Coup de pouce pour une nouvelle chance

Coup de pouce pour une nouvelle chance

Certains demandeurs d’emploi peinent à réintégrer le marché du travail ordinaire. Manque de qualifications, âge « avancé » et capacités physiques restreintes peuvent expliquer ces difficultés. Au niveau communal, les CIGL leur ouvrent leurs portes pour deux ans et les aident à trouver un emploi plus durable.

Les centres d’initiative et de gestion locaux (CIGL) sont gérés en étroite collaboration avec les communes du Luxembourg et fonctionnent au travers de conventions avec le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Économie sociale et solidaire. Neutres « du point de vue politique, idéologique et confessionnel », ils sont un lieu de transition, de deuxième chance, de réinsertion.

« Le ministère nous octroie un certain nombre d’équivalents temps plein », développe Carlos Breda, coordinateur général du CIGL Esch. « Ensuite l’Adem nous envoie des candidats répondant à certains critères dont l’âge minimal est fixé à 25 ans.

Dans la plupart des cas, ce sont des personnes peu qualifiées, certaines avec des restrictions physiques et environ 25% ont plus de 50 ans ». Ces profils seniors ou en incapacité partielle attirent moins les employeurs, alors qu’ils sont encore tout à fait en mesure d’occuper un emploi. « Aussi, en raison de notre expérience de plus de 20 ans dans l’accompagnement socio-professionnel des demandeurs d’emploi, les CIGL sont des partenaires très importants dans la stratégie
nationale d’accueil et d’intégration des bénéficiaires de protection internationale ou temporaire, comme les personnes ayant fui la guerre en Ukraine
 » ajoute Lola Artigao, chargée de direction du CIGL Walfer. LesLes CIGL ont donc pour mission d’essayer de les réintégrer au marché ordinaire.

Chaque centre a sa façon de procéder et ses propres activités, liées directement aux besoins de la commune. Les demandeurs d’emploi retenus sont embauchés pour une durée maximale de 2 ans.

Comprendre, former, renforcer le CV

La première étape consiste généralement à réhabituer les nouvelles recrues au travail en entreprise. Comme partout, il y a de bons et de moins bons profils. Dany Scholten (à gauche sur la photo principale) est chargé de direction pour le CIGL Sanem : « Certains ne se présentent pas, ou arrivent en retard. Notre rôle est alors de communiquer avec eux pour comprendre d’où viennent ces problèmes et proposer notre aide », là où des employeurs ordinaires ne pourraient pas se permettre d’être si tolérants. Et de poursuivre : « Certaines personnes n’ont pas travaillé depuis 5, 10 ans. Il leur faut donc un temps d’adaptation à la reprise de la vie active. Cela peut prendre jusqu’à un an, voire un an et demi et on arrive alors rapidement à la fin des deux ans »

Un plan de carrière est également établi afin d’envisager des formations et stages qui pourraient venir renforcer leur CV. Carlos Breda (CIGL Esch) : « nous définissons généralement trois métiers pour lesquels ils vont essayer de trouver un emploi. Ensuite nous voyons si nous pouvons proposer des formations en interne ou alors nous faisons appel à un organisme externe, avec un budget s’élevant généralement à 800-1.000 euros par personne par an ». Les bénéficiaires ont également l’obligation de suivre un atelier recherche emploi. Dany Scholten (CIGL Sanem) : « on leur apprend à créer un nouveau CV, à gérer un entretien d’embauche, etc. Ils suivent également une formation avec l’office social pour savoir où s’adresser, par exemple en cas de soucis financiers ou pour trouver un logement ».

« Nous abordons l’acquisition de compétences en dehors du cadre formel d’apprentissage et nous adaptons notre offre de formation à notre public cible », poursuit Lola Artigao (CIGL Walfer). « Il est aussi de notre responsabilité de former et d’instruire des individus membres à part entière de notre société, dans un monde changeant à vitesse accrue : la digitalisation, l’hygiène de vie, l’alimentation saine, saisonnière et locale, l’égalité homme-femme, la parentalité, l’affirmation de soi, la santé mentale, la gestion budgétaire, l’écologie et le dérèglement climatique, les droits et devoirs du citoyen,… Ce sont des thématiques transversales qui prennent de plus en plus d’importance dans notre dispositif de formation continue, à côté des formations techniques visant le développement des hard skills. »

Rien de tel évidemment que l’expérience pour faire ses preuves. En plus du travail proposé par le CIGL, qui les réhabitue à la vie active mais ne correspond pas toujours entièrement à leurs projets professionnels, les aspirants travailleurs sont invités à postuler pour des stages en entreprises, soit partenaires du CIGL, soit via les offres d’emploi déposées à l’Adem.

Une question de perception

Carlos Breda (CIGL Esch) : « les stages peuvent durer jusqu’à 6 semaines, mais généralement, 2 à 3 semaines suffisent pour savoir si le candidat convient au poste ». Soit ce n’est pas le cas et on s’orientera vers un autre poste ou une formation, soit c’est une réussite et l’employeur recrute la personne. Les candidats étant pris en charge par le CIGL, les stages sont entièrement gratuits pour les employeurs ouverts à l’expérience, ce qui explique aussi qu’ils n’en profitent que le temps de se faire une idée.

Toutefois, les stages ne sont pas toujours simples à trouver, en raison des réactions des employeurs parfois très fermés aux profils proposés, précisément parce qu’ils sont envoyés par le CIGL. M. Scholten explique : « la perception est que ce sont des gens qui n’ont pas envie de travailler. Ce n’est pas du tout cela. Il y a partout des gens qui n’ont pas envie de travailler, mais une initiative sociale, c’est une deuxième chance pour tout le monde. N’importe qui, à à un moment de sa vie, peut avoir besoin de passer par une initiative. J’aimerais que tout le monde sache que c’est très bénéfique pour ces personnes qui ont beaucoup de compétences et de motivation. Même le regard du grand public doit évoluer vers une image plus positive ».

Le CIGL de Sanem accueille 34 bénéficiaires. Ces dernières années, en dépit de la situation sanitaire, 5 à 6 personnes ont pu chaque année trouver un nouvel emploi. Du côté d’Esch et Walferdange, le taux d’insertion est d’environ une personne sur trois. « Notre accompagnement est toujours bénéfique pour ces personnes, qu’elles puissent trouver un emploi à court terme ou pas, le parcours au CIGL laisse une trace durable et il rend la personne plus émancipée et autonome » explique Mme Artigao. Les candidats arrivés au terme du programme et n’ayant pas trouvé de travail continuent à être suivis par l’Adem et doivent attendre deux ans avant de pouvoir à nouveau bénéficier d’une mesure pour l’emploi.

Marie-Astrid Heyde
Photos : CIGL Esch, CIGL Sanem, Infogreen.lu

Extrait du dossier du mois « Former pour agir »

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Publié le lundi 6 mars 2023
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