvre une politique anticyclique en termes d’investissement (…), que ce soit au niveau de constructions nouvelles ou de projets de rénovation ».

Par ailleurs, en relevant le seuil de 40 à 60 millions d’euros, le gouvernement dynamise les procédures de marchés publics. En dessous de la barre nouvellement fixée, les opérations n’auront plus de recours nécessaire à une loi spéciale.

Ensuite, pour désolidariser les projets de constructions neuves de leur commercialisation privée, l’État se fera acquéreur de logements VEFA, vente en l’état futur d’achèvement. Une manière de fluidifier les initiatives en minimisant leurs risques d’invendus.

La branche innovation durable n’est pas oubliée avec une simplification annoncée des interventions de décarbonation et de rénovation énergétique des bâtiments. Concrètement, cela passera par la révision du Règlement-type sur les bâtisses, les voies publiques et les sites (RBVS), ainsi que des propositions de textes-types pour PAP (plan d’aménagement particulier), concernant par exemple les aspects de la rénovation énergétique, des pompes à chaleur et des installations photovoltaïques.

Enfin, un appel à projet de rénovation de copropriétés débutera à l’automne 2023. Il aura pour objet la réalisation d’une cinquantaine d’études de faisabilité de restructuration énergétique de logements en copropriétés. L’enveloppe budgétaire dédiée à la réalisation des projets retenus est estimée à 1 500 000 €.

Les mesures destinées aux entreprises de l’immobilier

6. Élargir les aides aux entreprises en vue d’une amélioration de l’efficience énergétique et soutien à la trésorerie et à l’investissement
7. Ouvrir les marchés publics à plus de PME actives sur le marché privé de la construction.
8. Renforcer les compétences techniques au sein du secteur de la construction (formations pour salariés)

Ce que l’on peut retenir, c’est la volonté du gouvernement d’ouvrir les portes des marchés publics au plus grand nombre. Un soutien au tissu économique des PME en l’impliquant davantage dans le champ de la construction publique et en lui permettant de soumettre des offres.

Les mesures destinées aux Communes

9. Appel aux communes à maintenir leurs budgets d’investissements
10. Renforcer le régime d’aides pour la rénovation énergétique en faveur des communes
11. Renforcer la rénovation des logements abordables, notamment communaux

Outre l’appel aux bonnes volontés des communes et des syndicats de commune, pour qu’ils s’associent à l’effort d’investissement et qu’ils y englobent le commerce et l’artisanat, le gouvernement met la main au portefeuille. Un budget de 25 millions d’euros est consacré à augmenter temporairement les aides financières aux rénovations énergétiques des bâtiments communaux.

Dernière mesure à l’échelle communale : la mise en place d’une analyse et d’un inventaire des projets de rénovation des logements abordables en lien avec la Klima-Agence. Si le promoteur social décide de finaliser la réhabilitation énergétique, la participation étatique sera de 75 % telle que la législation le prévoit.

Les mesures destinées aux ménages

12. Renforcer les aides individuelles d’accès au logement

• Garantie d’État : relever le montant maximal
• Mieux tenir compte des enfants pour la subvention d’intérêt
• Renforcer la création de logements intégrés
• Introduire une prime compensatoire conjoncturelle

13. Sensibiliser aux aides exceptionnelles du « Solidaritéitspak 2.0 » en faveur des énergies renouvelables et des assainissements énergétiques.

Les aides individuelles d’accès au logement se trouvent donc renforcées et les demandes d’aides « Klimabonus » se verront simplifiées.

Le montant de la garantie étatique dans le cadre d’un prêt hypothécaire en vue de l’acquisition d’un logement est relevé à 26 000 euros. Cette garantie permet aux banques de se prémunir en cas de défaillance de l’emprunteur.

Ensuite, pour les logements intégrés, la décision gouvernementale est de faire passer la prime de 10.000 € à 20.000€ pour des travaux de « logement intégré », c’est-à-dire la transformation d’une maison unifamiliale en 2 unités d’habitation distinctes.

Pour finir, les primo-acquéreurs peuvent bénéficier d’une prime compensatoire conjoncturelle de 20 000 €. Cette aide devrait compenser en partie l’inflation des prix des matières premières. Elle couvrira ainsi, les frais de transaction et d’enregistrement lors du premier achat d’un bien immobilier au Luxembourg. Sont concernés les ménages dont les revenus sont situés parmi les 4 déciles inférieurs de la répartition des revenus.

Qu’est-ce qu’un décile ?

Les salaires sont classés par tranche de 10 %, des 10 % les plus bas, jusqu’au 10 % les plus hauts. Chaque tranche de 10 % est un décile. Il y a donc 10 déciles (100 %). Par exemple, le plafond du 5e décile est le salaire médian car il sépare les revenus en deux : 50 % gagnent plus, 50 % gagnent moins. Si 60 % des salaires sont supérieurs aux vôtres, vous êtes parmi les 4 déciles inférieurs (40 %).

Quel est le coût des 13 mesures gouvernementales ?

Le gouvernement budgétise l’ensemble des mesures (hors investissements publics prévus) à quelque 150 000 000 d’euros, ainsi divisés :

• 100 000 000 pour les mesures mises en œuvre par l’état
• 10 000 000 pour celles dévouées aux entreprises
• 25 000 000 pour celles destinées aux communes
• 15 000 000 pour celles dévolues aux ménages

L’argent mis sur la table autour de ces 13 mesures cherche à doper la demande à court terme, restaurer la confiance et provoquer l’intérêt des investisseurs privés. En espérant que les taux d’intérêt, l’inflation et tous les impondérables conjoncturels n’en dissipent pas les effets. Auquel cas, il faudra sans doute, dès la fin de l’année, remettre la main à la poche…

Par Sébastien MICHEL
Photo d’illustration : (de g. à dr.) Franz Fayot, ministre de l’Économie ; Henri Kox, ministre du Logement ; Lex Delles, ministre des Classes moyennes / MLOG

Article
Publié le jeudi 29 juin 2023
Partager sur
Nos partenaires