10 milliards pour la Terre : Greenpeace réagit au « Fonds Bezos »

10 milliards pour la Terre : Greenpeace réagit au « Fonds Bezos »

Quand Jeff Bezos, le grand patron d’Amazon, annonce le lancement d’un Fonds pour lutter contre le changement climatique, Greenpeace Luxembourg dit « banco » mais s’interroge.

Jeff Bezos est le boss d’Amazon, qu’il a fondée. Il est aussi considéré comme l’homme le plus riche de la planète. Alors, quand il annonce, par réseaux sociaux interposés, le lancement du « Bezos Earth Fund » pour lutter contre le changement climatique, cela fait écho.

D’abord parce que le multimilliardaire dit doter personnellement ce fonds de 10 milliards de dollars à titre d’amorce, ce qui correspondrait à un peu moins de 8% de sa fortune selon les estimations de son patrimoine, par Forbes notamment. Ensuite, parce qu’Amazon est pointée du doigt comme un modèle de grosse destruction de l’environnement.

Un géant qui fait son poids à Luxembourg

A Luxembourg, Amazon compte dans le paysage. La multinationale y a un vrai siège européen et plusieurs services installés, avec plus de 2 200 collaborateurs, ce qui en fait un des plus gros employeurs du pays.

Elle n’a cessé d’y croître depuis plus de quinze ans de présence, d’abord discrète dans le Grund, puis dans un rutilant bâtiment à Clausen, et désormais au Kirchberg, dans plusieurs immeubles dont le géant loue des plateaux entiers, alors que les offres d’emplois qu’il publie sont encore légion.

A Luxembourg donc, l’annonce De Bezos n’a guère été commentée. On y a pourtant entendu la voix militante de Greenpeace.

« Tout simplement hypocrite »

« Le Fond Bezos pour la Terre est le bienvenu en tant que reconnaissance de la menace que pose l’urgence climatique. En revanche, il y a de quoi se poser des questions en ce qui concerne le bilan environnemental d’Amazon », estime, dans une tribune relayée sur les réseaux sociaux, Raymond Aendekerk, directeur de Greenpeace Luxembourg.

« Dire que le changement climatique est la plus grande menace envers notre planète tout en favorisant l’industrie des combustibles fossiles en lui fournissant la technologie lui permettant de découvrir et de forer plus de pétrole, c’est tout simplement hypocrite. Amazon a encore du travail à faire pour faire en sorte que son réseau croissant de centre de données se détourne complètement des combustibles fossiles ; et l’entreprise doit faire preuve de transparence concernant sa consommation d’énergie, comme le font déjà Google et Apple. »

Pour Greenpeace, Amazon ne peut pas à la fois se poser en nouveau champion du climat et aider l’industrie gazière et pétrolière. « L’entreprise ne peut pas prétendre prendre la crise climatique au sérieux et en même temps menacer de licencier les employés qui prennent la parole sur le sujet. Le géant ne peut pas faire avancer les solutions climatiques tout en contribuant à des groupes de réflexion ou à des politiques climatosceptiques ».

Critiques de l’intérieur

« La science est claire : les énergies fossiles doivent rester dans le sol, nous devons accélérer le renouvellement et élire des politicien-ne-s qui soutiennent des mesures ambitieuses pour un avenir durable. Nous attendons avec impatience les détails concernant les types de projets et d’innovations que soutiendra le Fonds Bezos », souligne Raymond Aendekerk.

Bezos a communiqué sur le fait que les premières subventions, destinées à des chercheurs, militants et ONG, seront attribuées dès cet été.

Selon l’AFP, Amazon produirait l’équivalent de 10 % des émissions de CO2 françaises. Et l’agence rappelle que l’annonce du Fonds est survenue une vingtaine de jours après que quelque 300 collaborateurs d’Amazon ont signé des critiques contre leur employeur, notamment au sujet de sa politique environnementale. Le collectif Amazon Employees for Climate Justice (AECJ) pousse l’entreprise « à aller plus loin dans son plan de mitigation annoncé à grand renfort de publicité en septembre 2019 ». Jeff Bezos avait alors lancé une campagne en vue de remplir, avec quelques longueurs d’avance, les engagements climatiques de l’accord de Paris.

Alain Ducat

Photo : Action de Greenpeace contre le centre logistique d’Amazon près de Hambourg, en juillet 2019. © Daniel Müller / Greenpeace

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Publié le lundi 24 février 2020
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