
« La nature nous donne ce dont nous avons besoin au bon moment »
La cuisine végétale, c’est la spécialité et la passion de René Mathieu, chef étoilé aujourd’hui à la tête du restaurant Fields. Il explique pourquoi nous avons tout à gagner à sortir de notre zone de confort alimentaire.
En quoi l’alimentation végétale est-elle bénéfique pour la santé de l’Homme ?
René Mathieu : Hippocrate disait que ta nourriture doit être ton médicament, et ton médicament ta nourriture. Il ne faut pas penser en termes de quantité mais plutôt de nutriments : manger sainement, avec une alimentation plus végétale, c’est renforcer son système immunitaire. Et la sensation de satiété ne vient pas par la quantité ! Si le corps ne reçoit pas les nutriments dont il a besoin, le cerveau va continuer de réclamer de la nourriture.
« Au-delà de se renseigner sur l’alimentation végétale, il faut vouloir changer sa façon de vivre et de s’alimenter. C’est important de se donner des défis ! »
René Mathieu, chef du restaurant Fields
Adopter une alimentation plus végétale est aussi une bonne chose pour la planète.
Si on diminue les quantités de viande consommée, on réduit le besoin de production. Le comble, c’est qu’il faut cultiver du fourrage pour nourrir les bêtes qui vont ensuite nourrir les humains. Si on mange moins de viande, il y aura donc moins de cultures et d’élevages intensifs, qui polluent énormément et donnent des produits pauvres nutritionnellement.
Au-delà de ça, je pense que le plus gros problème reste le gaspillage : 40% de ce qu’on produit finit à la poubelle. Et avant cela, tous ces produits sont transportés, stockés dans des frigos, etc. Imaginez la quantité d’énergie gaspillée ! Au restaurant, nous faisons sécher les chutes de légumes pour en faire des chips par exemple et nous faisons évidemment du compostage.
Quelles sont alors les habitudes de consommation à adopter ?
Il faut se tourner vers des produits locaux et de saison, parce que la nature nous donne ce dont nous avons besoin au bon moment. Il faut se rapprocher des producteurs et des maraîchers qui peuvent aussi être de bons conseils. Pourquoi ne pas réapprendre les méthodes de conservation qu’utilisaient nos aïeuls ? C’est très utile pour la saison hivernale. Je peux aussi conseiller de faire attention au mode de cuisson, car si on cuit trop un légume, il perd sa valeur nutritionnelle.
C’est un équilibre à trouver, ce n’est pas parce que vous mangez du poisson ou de la viande de temps en temps que vous détruisez la planète. Mon objectif n’est pas que tout le monde devienne végétarien ! Je souhaite sensibiliser et éduquer.
Selon vous, les chefs peuvent donc avoir un rôle à jouer dans la transition globale vers une alimentation plus végétale ?
Bien sûr et c’est très important ! J’essaie de montrer l’exemple et de transmettre ma passion, mais je comprends aussi que sortir de sa zone de confort n’est pas chose simple. Je suis optimiste pour l’avenir, mais je pense que c’est surtout aux pouvoirs publics d’agir.
À mon niveau, je veux partager ma philosophie fondée sur trois principes : la conscience, l’amour et le respect. Il faut prendre conscience de son impact sur son environnement, en ayant de l’amour et du respect pour tout ce qui le compose.
Propos recueillis par Léna Fernandes
Photo de couverture : © Picto