Consommation, piratage et contrefaçon : l'aveu des jeunes

Consommation, piratage et contrefaçon : l’aveu des jeunes

Une étude de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) observe l’évolution des comportements d’achat en ligne des jeunes Luxembourgeois. Parfois surprenant...

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle, l’EUIPO est l’une des plus grandes agences décentralisées de l’UE, basée à Alicante (Espagne), qui a été classée comme l’office de propriété intellectuelle le plus innovant au monde en 2021. C’est là qu’on gère l’enregistrement des marques, dessins ou modèles, pour offrir une protection de la propriété intellectuelle (et de sa valeur) dans tous les États membres de l’Union.

On y trouve aussi l’Observatoire européen des atteintes aux droits de propriété intellectuelle, créé en 2009 pour soutenir la propriété intellectuelle et contribuer à lutter contre les atteintes à cette propriété, menacée constamment, et même de plus en plus, par la consommation de masse et les achats en ligne. Consciemment ou non.

C’est tout l’intérêt de l’étude actualisée que vient de sortir l’EUIPO. « Cette nouvelle analyse devrait constituer un outil exploitable et précieux pour aider les parties prenantes, les décideurs politiques, les éducateurs et les organisations de la société civile, à concevoir des initiatives de sensibilisation à l’appui des choix éclairés de nos jeunes citoyens et consommateurs », explique dans l’avant-propos Christian Archambeau, Executive Director de l’Office européen.

L’étude vient compléter celles menées en 2016 et 2019. L’objectif spécifique de la recherche initiale était de comprendre quels sont les principaux moteurs et obstacles lors de l’acquisition de contenus numériques en ligne ou de l’achat de biens physiques, légalement ou illégalement.

Pratiques courantes

L’étude a été menée auprès d’un total de 22 021 jeunes (âgés de 15 à 24 ans) dans les 27 États membres de l’UE, entre le 7 et le 28 février 2022.

Et une série de données ont été comparées entre pays, avec la moyenne européenne. Pour le Luxembourg, les principaux résultats sont… intéressants.

Il ressort ainsi que l’accès à des contenus provenant de sources illégales et l’achat en ligne d’articles ou biens physiques contrefaits restent des pratiques courantes chez les jeunes. Dans l’UE, un tiers des répondants ont utilisé, lu, téléchargé ou diffusé en continu du contenu provenant de sources illégales au cours des 12 derniers mois. 21% d’entre eux l’ont fait volontairement ; 12% déclarent l’avoir fait involontairement. A contrario, cela fait 60% de jeunes déclarant n’avoir pas a accédé à des contenus via des sources illégales.

Et au Luxembourg ? 53% des jeunes personnes qui ont répondu déclarent ne pas avoir accédé à des contenus pirates (contre 60% donc en moyenne européenne). Ils sont même 28% au Luxembourg (contre 21% dans l’UE) à avouer des accès intentionnels à ce type de contenus non autorisés…

Ce sont les films et les séries qui sont les plus recherchés, suivis des événements sportifs en direct. On trouve également du piratage pour la musique, les logiciels, les jeux ou les livres.

Le succès des produits contrefaits

En ce qui concerne la contrefaçon, un peu plus de la moitié (52%) des jeunes interrogés en Europe disent avoir acheté au moins un produit contrefait en ligne au cours des 12 derniers mois. De façon volontaire ou inconsciente, la proportion étant similaire à ce niveau. Et les résultats indiquent une augmentation notable des achats de contrefaçon depuis 2019, sans doute à mettre en parallèle avec l’essor des sites de vente et de seconde main. Vêtements, accessoires et chaussures sont les cibles favorites…

On retrouve ces notions dans les résultats de l’enquête luxembourgeoise, où 34% des jeunes interrogés déclarent avoir acheté sciemment au moins un produit de contrefaçon.

Au niveau des produits ciblés, si un quart des achats concernent effectivement le dressing (vêtements, chaussures), on note 9% d’achats électroniques et 6% de produits d’hygiène…

Fausse marque, fausse bonne idée

L’enquête s’est alors intéressée aux raisons de ces achats… Le coût reste le facteur le plus important qui motive l’accès illégal à des contenus numériques ou l’achat de produits « fausse marque ». Mais d’autres facteurs gagnent du terrain, en particulier les influences sociales. Par rapport à l’étude menée en 2019, ils sont 5 à 6% de plus à répondre, en justificatif de l’acte d’achat illégal : « des amis ou d’autres personnes que je connais font cela »...

Beaucoup disent aussi ne pas se soucier de savoir si le produit est un faux ou un vrai, ou avoir la conviction qu’il n’y a pas de différence entre l’authentique et le falsifié. 18% observent la facilité de trouver ou de commander des contrefaçons en ligne.

Et qu’est-ce qui pourrait faire changer d’avis les « pirates » du web, qui trouvent beaucoup leur « bonheur » via les réseaux sociaux ? D’une part, il faudrait pouvoir trouver des produits et contenus authentiques, de bonne qualité mais bien moins cher, sur des sources légales. Pas simple...

D’autre part, les risques de sanction comptent toujours parmi les principaux facteurs qui inciteraient les jeunes à renoncer à l’alternative illégale. Une approche différente dans la façon de poser les questions a aussi permis aux enquêteurs d’identifier un autre frein : le risque, celui d’une cyber-menace ou d’une fraude en ligne par exemple, ou encore le risque de récupérer en ligne un produit défectueux ou de mauvaise qualité, voire peu sûr… ou dangereux (pour la santé notamment).

Une proportion similaire de répondants a déclaré qu’une meilleure compréhension des incidences négatives sur l’environnement (19 %) ou la société (17 %) les inciterait à arrêter.

Manifestement, il y a encore de la sensibilisation à faire et des actions à mener pour inviter les jeunes consommateurs à poser ces fameux choix éclairés.

Alain Ducat

Illustrations/Photo : EUIPO/Vous / Shutterstock

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Publié le vendredi 24 juin 2022
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