Avancer avec les populations sans faire reculer la planète

Avancer avec les populations sans faire reculer la planète

Venir en aide aux populations vulnérables ne doit pas se faire au détriment de l’environnement. C’est une philosophie que la Fondation Follereau Luxembourg applique à chacun de ses projets.

La Fondation Follereau Luxembourg intervient dans 9 pays africains, principalement en Afrique de l’ouest, afin d’améliorer les conditions sanitaires des populations et de soutenir les communautés particulièrement vulnérables (femmes et enfants). Deux thématiques s’intègrent toujours dans les projets sur lesquels elle travaille : la question du genre et la préservation de l’environnement.

Pour ce continent particulièrement touché par le changement climatique, il est indispensable de penser les projets en intégrant les enjeux environnementaux. C’est ce à quoi veille Clémentine Gloire, chargée de projets pour le Bénin. Elle nous emmène dans le sud du pays, dans la commune de Savalou, sur le lieu de construction d’un centre de formation professionnelle.

Clémentine, tu es en mission dans l’arrondissement de Doumè. Peux-tu nous en dire plus sur ce projet ?

L’arrondissement de Doumè compte environ 30.000 habitants et nous sommes actifs dans un quartier de 5.000 habitants. Nous y construisons - avec nos partenaires sur le terrain - un centre de formation qui comprendra quatre filières : maçonnerie, menuiserie, électricité et construction métallique. Il aura une capacité d’accueil de 80 élèves, soit environ 20 par filière. Les formations s’adresseront aux jeunes déscolarisés de 15 à 22 ans, en vue de les réinsérer et de leur faciliter l’accès à l’emploi. Les jeunes diplômés reçoivent d’ailleurs un kit de départ pour lancer leur activité ou être plus rapidement embauchés.

L’appui de la Fondation Follereau est prévu pour 5 ans, mais nous pensons le projet pour qu’il soit durable : le personnel est affecté et rémunéré par l’État et la gestion se fait avec le ministère béninois de la formation professionnelle et la mairie. Nous privilégions toujours une approche participative et communautaire ; dans ce cas précis un collectif d’artisans existait déjà et a été impliqué dans le projet. Au terme des 5 années, nous maintenons un suivi tous les 6 mois pour vérifier que tout tourne bien.

Quelles sont les conditions de vie dans cette région ?

Comme la plupart des régions dans lesquelles nous sommes actifs, la commune de Savalou est une zone très enclavée, partiellement exclue des systèmes de base de santé, d’éducation, où les accès à l’eau potable sont limités. Ce sont des régions agricoles où les populations cultivent avant tout pour leur propre survie puisqu’on y importe très peu de denrées.

L’Afrique est aussi le continent qui souffre le plus du changement climatique, alors que c’est celui qui pollue le moins. Les vagues d’inondations et de sécheresse dont il est victime rendent les populations encore plus vulnérables et dépendantes. Un rapport du GIEC souligne d’ailleurs qu’un enfant qui naît maintenant en Afrique connaîtra 8 fois plus de vagues de chaleur que s’il était né dans les années 60 !

De plus en plus, dans les échanges avec les autorités locales, on ressent une conscience des défis environnementaux et la volonté d’atténuer les impacts négatifs des actions menées. Les populations souhaitent vivre en harmonie avec leur environnement, de manière équilibrée par rapport aux ressources disponibles.

Comment tenez-vous compte de ces enjeux environnementaux ?

En amont, nous avons réalisé une étude d’impact environnemental et social. C’est obligatoire dans le cadre de la formation au Bénin, selon un texte de loi qui existe depuis 1991, mais qui n’est appliqué que depuis quelques années. C’est un travail qu’on fait de manière systématique mais de façon moins formalisée, donc cela nous convenait très bien.

L’étude est menée par un cabinet désigné par le ministère. Il analyse l’impact du projet dès la phase de construction jusqu’au fonctionnement du centre, et inclut une analyse de la pollution de l’air et du sol qui sera générée par le déblayage, le nettoyage, la construction et le fonctionnement du site. Le cabinet nous soumet une série de recommandations pour chaque phase du projet et nous en discutons pour trouver les meilleurs compromis. On reçoit par exemple une liste des espèces protégées ou à croissance lente qu’on doit éviter de couper ou compenser en plantant des arbres similaires sur le site. Généralement, nous faisons en sorte de maintenir un maximum d’arbres, d’autant plus s’il s’agit d’espèces protégées.

Nous élaborons ensuite un plan de gestion environnementale qui sera suivi par la Fondation, le partenaire local, la mairie et le ministère de tutelle durant toutes les phases d’exécution pour s’assurer que les mesures visant à limiter l’impact négatif sur l’environnement sont bien mises en place.

Nous allons généralement plus loin que ce qui est exigé. Nous avons par exemple prévu un système de recyclage : les déchets de la menuiserie seront traités et revalorisés par une entreprise locale ; les déchets biodégradables aussi.

La main-d’œuvre est bien entendu très locale. On embauche d’abord dans le village et on s’éloigne légèrement au besoin. D’ailleurs, les coûts de construction ont tellement augmenté ces dernières années que nous avons commencé par l’atelier de maçonnerie, de telle sorte que les élèves puissent dès l’année prochaine participer à la construction des 3 autres ateliers dans le cadre de leur stage/apprentissage !

Propos recueillis par Marie-Astrid Heyde
Photos : Fondation Follereau
Photo principale : Dans l’atelier de maçonnerie récemment construit : Discussion sur les aspects techniques de la construction et sur les prochaines étapes avec l’équipe de la R-FFL (Représentation de la FFL au Bénin), le Maire de Savalou, et le premier agent au Maire.

Extrait du dossier du mois « Petits pas, grandes avancées »

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Publié le lundi 25 juillet 2022
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