La résilience climatique est aussi une lutte pour le bien-être et la santé

La résilience climatique est aussi une lutte pour le bien-être et la santé

L’Observatoire de la Politique Climatique (OPC) délivre des avis sur les projets, les actions et les mesures climatiques. C’est un discours de la vérité étayé par des faits scientifiques.

Avant de remettre la publication de son rapport annuel au gouvernement, le président de ce conseil d’experts, Andrew Ferrone dresse un bilan sans concessions de la stratégie climatique luxembourgeoise.

« Les efforts du gouvernement contre le réchauffement climatique se traduisent surtout par de vastes politiques dans les domaines du transport et des énergies renouvelables. Après la pandémie, les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont été inférieures aux objectifs. Seule l’industrie ne les avait pas atteints. » Cette note positive lance une partition pourtant pas exempte de fausses notes…

Le président de l’OPC déplore ainsi les vues segmentées de la politique climatique nationale : « chaque ministère avance dans son coin. Une vue intégrée fait défaut. Les solutions étape par étape ne sont plus suffisantes. »

Andrew Ferrone pointe une autre carence : « les chiffres officiels n’incluent que les émissions de GES produites au Luxembourg. Tout ce qui est importé, ordinateur, smartphone ou automobile, toutes ces émissions de la consommation ne sont pas comptabilisées. Or, ce sont les émissions les plus compliquées à réduire. Clarifier ces données permettrait à chaque citoyen de mesurer la nature exacte de ses émissions ».

D’ailleurs, l’observateur estime qu’une grande part de l’impuissance climatique est imputable au manque d’information, ou pire, à la désinformation.


« Nous recommandons une campagne de sensibilisation d’ampleur pour le climat, digne de celle du COVID. À l’adresse de la population difficile à convaincre, il faut insister sur les bénéfices pour la qualité de vie et la santé. »

Andrew Ferrone, président de l’Observatoire de la Politique Climatique

Au chapitre des réponses percutantes se trouve la taxe carbone à 45 euros la tonne de CO2, jugée largement insuffisante. « Sur base de l’évidence scientifique et de la position du Klima-Biergerrot (KBR), nous défendons une hausse à au moins 200 euros la tonne de CO2.

Mais la taxe ne doit pas enrichir le gouvernement. Elle doit servir à soutenir les personnes les plus vulnérables, ainsi que les petites et moyennes entreprises dans la décarbonation de leurs modes de vie et de leurs productions. »

La taxe CO2 permettra de financer la transition climatique par des investissements mais également par des fonds comme le « fonds climat énergie ». Pour l’OPC, la gouvernance de ce fonds n’est pas assez transparente et trop peu d’acteurs sont au fait de son existence.

Andrew Ferrone
Andrew Ferrone - ©Marie Champlon

L’OPC et son président ont largement défini des solutions climatiques à court terme. Les voici.

Dans le domaine du transport, le déplacement à pied, à vélo et en transport public est à favoriser. Pour la mobilité individuelle incompressible restante : « la voiture électrique est scientifiquement la réponse la plus adaptée. Prenons une échelle de grandeur : un véhicule électrique a besoin d’une éolienne sur une année fonctionnelle. Une voiture à hydrogène, trois et une voiture avec fuel synthétique, presque cinq. »

Ensuite, l’alimentation qui représente un tiers des émissions mondiales de GES. Acheter local ? Seules 10 % des émissions de l’alimentation sont issues de son transport. « La viande rouge est le vrai levier climatique de l’alimentation et donc, la modification de nos régimes alimentaires, la seule alternative. »

Concernant le logement, l’OPC recommande « le certificat de performance énergétique (CPE) pour tous les bâtiments, sans exception » Le passeport énergétique est une information qui déclenche une estimation de la rentabilité d’une rénovation énergétique, en lien avec la Klima-Agence, et donc, une action.

D’autre part, en dessous d’une mauvaise classe énergie, immobiliser les loyers, accélérerait les rénovations énergétiques.

Au-delà des problèmes légaux, l’OPC suggère un tiers-payant, pour que les ménages n’avancent plus les subsides au moment de l’investissement.

En outre, « la capacité de production des énergies renouvelables du Luxembourg doit s’accroître pour limiter la dépendance aux marchés extérieurs et mieux contrôler leur impact environnemental. »

La finance doit procéder à une analyse de ses fonds, les diversifier en restreignant toujours plus les financements des énergies fossiles. « Notre premier secteur économique doit éviter le greenwashing. Ce n’est pas son apanage, mais intentionnellement ou pas, il est trop présent. »

Andrew Ferrone finit par rappeler que le Climat est à la base de tout : « les écosystèmes, la biodiversité, l’agriculture, l’ensemble des objectifs de développement durable (ODD), etc. ». Sans lutte climatique, rien n’est appelé à durer.

Propos recueillis par Sébastien MICHEL
Photos : Marie Champlon

Article tiré du dossier du mois « INCO₂MPATIBLES »

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Publié le mardi 17 octobre 2023
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