Le réchauffement climatique anthropique aurait débuté il y a au moins 180 ans

Le réchauffement climatique anthropique aurait débuté il y a au moins 180 ans

S’appuyant sur une synthèse unique de données paléo-climatiques, un groupe international de chercheurs vient de montrer que le réchauffement climatique dû aux activités humaines aurait débuté il y a près de deux siècles, soit au début de la révolution industrielle.

En outre, ce réchauffement n’aurait pas débuté de manière synchrone et ne se serait pas déployé au même rythme sur l’ensemble de la planète. Réalisés dans le cadre du programme international « Past Global Changes 2k », auquel participent des chercheurs du Laboratoire d’océanographie et du climat : expérimentations et approches numériques (LOCEAN/IPSL, UPMC / CNRS / MNHN / IRD) et du Centre européen de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (CEREGE/PYTHÉAS, CNRS / Université Aix-Marseille / IRD / Collège de France), ces travaux révèlent l’extrême sensibilité du climat aux perturbations anthropiques.

Trop rares et incertaines avant 1900, les mesures directes de température ne permettent pas d’estimer la température de la planète avant cette date. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le changement climatique anthropique est généralement considéré comme un phénomène du XXe siècle. En revanche, le réchauffement imputable à l’homme depuis 1900 a pu être estimé : il a été en moyenne de l’ordre de 1°C.

Une équipe de 25 scientifiques provenant d’Australie, des États-Unis, d’Europe et d’Asie et travaillant ensemble dans le consortium « Past Global Changes 2000 years (PAGES 2K) » a réalisé une synthèse de diverses reconstructions de la température à la surface de la planète ayant donné lieu à publication et couvrant les 5 derniers siècles. Ces estimations de températures ont été principalement obtenues à partir de l’analyse de coraux et de sédiments marins pour les températures océaniques et de cernes d’arbres, de spéléothèmes et de carottes de glace pour les températures de l’atmosphère à la surface des continents.

Bien que surprenants, les résultats obtenus par les chercheurs sont clairs : le réchauffement climatique auquel nous assistons a commencé au tout début de la révolution industrielle, il y a environ 180 ans. Cette étude met donc en évidence un réchauffement plus précoce que les scientifiques ne l’avaient envisagé jusqu’à présent.

De plus, cette synthèse unique de données à l’échelle globale montre que le réchauffement actuel n’a pas débuté de manière synchrone sur l’ensemble de la planète. En effet, le réchauffement a d’abord touché la région Arctique et les océans tropicaux, et ce dès les années 1830, avant d’atteindre les autres régions de l’hémisphère nord. Dans l’hémisphère sud, comme en Australie ou en Amérique du Sud, le réchauffement n’est détectable dans les archives paléo-climatiques que près d’un siècle plus tard.

Il apparaît également que la région arctique s’est réchauffée à un rythme de 1°C par siècle depuis le début du XIXe siècle, donc deux fois plus vite que les continents de l’hémisphère nord et que les océans Indien et Atlantique. Dans l’hémisphère sud, le réchauffement a atteint au mieux 0,2°C par siècle durant la même période.

Ces données ont également permis de dater précisément le moment où le climat a dévié de son état naturel. Il s’avère ainsi que même si les températures ont augmenté dès le début du XIXe siècle, l’amplitude du réchauffement n’a excédé celle des fluctuations naturelles des températures qu’un siècle plus tard.

Seules les données paléo-climatiques permettent de détecter des changements de températures aussi ténus que ceux rapportés dans cette étude pour la période 1830-1900. L’incertitude sur l’estimation de ces changements découle principalement de la calibration de chaque proxy à la base des reconstructions paléoclimatiques. Le fait de sélectionner un grand nombre de reconstructions paléoclimatiques issues de proxys et d’archives différents sur la base de critères de qualité définis par le groupe a permis aux chercheurs de tester et de valider, région par région, leur robustesse.

Enfin, les simulations réalisées avec les modèles climatiques prenant en compte les forçages solaires, volcaniques et anthropiques confirment, sauf pour l’Antarctique, ce que révèlent les données paléoclimatiques, tant sur la précocité que sur l’asymétrie du réchauffement lié à l’homme.

En montrant que l’incidence des gaz à effet de serre sur les températures est détectable même à leurs faibles niveaux du début de l’ère industrielle, ce travail illustre l’extrême sensibilité du climat à de telles perturbations anthropiques.

Illustration : Image par Henry Gastineau de ferronneries au Pays de Galles du Sud pendant la révolution industrielle, vers 1820. Wikimedia Commons

Source : Actualité du CNRS-INSU - http://www.insu.cnrs.fr/node/5977

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Publié le jeudi 8 septembre 2016
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