Biens de consommation : besoin ou désir ?

Biens de consommation : besoin ou désir ?

Le cycle de conférences « Decarbonize now ! » organisé par Caritas, Greenpeace, le List et le ministère de la Protection des consommateurs s’est poursuivi ce 19 avril sur la thématique des biens de consommations.

Après un premier lunch debate dédié à l’énergie, les deux spécialistes du List (Luxembourg Institute of Science and Technology) ont cette fois fait le point sur l’impact des biens de consommation sur l’environnement. Dr Elorri Igos et Dr Thomas Gibon sont également à l’origine de la brochure « Vers la décarbonation : Comprendre et réduire l’empreinte carbone au Luxembourg » qui fait notamment l’objet d’une campagne pédagogique dans les écoles.

Un Luxembourgeois émet en moyenne 13 tonnes d’équivalent CO2 par an, la mobilité étant le principal accusé. Pour ne pas atteindre 2° de hausse de température – l’ambition de l’Accord de Paris -, il faudrait réduire cette émission à 1,6 tonne, soit une diminution de 90% !

En marge de la campagne Rethink your Clothes, du 10e anniversaire de la catastrophe du Rana Plaza, de la pétition Good Clothes Fair Pay, l’accent de cette conférence est mis sur les vêtements, qui est la catégorie la plus émettrice de gaz à effet de serre parmi les biens de consommation (621 kg d’équivalent CO2 par personne par an).

Le secteur textile représente 2,106 millions de tonnes d’équivalent CO2, dont les trois quarts sont émis lors de la production. 20% environ sont dus à l’utilisation des vêtements : nettoyage, repassage, etc.

Matières et labels

Une étude suisse menée en 2021 s’est penchée sur l’impact de 7 matières employées dans la production textile. Selon les approches, les résultats diffèrent. Ainsi, le polyester et l’acrylique ont des empreintes carbone et des besoins en eau très basses, mais sont les plus consommateurs d’énergies fossiles. Le coton de son côté demande beaucoup d’eau mais les émissions carbones dues à sa production sont relativement basses. Il convient donc de se diriger vers la production de matières naturelles de la façon la plus durable possible.

La même étude s’est intéressée à l’utilisation des vêtements. Sans surprise, le bon comportement vise à privilégier les machines bien remplies plutôt qu’à moitié, le séchage à l’air libre plutôt qu’au sèche-linge, une température de lavage basse… Et, naturellement, une durée de vie prolongée !

Pour la plupart des biens de consommation, voire des services, des écolabels permettent de faire des achats plus responsables. Il faudra veiller à choisir des labels certifiés par des tiers indépendants plutôt que les labels que les marques s’ « auto-attribuent ». Par exemple, l’EU Ecolabel garantit un impact environnemental moindre par rapport à des produits similaires. En 2021, il était déjà affiché sur 78.071 produits dans 24 catégories différentes. Des labels nationaux peuvent aussi vous éclairer : NF Environnement (France), Der Blaue Engel (Allemagne), Nordic Swan Label… mais aucun label n’existe actuellement pour le Luxembourg.

Comportements d’achats

Si l’achat en seconde main est plébiscité – puisqu’il émettra bien moins de carbone que la production d’un nouveau produit -, il n’a finalement d’intérêt que s’il vient remplacer un achat neuf, et non le compléter.

Lors d’achats neufs, les labels peuvent donc aider à faire des choix durables. Un produit durable aura une durée de vie plus longue qu’un produit bas prix. Mais, en sortant quelque peu du secteur vestimentaire pour s’intéresser, par exemple, à l’électronique, il reste encore à faire des efforts en matière de réparabilité. Réparer est généralement plus intéressant pour le portefeuille et pour l’environnement, mais la question du remplacement peut avoir de l’intérêt si un produit plus neuf consommera nettement moins d’énergie, par exemple.

Quid des achats en ligne ? Une étude britannique a analysé 3 scénarios :

  • J’achète en magasin
  • J’achète en ligne et récupère le colis en magasin
  • J’achète en ligne et me fais livrer à la maison
    En moyenne, le dernier scénario est le pire. Mais de nombreuses incertitudes persistent : il faudrait analyser l’impact des retours, des pertes lors des livraisons, savoir si les achats en ligne sont effectués en plus de nombreux achats en magasin, etc. La modération reste de mise.

Revenus et économies

La corrélation entre richesse et émission de gaz à effets de serre est évidente et prouvée par diverses études, basées sur des données mondiales mais aussi individuelles (voir dans la présentation en fin d’article). 48% des émissions sont à imputer aux 10% des personnes ayant les plus hauts revenus (dont 15% pour le top 1%).

L’une des tendances dans l’esprit de consommation est de « rattraper » les bienfaits d’un achat durable avec un comportement négatif. Prenons le cas de l’achat d’une nouvelle voiture, consommant moins que la précédente. Le « Rebound Effect » implique que l’utilisateur risque de rouler plus puisque le carburant lui revient moins cher, de s’acheter un billet d’avion avec l’argent économisé ou de déménager plus loin de son lieu de travail et ainsi polluer plus. Un mode de consommation plus responsable implique de combiner l’efficience du véhicule avec la frugalité : plus ne veut pas dire mieux !

L’argent « mis de côté » est un sujet intéressant pour le Luxembourg, où, en moyenne, chaque individu économise 15% de son revenu mensuel. Cet argent, il convient aussi de le placer soigneusement. Les euros qui se reposent sur notre compte en banque sont en réalité réinvestis par nos banques dans divers projets. Bien que la transparence ne soit pas toujours assurée, il convient de se renseigner sur les critères employés par l’organisme bancaire dans ces choix d’investissements.

Mémo

Dans chaque acte d’achat, se poser ces quelques questions peut s’avérer utile pour se diriger vers un comportement plus eco-friendly :

  1. Repenser ses besoins : En ai-je vraiment besoin ? Pourrais-je louer au lieu d’acheter ? Réparer au lieu de remplacer ?
  2. Préférer les achats de seconde main
  3. Chercher des options plus durables : plus efficaces énergétiquement, réparables, disposant d’un éco-label, etc.

L’idée n’est bien sûr pas de priver chacun de ses petits plaisirs, mais comme on conseille de tourner 7 fois sa langue dans sa bouche avant de parler, se poser 3 petites questions avant d’acheter peut également être bénéfique.

Les nombreuses statistiques présentées par les spécialistes du List peuvent être retrouvées dans la présentation ci-dessous :

Le 3e rendez-vous du cycle de conférences « Decarbonize now ! » est programmé le 17 mai (12h00-14h00), toujours à la House of Startups à Luxembourg. Il aura pour thème la mobilité. Pour obtenir plus d’informations et s’y inscrire gratuitement, cliquez ici.

Marie-Astrid Heyde

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Publié le jeudi 20 avril 2023
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