Prolifération des « algues bleues » : un vrai danger !

Prolifération des « algues bleues » : un vrai danger !

L’administration de la gestion de l’eau (AGE) vient encore de lancer une alerte aux cyanobactéries qui pullulent dans les eaux calmes. Remerschen est interdit de baignade. Les cas sont récurrents ces derniers temps, au Luxembourg mais aussi un peu partout sur la planète… Et les effets climatiques ne sont pas anodins, favorisant la prolifération de ces « algues bleues » qui peuvent s’avérer très dangereuses, voire mortelles.

Ce n’est pas le premier communiqué du genre, qui à vrai dire est quasi devenu un classique des derniers étés au Luxembourg, en particulier du côté de la Haute Sûre ou de la Moselle. Cette fois, l’alerte cible les étangs de Remerschen, dont les eaux de baignade sont prisées des estivants, mais désormais interdites.

L’AGE – administration de la gestion de l’eau – effectue une surveillance régulière de la qualité des eaux de baignade et a repéré une prolifération localement importante de ces cyanobactéries, appelées « algues bleues » dans le langage courant,.

L’AGE rappelle que les toxines produites par ces cyanobactéries « peuvent être dangereuses pour l’homme, la faune aquatique, les animaux domestiques et le bétail. Le Centre de recherche public LIST a été mandaté pour réaliser des analyses détaillées en vue de déterminer la composition des espèces des cyanobactéries présentes. Les analyses ont révélé la présence, entre autres, de l’espèce Microcystis potentiellement productrice de toxines et donc potentiellement nuisible pour la santé. »

Conditions favorables aux blooms

L’AGE suit l’affaire de près (situation à suivre sur son site www.waasser.lu) et les scientifiques du LIST aussi, eux qui se sont spécialisés dans ce domaine.

Car le problème est récurrent, dans la Haute-Sûre notamment, où il revient régulièrement comme un couperet pour les baigneurs ou consommateurs d’eau, humains ou animaux. « Les algues bleues sont en réalité des bactéries. Ces micro-organismes photosynthétiques produisent des pigments spécifiques, tels que la phycocyanine (pigment bleu), qui leur confère la couleur caractéristique bleu-verte », expliquait une publication du LIST en 2016, alors qu’une alerte aux algues avait été lancée dans le Stausei (Lac de la Haute-Sûre).

Les « conditions favorables » à la prolifération des cyanobactéries sont connues : fort ensoleillement, peu de vent, apport en azote et phosphore abondant. « Ces bactéries coloniales deviennent dominantes dans la colonne d’eau, pour finalement former des efflorescences, appelées ‘blooms’, en surface », explique le Luxembourg Institute of Science & Technology (LIST) dont une équipe de microbiologie de l’environnement peut se prévaloir d’une solide expérience soulignant l’importance d’une expertise locale en la matière. « Mis à part l’effet visuel parfois spectaculaire, de nombreuses espèces de cyanobactéries produisent des toxines dangereuses pour l’homme et les animaux, dont des hépatotoxines (atteinte du foie), neurotoxines (cerveau) ou encore des dermatotoxines (peau) ».

Le LIST travaille en étroite collaboration avec l’AGE et les administrations et syndicats de gestion locaux, notamment pour un monitoring de ces cyanobactéries et de leurs toxines associées durant la période de prévalence, qui s’étend généralement de fin août à fin octobre.

Des cas spectaculaires dans le monde qui se réchauffe

Le phénomène est global. Et l’actualité rebondit d’inquiétudes en faits divers, en Belgique, en France, en Allemagne… Outre-Atlantique aussi, avec des cas spectaculaires. Comme cette étrange mort d’une petite famille en Californie, relatée par les agences et relayée par plusieurs médias : dans une zone naturelle préservée, le seul coupable du décès tragique et mystérieux d’un couple et de son enfant en bas âge semble être un plan d’eau douce couvert d’algues bleuâtres formant une écume « ressemblant à une soupe de brocolis » comme en témoigne le sheriff du comté.

Inquiétude aussi, notamment, au Canada, où le temps chaud et sec des dernières semaines nuit considérablement à la qualité de l’eau de plusieurs lacs, aux prises avec un important problème de prolifération d’algues bleues. Des riverains du Lac Roxton (en Estrie, une région administrative du Québec) témoignent de difficultés à circuler avec les bateaux tant les plantes sont envahissantes. Soucis aussi pour le Lac des Castors, bassin d’eau artificiel sur le Mont Royal (près de Montréal).

Un biologiste canadien fait le lien avec le réchauffement climatique, mais aussi avec le phosphate issu d’exploitations agricoles ou d’installations sanitaires inadaptées. Et les scientifiques américains s’attendent à ce que le fléau continue de se répandre dans les lacs et étangs dans les années à venir, avec l’augmentation redoutée du nombre de journées caniculaires.

Surveillance et prévention

Dans une récente communication, Bruxelles-Environnement note aussi que le développement des cyanobactéries est favorisé par les conditions environnementales (canicule, sécheresse, eaux troubles,...) mais aussi par l’eutrophisation des étangs, dont l’enrichissement provient également des restes du nourrissage des oiseaux d’eau ou des poissons avec du pain notamment.

Si les cyanobactérie sont des microorganismes naturellement présents dans les étangs, le problème vient de leur prolifération et de leur soudaine dominance de la surface de l’eau, créant le fameux film vert-bleuté et générant des toxines dangereuses pour la santé.

Au Luxembourg, le LIST cherche à mieux identifier les facteurs favorisant l’apparition et le développement d’efflorescences de cyanobactéries, en couplant les analyses microscopiques et chimiques à des études d’hydrologie, de pollution environnementale ou encore de climatologie. Et ses spécialistes travaillent aussi aux mesures de prévention face à la formation des « blooms ».

Alain Ducat

Photos
© MichalLudwiczak/Shotshop.com/LIST : des « blooms » de cyanobactéries ou algues bleues sont visibles comme un film de couleur verte en surface des eaux contaminées

©AGE : Algues bleues aux étangs de Remerschen

Article
Publié le lundi 30 août 2021
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