La rénovation, enjeux et potentiel : avis d’experts
Réduction des ressources consommées, des déchets et gaz à effet de serre produits, des frais énergétiques, amélioration du confort et de la sécurité des occupants, mais aussi augmentation de la valeur marchande du bien et préservation du patrimoine, la rénovation est une opportunité d’améliorer l’environnement bâti durablement et efficacement.
Pit Kuffer, associé chez Witry & Witry architecture urbanisme et membre de l’OAI
« L’impact socio-culturel de la rénovation de notre patrimoine bâti est souvent mépris par rapport aux paramètres écologiques, et pourtant ce n’est qu’en valorisant l’intégralité des circonstances, la cohésion sociétale et les possibilités de réduction des émissions de CO2 éq. que la rénovation déploie son vrai potentiel. D’une part, la rénovation des espaces urbains et des bâtiments amplifie la cohésion sociale et renforce les liens interhumains. Elle renforce également l’identité culturelle qui favorise la stabilité sociétale.
D’autre part, la rénovation contribue à la réduction des ressources de construction nécessaires et des émissions CO2 éq liés. Lors d’une rénovation, de nombreux éléments pourraient être réemployés sur place ou être intégrés dans d’autres projets. Les équipements sanitaires, par exemple, restent intacts pendant des décennies et auraient juste besoin d’un nettoyage intense pour pouvoir être réutilisés. Sachant que la structure portante des bâtiments est responsable d’environ 50 % des émissions CO2 éq et 30 % du coût lié à la construction, le potentiel écologique, économique et sociétal de la rénovation est manifeste.
Le but est donc de conserver et de réutiliser un maximum d’éléments de l’existant, tout en adaptant les bâtiments aux besoins actuels et futurs. Le rôle des architectes et des ingénieurs est de favoriser la rénovation par rapport à la démolition et de transposer le réemploi envers la neutralité carbone, sans pour autant oublier les aspects sociétaux de notre patrimoine bâti. »
Violaine Giaux, direction de l’efficacité énergétique au ministère de l’Économie
« Ce qui importe, c’est l’objectif commun : l’être humain a besoin de la planète pour vivre, alors que la planète n’a pas besoin de nous. Il est dans notre propre intérêt de la préserver. Prendre conscience de nos besoins énergétiques et agir pour les réduire est crucial pour cette préservation.
Viser un parc immobilier peu énergivore, durable et résilient, tout en garantissant le confort et la sécurité de tous, est une priorité pour le Ministère. Cela signifie que la rénovation énergétique doit être accessible à tous, non seulement pour préserver notre milieu naturel, mais aussi pour permettre à chacun d’accéder à un logement confortable à un coût accessible, pilier d’une vie digne. Cette vision philanthrope entraîne également des effets positifs sur l’économie locale et la créativité technologique.
Pour œuvrer collectivement à ces objectifs, la mobilisation de tous les acteurs est essentielle. Nous devons tous continuellement nous informer, nous former, nous réinventer, collaborer, encourager, créer, etc. Le Luxembourg est riche d’acteurs clés déjà très avancés dans cette direction. Face aux nombreux défis, l’implication de nouvelles forces dans la formation, le conseil, la conception, la planification, la réalisation des travaux, ainsi que le suivi et le contrôle de qualité, est toujours la bienvenue.
La ligne directrice du ministère est de promouvoir une action en deux étapes : d’abord, améliorer l’efficacité énergétique de manière durable, puis décarboner les systèmes de chauffage pour répondre aux besoins énergétiques résiduels. Pour cela, l’attention et les actions sont portées sur une approche intégrée combinant la sensibilisation, l’accompagnement des propriétaires et des professionnels, la formation professionnelle, les outils techniques, les incitatifs financiers, les réglementations.
Pour une vue plus complète de la stratégie nationale, j’invite les lecteurs à consulter prochainement la mise à jour du PNEC (plan national intégré en matière d’énergie et de climat), dont la version finale sera publiée cet été, ainsi que la nouvelle EPBD (directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments (UE) 2024/1275) publiée ce printemps et la nouvelle EED (directive européenne relative à l’efficacité énergétique (UE) 2023/1791), qui seront toutes deux prochainement transposées en droit national. »
François-Xavier Gilen, Manager vente chez Thomas & Piron
« La rénovation exige une expertise technique, un savoir-faire et de la fiabilité. Chez Eklozio, l’entité dédiée à la rénovation lancée par Thomas & Piron il y a quelques mois, nous maîtrisons toutes les techniques et nous intégrons tous les corps de métier, car nous bénéficions de l’expérience d’un groupe présent depuis 48 ans dans la construction et l’immobilier. De plus, nous formons régulièrement nos salariés.
Pour recenser les expertises présentes au sein de notre groupe, nous avons décidé d’établir un cadastre des compétences, et le résultat nous a surpris ! Nous avons réalisé que notre carreleur, qui a été engagé comme tel il y a 20 ans et qui a cette fonction unique inscrite depuis sur son contrat de travail, a également d’autres compétences : il sait plafonner, remplacer une prise électrique, etc. Compétences qu’il a acquises en travaillant dans sa propre maison ou parce qu’il a eu des expériences dans d’autres entreprises Et, c’est le cas de 90 % de nos employés ! Cette polyvalence est exactement ce dont nous avons besoin en rénovation où de nombreuses petites interventions successives de différents corps de métier sont nécessaires.
Je trouve que c’est une démarche que nous aurions dû faire plus tôt, car elle nous a permis de nous rendre compte qu’il y a de l’or dans les mains de beaucoup de nos collaborateurs, et pas uniquement dans la perspective dans laquelle ils ont été employés. »
Propos recueillis par Mélanie Trélat
Extrait de Neomag #64