Taxe sur les voitures : l'UE saisit l'OMC contre la Russie

Taxe sur les voitures : l’UE saisit l’OMC contre la Russie

L’Union européenne est passée aux actes mardi en portant devant l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) son différend avec la Russie concernant une taxe sur le recyclage des voitures, qui pénalise lourdement les véhicules importés et touche de plein fouet le secteur automobile européen.

Après près d’un an de discussions infructueuses avec Moscou, l’UE « n’a plus d’autre choix que de recourir aux procédures de règlement des différends de l’OMC », a justifié la Commission européenne qui a concrètement demandé l’ouverture de « consultations » sur ce dossier.

Cette première étape vise à trouver une solution à l’amiable dans les 60 jours avant l’éventuelle désignation d’un panel (groupe d’experts) chargé de trancher.

Si, à la fin du processus, la Russie ne se mettait toujours pas en conformité, l’UE n’écarte pas l’idée de représailles, en imposant des « mesures équivalentes » à la taxe russe, a prévenu mardi une source européenne.

1,3 milliard d’euros par an

Pour les Européens, la taxe russe est clairement « incompatible avec la règle fondamentale de l’OMC interdisant la discrimination à l’égard des importations, et entre celles-ci ». Elle s’applique en effet à toutes les importations de voitures en provenance de l’UE. Les véhicules produits en Russie sont exemptés, tout comme ceux importés du Kazakhstan et du Belarus.

La taxe va de 420 à 2.700 euros pour les voitures neuves et de 2.600 à 17.200 euros pour les véhicules de plus de trois ans, selon Bruxelles. Or les exportations de voitures européenne en Russie représentent un marché conséquent de 10 milliards d’euros par an. Dans le même temps, cette taxe rapporte 1,3 milliard d’euros par an à la Russie. Dans une étude récente, le cabinet PWC a évalué son montant à environ 20 milliards de dollars sur les 20 prochaines années.

Les Européens menaçaient Moscou de lancer cette procédure depuis des mois, estimant que le pays ne respecte pas suffisamment ses engagements auprès de l’OMC, dont il est devenu membre en août 2012.

C’est d’ailleurs juste après son entrée à l’OMC que Moscou a imposé la taxe sur le recyclage, « en réponse à la baisse des droits de douane qui s’appliquent aux véhicules importés », rappelle Mikhaïl Ganéline, analyste chez Sberbank CIB.

Si elle était supprimée, il y aurait « une baisse de la rentabilité des constructeurs russes et des étrangers qui ont des usines en Russie, mais d’une manière ou d’une autre il y aura une compensation », affirme l’analyste.

Les autorités russes ont assuré mardi que ce dossier serait réglé rapidement.

Le gouvernement russe a en effet mis au point en mai une nouvelle version de la taxe afin qu’elle touche également les constructeurs locaux, mais le projet n’a toujours pas été examiné par le Parlement.

« L’UE comptait sur le fait que tout soit réglé avant le 1er juillet avec l’adoption des amendements à la loi (...) mais ils n’ont pas été adoptés, la Douma ayant suspendu ses activités pour l’été », a expliqué Ekaterina Maïorova, du ministère de l’Economie russe.

Un contentieux parmi d’autres

En mars, le Premier ministre Dmitri Medvedev avait assuré que cette taxe ne constituait pas « un moyen de lutter contre la concurrence » mais « une décision nécessaire destinée à améliorer la protection de l’environnement ».

Ce dossier s’inscrit dans une série de contentieux commerciaux entre l’UE et la Russie, qui va du commerce du bois à celui des pommes de terre ou des oeufs.

Il est aussi, comme les litiges avec la Chine, un signe de la détermination de l’UE à défendre son industrie dans le cadre de la libéralisation du commerce mondial.

La Russie est le troisième partenaire commercial de l’UE, qui est de son côté le premier partenaire de la Russie. En 2012, l’UE a exporté pour 123 milliards d’euros de biens vers la Russie, et a importé pour 213 milliards d’euros.

Le marché automobile russe est très convoité : en 2012, à l’inverse de la plupart des pays européens, il a connu une croissance de 11%, atteignant le niveau record de 2,93 millions d’unités, ce qui en avait fait le deuxième marché en Europe après l’Allemagne.

Photo : Karel De Gucht, commissaire européen en charge du Commerce ©Commission Européenne / Texte AFP

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Publié le mardi 9 juillet 2013
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