Le coton, blanc comme neige ?

Le coton, blanc comme neige ?

On croit bien faire en achetant un t-shirt en coton. En effet, quoi de plus naturel que cette matière utilisée depuis des millénaires pour fabriquer du tissu ? Mais sa culture cache d’innombrables problèmes sociaux, sanitaires et environnementaux...

Le coton, ce sont près de 100 millions d’exploitations agricoles, situées en majorité dans les pays du Sud, pour la plupart familiales et de petite taille. En un demi-siècle, sa production a plus que doublé. Elle atteignait 25,4 millions de tonnes en 2017-2018.

Mais la culture du coton puise lourdement dans les ressources naturelles : 2 700 litres d’eau sont nécessaires pour fabriquer un seul t-shirt, 11 000 pour un jean ! La monoculture épuise les sols et des litres de fertilisants sont déversés pour compenser cet appauvrissement… ce qui ne fait qu’amplifier le problème à long terme. De plus, le coton est très apprécié par certains parasites et, si les champs de coton ne représentent que 3 % des surfaces cultivées, ils absorbent 15 % des pesticides répandus au niveau mondial.

Toutes ces substances chimiques ne sont évidemment pas sans répercussions sur la santé humaine... Sans parler des métaux lourds qui interviennent plus tard, dans les procédés de teinture notamment.

Mais revenons à la production. La prolifération de semences génétiquement modifiées menace la survie des cultivateurs et de leurs familles. Les plants étant stériles, ils doivent être rachetés chaque année, générant endettement et dépendance à Monsanto. Certains vont même jusqu’à se suicider sur leurs champs en ingérant les produits de traitement qu’ils pulvérisent sur leurs cultures.

Il faut savoir aussi que coton rime souvent avec travail forcé, des champs d’Ouzbékistan où des fonctionnaires sont réquisitionnés pour la cueillette, aux filatures du Bangladesh où les ouvrières vivent dans des chambres situées dans le périmètre de l’usine dont elles ne peuvent sortir sans autorisation, travaillent jour et nuit et se font « sucrer » leur paie au moindre signe de fatigue ou de relâche. De plus, les enfants sont souvent mis à contribution, que ce soit pour extraire les fibres des coques de coton et les séparer des graines oléagineuses (ce qu’ils parviennent mieux à faire que les adultes avec leurs petites mains) ou, en aval, pour travailler dans les usines de filature, de tissage et de confection, parfois de nuit ou avec des machines dangereuses.

Par ailleurs, la fibre de coton est cotée en Bourse et c’est sur les marchés d’exportation que se fixe son prix de référence dans les échanges mondiaux. Celui-ci est artificiellement maintenu à un bas niveau par les subventions accordées aux producteurs dans les pays du Nord, ce qui se fait au détriment des producteurs d’Asie et d’Afrique qui n’en reçoivent pas alors que, pour eux, la culture du coton revêt une importance économique et sociale cruciale. Il existe une forte corrélation entre la chute des cours et l’augmentation de la pauvreté.

Alors, comment s’habiller sans mettre en péril la nature, les droits de l’Homme, la santé et la stabilité économique des petits producteurs ? Du champ à la boutique, le coton est extrêmement difficile à tracer. En cause, le nombre d’intermédiaires (culture, filage, tissage, confection, acheminement, vente) et le manque de transparence (sur un article en coton ouzbek transformé sur place, il est autorisé d’apposer n’importe quel « Made in »).

En tant que consommateur, on peut néanmoins limiter les dégâts en optant pour des produits certifiés. Fairtrade, par exemple, impose des standards environnementaux très stricts, interdit les semences génétiquement modifiées et les substances chimiques dangereuses et garantit un prix minimum aux producteurs défini selon la région de production, la variété cultivée et, en Inde, la longueur des fibres. De plus, l’organisation verse une prime aux producteurs qui leur permet d’investir non seulement dans la productivité et la qualité, mais aussi dans des projets de développement concernant l’accès aux services sociaux de base, à la santé, à l’eau potable ou à l’éducation

Mélanie Trélat
Sources : Fairtrade, Cash Investigation
Photo : Janko-Ferlic / Unsplash

Dossier du mois Infogreen « Les dessous du textile »

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Publié le jeudi 21 février 2019
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